Maroc s’empressa de le féliciter de la manière la plus bienveillante, et trois ans
après il renvoya sans rançon des marins français qui avaient fait naufrage sur ses
côtes. En 1789, le dey d’Alger, voulant profiter de la situation fâcheuse où se
trouvait la France, proposa à l’empereur de Maroc de se liguer contre nous: celui-
ci refusa formellement, et ajouta qu’il ne consentirait jamais à ce que les prises
relâchassent dans ses ports. L’expédition d’Égypte et la protection que notre
armée accorda aux pèlerins de la Mecque, accrurent notre influence au Maroc, si
bien qu’après la prise de Malte, les Algériens s’étant décidés à courir sur nos
navires, l’empereur leur signifia de suspendre leurs courses, s’ils ne voulaient
s’exposer à un sévère châtiment de sa part. La défaite de Trafalgar, l’oubli de
toutes les traditions diplomatiques, sous l’empire, le blocus continental,
portèrent une grave atteinte à nos relations avec ce pays. Mais, après la chute
de Napoléon, Muley-Soliman, empereur de Maroc, se montra digne du mouvement
civilisateur qui rapprochait les peuples trop longtemps divisés par une guerre
universelle. C’est alors que ce prince, charitable et pieux, réalisa l’abolition de
tout esclavage entre chrétiens et musulmans, mesure dont la pensée avait rendu
si remarquables les derniers rapports de Louis XVI et de Sidi Mohamed. Là ne
s’arrêta pas encore son bon vouloir. En 1818, la disette ayant affligé la France,
Muley-Soliman, par un privilège unique et illimité, nous ouvrait le Maroc pour que
nous puissions en tirer toute espèce d’approvisionnements en blé, et il mit le
comble à sa générosité en renonçant même à ses droits de douane sur
l’exportation. Le sultan renouvela à cette époque une ordonnance de Sidi
Mohamed de 1759, qui permettait à tous les négociants chrétiens de s’établir
dans son empire, et il déclara, en outre, que dans le cas où un Européen, faisant
des affaires avec un de ses sujets, en éprouverait quelque préjudice, justice lui
serait immédiatement rendue. Ainsi, en 1820, M. Sourdeau, consul de France à
Tanger, ayant été frappé par un santon, l’empereur s’empressa de mettre le
coupable en arrestation et offrit lui-même au consul les plus complètes