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C’est peut-être ce qui explique l’impressionnante universalité artistique de
l’autoportrait, tellement universelle qu’elle se manifeste de manière fractale dans le
moindre tracé et la moindre modulation
.
Objection votre Honneur ! Si on demande à un enfant de dessiner sa famille, certains
se dérobent à y marquer leur présence (pour s’être sentis exclus du cercle familial).
Sans compter ceux dont la signature se termine, comme il se doit, par un paraphe ;
sauf que ce paraphe sert à barrer le nom qu’il devrait mettre en valeur.
Ainsi, le sujet, plutôt que d’exalter sa propre image, la déprécie, l’abîme, la vilipende,
quitte à passer, au tournant, par la case glorieuse que ce dessin en creux a fini par
graver.
Désexualisation
“La pulsion sexuelle met à la disposition du travail culturel des quantités de force
extraordinairement grandes et ceci par suite de cette particularité, spécialement
marquée chez elle, de pouvoir déplacer son but sans perdre, pour l'essentiel, de son
intensité. On nomme cette capacité d'échanger le but sexuel originaire contre un autre
but
, qui n'est plus sexuel mais qui lui est psychiquement apparenté, capacité de
sublimation” (Freud).
Lacan fait remarquer que les créations métaphoriques des œuvres d’art sont des
formations de l’inconscient et sont retour du refoulé, au même titre que les
symptômes, les rêves, les actes manqués, les traits d’esprit. Pour lui, sublimer, c’est
renoncer à la recherche illusoire et désespérée de l’objet, quitte à célébrer sa perte.
Dans l’amour courtois, c'est parce que la Dame est posée comme quasi inaccessible,
quasi-impossible, perdue d’avance, qu'elle peut être élevée à la dignité de l’objet
perdu, définitivement inaccessible.
Bernard Auriol, « L'image préalable, l'expression impressive et l'autoportrait », in Psychologie
Médicale, 1987, 19, 9 ; 1543-1547. Disponible en ligne :http:/auriol.free.fr/psychanalyse/autoport.htm.
Dans « Le Moi et le ça », in Œuvres complètes, PUF, XVI.