DISSERTATION Droits et devoirs des entreprises multinationales

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DISSERTATION
Droits et devoirs des entreprises multinationales
Les entreprises multinationales (EMN) font partie du paysage économique depuis de
nombreuses décennies. L’ordre économique mondial actuel confère aux entreprises
multinationales un pouvoir extraordinaire tout en leur permettant d'ignorer toute
responsabilité, si ce n’est celle qu'elles assument envers leurs actionnaires.
On peut alors se poser la question en quoi consistent les devoirs des entreprises
multinationales et – par conséquent - quels sont leurs droits ?
Pour pouvoir en donner une réponse, il est nécessaire tout d’abord de définir les entreprises
multinationales. Il s’agit de sociétés ou autres entités à captial privé, public ou mixte, établies
dans des pays différents et liées de telle manière qu’une ou plusieures d’entre elles sont en
mesure d’exercer une influence importante sur les activités des autres.
L’apparition des entreprises multinationales sur la scène économique mondiale, et leurs
activités durant les années 60 surtout, ont suscité d’intenses discussions qui ont aboutis à des
tentatives d’élaboration d’instruments internationaux pour réguler leur conduite. Durant les 30
dernières années, la richesse et le pouvoir des entreprises multinationales dans le monde se
sont accrus da manière massive et inégalée.
S’il est vrai que d’une part des instruments internationaux existent, il faut signaler qu’ils sont
souvent sont inapplicables et donc largement inefficaces en pratique. Ces instruments sont très
nombreux, mais peu, voire aucun d’entre eux n’est contraignant. Ainsi, lors du sommet de
Johannesbourg par exemple, beaucoup d’ONG ont été déçues car les géants de l’économie
mondiale refusent toute réglementation internationale contraignante, le sommet n’ayant abouti
à aucun résultat véritable. La répartition des responsabilités entre les états et les
multinationales est de plus souvent confuse, ce qui crée un vide dont chacun tire profit pour
éluder ses responsabilités.
D’autre part, l’absence d’une législation contraignante augmente le risque que courent ces
entreprises de se voir imposer des obligations contradictoires par des pays Membres de
l’OCDE notamment. Ainsi, leurs droits ne sont ni bien définis ni fixés.
De ce fait, on peut apercevoir la nécessité d’instaurer des instruments internationaux
contraignants fixant les devoirs et droits des entreprises multinationales (I). Mais en même
temps, on constate les difficultés de mise en oeuvre (II).
I) La nécessité d’instaurer une législation contraignante
Dans le contexte actuel d'affaiblissement de l’état et de privatisation des services publics, les
Etats tentent de plus en plus de se défaire de leurs responsabilités au profit de sociétés privées,
ce qui débouche généralement sur des services de moindre qualité. D’ou la nécessité d’établir
un cadre contraignant pour les EMN (A). Or, il ne faut pas oublier le poids de celles-ci et de
leurs investissements internationaux, d’ou la nécessité de leur attribuer des droits (B).
A) La nécessité de réguler la conduite des EMN : les devoirs
1) la responsabilisation des EMN
Alors que dans les années 60 et 70, on craignait surtout de la part des multinationationales une
ingérence excessive dans les affaires des pays en voie de développement, on constate
qu’aujourd’hui, elles ne parviennent même pas à controler les pratiques repréhensibles de
leurs filiale à l’étranger. Bien qu'elles soient souvent plus puissantes et plus riches que
certains gouvernements, elles ne reconnaissent pas souvent l'obligation morale d’employer
cette puissance et ces richesses pour participer à l'amélioration des conditions de vie des
populations des pays où elles développent leurs activités.
Il est ainsi nécessaire d’inviter les États à surveiller les pratiques des multinationales se situant
sur leur territoire. En faisant pression sur les pays d’origine des multinationales ceux-ci
peuvent garantir un comportement responsable des sociétés à l'étranger et les pays d’accueil
où les multinationales sont actives pourront formuler et mettre en œuvre une législation
réglementant les activités commerciales dans leur juridiction. Les multinationales disposent
cependant de moyens pour éviter les pressions exercées par le biais des gouvernements : elles
peuvent aller établir leur siège dans un état plus accommodant. D’où il est nécessaire d’établir
un cadre contraignant international.
2) des limites à l’exploitation de la puissance économique par les EMN
Souvent, les multinationales ont été critiquées en ce qu’elles sont non seulement des
concurrentes pour les entreprises nationales mais surtout des États en menaçant de rendre leur
souverainté obsolète. Ainsi, par exemple, que plus de la moitié des 100 plus grandes
économies mondiales sont des entreprises multinationales. De ce fait, souvent les
multinationales sont une concurrence inégale aux entreprises nationales.
Également, avec la tendance actuelle de la privatisation, les États ont tendance à transmettre
aux multinationales la responsabilité et le pouvoir de décision. Comme nous l’avons déjà
énoncé plus haut, le pouvoir et la richesse des mulitnationales se sont accrus durant les 30
dernières années. Beaucoup d’États importateurs d’investissements accordent souvent aux
multinationales des avantages excessifs ce qui conduit alors au pillage de leurs ressources car
le droit interational traditionnel n’est pas assez efficace sur ce point. Et les progrès réalisés
par les mulitnationales dans l’organisation de leurs activités hors du cadre national peuvent
conduire à des concentrations abusives de puissance économique.
De plus, les multinationales ont tendance à organiser un système économique propre et
autonome qui a tendance à se substituer à l’ordre international interétatique. Par exemple, les
principales entreprises pétrolières ont créé une entente, les « Seven Sisters » et ont ainsi donné
naissance à la lex petrolea.
En établissant donc une législation internationale contraignante, les multinationales ne
pourront qu’agir dans un cadre bien défini sans être tentées d’abuser de leur pouvoir
économique.
B) La nécessité d’attribuer des droits précis aus EMN
1) un rajustement de l’image des EMN
Il ne faut pas faire des multinationales la grosse bête noire de l’économie internationale. En
effet, même si l’on peut émettre des critiques à l’encontre des multinationales, les incidences
sur l’économie internationale sera importante si l’on émettait trop de restrictions aux
multinationales.
De plus, il est important que soient définis précisément les droits des multinationales.
Autrement les obligations qu’elles ont envers chaque État se superposeront. Ainsi, le
problème est que les multinationales courent de plus en plus le risque de se voir imposer des
obligations contradictoires par des pays Membres de l’OCDE. Les obligations contradictoires
existent lorsqu’une législation nationales ou des obligations juridiques imposées par un pays
et qui ont une portée extraterritoriale, entrent en conflit avec la législation en vigueur dans
d’autres pays. Ceci affecte par exemple, les opérations des entités d’entreprises
multinationales qui s’y sont implantées. Comme conséquence, ces contradictions tendent à
influer sur le climat de l’investissement. Pour éviter des contraintes en trop, les
multinationales auront alors comme réflexe de se retirer progressivement du marché
international. Le développement des échanges et de l’investissement sera difficile d’être
préservé.
Dans l’ensemble, les multinationales ont permi des pogrès technologiques, l’évolution des
conditions du marché et un changement de climat des affaires. Par exemple, elles ont
contribuées à l’ajustement et à la croissance du fait qu’elle étaient souvent en mesure de
s’adapter avec une grande souplesse. Aussi, au niveau de l’emlpoi, leur performance a été
(dans les années 80) au moins égale à celle des entreprises nationales
2) encourager l’investissement international des EMN
Les entreprises multinationales jouent un role important dans les économies des pays
Membres de l’OCDE et dans les relations éonomiques internationales. Gràce aux
investissements internationaux, les multinationales peuvent apporter des bénéfices aux pays
d’origine et aux pays d’accueil en contribuant à l’utilisation efficace des techniques et
ressources entre les pays. Ils jouent ainsi un role non négligeable pour la promotion du bien
être économique et social.
En ce qui concerne les droits des EMN dans le domaine de l'élaboration de normes, on
constate que les obligations positives sont plus difficiles à formuler que les négatives.
Néanmoins, des droits légaux existent en faveur des multinationales comme par exemple ceux
du droit de commercer et droit d’accès aux marchés.
Mais il faut citer surtout une clause importante qui ont une influence sur les investissements
des multinationales : l’égalité de traitement entre les produits importés et nationaux. Ce
traitement constitue un complément du traitement de la nation la plus favorisée pour donner
effet au principe de la non-discrimination lors des échanges commerciaux interantionaux. La
clause impose le principe que les produits étrangers (importés) doivent être traités
pareillement que les produits nationaux. Elle permet de plus d’assurer des conditions égales
de concurrence entre les produits sur un marché national car toutes les lois, réglements et
autres prescriptions affectant la vente des produits en vigueur dans le pays importateur
doivent s’appliquer également aux produits nationaux et importés. Donc, les multinationales
qui émettent leurs produits sur un marché donné ont la garantie et donc les mêmes droits que
toute entreprises nationale.
Ainsi, en octroyant aux multinationales des droits bien définis, celles-ci seronts encouragées à
investir et se développer tout en ayant garanti le respect des autres entreprises nationales ainsi
que des États.
II) Les difficultés de mise en oeuvre
Dans le contexte juridique général, il existe des actions contre les entreprises multinationales.
Ainsi, celles-ci peuvent être tenues responsables de leurs activités dans d’autres pays. Or, cela
implique que les États réglementent les activités des entreprises (A). Sachant que chaque État
ne peut que régler les activités des multinationales implantées sur son territoire ou en rapport
avec celui-ci, il est de plus en plus nécessaire qu’un droit international contraignant soit établi.
De ce fait, de nombreuses tentatives au niveau international on été faites (B).
A) L’action des gouvernements
1) l’instauration d’un cadre réglementaire
Les états sont obligés de protéger les droits des populations dépendant de leur juridiction.
Cela implique qu’ils doivent réglementer les activités des entreprises officiellement établies
ou opérant dans leur juridiction. Ainsi, les gouvernements, c’est à dire les pays d’accueil et
d’origine, sont à même de formuler et de mettre en oeuvre des lois et des mécanismes de
réglementation.
Souvent encore, les gouvernements ont tendance à fermer les yeux sur les violations
commises par les multinationales. Il est donc nécessaire d’établir des devoirs contraigangts
aux multinationales. Or, encore aujourd’hui cela n’est toujours pas le cas.
Les multinationales disposent cependant de moyens pour éviter les pressions exercées par le
biais des gouvernements : dans ce cas, elles vont utiliser leur statut juridique éphémère et
changeant, et leur présence dans de nombreux pays en même temps, pour prétendre qu’elles
n’existent dans aucun et qu’elles ne sont donc soumises aux réglementations d’aucun
gouvernement, si ce n'est celui du pays où elles se trouvent à un moment donné : le pays
d’accueil.
2) l’exemple des pays en développement et des pays développés
Un cadre réglementaire interne est d’autant plus nécessaire que certaines EMN ont tendance à
exploiter la faiblesse des pays en développement. La collusion est susceptible d’y être plus
importante, notamment parce que les pays en voie de développement, qui sont généralement
pays d’accueil, ont vraiment besoin des multinationales pour survivre dans l’économie
mondialisée. De nombreuses petites économies nationales faibles dépendent des
multinationales et, même si cela est regrettable, il est compréhensible que ces pays craignent
de les aliéner.
Un certain nombre de pays développés néanmoins cherche à faire reconnaître la responsabilité
légale des multinationales dans leur pays d’origine. Un certain nombre d'actions intentées
dans plusieurs pays industrialisés, sièges d'entreprises multinationales ouvrent
progressivement un terrain favorable aux demandeurs de pays d’accueil qui cherchent à faire
reconnaître la responsabilité légale des multinationales dans leur pays d’origine. On constate
que la plupart des actions évoquées dans le cadre des actions intentées devant la justice du
pays d’origine avaient été entreprises dans des pays de droit coutumier. Ainsi par exemple, en
Angleterre la norme légale utilisée dans le cadre de la loi britannique est ce que l'on appelle la
« duty of care » (le devoir de diligence). Il s'agit d'une obligation qui s’applique à tout le
monde en Grande-Bretagne, tant aux individus qu'aux entreprises, notamment aux
multinationales implantées en Angleterre. Également, aux États-Unis l’instrument le plus utile
est l’Alien Tort Claims Act, une loi vieille de 200 ans qui confère aux tribunaux américains le
pouvoir de juger des cas de violations du droit coutumier international perpétrés n’importe où
dans le monde pour autant que le défendeur relève de la juridiction des tribunaux américains.
B) Les tentatives régionales et internationales
1) les actions de l’Union Eurpéenne et au niveau international
Les différences existant entre législations nationales et les points faibles de ces législations
que les sociétés peuvent exploiter, renforcent l’argument selon lequel il faut chercher les
solutions au problème des devoirs des entreprises au niveau international.
L’Union Européenne s’intéresse au problème de la responsabilité des entreprises depuis les
années 70 et a introduit une série de Directives qui ont trait au comportement des
multinationales. Plus récemment, une résolution du Parlement a débouché sur l’adoption, en
janvier 1999, de l’idée d’un « Code de Conduite européen pour les entreprises européennes
opérant dans les pays en voie de développement ». Il s’agit de rédiger un modèle de code basé
sur les normes minimales existantes pour les entreprises multinationales. Ce code ne sera pas
légalement contraignant, mais le Parlement Européen a demandé à la Commission
Européenne de faire appliquer une obligation existante, selon laquelle toute entreprise privée
travaillant pour le compte de l’UE dans des pays tiers est tenue de respecter les droits
fondamentaux conformément au Traité de l’Europe, faute de quoi elle perdra le financement
communautaire.
Il est aussi nécessaire de disposer de normes internationales qui soient directement
contraignantes pour les entreprises multinationales. Ainsi, pour l’instant, la Convention de
l’OCDE sur la Corruption est le seul instrument international qui impose des obligations aux
entreprises multinationales.
Au besoin de normes internationales doivent venir s'ajouter des institutions internationales
capables de contrôler et d’imposer la mise en application de celles-ci. Or, avec l’échec de
l’AMI et de la tentative de rendre tant les sociétés que les individus responsables devant la
Cour pénale internationale de Rome, il ne reste que des codes de conduite internationaux, tels
que les mécanismes de l’OIT et de l’OCDE. Mais ces lois ne s’imposent pas directement aux
multinationales et souffrent de lacunes surtout dans le domaine de la mise en application.
L’Organisation Mondiale du Commerce est le seul organe international disposant d’un réel
pouvoir contraignant. L’OMC donne la possibilité aux victimes de pratiques commerciales
abusives d’imposer des sanctions aux entreprises à concurrence d’un certain montant
maximum. Dans un certain nombre de cas, des entreprises ont dû modifier leur comportement
et supporter en fin de compte les frais.Donc, on constate qu’il y a beaucoup de tentatives mais
peu de mise en oeuvre.
2) l’originalité des Principes directeurs de l'OCDE
L’OCDE n’est pas réellement un organe international. Ses membres étant les gouvernements
de 29 pays industrialisés, l'organisation est très largement favorable aux pays du Nord. Elle
dispose néanmoins d’une série d’accords et de règles de conduite relatifs aux entreprises
destinés aux gouvernements membres.
Ainsi, l’originalité réside dans le fait que les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des
entreprises multinationales, élaborés en 1976 et révisés à plusieurs reprises couvrent toute la
gamme d’activités industrielles et commerciales. Les principes représentent ce que les
gouvernements attendent collectivement du comportement et des activités des
multinationales. Des normes sont établies à l’intention de celles-ci pour contribuer à mettre en
harmonie leurs activités aves les politiques nationales des pays où elles opèrent et à renforcer
la confiance mutuelle entre elles et les gouvernements.
Le problème réside dans le fait qu’il ne s’agit que de recommandations, donc il n’a pas
d’obligations légales des multinationales. On peut constater le peu d'usage qu'il a été fait
jusqu'à présent des Principes directeurs. En 24 ans d’existence, l’OCDE n’a examiné qu’une
trentaine de cas.
Ceci amène à se poser la question dans quelle mesure un code volontaire peut être efficace en
pratique. Les labels et codes de conduite volontaires ne peuvent remplacer la législation et les
accords internationaux contraignants. Mais ils peuvent contribuer à la promotion des droits de
l'homme et des droits fondamentaux des travailleurs partout dans le monde. Le débat reste
ouvert.
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