SOCIOLOGIE 1 : CLASSES, STRATIFICATION ET MOBILITE SOCIALE
1.1 Comment analyser la structure sociale ?
NOTIONS :
Inégalités économiques
Ecarts de situation entre individus par rapport aux revenus, à
la dotation en capital physique, financier ou humain, ou encore
à l’accès à certaines prestations allouées par le marché ou par
l’Etat.
Inégalités sociales
Différences socialement structurées qui se traduisent par des
avantages ou des désavantages dans l’accès aux ressources
valorisées.
Classes sociales
Groupe social qui rassemble des individus ayant des
conditions économiques relativement proches, ce qui influence
leur mode de vie.
Groupe de statut
Groupe social qui partage le même niveau de prestige social,
qui a un style de vie commun ou des valeurs communes. (sans
forcément avoir de ressources économiques communes)
Catégories
socioprofessionnelles
Nomenclature de l’INSEE qui vise à classer l’ensemble de la
population en catégories sociales relativement homogènes
selon différents critères (statut professionnel, niveau de
qualification…)
A/ Comment mesurer les inégalités de revenu et de patrimoine ?
Inégalités économiques Accès différencié aux ressources économiques à l’intérieur d’une
société. Elles prennent principalement deux formes différentes :
Les inégalités de revenu prises en compte au niveau des revenus primaires (revenus du travail,
revenus du capital, revenus mixtes des travailleurs indépendants) mais aussi au niveau des revenus
disponibles (revenus primaires prélèvements obligatoires + revenus de transfert). Les inégalités de
revenus sont aussi mesurées par rapport au niveau de vie (revenu disponible par unité de
consommation).
Les inégalités de patrimoine Le patrimoine représente le capital immobilier (maisons, terrains) et
capital mobilier (actions, obligations, compte épargne) que possède un ménage. C’est un stock
alimenté par des flux de revenus et qui permet à son tour de générer des revenus (dividendes, loyers,
intérêts). La répartition des patrimoines est encore plus inégalitaire que celle des revenus car
l’acquisition d’un patrimoine nécessite une certaine épargne ou la chance d’un héritage.
(VOIR TD)
Problèmes méthodologiques pour mesurer les inégalités ?
Quelles inégalités mesurer ? Selon le type d’inégalité qu’on étudie on aura pas la même
représentation des inégalités (plus ou moins forte selon la variable, ex : selon que l’attention se porte
sur le revenu ou le patrimoine, on dira que les inégalités s’estompent ou bien qu’elles s’accroissent).
Quelle population comparer ? Selon le choix de la population, on aura des résultats différents
(ménages, individus, foyers fiscaux…). Chaque population étudiée va entrainer des limites car des
populations ou des revenus vont échapper aux résultats. Parfois on peut être amenés à faire des études
sur des populations très hétérogènes (ex : CSP)
Comment mesurer les inégalités ? Deux grands types d’outils : ceux qui mesurent la dispersion (écart
entre les valeurs extrêmes d’une population revenus des 10% les plus riches face aux revenus des
10% les plus pauvres) et ceux qui mesurent la disparité (écart entre les valeurs centrales de deux
populations différentes revenus moyens des hommes face aux revenus moyens des femmes).
Principaux outils d’analyse des inégalités économiques
a) Le rapport interdécile
Le rapport entre le niveau de vie minimum des 10 % les plus riches (ce qui s’appelle un décile, le
neuvième) et le niveau de vie maximum des 10 % les plus pauvres (un autre décile, le premier).
Rapport interdécile = D9 / D1
= limite supérieure de D9 / limite supérieure de D1
= revenu minimal que perçoivent les 10% les plus riches / revenu
maximal que perçoivent les 10% les moins riches.
b) La courbe de Lorenz
La bissectrice désigne une répartition égalitaire : telle que 10% de la population aurait 10% de la
grandeur étudiée etc… Plus la courbe de Lorenz s'éloigne de la bissectrice, plus la distribution
observée est inégalitaire. On voit, ici, que la répartition du patrimoine est beaucoup plus inégalitaire
que celle du niveau de vie.
Inégalités patrimoine > Inégalités de revenus.
c) Le coefficient de Gini
Il mesure l’écart entre la courbe de Lorenz et la bissectrice (voir TD doc7). Plus le coefficient se
rapproche de 1, plus on se trouve dans une situation inégalitaire.
Ex : le coefficient de Gini français est de 0,27 en 2008 contre 0,38 aux Etats- Unis selon l'OCDE : la
France est moins inégalitaire au niveau des revenus que les Etats-Unis.
SYNTHESE :
Notre société se caractérise par de nombreuses différences entre les individus ou les groupes
sociaux (âge, genre,…). Cependant les différences ne constituent des inégalités que
lorsqu’elles se traduisent en termes d’avantages ou d’inconvénient dans l’accès à des
ressources socialement valorisées. Les inégalités sont des inégalités sociales lorsqu’elles
touchent tout un groupe social. La mesure des inégalités pose des problèmes
méthodologiques : le choix des inégalités à mesurer (de revenus, d’accès à la culture…), la
population à étudier (PCS, ménages…) le type d’outils choisis (moyenne, médiane,
quantiles…) changent la perception des inégalités et de leur évolution.
Les inégalités de revenus et de patrimoine sont généralement analysées avec le rapport
interdécile, la courbe de Lorenz ou le coefficient de Gini. Les inégalités de patrimoine
sont beaucoup plus importantes que les inégalités de revenus : les 10% des ménages les
mieux lotis disposent d’un revenu annuel au moins 4X supérieur à ceux des 10% les moins
bien lotis, et d’un patrimoine environ 204X supérieur à ceux des 10% les moins bien lotis.
Le revenu permet de constituer un patrimoine qui à son tour génère des revenus, créant un
cercle vertueux qui se transmet par l’héritage, de génération en génération. Les inégalités de
revenus et de patrimoines sont donc cumulatives, et varient considérablement en fonction de
la PCS ou de l’âge.
B/ Comment mesurer les inégalités sociales ?
Inégalités sociales Différences socialement structurées qui se traduisent par des avantages ou
des désavantages dans l’accès aux ressources valorisées. Les inégalités sociales peuvent prendre
différentes dimensions :
- Inégalités devant la mort Un cadre a une espérance de vie > à celle d’un ouvrier. Les cadres
vivent + longtemps et en meilleure santé, ils ont accès à de meilleurs soins, une meilleure hygiène de
vie…
- Inégalités devant le chômage Le taux de chômage est d’autant plus élevé si les parents sont
étrangers (origine sociale).L’âge, le sexe, le diplôme ou encore les discriminations ethniques peuvent
également faire varier le taux de chômage.
- Inégalités de fréquentation culturelle Différence de capital culturel : la culture classique
appartient à la classe supérieure, elle est donc la seule à la posséder. La culture a donc une certaine
rentabilité pour les classes supérieures, alors que cela a très peu de valeurs pour les classes populaires.
Aujourd’hui, la culture des classes supérieures s’est ouverte (omnivore Coulangeon) alors que celle
des classes populaires est univore.
- Inégalités devant la politique Idée de compétence qui n’est pas également distribuée dans toutes
les classes sociales : il existerait une barrière (cens) culturelle qui empêcherait ou dissuaderait de
voter. Dans les milieux supérieurs on reçoit davantage une socialisation politique donc les personnes
de classes supérieures se sentent plus aptes à donner leurs avis alors que les personnes de classes
populaires s’auto-déshabilitent, se jugent incompétent.
- Inégalités scolaires : Forte inégalité entre les milieux sociaux pour les études supérieures et les
filières sélectives.
- Inégalités des sexes : Inégalité domestique (femmes consacrent 2 fois plus de temps aux tâches
ménagères que les hommes). Les femmes occupent l’essentiel des emplois à temps partiel et ces
emplois sont moins bien rémunérés ; et elles sont également moins présentes aux postes de direction.
Inégalités sont donc cumulatives
Les inégalités économiques expliquent les inégalités sociales :
Faibles revenus => Zone défavorisée => faibles vacances ou pas d’études longues pour les enfants
(moins bonnes écoles) => Moins bon statut social
Chômage, précarité => faible revenu => pas de crédit => pas d’achat de maison => faible niveau de
vie
Les inégalités sociales expliquent les inégalités économiques :
Échec scolaire => pas de diplôme => pas de qualification => emploi mal rémunéré => pas d’achat de
logement => pas de patrimoine
Catégories populaires => consommation de moindre qualité => perte du prestige social
Catégories populaires => conditions de travail difficiles => faible espérance de vie
Catégories populaires => pas d’études supérieures => faible qualification => forte vulnérabilité sur le
marché du travail.
Cette cumulation des inégalités alimente la polarisation de la structure sociale : les milieux
supérieurs voient leurs avantages renforcés (donc augmentation des chances pour une meilleure
position sociale) et les milieux défavorisés cumulent les désavantages.
SYNTHESE :
Les inégalités sont multidimensionnelles. On peut les mesurer en termes d’espérance de vie (6 ans
d’écart entre les cadres et les ouvriers), de taux de chômage (les sans diplômes sont 5 fois plus
nombreux au chômage que les bac+3, phénomène renforcé par l’origine sociale), d’accès à la culture,
mais aussi en termes d’études (environ 8 fils de cadres sur 10 ont un bac général, contre seulement 1
fils d’ouvrier sur 2), ou de compétence politique.
Les inégalités spécifiquement économiques constituent souvent une matrice sur laquelle se
développe une multiplicité d’inégalités sociales. Par exemple, les inégalités de revenu et de
patrimoine donnent naissance à des inégalités d’accès au logement, d’accès à la santé, etc. Les
inégalités sont donc interactives. Plus encore, elles sont liées entre elles par des processus cumulatifs
qui alimentent la polarisation de la structure sociale : les avantages des uns s’additionnent pendant
que les désavantages des autres se renforcent mutuellement.
C/ Comparer les inégalités dans le temps et dans l’espace
Dans l’espace :
En moyenne, dans les pays de l’OCDE, les ménages les 10% les plus riches disposent d’un revenu
disponible 9fois supérieur à celui des 10% les plus pauvres. Les pays les plus inégalitaires sont le
Mexique (RD 27 fois supérieur) et les USA (rapport de 15,1). Cependant, les pays au Nord de
l’Europe comme la Norvège ou le Danemark sont des pays assez égalitaires (avec un rapport inférieur
à 6).
La France quant à elle, est un pays qui lutte contre les inégalités, elle est en dessous de la moyenne
(rapport de 6,8), avec une redistribution des revenus relativement importante.
Dans le temps :
Sur le long terme, on observe incontestablement un mouvement de réduction des inégalités
économiques. De nombreuses études (Kuznets, Piketty) sur l’évolution de la distribution des revenus
au sein de pays développés au cours du XXème siècle attestent d’un accroissement des niveaux de vie
moyens et d’une réduction très significative des inégalités économiques. La forte croissance des Trente
Glorieuses et l’extension du champ d’intervention de l’État ont permis une transformation des
structures sociales dans le sens d’une « moyennisation de la société » favorable à la réduction de
nombreuses inégalités.
On peut remarquer que cette baisse des inégalités de revenus est surtout intervenue de 1970 jusqu'au
milieu des années 80, car depuis cette période, les inégalités ont tendance à se stabiliser.
Explication :
a) Courbe de Kuznets
Explication de la hausse des inégalités : une première phase de l’expansion économique conduit à une
augmentation des inégalités par augmentation des écarts de revenu: salaires très faibles face à un fort
rendement du capital.
Explication pour la baisse des inégalités : au bout d’un certain niveau de croissance, les inégalités
globales baissent puisque les gains de productivité permettent l’augmentation des salaires que
réclament les ouvriers (meilleur partage de la valeur ajoutée), ce qui réduit les inégalités, à quoi
s’ajoutent la diminution des revenus de patrimoine (euthanasie des rentiers avec les impôts sur les
successions) et la création d’une protection sociale généralisée (Etat-Providence).
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