Septembre 2004 n°221 Une version plus complète de ce bulletin est accessible sur le site de l'INRA www.inra.fr. sous son nom dans : Information Scientifique et Technique puis Publications INRA en ligne. Le signe ### dans cette version papier indique quelques développements supplémentaires ou des commentaires additionnels consultables dans la version électronique. André BERKALOFF e-mail : [email protected] Concepts et Techniques 1.### Le fait de transcrire des séquences non codantes, et sans fonctions connues, doit avoir une signification qui est discutée dans S Schmitt et al.; Nature 429 (06JUN04) 510-511 dans le cadre d'un commentaire de l'article de JA Martens et al.; p.571– 574. Les ARNs issus de cette transcription plus ou moins exhaustive du génome sont souvent considérés comme du "bruit" sans signification. Ces derniers auteurs montrent que ce n'est pas le produit, un ARN, messager ou autre, mais la transcription ellemême qui permet des régulations de la transcription. 3. ### DR Denver et al.; Nature 430 (05AUG04) 679–682 montrent que, chez Caenorhabditis elegans, les mutations sont dix fois plus fréquentes que prévu, entraînant une instabilité génomique notable. On admet généralement (mais les estimations sont indirectes) que les mutations sont rares et, d'une certaine façon, utiles car elles peuvent entraîner une variabilité génétique substrat de l'évolution. En effet, un tiers des mutations entraîne probablement des modifications du phénotype. Mais les méthodes d'évaluation de la fréquence des mutations oublient que certaines sont létales ou suffisamment nocives pour que les porteurs puissent contribuer à la descendance. Les auteurs se sont affranchis de ce biais inévitable en s'attaquant directement au génome et à sa séquence et en séparant les lignées pour éviter autant que possible le biais de la contre-sélection des porteurs de certaines mutations 7. ### EY Levanon et al.; Nature Biotechnology 430 22 (AUG04) 1001-1005 de la firme israélienne Compugen Ltd décrivent les résultats d'une analyse systématique de l'édition d'adénosine en inosine des ARNs messagers humains basée sur les banques de données sur les ESTs (Expressed Sequence Tags). On sait que cette édition est assurée par des ADAR (Adénosine Déaminases Acting on RNA) chez probablement tous les métazoaires, et qu'elle est indispensable au développement des mammifères, mais on n'en connaît que peu de cas "officiels" avec 54 sites dans 17 gènes. Les auteurs ont cependant détecté 12 723 sites dans 1 637 gènes différents. Les auteurs ont validé expérimentalement un certain nombre de ces sites sur 26 nouveaux substrats (ce sont des ARNs doubles brins imparfaitement appariés pour la plupart). Ces éditions ont surtout lieu dans des séquences non codantes tout particulièrement dans les séquences répétées Alu. Les cas d'édition dans des séquences codantes deviennent donc l'exception. La signification biologique de l'édition est donc à revoir. On sait que la présence d'un ARN double brin intronique et sa stabilité influencent la cinétique de l'épissage ou même un épissage alternatif. De plus l'édition pourrait affecter l'activité transpositionnelle des séquences Alu et L1 et supprimer les effets répressifs de L1 sur l'élongation lors de la transcription. Enfin, et toujours, selon K Nishikura, elle pourrait supprimer l'interférence ARN (RNAi) dans les gènes porteurs de ces sites édités, comme cela l'a été démontré chez Caenorhabditis. elegans. Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 Les Productions Végétales Les gènes et les génomes 8. Les transferts horizontaux de gènes sont, à la fois, un phénomène très naturel et actif au cours de l'évolution, et craints par certains comme modifiant la nature, ce qui est la conséquence de la remarque précédente. CC David et al.; Science 305(30JUL04) 676-678 décrivent un nouvel exemple original, entre une plante parasite et sa plante hôte. Les Rafflesiacées sont des plantes de l'Asie du sud-est, parasites avec des sortes d'hyphes envahissant la plante hôte. Les fleurs géantes très connues de Rafflesia sont fort belles (ce qui en fait une espèce en voie de disparition) mais passablement puantes. Les génomes mitochondriaux et nucléaires indiquent que ces plantes sont apparentées aux Malpighiales, mais certains gènes mitochondriaux comme nad1B-C les rapprochent des Vitacées, comme la liane Tetrastigma qui est précisément l'hôte obligé de Rafflesia arnoldii. Il est donc vraisemblable que le génome mitochondrial a été partiellement emprunté à l'hôte. 9. Une banque de données sur le polymorphisme ADN du riz, dans le but avoué du clonage basé sur la cartographie, des deux variétés japonica Nipponbare et indica 93-11 contenant 1 703 176 SNPs (Single Nucleotide Polymorphisms) et 479 406 InDels (Insertion/Deletions), avec en moyenne un SNP toutes les 268 pb et un InDel toutes les 953 pb est décrite par des chercheurs chinois. YJ Shen et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1198-1205. (http: //shenghuan.shnu.edu.cn/ricemarker) Ils ont été validés expérimentalement. Sur 109 SNPs choisis au hasard, 107sont exacts et 90% (97 sur 108) des InDels peuvent être utilisés comme marqueurs. Par ailleurs, les marqueurs moléculaires SNPs et de 68% à 89% des 97 InDel présentent un polymorphisme avec d'autres riz indica (Zhong-hua 11 et 9522). On devrait donc pouvoir utiliser cette banque pour analyser d'autres cultivars japonica et indica. Voir le §132 pour la politique dans laquelle s'insèrent ces recherches L'Expression Génique 10. Les tentatives de surexpression entraînent souvent l'effet inverse à la suite de phénomènes de "silencing". Des chercheurs de Leuven, utilisant des mutants de silencing sgs2 et sgs3 d'Arabidopsis ont, en grande partie, éliminé ce silencing. Avec un montage utilisant un promoteur 35S, on augmente très nettement les transformants surexpresseurs. Des constructions où les MARs (Matrix Attachment Regions) du gène du lysozyme de poulet flanquent le transgène semblent améliorer l'expression. KM Butaye et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 440-449. Le développement 11. ### La formation des cellules de garde du stomate chez Arabidopsis résulte d'une série de divisions au sein de l'épithélium foliaire. Elles démarrent avec la division asymétrique d'une cellule mère méristémoïde (MMC), donnant une petite cellule méristémoïde et une grosse cellule. La cellule méristémoïde constitue une cellule souche qui, après quelques divisions, s'arrête de le faire et devient une cellule mère de garde (GMC). Celle-ci donne lieu à une division symétrique qui va donner les deux cellules de garde qui assurent la fonction essentielle du stomate. DC Bergmann et al.; Science 304 (04JUN04) 14947) viennent de montrer que la MAPKKK (Mitogen Activated Proterin Kinase Kinase Kinase d'Arabidopsis appelée YODA (un petit chef vert des Jedi, selon mes petits enfants usuellement fort compétents) est indispensable à la formation et à la disposition des stomates. La protéine Yoda avait été identifiée comme responsable de la division asymétrique entre embryon et suspenseur (elle est donc responsable de la séparation des domaines embryonnaire et extraembryonnaire) et sa mutation empêche la formation du suspenseur, voir PN Benfey; Cell 116 (09JAN04) 4-5. YDA réduit le nombre de cellules entrant dans lignée stomatale et régulant l'équilibre entre le renouvellement des cellules méristémoïdes et la différenciation des stomates. 2 12. Le gène homéotique AGAMOUS (AG) d'Arabidopsis est nécessaire à la spécification précoce des étamines et carpelles. On sait qu'AG code un facteur de transcription qui est exprimé dans ces organes. Plus tard, AG est exprimé dans d'autres régions de l'appareil reproducteur. Ceci indique que ce facteur participe à la maturation des étamines et carpelles. Mais on ne connaissait pas les cibles de ce facteur. Le groupe de Meyerowitz montre qu'AG active le gène SPOROCYTELESS (SPL, alias NOZZLE, NZZ), qui est un régulateur de la sporogenèse. SPL est capable de lancer la formation du pollen indépendamment d'AG. AG régule probablement plusieurs processus par l'intermédiaire d'autres régulateurs plus spécifiques. T Ito et al.; Nature 430 (15JUL04) 356-360. Les auteurs ont utilisé un promoteur inductible par les glucocorticoïdes pour piloter l'expression du gène. 13. STYLOSA (STY) d'Antirrhinum et LEUNIG (LUG) d'Arabidopsis régulent la distribution spatiale des fonctions homéotiques de l'organogenèse florale. C Navarro et al.; Development 131 (AUG04) 36493659. Les mutants sty montrent également une altération de la veination des feuilles et une hypersensibilité à l'auxine et aux inhibiteurs de son transport polaire, ce qui indique que ce gène a des fonctions relativement étendues dans la plante. STY et LUG codent des protéines jouant un rôle de co-répresseurs. STY interagit avec plusieurs facteurs de transcription. STY interagit en Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 particulier avec certaines protéines de la famille YABBY (je suppose que ce nom vient de l'écrevisse australienne correspondante, mais…)., comme GRAMINIFOLIA (GRAM), et renforce les défauts phénotypiques chez les doubles mutants sty gram dans la régulation de la phyllotaxie (disposition des feuilles sur la tige), les fonctions homéotiques florales et la polarité des organes. STY est exprimée dans tous les méristèmes puis voit sa localisation se confiner au domaine adaxial des organes, ainsi qu'aux tissus provasculaires. Ce patron est également celui des gènes régulant l'identité adaxiale bien que STY ne la détermine pas et ne fait que l'accompagner. 14. Les kinases cyclines-dépendantes (CDKs) et leurs cyclines sont abondantes chez une plante comme Arabidopsis qui code au moins 8 CDKs et 30 cyclines. Mais on ne connait les fonctions d'aucune d'entre elles, faute de mutants, et ceci est peut être dû à des redondances. W Wang et al.; Development 131, n°13 (JUL04) 3147-3156 montrent que HUA ENHANCER3 (HEN3) qui code CDKE, un homologue de CDK8 des Mammifères est indispensable à la détermination des carpelles et étamines et, à la fin, de l'entretien des cellules souches des méristèmes floraux. 15. Des chercheurs californiens viennent de montrer que c'est un homologue de TERMINAL FLOWER (TFL), CsTFL, des Citrus qui assure la fin de la période juvénile (sans floraison et donc sans production de fruits). LJ Pillitteri et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1540-1551. TFL est une régulateur essentiel de la période de floraison chez Arabidopsis et d'autres plantes herbacées. Le gène d'agrumes a été isolé chez Citrus sinensis(dans ce cas une variété hybride de Navel). Si on exprime CsTFL chez Arabidopsis on observe un phénotype de floraison tardive, comme pour une surexpression du TFL1 autochtone. L'oranger Citrus sinensis possède, contrairement aux autres modèles étudiés, deux allèles distincts de CsTFL. Les transcrits sont, chez la forme adulte, uniquement présents dans tous les organes floraux et non détectables dans aucun des tissus végétatifs. Le phénotype juvénile est positivement corrélé avec l'accumulation de ces transcrits et négativement avec ceux de LEAFY et APETALA1 qui régulent la formation des fleurs. 16. ### Le groupe de Baulcombe montre que c'est un miRNA (ARN interférant) régulé par la gibberelline (GA) qui module la floraison. La transition florale chez Arabidopsis est fortement induite par GA qui active l'expression du gène de détermination de l'identité du méristème floral LEAFY. P Achard et al.; Development 131, n°13 (JUL04) 3357-3365. 17. Chez la vigne les vrilles sont des inflorescences modifiées. Normalement, la vigne produit des fleurs à l'opposé des premières nouvelles feuilles et des vrilles face aux feuilles plus tardives (en réalité face à 2 sur 3 de ces feuilles). Elles dérivent de méristèmes caulinaires particuliers dits "non déterminés". M Calonje et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1491-1501 ont étudié l'initiation florale et son développement. Ils ont caractérisé deux gènes les homologues, chez Vitis vinifera, de FRUITFULL (FUL-L) et APETALA1 (AP1) d'Arabidopsis. Les deux gènes sont exprimés dans les méristèmes latéraux qui vont donner, soit les fleurs, soit les vrilles. Ils sont co-exprimés dans les inflorescences et les fleurs. Au cours du développement floral l'expression de FUL-L a lieu dans la partie centrale du méristème floral, puis dans la région de ce méristème qui va donner les carpelles. Le patron d'expression d'AP1 doit jouer un rôle dans la transition florale et le développement de la fleur, mais il n'y a pas d'expression dans les sépales, ce qui indique que ce n'est probablement pas un gène assurant la fonction A (la morphogenèse des sépales et des pétales) chez la vigne, comme c'est le cas chez Arabidopsis (voir A Litt et al.; Genetics 165 (OCT03) 821-833, par exemple). Ces deux gènes sont exprimés durant toute la différenciation des vrilles, même avant la transition juvénile-reproductrice. Cette expression est donc indépendante de l'induction florale. 18. L'interaction des cellules des primordia d'identité abaxiale et adaxiale est nécessaire au développement du limbe foliaire. JF Golz et al.; Development 131, n°15 (AUG04) 3661-3670 montrent que la croissance et l'asymétrie des feuilles du muflier Antirrhinum majus impliquent les facteurs de transcription de type YABBY, GRAMINIFOLIA (GRAM) (voir le §11) et PROLONGATA (PROL). GRAM est exprimé à la périphérie abaxiale du primordium où il induit la croissance latérale et la détermination abaxiale. GRAM n'est pas indispensable à la détermination abaxiale, en l'absence d'une détermination adaxiale ce qui suggère qu'il induit détermination abaxiale par exclusion de l'identité adaxiale. Bien que l'expression de GRAM soit limitée au domaine abaxial, il fonctionne de façon redondante avec son paralogue abaxial, PROL et le gène exprimé de façon ubiquitaire PHANTASTICA pour promouvoir l'identité adaxiale grâce à un signal intercellulaire. Ceci explique que GRAM uniquement exprimé dans la partie la plus abaxiale puisse assurer un développement normal de cellules adaxiales. GRAM est donc capable de promouvoir et de réprimer l'identité adaxiale. 19. Le groupe de Willmitzer vient de montrer qu'une surexpression d'une invertase dans la paroi des méristèmes apicaux accélère la floraison chez Arabidopsis et accroît de 30% la production de graines. Cette surproduction est liée à l'augmentation du nombre des siliques (le fruit des crucifères) qui est une conséquence de la ramification accrue de l'inflorescence. AG Heyer et al.; Plant Journal 39 (JUL04) 161-169. Si on exprime cette enzyme dans le cytosol on a l'effet inverse. Les invertases ont donc des effets (probablement indirects) sur le développement. 20. PICKLE (PKL) code un facteur remodelant de la chromatine et réprimant les caractères embryonnaires des graines d'Arabidopsis. Chez les 3 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 mutants pkl, les racines primaires expriment de nombreux caractères embryonnaires après la germination. Ces racines accumulent des triglycérides, avec une composition en acides gras et des protéines de réserve typiques des graines, ainsi que des phytates. Il n'en est pas de même pour certains autres composés. Il y a donc une répression, mais sélective, de certains synthèses par PKL. La Reproduction 21. Un nouveau type de mutants mâle-stériles d'Arabidopsis a été obtenu en inactivant une protéine impliquée dans l'accumulation des lipides, ce qui déstabilise la formation du pollen en provoquant une distribution désordonnée de la sporopollenine et une absence d'exine. Ce mutant a été appelé nef (no exine formation). T Ariizumi et al.; Plant Journal 39 (JUL04) 170-181. Ce gène code une protéine membranaire du chloroplaste de 1123 aminoacides. Elle maintient probablement son intégrité. 22. SHY est un gène pollen-spécifique induit lors de la germination du grain. Il code une protéine sécrétée à répétitions riches en leucines (LRRs). Utilisant un antisens V Guyon et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 643-654 montrent que ce gène intervient dans la croissance du tube, son absence entraîne un arrêt de la croissance au niveau de l'apex de l'ovule avec une accumulation de callose le long et à la pointe du tube. La protéine SHY ressemble beaucoup à d'autres glycoprotéines de matrice avec LRRs, comme les inhibiteurs de polygalacturonase. Mais SHY n'a pas un tel rôle d'inhibiteur. Le produit de l'homologue de SHY chez la tomate (LeSTIG1) interagit avec les kinases de récepteurs (LePRK1 et 2) comme le montrent W Tang et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 343-353 qui penchent plutôt pour une interaction avec le pistil, mais les résultats des auteurs précédents indiquent que SHY fonctionne dans une cascade assurant la croissance du tube pollinique. 23. Beaucoup d'espèces de Prunus présentent une auto-incompatibilité de type gamétophytique basé sur une S-RNase (GSI). La spécificité de cette allogamie est assurée par un minimum de deux gènes du locus S assurant la sélectivité du pistil vis à vis du pollen. Côté pistil c'est le gène codant la S-RNase. SFB (S haplotype–specific F-box protein), est un gène de ce locus codant une protéine à F-box qui semble bien être le déterminant côté pollen. L'autocompatibilité de certains haplotypes de Prunus avium et P.mume correspondent à un défaut dans ce gène. Ce sont, soit une délétion de 4 pb entraînant un changement de phase de lecture, soit une insertion de 6,8 kb conduisant tous deux à la perte des deux régions hypervariables. K Ushijima et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 573-586. Les mêmes auteurs avaient montré l'an passé, que l'amandier présente un gène de ce type lié génétiquement à celui de la SRNase. K Ushijima et al.;The Plant C ell 15 (MAR03) 771-781. 24. La croissance du tube pollinique exige un gradient de Ca++ comportant un niveau élevé dans le cytosol apical du tube. Ce dernier oscille, mais est maintenu par un influx continuel lors de l'élongation. On a longtemps supposé que cet influx est assuré par des canaux sensibles à la tension liée à l'élongation, mais on n'était pas arrivé à les caractériser. Des chercheurs de Purdue University viennent de le faire dans le pollen du Lys Lilium longiflorum. Ils sont effectivement localisés à la pointe du tube (plus exactement à la partie des protoplastes de tube correspondant à cette extrémité). Des canaux à K+ activés par la tension sont distribués sur toute la surface du grain de pollen avec des canaux spontanés à K+ à l'exception de l'extrémité du tube. R Dutta et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1398-1406. La Physiologie des Plantes 25. La longueur du jour est perçue au niveau des feuilles et commande la floraison. Le signal généralisé (systémique) correspondant est inconnu et dénommé "florigène"!!!. L'analyse génétique permettant de le découvrir est toujours en cours et Constans (CO), une protéine nucléaire à doigt à zinc est fortement soupçonnée d'y participer. En jours longs chez Arabidopsis, elle stimule l'expression de la protéine codée par Flowering Time (FT) qui est une protéine inhibitrice RAF-kinase-like. En utilisant des greffes des chercheurs du Max PLanck de Köln (l'Institut de J Schell maintenant dirigé par G Coupland) montrent que CO agit sur le phloème., ce qui permettrait la dissémination du signal. Ce qui créait la difficulté était que CO est exprimé dans de nombreux sites de la plante, mais sous la commande d'un promoteur phloème-spécifique, une altération de CO bloque le signal de floraison. H An et al.; Development 131, n°15 (AUG04) 3615-3626. 26. Les gènes Transparent Testa TT2, TT8 (un homologue du gène R du maïs) et TTG1 4 (TRANSPARENT TESTA GLABRA1) spécifient, de façon synergique, l'expression du gène BANYULS. Ce dernier code l'enzyme de synthèse (une anthocyanidines réductase) des proanthocyanidines dans la paroi des graines d'Arabidopsis. Voir I Debeaujon et al.; Plant Cell 15 (NOV03) 2514-2531 et DY Xie et al.; Archives of Biochemistry & Biophysics 422 (01FEB04) 91-102. Les mutations ban entraînent une accumulation précoce des anthocyanes dans la paroi de la graine comme l'avait montré l'équipe de Delseny à Perpignan en 1997. TT2, TT8 et TTG1 activent directement le promoteur de BAN comme cela avait été suggéré par la même équipe dans N Nesi et al.; The Plant Cell 12 (OCT00) 1863–1878. Ces trois protéines forment un complexe ternaire. Les chercheurs de l'INRA à Versailles (A Baudry et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 366-380) montrent que TTG1 agit en combinaison directe avec TT8 ou des protéines apparentées, mais que TT2 ne peut être remplacée par d'autres protéines MYB d'Arabidopsis. Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 L'expression ectopique de TT2 suffit à déclencher l'expression de BAN dans les parties végétatives de la plante. 27. Les brassinostéroïdes (BRs) de la graine de tomate sont des dérivés en C27 et C28. La voie de synthèse des C27 a été disséquée par des chercheurs coréens. Elle comporte les conversions cholestérol → cholestanol et 6-déoxo-28-norteastérone ↔ 6-déoxo28-nor-3-dehydroteastérone ↔ 6-déoxo-28nortyphastérol -> 6-déoxo-28-norcastastérone → 28norcastastérone (28-norCS). TW Kim et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1231-1242. Le cytochrome CYP85A1 d'Arabidopsis intervient dans cette dernière étape. Un mutant nain de CYP85 peut être complémenté par addition de 28-norCS. CYP85 oxyde en C-6 le 6-déoxoCS en CS comme il le fait pour les mêmes dérivés de norcastastérone. La méthylation en C-24 de la 28-norCS en CS est assurée en présence de NADPH et de la S-adénosylméthionine (SAM). Les C27 BRs, comme les C28 BRs sont aussi actifs quand l'appareil de méthylation SAM-dépendant permet de convertir les BRs C27 en C28. La 28-norCS ne dérive pas du CS, mais de la voie issue du cholestérol. De plus le brassinostéroïde des plantules de tomate est bien la castastérone, et pas le brassinolide. Les 28-norBRs permettent de maintenir l'homéostasie de la CS. Pour ceux que ces jongleries rendent perplexes, voir SD Clouse; The Arabidopsis Book qui est librement consultable à http://www.bioone.org/bioone/?request=getdocument&issn=15438120&volume=026&issue=01&page=0001 30. L'inhibiteur de dextrinase limite de l'orge (LDI), une enzyme déramifiante de l'amylopectine, est structuralement apparenté à la famille des inhibiteurs d'-amylase/trypsine. La limitation de cette activité par antisens augmente, tout naturellement, l'activité de l'enzyme. Mais on observe des effets imprévisibles et pléiotropes, notamment sur les - et -amylases, ainsi que sur les amidons synthases.Y Stahl et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 599-611. On trouve moins de grains d'amidons de type B (constitué de grains d'environ 6 contre pour l'amidon A), avec moins d'amylose. La distribution en longueur des chaînes d'amylopectine est modifiée avec des ramifications longues moins abondantes et plus de chaînes moyennes (10-15 glucoses). 31. On sait produire des amidons aux propriétés variées chez le maïs, mais la pomme de terre est difficile à modifier dans ce sens, alors que c'est un producteur important d'amidons industriels, bien que l'amidon y soit fortement dilué par l'eau. La taille des grains d'amidons est très variable (20 à 190 et la taille moyenne des molécules d'amidon est plus grande que chez le maïs, son principal concurrent avec le blé). De plus, cet amidon est relativement riche en amylopectine (76 à 80%). Des pommes de terre riches en amylose ont été obtenue par inactivation des deux enzymes ramifiantes connues par antisens. Ces pommes de terre ont été suivies pendant plusieurs années au champ par Plant Science Sweden AB. Ces lignées sont stables mais la production d'amidon est diminuée, la diminution de la production d'amylopectine n'étant pas compensée par un accroissement de celle de l'amylose. P Hofvander et al.; Plant Biotechnology Journal 2 (JUL04) 311-320. La taille des grains d'amidon est réduite en moyenne. 32. ### Thellungiella halophila est une petite crucifère annuelle extrêmophiles (halophyte avec une tolérance à 500 mM de NaCl grâce à une accumulation de proline et cryophyte avec une tolérance à –15°) avec un cycle court comme Arabidopsis annua. Son génome est à peine deux fois plus grand que celui de cette dernière. L'identité de séquence entre les deux est de 92%. Elle peut être transformée par trempage classique de la fleur. Cette plante pourrait, pour toutes ces raisons ,constituer un modèle intéressant. Ses caractéristiques sont détaillées dans G Inan et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1718-1737 et sa tolérance au sel par T Taji; p.16971709 utilisant des sondes d'Arabidopsis. 33. Plusieurs gènes de glutathione peroxydase ont pu être clonés, et tous sont fortement homologues des gènes d'isoformes des hydroperoxidases de phospholipides. Ces protéines sont probablement impliquées dans les réponses aux stress. Le gène gpx1 de l'orange Citrus sinensis codant une telle isoforme est régulé d'une façon qui indique que son induction par le sel est liée à un stress oxydatif. Ceci a été démontré par O Avsian-Kretchmer et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1685-1696. Mais c'est le peroxyde d'hydrogène intracellulaire qui intervient, pas celui que l'on peut appliquer de façon exogène qui utilise une autre voie. 34. On peut trouvera dans L Ralley et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 477-486, un tour d'horizon sur l'ingénierie des céto-caroténoïdes (astaxanthine, canthaxanthine et 4-céto-zéaxanthine) chez les plantes. 35. L'expression du gène BGL1 de la -glucosidase d'Aspergillus niger chez le tabac Nicotiana tabacum (cv. Xanthi) a un effet très net sur les émissions volatiles des feuilles. BGL1 a été exprimé sous la commande du classique promoteur 35S en divers sites cellulaires. L'activité enzymatique a été surtout observée dans la paroi de la vacuole lytique et dans le réticulum endoplasmique. S Wei et al.; Plant Biotechnology Journal 2 (JUL04) 341-350. Les feuilles de toutes les plantes transgéniques émettent des quantités supérieures de 2-éthylhexanol. Dans la paroi ce sont surtout du trans-caryophyllène et du cembrène dans le réticulum et la vacuole lytique. Si on considère les feuilles pressées, ce sont du linalool, du nérol, de l'oxyde furanoïde de cis-linalool, du 4-méhyl-1-pentanol, du 6-méthyl-hept-5-en-2-ol et du 2-éthylhexanol. Il est clair que ces études sont destinées à améliorer la qualité aromatique des tabacs. Les Symbioses 5 36. ### ID Rodriguez-Llorente et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 587-598 se sont penchés sur le problème de savoir ce qui a permis au Légumineuses de généraliser la fixation symbiotique nodulaire de l'azote atmosphérique. Ils ont analysé le rôle des polygalacturonases (PGs) et pectine méthyl estérases (PMEs) au cours des premières étapes de la symbiose de Sinorhizobium meliloti/Medicago avec les interactions entre les deux partenaires. Ils les ont comparé aux interactions entre le tube pollinique et le pistil. Le tube pollinique avec sa progression au sein du style étant comparé à celui des bactéries dans le cordon infectieux racinaire. 37. Sinorhizobium meliloti met en route ses gènes de fixation de l'azote en microaérobiose grâce à un régulateur global à deux composants FixLJ. Des chercheurs du centre CNRS-INRA de Toulouse ont utilisé une approche SELEX pour caractériser les cibles génomiques de la protéine FixJ. Le procédé SELEX (si j'ai bien compris) est un processus itératif qui permet d'identifier un aptamère se liant à n'importe quelle cible mis au point par le groupe de Gold à l'University of Colorado et commercialisé par Archemix (voir le Bulletin d'Août §137). Ceci a permis d'identifier 22 sites de fixation de FixJ , y compris les sites connus dans les promoteurs fixK1 et fixK2 de Bradyrhizobium japonicum. La majorité de ces sites sont portés par le plasmide pSymA ou par une courte région chromosomique manifestement intégrée à partir d'un support génétique non chromosomique. Les auteurs ont ainsi découvert deux nouveaux sites de fixation et probablement régulés par FixJ. Ces sites sont manifestement issus d'une duplication du promoteur fixK avec une partie du gène correspondant. On connaît des duplications similaires du promoteur de nifH. Il n'y a pas moins de 17 duplications de ce type dans le génome, et il semble bien que S.meliloti utilise à tour de bras ce procédé pour réguler sa fixation de l'azote. 39. L'osmoprotectant proline-bétaine est la principale bétaïne de la Luzerne. Son accumulation, et son métabolisme lors de la réponse à long terme à un stress salin, ont été étudiés par l'équipe CNRS de Nice de Le Rudulier (JC Trinchant et al.; Plant Physiology 135 (JUL04) 1583-1594). Le stress salin ne stimule pas la synthèse de la proline-bétaine, mais diminue fortement son turnover dans les bactéroïdes. 40. Le nectar extra-floral (les glandes sont situées à l'aisselle des feuilles), qui est usuellement inductible chez les acacias après blessure et stimulation par l'acide jasmonique, est sécrété en permanence par les acacias myrmécophytes d'Amérique Centrale colonisés par les fourmis qui se logent dans les épines creuses de la plante (Acacia chiapensis, A. collinsii, A. cornigera, A. globulifera et A. hindsi). Sauf chez A. collinsii, l'acide jasmonique n'a pas d'effet inducteur. Il s'agit, en réalité, d'une défense indirecte contre les insectes herbivores grâce à des mercenaires. M Heil et al.; Nature 430 (08JUL04) 205-208. Les auteurs (dont deux du CIRAD) montrent que la voie de l'acide jasmonique est cependant parfaitement fonctionnelle chez toutes ces myrmécophytes, laissant donc cette voie utilisable pour d'autres fonctions. Les Pathogènes des Plantes et les Mécanismes de Défense 42. Les chloroplastes des plants de tomate importent une polyphénols oxydase en présence de méthyl-jasmonate induit par les herbivores. S Koussevitzky et al.; Planta 219 (JUL04) 412-419. Ce n'est pas le cas pour le pois, et par ailleurs si l'éthylène renforce cet effet , il n'est pas capable de le déclencher à lui tout seul. L'enzyme se lie aux thylakoïdes et elle est transloquée dans la cavité du thylakoïde. C'est une protéine de 90 kDa qui n'est autre que l'inhibiteur de protéases multicystatine qui est induit par le méthyljasmonate et associé à la compétence au transport de l'enzyme et donc aux réactions de défense. 43. Le Turnip yellow mosaic virus (TYMV) est un virus à ARN codant directement les protéines. Il code, en particulier, deux protéines de réplication de 140 kDa et 66 kDa. La séquence de la protéine de 140 kDa indique qu'elle possède une activité de méthyltransférase, protéase et NTPase/hélicase (c'est donc une de ces enzymes multifonctionnelles évoquées dans le Bulletin d'Août §96), tandis que celle de 66 kDa constitue l'ARN polymérase ARN dépendante nécessaire à la réplication. La réplication a lieu à la périphérie des chloroplastes où elle est recrutée par la protéine 140 kDa comme l'avaient montré D Prod'homme et al.; Journal of Virology 77, n°17 (SEP03) 9124–9135. Contrairement à ce que l'on observe chez les autres -virus, c'est le domaine protéase de la protéine 140K qui permet l'interaction avec le domaine ARN polymérase de la protéine 66K. C'est ce que montre le même groupe d'Isabelle Jupin de l'Institut Jacques Monod de Paris. A Jakubiec et al.; Journal of Virology 78, n°15 (AUG04) 7945-7957. 45. Des carbohydrates oxydases participent aux défenses contre les agressions par les pathogènes dans les feuilles de laitue et de tournesol traitées à l'acide salicylique. JH Custers et al.; Plant Journal 39 (JUL04) 147-160. Elles permettent la libération de peroxyde d'hydrogène et sont également inductibles par les pathogènes fongiques, mais pas par l'éthylène ou le jasmonate. Ce rôle a été vérifié pour Pectobacterium carotovorum ssp. carotovorum (alias Erwinia carotovora ssp. carotovora pour tromper le lecteur). Les plantes recombinantes 46. D Klaus et al.; Planta 219 (JUL04) 389-396 montrent qu'il est possible d'enrichir le tubercule de la pomme de terre en lipides en divertissant une partie du flux de carbone vers la lipogenèse, à la place Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 de l'amylogenèse. La surexpression de l'acétyl-CoA carboxylase d'Arabidopsis dans les amyloplastes du tubercule quintuple la teneur en triacylglycérol (il est vrai qu'il y en a peu au départ), le malonyl-CoA étant le facteur limitant (l'ATP plastidial ne l'étant pas). On pourra bientôt faire des frites sans huile. 47. Un vaccin contre le coronavirus de la bronchite infectieuse du poulet (IBV), basé sur l'expression dans la pomme de terre de la protéine complète des spicules de la capside, est décrit dans JY Zhou et al.; Journal of Biotechnology 111 (15JUL04) 121-130. Son efficacité a été vérifiée chez le poulet après immunisation orale et par injection intramusculaire. 48. Les glycanes d'origine végétale peuvent donner lieu à des inquiétudes d'ordre immunologique quand on les injecte de façon relativement massive et répétée. Ce peut être le cas de protéines glycosylées exprimées dans les plantes dont la N-glycosylation est différente de celle des animaux, avec du xylose et de l'1,3 fucose. Un moyen de l'éviter est de confiner ces protéines dans le réticulum endoplasmique, en évitant ainsi les glycosylations dans le Golgi. R Sriraman et al.; Plant Biotechnology Journal 2 (JUL04) 279-287. Mais sans glycosylation seront-elles efficaces? Il f faudra les glycosyler enzymatiquement après purification. 49. Des chercheurs d'Advanta Biotechnology décrivent des betteraves exprimant des complexes de fructanes grâce à une fructosyltransférase d'oignon. G Weyens et al.; Plant Biotechnology Journal 2 (JUL04) 321-327. Les Insectes et leur Maîtrise 50. La sélection de parentèle (kin selection en anglais, qui est une manière "indirecte" de promouvoir ses gènes en excluant les étrangers), indique que les individus apparentés montrent une moindre agressivité réciproque et plus d'altruisme et c'est la base des sociétés d'animaux. Mais on a récemment pu montrer que, dans le cas d'une dispersion limitée des individus, la compétition finit par surmonter l'affection mutuelle. Il n'est pas facile de quantifier expérimentalement ces deux facteurs opposés mais trop liés. Chez les guêpes parasitoïdes à polyembryonie comme Copidosoma floridanum (alias C.truncatellum, une petite guêpe de 1mm sans nom vulgaire tellement elle est petite et inaperçue, voir le §52), chaque œuf donne lieu à des divisions et naissance à une abondante descendance clonale. Dans une telle "portée" clonale les soldats stériles n'ont, en principe, aucun conflit d'intérêt avec les autres descendants du même œuf. Mais quand plusieurs œufs sont déposés dans un même hôte (œufs de Trichoplusia ni ou Pseudoplusia includens), des sources potentielles de conflit apparaissent. Le même groupe de MR Strand, D Giron et al.; Nature 430 (05AUG04) 676-679 montrent que c'est bien la parenté qui importe, et pas la compétition pour la nourriture. 51. La coopération extrême au sein des colonies des insectes eusociaux, avec une caste ouvrière et une ou des reines, est souvent perturbée par des dérives consistant en une reproduction de certaines ouvrières. Ce peut être le cas chez les hyménoptères (fourmis, abeilles, etc…) où des ouvrières peuvent donner des mâles à partir d'œufs non fécondés. Les théories actuelles n'arrivent pas à expliquer, de façon claire, le niveau de cette reproduction parasite. C LopezVaamonde et al. Nature 430 (29JUL04) 557-560 montrent que chez le bourdon Bombus terrestris, ce sont des ouvrières non apparentées qui s'introduisent dans la colonie où elles donnent des oeufs de mâles de façon nettement plus précoce que les ouvrières autochtones s'adonnant à cette pratique. En effet une colonie de ce bourdon est annuelle avec la reine et les ouvrières réglementaires. Les coûts en productivité d'une reproduction des ouvrières sont très faibles. Aussi la théorie de la sélection de parentèle (voir le §50) prévoit qu'une production substantielle de mâles, accompagnée par un conflit évident entre ouvrières et reine, ainsi qu'entre ouvrière pour cette reproduction se traduit par une agressivité entre ces catégories et individus. Les auteurs ont quantifié cette évolution de la population en marquant les individus. 52. La formation des castes chez les insectes sociaux dépend de facteurs du milieu comme la nourriture. Certaines guêpes parasitoïdes pondant leurs œufs dans une proie comme Copidosoma floridanum montrent une polyembryonie clonale (jusqu'à 1000 embryons à partir d'un seul œuf, une polymorula) avec deux castes. Les œufs du parasitoïdes éclosent au cinquième stade larvaire sous l'effet des hormones de la proie, mais le parasitisme induit un différé de la pupaison de la proie et des mues supplémentaires. Certains embryons du parasitoïde se développent précocement et donnent des ouvrières soldats stériles qui défendent le grenier contre d'autres parasitoïdes. Les embryons se développant plus tardivement finissent de consommer le contenu de l'hôte, donnent des pupes et les guêpes adultes et reproductrices. Les soldats meurent alors. Dans ce cas, la détermination de la caste dépend de la distribution des cellules germinales lors de la polyembryogenèse. L'expression du gène Vasa indique qu'au stade 4 cellules, l'une d'entre elles est déjà déterminée comme cellule germinale primordiale. Si on procède à une ablation de cette cellule, les descendants de l'embryon sont des ouvrières (soldats). DM Donnell et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06JUL04) 10095-10100. Quand deux œufs sont déposés dans la même proie les clones sont de sexe opposé, l'un des oeufs est fécondé et l'autre pas et cela reste à expliquer. 7 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 53.### La nature haploïde des mâles fonctionnels, issus d'œufs non fécondés chez les Hyménoptères sociaux et autres, est un dogme largement répandu. C'est effectivement le mode le plus étudié. Cette détermination selon le principe de la "single locus complementary sex determination (sl-CSD)" ne dépend pas de la seule ploïdie (nombre de garnitures chromosomiques). Elle permet l'apparition de mâles diploïdes biparentaux en petit nombre. Le potentiel reproducteur de tels mâles a été étudié chez environ 13 des 200 000 hyménoptères probables dans le monde. Dans tous ces cas ces mâles sont un fond de sac reproducteur, car ils sont stériles, voire non viables. On vient de montrer que chez la guêpe solitaire Eumenine Euodynerus foraminatus, les mâles haploïdes et diploïdes sont fertiles. DP Cowan et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (13JUL04) 10374-10379. Beaucoup de ces guêpes solitaires euménines utilisent des cavités allongées (tunnels d'insectes dans le bois, par exemple) comme nid. La femelle suspend un œuf au fond de la galerie, puis va chasser les chenilles qu'elle paralyse puis stocke dans le nid et assure le casse croûte de son descendant avant de fermer la cellule avec de la boue. Elle recommence alors un nouveau cycle, etc… Dans les nids contenant les deux sexes, les œufs du fond sont fécondés et donnent donc des femelles. Les œufs déposés plus près de la sortie sont des mâles entre lesquels une vive compétition existe, laissant peu de place aux mâles extérieurs. Cette fertilité des mâles et l'inbreeding sont des caractéristiques de bien d'autres hyménoptères et cette situation est probablement plus fréquente qu'on ne le pensait. 55. ### Blochmannia floridanus est une bactérie endosymbiotique intracellulaire de la fourmi Camponotus floridanus et voisine des Buchnera et Wigglesworthia glossinidia. Elle se loge dans des cellules spécialisées, les bactériocytes. La séquence de son génome a été publiée par R Gil et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 100 (05AUG03) 9388-9393. F Wolschin et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 4096-4102 se sont intéressés, eux, à la prolifération de la bactérie. La dépendance des Camponotus tropicales est manifestement différente de celles d'autres insectes. Ces fourmis se nourrissent, en principe d'exsudats d'insectes ou de plantes, et sont donc des herbivores secondaires, ce qui laisse entrevoir une spécialisation nutritionnelle. Mais leur migration dans des régions plus tempérées s'accompagne d'une diversification de l'alimentation, ce qui exclue probablement un rôle nutritionnel des symbiotes. Les bactéries prolifèrent durant la pupaison, et immédiatement après l'éclosion des adultes. Chez les ouvrières le nombre de bactéries dans les bactériocytes de l'intestin diminue, alors que les chez les reines âgées les bactériocytes intestinaux disparaissent également, mais les bactéries prolifèrent dans les ovaires avec le développement reproducteur (la transmission est verticale via l'ovocyte). Ce qui est intéressant est que, dans ce couple la présence de la bactérie ne semble pas essentielle pour la fourmi qui semble bien se porter quand on élimine les bactéries (ce qui n'est pas le cas pour les pucerons et leurs Buchnera, ou les mouche tsetse avec leurs Wigglesworthia). La symbiose semble ne pas être indispensable aux adultes mais pourrait jouer un rôle au cours du développement Les Biopesticides 55. Serratia marcescens 90-166 et Bacillus pumilus SE34 sont deux rhizobactéries favorisant la croissance d'Arabidopsis écotype Columbia. CM Ryu et al.; Plant Journal 39 (AUG04) 381-392 montrent qu'elles ont la capacité de réduire les symptômes du virus de la mosaïque du concombre. Le signal impliqué a pu être caractérisé en utilisant des mutants bactériens de la souche 90-166 et d'Arabidopsis ainsi que des Arabidopsis transgéniques. Ce signal dépend de la voie du jasmonate et pas de l'acide salicylique et du gène NPR1 (NON-EXPRESSOR OF PR1, alias NIM1). 56. Serratia plymuthica IC1270 est une bactérie biopesticide. Elle a été isolée de la rhizosphère de la vigne et semble antagoniste de très nombreux pathogènes dont des champignons. Elle produit deux N-acétyl--D-glucosaminidases de 89 et 67 kDa, l'endochitinase de 58 kDa ChiA, et l'antibiotique pyrrolnitrine. L'activité antagoniste de plusieurs pseudomonades fluorescents contre les champignons pathogènes dépend d'un système régulateur à deux composants GacA/GacS et du facteur RpoS. M Ovadis et al.; Journal of Bacteriology 186,n°15 (AUG04) 49864994 ont recherché chez des bactéries biopesticides autres que les Pseudomonas, les gènes de régulation 8 globale de l'activité pesticide. Cette régulation porte sur la production des antifongiques et des exoenzymes. Les homologues chez la souche IC1270 ont été clonés et caractérisés. Les mutants sont nettement moins efficaces contre Rhizoctonia solani ou Pythium aphanidermatum. 57. Serratia entomophila et Serratia proteamaculans causent la maladie ambrée de Costelytra zealandica un scarabée des fourrages et pâturages redouté en Nouvelle Zélande où il est indigène. Un plasmide de 155 kb pADAP, porteur des gènes sepA, sepB et sepC, est responsable des symptômes de la maladie. L'inactivation de chacun de ces trois gènes abolit la destruction de l'intestin de la larve, mais pas l'arrêt de la prise de nourriture, qui doit être régulée ou assurée par d'autres gènes du plasmide. On vient de montrer que l'activité anti-herbivorie est liée à l'existence d'un prophage en voie de dégénérescence. Ce qui est intéressant est que six exemplaires potentiels de ce phage sont présents chez Photorhabdus luminescens subsp. laumondii TTO1. MRH Hurst et al.; Journal of Bacteriology 186,n°15 (AUG04) 5116-5128. 58. Les Photorhabdus utilisent un système de sécrétion de type III. Les effecteurs transportés par ce Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 système de sécrétion, et prédits par une étude génomique, diffèrent entre Photorhabdus luminescens et P.asymbiotica, malgré la grande conservation du système. K Brugirard-Ricaud et al.; Journal of Bacteriology 186,n°13 (JUL04) 4376-4381. Ce sont deux espèces voisines, mais si Photorhabdus luminescens est un insecticide, P.asymbiotica, comme son nom l'indique, ne participe pas à une symbiose insecticide avec un nématode. Il a été retrouvé dans des échantillons cliniques chez l'homme. La structure des gènes codant ce système indique qu'ils ont probablement été acquis avec un bactériophage intégratif. P.luminescens code une protéine effectrice du type de YopT de Yersinia tandis que chez P.asymbiotica c'est une protéine de type ExoU de Pseudomonas aeruginosa. Ce système de sécrétion semble absent chez les souches de Xenorhabdus examinées. Les Productions animales L'expression des gènes 59. Des chercheurs de l'ETH de Zürich (BP Kramer et al.; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 867-870) utilisent un mécanisme épigénétique pour piloter l'expression de transgènes par un mécanisme d'interrupteur à bascule. Ils utilisent deux répresseurs pilotant réciproquement leur expression pour exprimer, de façon alternative, deux transgènes. Chacune des expressions, stables, est induite de façon transitoire par un produit chimique différent. Un schéma illustre plus clairement le procédé que je ne pourrais le faire. Le développement 60. Les interactions entre l'épithélium mammaire et le stroma mésodermique qui l'enveloppe est nécessaire à l'organogenèse de la glande mammaire. S Cases et al.; Development 131 (JUL04) 3047-3055 montrent que l'acyl CoA:diacylglycérol transférase 1 (DGAT1), une enzyme de synthèse des triglycérides, est indispensable à cette organogenèse, à la fois dans l'épithélium et dans le stroma. 61. On sait que les phanères comme les poils et les plumes sont induites par un signal, encore inconnu, du derme vers l'épiderme qui le recouvre. Ce signal déclenche la formation de la placode qui va donner la phanère. La surexpression des versions solubles des récepteurs FGFR1 ou FGFR2, pièges pour le FGF, dans la peau d'un embryon de poulet entraîne une absence de plumes avec absence des placodes correspondantes. Fgf10 est exprimé à ce niveau, et des anticorps antiFGF10 suppriment la différenciation de la placode en plume. FGF10 induit l'expression des régulateurs positifs et négatifs impliqués dans la formation de la plume. Il peut également induire sa propre production lorsque les BMPs (Bone Moprhopgenetic Protéines) sont à faible niveau. M Mandler et al.; Development 131 (JUL04) 3333-3343. 62. La perte de Fgf9 empêche le développement du testicule et entraîne une inversion du sexe mâle en femelle chez l'individu porteur. Mais la fonction en cause était encore indéterminée. J Schmahl et al.; Development 131 (AUG04) 3627-3636 ont caractérisé les deux étapes de la différenciation du testicule ou Fgf9 intervient. La première est juste en aval de Sry dans la cascade et régule la prolifération des précurseurs des cellules de Sertoli (cellules accessoires mais importantes du testicule). La seconde porte sur la localisation nucléaire d'un des récepteurs de Fgf, le FGFR2, dans ces précurseurs. Cette localisation de FGFR2 coincide avec le début de l'expression de Sry et la localisation nucléaire de SOX9 au cours du début de la différenciation des cellules de Sertoli et la détermination mâle. une revue de J Brennan et al.; Nature Reviews Genetics 5 (AUG04) 509-521 évoquent également le rôle de Fgf9 dans la localisation nucléaire de Sox9 ainsi que sur son rôle dans la prolifération des cellules pré-Sertoli et se penchent sur les aspects plus généraux de cette différenciation. 63. La période préimplantaire de l'embryon des Mammifères est décisive, car c'est au cours de cette période que se déroule les modifications épigénétiques des génomes paternel et maternel. On sait que seul l'allèle maternel de H19 et l'allèle paternel de Igf2 sont exprimés. Le locus murin Igf2/H19 contient quatre sites de fixation pour la protéine CTCF (CCCTC-binding factor, il y en sept chez l'homme). Ces sites sont liés à des isolateurs (AM Fedoriw et al.; Science 303 (09JAN04) 238-240). Sur l'allèle maternel, ces sites bloquent l'action d'un enhancer en aval sur le promoteur d'Igf2 ce qui empêche l'expression de l'Igf2 maternel. Dans le cas de l'allèle paternel, les sites CTCF sont méthylés, de sorte que CTCF ne peut se fixer et l'enhancer est donc libre d'activer l'Igf2 paternel. La régulation de l'empreinte de H19 et Igf2 est régulée par des éléments communs. Elle dépend de séquences aval de H19. RI Verona et al.; Genomics 84 (JUL04) 59-68, montrent que ce sont des séquences transcrites avec H19, dont l'"enhancer" endodermique de H19/Igf2 et des éléments d'un domaine de 4,2kb entre l'unité de transcription H19 et les enhancers, qui assurent l'empreinte d'Igf2. Mais les auteurs soulignent que d'autres facteurs (séquences ou organisation de la chromatine doivent intervenir, la solution complète reste donc à éclaircir). On avait déjà montré que l'empreinte de H19 peut être perdue durant la période préimplantaire dans certaines conditions de culture. MR Mann et al.; Development 131 (AUG04) 37273735 ont analysé cette perte durant une culture d'embryons préimplantaires. Environ 65% des blastocystes montrent une expression biparentale, et donc une perte de l'empreinte. Cette perte continue à se manifester dans les stades plus avancés de 9 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 l'embryogenèse. Les tissus placentaires (extraembryonnaires) montrent une activation de l'allèle normalement silencieux (paternel) de H19 ainsi que des gènes Ascl2, Snrpn, Peg1 et-3 et Xis, tandis que, dans l'embryon proprement dit, l'empreinte se manifeste. Voir D Lucifero et al. Human Molecular Genetics 13 (15APR04) 839-849. La perte de l'empreinte est associée avec une perte de la méthylation des séquences de régulation de l'empreinte de H19 et Snrpn. Les tissus dérivés du trophectoderme (donc extra-embryonnaires) sont donc incapables de rétablir l'empreinte génomique et doivent donc disposer de mécanismes de rétablissement moins robustes que l'embryon proprement dit. La Physiologie 64. Notch est un récepteur de surface ancien et conservé qui régule un très grand nombre de voies en aval. On vient de montrer qu'il gouverne la mémoire à long terme, au moins dans le cerveau de la Drosophile. X Ge et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06JUL04) 1017210176. L'établissement de la mémoire à long terme implique une régulation de l'expression génique mais les facteurs intervenant sont encore inconnus. Des chercheurs du CNRS à Gif montrent qu'une mutation dans le gène crammer (cer) entraîne un défaut dans cet établissement. Ce gène code un inhibiteur de la protéase à cystéine cathepsine. Ilest exrpimé dans le site de la mémoire olfactive de la mouche et les cellules gliales voisines. Sa surexpression dans les seules cellules gliales entraîne le défaut de mémoire. Chez les mouches normales l'expression de cer est transitoirement abaissée pendant l'apprentissage ce qui indique que la cathepsine est activée au cours des stades précoces de l'établissement. D Comas et al.; Nature 430 (22JUL04) 460-463. 65. L'horloge circadienne intervient dans la régulation de la synthèse du noyau hème par lbiais de la régulation de la synthèse de l'aminolevulinate synthase 1 qui est l'enzyme limitante dans cette synthèse. On vient de montrer qu'il existe une r égulation en retour. Le noyau hème (et plus généralement les porphyrines) régule l'expression des gènes mammaliens Period, mPer1 et mPer2 in vivo grâce à un mécanise impliquant le domaine neuronal PAS de NPAS2 et mPER2. K Kaasik et al.; Nature 430 (22JUL04) 467-471. 66. Le système nerveux sympathique joue un rôle dans la lipolyse et la production de leptine par les adipocytes. MR Peeraully et al.; American Journal of Physiology; Endocrinology & Metabolism 287 (AUG04) E331-399 montrent que l'expression du NGF (Nerve Growth Factor), une adipokine qui entretient les neurones sympathiques, est détectée dans tous les tissus adipeux blancs. Le TNF- étant le stimulateur le plus efficace. Ceci indique que le NGF est une protéine de la réponse inflammatoire des adipocytes. 67. Les récepteurs Toll-like sont connus pour leur rôle dans la réponse immunitaire innée. Ce n'est pas le seul. TLR-4 des cellules épithéliales pigmentées de la rétine participe à la transmission transmembranaire du signal en réponse au segment externe des photorécepteurs. AL Kindzelskii et al.; Journal of General Physiology 124 (AUG04) 139-149. Le système immunitaire 68. La mémoire immunologique est définie par la capacité d'un hôte à garder une mémoire moléculaire d'une agression antérieure donnée et à utiliser cette prédisposition pour répondre plus rapidement à une nouvelle agression. On discute toujours abondamment dans les cafeterias de la durée de cette prédisposition des cellules T. Dans le cas de la vaccine elle décline avec une demi vie de 8-15 ans, tandis que la réponse par anticorps circulants dure plus de 75 ans sans atténuation. Une revue dans cet exemple historique qui remonte à Jenner est parue avec MK Slifka; Current Opinion in Immunology 16 (AUG04) 443-450. 69. Une bonne protection par les cellules T CD8+ est un des objectif des vaccinations. Les cellules T CD8+ "mémoires" peuvent être divisées en souspopulations dénommées "mémoire centrale" (TCM) et "mémoire effectrice" (TEM) suivant leur phénotype (notamment les chimiokines produites) et la capacité à se rendre respectivement dans les ganglions lymphatiques (grâce à CD62L) ou les tissus non lymphoïdes. On sait, maintenant que ces cellules se différencient à partir de cellules effectrices "mémoire" qui donnent des cellules "mémoire 10 centrale" qui sont soigneusement entretenues. De plus les cellules T CD4+ pilotent la différenciation des cellules CD8+. Une revue sur les acquisitions récentes dans ce domaine est parue avec JK Northrop et al.; Current Opinion in Immunology 16 (AUG04) 451-455. Dans le cas des cellules T CD8+ mémoires, on sait que les interleukines IL-7 et IL-15 assurent la survie, tandis que IL-15 stimule la prolifération homéostatique qui entretient le stock. DC Lenz et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (22JUN04) 9357-9362 montrent que la prolifération des cellules T CD4+ "mémoire" est régulée par l'interleukine-7. IL-7 et IL-15 assurant les mêmes fonctions pour les cellules CD4+ tout se passe comme si la régulation de ces deux populations hétérogènes est similaire et dépende beaucoup plus de facteurs quantitatifs que qualitatifs. 70. ### On a longtemps cru que les agnathostomes (les lamproies) ne possèdent pas de système immunitaire adaptatif. Il n'en est rien, il est simplement différent de celui qu'on pouvait attendre. On trouvera dans l'article de Z Pancer et al.; Nature Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 430 (08JUL04) 174-180, commenté par MF Flajnik; p.157-158, des résultats intéressants dans ce domaine. Le système immunitaire innée est codé par des gènes déjà présents dans la lignée germinale, non remaniés (et donc à large spécificité basée sur des patrons communs aux pathogènes), contrairement à ce qui se passe dans le cas du système adaptatif beaucoup plus élaboré. Pancer et al. ont découverts des protéines à répétitions riches en leucine (LRRs), qu'on trouve dans le système immunitaire inné, ainsi que dans des systèmes de défense des invertébrés et des plantes. Ils montrent que ces gènes sont surexprimés dans des lymphocytes stimulés par un antigène. Ils ont surtout découvert que c'est une famille très riche en gènes avec une grande variabilité de leurs cassettes de répétitions LRRs. Ils les ont dénommés "variable lymphocyte receptors" ou VLRs. Des cassettes LRR invariantes sont présentes aux extrémités de chaque clone dérivé des ESTs avec, interposées, des cassettes variables. Les cassettes invariantes sont codées par des gènes simple copie proches les uns des autres dans les cellules non lymphocytaires. Les LRRs variables interposées sont intégrées ultérieurement, et on retrouve une structure qui fait penser à la sélection clonale du système adaptatif et à une recombinaison de type RAG. On a donc des indications d'un système qui a été fonctionnellement remplacé par le système adpatatif, comme celui que nous connaissons chez les vertébrés à mâchoires mais a peut être subsisté sous une forme que nous n'avons pas reconnue, et on en a des indications chez les Echninodermes et les Mollusques, pourquoi pas chez nous. 71. ### C'est encore chez la lamproie que l'on retrouve l'origine de la voie classique du complément qui est un des éléments du système de l'immunité adaptative. La voie des lectines est l'équivalent de la voie classique dans l'immunité innée sur le plan des composants. Les deux voies sont amorcées par des complexes faisant intervenir des protéines type collagène et de protéases à sérine de la famille des protéases associées à des lectines se liant au mannose (MASP)/C1r/C1s. On a supposé que la voie classique du complément a conservé le mécanisme d'activation de la voie des lectines après sa divergence de la première. Ces deux voies existent à la fois chez les poissons cartilagineux et les urochordés (ascidies). M Matsushita et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06JUL04) 10127-10131 montre que l'orthologue, chez la lamproie, du composant C1q du complément des mammifères se comporte comme une lectine liant les seules GlcNAc. C1q, est un élément du premier composant (collagéneux) impliqué dans la reconnaissance des immunoglobulines dans la voie classique du complément. 72. Les chercheurs d'Hybrigenics et de l'Institut Pasteur (dont la firme est issue), E Real et al.; Journal of Virology 78, n°14 (JUL04) 7410-7417 décrivent une stratégie de lutte antivirale basée sur des copies de peptides actifs sur une réplication virale (ici celle du virus rabique). Ces peptides sont contraints dans leur conformation (coactamères) en se basant sur les peptides actifs intervenant dans la réplication du virus. C'est la phosphoprotéine P qui a été choisie comme substrat reconnu par ces peptides. Elle interagit, en effet, avec la protéine N de nucléocapside et l'ARN polymérase ARA-dépendante L. P se lie également à la dynéine LC8 imlmpliquée dans le transport rétrograde. Cela pourrait intervenir dans une thérapie post-exposition à la rage, mais le principe est beaucoup plus général et servir condtre d'autres virus et d'autres cibles. 73. Les protéines Mx constituent une famille de GTPases de type dynamine, induites par les interférons qui ont des effets antiviraux puissants, en particulier contre les virus à ARN simple brin des mammifères et du poulet, où elles inhibent la première phase de la transcription du génome. OG Engelhardt et al.; Journal of General Virology 85 (AUG04) 2315-2326. Chez les poissons les interférons inhibent la réplication du virus de la nécrose pancréatique infectieuse (IPNV). On vient de montrer que la protéine Mx1 du saumon atlantique est bien responsable de l'activité antivirale. Il s'agit, dans ce cas, d'un virus à ARN double brin. R Larsen et al.; Journal of Virology 78, n°15 (AUG04) 7938-7944. MC King et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (15JUN04) 8957-8962 montrent qu'il est possible d'inhiber l'importation nucléaire de MxB humaine qui est de la même famille que MxA, mais n'a pas d'activité antivirale, grâce à une mutation neutralisant l'activité GTPase qui bloque le déroulement du cycle cellulaire. Ce rôle dans le trafic nucléocytoplasmique est probablement la cause de l'activité antivirale d'autres protéines de la famille. Les Vaccins 74. Les vaccins ADN, c'est-à-dire basés sur l'expression d'antigènes viraux séparés ou regroupés par un ADN vecteur dans les cellules de l'hôte ont eu une grande vogue dans les années 90s malgré les doutes émis, vu la très faible probabilité que cela puisse marcher. Puis sont venus une série de désillusions. Les effets mirifiques sur les rongeurs se sont révélés très décevants sur les primates. Il faut réaliser que l'effet immunostimulant est essentiel pour un vaccin, mais est également considéré comme néfaste dans les essais de sécurité. On doit donc réaliser des compromis. On a donc mieux ciblé les vecteurs vers les cellules immunocompétentes, notamment les cellules dendritiques de la peau et du muscle. On leur a adjoint des gènes de cytokines favorables, ce qui permet de diminuer les doses. Enfin, et surtout, on a combiné une vaccination par injection d'ADN qui n'a, certes pas un effet foudroyant, mais amorce la réponse, complétée par des rappels avec des vecteurs viraux recombinants l'avantage de s'exprimer beaucoup plus sûrement, mais ne peuvent être utilisés deux fois (pour le rappel) à cause de la réaction contre le vecteur. C'est d'ailleurs cette stratégie qui explique le rebond actuel malgré les 11 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 risques supplémentaires apportés par l'utilisation d'un vecteur viral. Les vaccins ADN n'ont jusqu'à présent donner lieu à aucun accident aux cours des essais nombreux (mais le plus souvent infructueux). De plus, on peut en préparer, en cas d'urgence, très rapidement contre un nouveau pathogène comme le virus West Nile et le virus du SARS. IL faut deux à trois ans pour accéder au même stade des essais cliniques pour un vaccin traditionnel. Les risques d'intégration dans l'ADN chromosomique sont impossibles à vérifier chez l'homme mais chez un animal ils sont 3000 fois inférieur à ceux des mutations. Un vaccin de ce type contre le virus West Nile et pour les chevaux produit par Fort Dodge Animal Health (une filiale de Wyeth) est, cependant, sur le point d'être enregistré. Un vaccin de ce type contre le même virus a été essayé au Zoo de Los Angeles pour protéger les condors du zoo contre ce virus. Pour l'instant on n'a pas cherché à vérifier l'efficacité contre ce virus qui n'a pas encore atteint cette région, mais au cas où… Ce vaccin n'a pas une carrière garantie car il existe d'autres vaccins plus conventionnels contre ce virus envahissant, dont un par la même firme basé, très classiquement, sur la protéine de capside exprimé par le virus canaripox dénommé West Nile Innovator™. Les flavivirus comme le West Nile (avec la fièvre jaune, la dengue , etc…) sembleraient être de bonnes cibles pour ces vaccins. On devrait pouvoir regrouper plusieurs sérotypes dans une seule injection. C'est ce qu'a réalisé Maxygen avec ses techniques de recombinaisons particulières. K Powell; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 799-801. L'auteur donne la liste des institutions et firmes qui avancent dans ce domaine. Sur le plan plus général de l'immunité contre ce virus on peut consulter T Wang et al.; Current Opinion in Immunology 16 (AUG04) 519523. Les Pathogènes 75. Des polémiques sur la transparence ou non du gouvernement chinois sur la prolifération du virus de la grippe H5N1 du poulet en Chine. Sa présence, annoncée à grand fracas, chez le porc fait qui, s'il se confirmait, serait grave car le porc possède à la fois les récepteurs aviaires et humains du virus de la grippe, n'empêche pas ses chercheurs de publier des résultats de leurs recherches en chinois que les américains ignorent (malgré leurs possibilités), mais aussi en américain (ce qui est peu excusable, mais on connaît). Ainsi des chercheurs de Harbin décrivent l'évolution de ce virus chez les canards depuis le milieu des années 80s. H Chen et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (13JUL04) 10452- 10457. Ils montrent que les virus isolés de canards apparemment sains sont devenus de plus en plus virulents pour les mammifères entre 1999 et 2002. Vingt et un de ces isolats sont tous antigéniquement voisins de A/Goose/Guangdong/1/96 ou Gs/Gd (H5N1) qui a été la source de l'épidémie de 1997 de Hong Kong. Tous sont fortement pathogènes pour le poulet. Ce sont des virus issus de réarrangements associant l'hémaglutinine A/Goose/Guangdong/1/96 à des gènes d'autres virus eurasiatiques qui leur permet d'infecter des souris. KS Li et al.; Nature 430 (08JUL04) 209-213 (un groupe de chercheurs de tout le sud-est asiatique et de Memphis, Tennessee) s'intéressent aux virus isolés, lors des multiples épidémies caractérisées à la fin de l'année dernière et au début de cette année, dans les élevages de ces pays et qui ont causé mort d'homme en Thaïlande et au Vietnam. Ils se sont intéressés aux réarrangements globaux du génome provoquant des sauts évolutifs, mais également aux mutations portées par ces segments résultant d'une pression de sélection sur les souches virales. Ils s'intéressent, de plus, aux modifications probables des fonctions induites par 12 les mutations. Cet article est particulièrement complet et intéressant. Les auteurs confirment les réarrangements qui ont permis la constitution du génotype Z de l'épidémie de Hong Kong en 1997 et des épidémies subséquentes de 2001 et 2002. Les auteurs confirment également le danger des infections inapparentes des canards et la diffusion du virus dans toute la région qui le rend pratiquement non éradicable. Ils identifient les réarrangements introduisant de nouvelles protéines internes du virus comme provenant des génotypes A, B, C, D, E et X0. La surveillance des marchés de volailles durant la période d'étude indique un pic de contamination lorsque les températures moyennes sont au dessous de 20°. Au début, c'est surtout chez les oiseaux aquatiques que les infections ont été constatées puis, à partir de 2001, le virus est apparu de plus en plus fréquemment chez les volailles terrestres, tout en restant prédominant chez les canards. A partir de 2002, huit nouveaux génotypes sont apparus H5N1 V, W, X1, X2, X3, Y, Z et Z+). Les génotypes A, C, D et E, et leur précurseur Gs/Gd ont disparu. Actuellement neuf génotypes au moins sont en circulation en Chine du Sud. Tous sauf Gs/Gd et X0–X3 portent une délétion de cinq acides aminés ( aa 80–84) dans la protéine NS1. Les virus isolés à partir de 2002 , sauf B, W et Z+, présentent une délétion de 20aa dans la tige de la neuraminidase NA (aa49–68). Il semble que cette délétion soit à l'origine de l'adaptation aux volailles terrestres. Depuis Janvier 2002, le génotype Z, possédant les deux délétions dans NA et NS1 est devenu la souche dominante en Chine du Sud. En Février 2003 des cas humains de grippe H5N1 ont été diagnostiqués, les premiers depuis 1997 (A/HK/212/03 et A/HK/213/03). Ces souches présentent la constellation des gènes du génotype Z, mais sans la délétion dans Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 NA, d'où la désignation de Z+. Sur 62 isolats de 2003, 60 sont de ce type. Tous les isolats des épidémies déclarées fin 2003-début 2004 en Indonésie, Thaïlande et Vietnam sont de ce type. Les virus Z isolés en Indonésie sont un peu à part et apparentés à ceux du Yunnan. Des échanges bidirectionnels ont permis l'apparition de nouvelles souches H9N2 et un mécanisme similaire pourrait donner prochainement de nouveaux H5N1. Il est remarquable que, depuis son émergence en 2002, le génotype Z ait pu, si rapidement, remplacer les génotypes A–E, X et Y chez les volailles aquatiques et terrestres dans la région. L'examen des substitutions silencieuses ou non dans les gènes des protéines internes du virus (sans HA et NA pour lesquels l'immunogénicité est importante) montre que les mutations dans chacun des segments du génome réarrangé ont leur importance. Ces mutations confèrent clairement un avantage significatif aux nouveaux types de virus. Le gène M2 a été soumis à une pression de sélection forte en 20022003, mais plus faible après. Les gènes NS1 et NS2, acquis fin 2000, ont également subi une pression de sélection notable. Ces dernières données sont intéressantes, car elles prouvent que l'adaptation du génotype Z au poulet n'est pas achevée. La résistance à l'amantadine, l'un des inhibiteurs utilisés pour lutter contre les cas humains, est liée à la présence de l'Asp31 de M2. Elle est présente dans tous les génotypes Z de Thaïlande et du Vietnam, mais seulement dans un des six virus isolés en Indonésie en 2004. Asp31 a également été observée dans certains génotypes B, Y et Z+. Cette distribution a donc été acquise de façon indépendante plutôt que par dérivation d'un unique gène M2. Les substitutions Ser64Ala et Glu66Ala dans M2 ont également été observées chez les génotypes Z et Z+ chez des souche aviaires très pathogènes à Hong Kong en Décembre 2002, et des virus humains à Hong Kong en Février 2003, ainsi qu'en Thaïlande et au Vietnam en 2003–2004. Les autres génotypes Z, dont ceux isolés en Indonésie et en Chine en 2003– 2004, conservent la Ser64 de la protéine M2. Cette sérine est le site prédominant de phosphorylation de la protéine M2. La mutation Ser64Ala ne modifie, cependant, pas de façon claire le phénotype ni les fonctions de M2. Le glutamate 66 n'a pas de fonction connue. . Les modifications de l'hémaglutinine HA n'ont pas donné de renseignements clairs concernant la transmission à l'homme. Il semble cependant que les HAs de la plupart des génotypes Z isolé depuis la fin de 2002 à Hong Kong, et deux des six isolats d'Indonésie, de tous les isolats de Thaïlande, Vietnam et du Yunnan fin 2003 et début 2004 aient acquis un nouveau site de glycosylation aux positions 154–156. Ce site est adjacent au site de fixation du récepteur cellulaire et aux sites antigéniques de la pointe globuleuse de la HA de H5. Il pourrait modifier la reconnaisance cellulaire et permettre une évasion immunitaire. La lysine 627 de la protéine PB2 est associée à une plus grande virulence du virus H5N1 pour la souris et du virus H7N7 pour l'homme. Trois des quatre virus H5N1 humains isolés au Vietnam présentent cette mutation, mais pas le seul virus humain thailandais. Parmi les isolats récents aucun ne porte de glutamate 92 dans NS1 qui est associé à une virulence accrue pour le porc. La dissémination de ce virus est liée à des oiseaux migrateurs, car les génotypes Z ont été isolés d'un certain nombre de ces oiseaux (Egrette Egretta garzetta), hérons Ardea cinerea, mouette Larus ridibundus, un pigeon et des moineux Passer montanus, ainsi qu'un faucon pélerin Falco peregrinus. Pour l'instant le nombre de cas humain est très restreint, vue la population qui y est exposée. Mais le virus est maintenant endémique dans toute la volaille locale. De plus les virus humains contemporains H3N2 sont endémiques chez les porcs du sud de la Chine, et peuvent facilement se réarranger avec les H5N1 dans cet hôte intermédiaire entre volailles et humains. 77. Les parvovirus sont les virus ADN ayant les plus petits génomes, de l'ordre de 5 kb. On en trouve quatre sous familles dont trois infectent les Vertébrés Parvovirus, Erythrovirus et Dependovirus, plus les Densovirus, infectant les invertébrés. Les Parvovirus et Erythrovirus sont autonomes pour leur réplication. Les dépendovirus (les Adéno-Associated Virus ou AAV) dépendent, eux, des adénovirus ou des herpèsvirus pour leur réplication. Une mini-revue de M Vihinen-Ranta et al.; Journal of Virology 78, n°13 (JUL04) 6709-6714 est consacrée aux infections par les Parvovirus et AAVs. Elle analyse les étapes successives du cycle viral. Comme pour la plupart des virus non enveloppés, l'entrée dans la cellule est mal connue. Les AAV-2 et AAV-3 utilisent des héparane sulfate comme récepteurs à faible affinité. Mais l'AAV-2 reste infectieux pour des cellules dépourvues de ces récepteurs. D'autres récepteurs potentiels de l'AAV-2 sont l'intégrine V5 et le récepteur du FGF (Fibroblast Growth Factor). AAV-4 et AAV-5 se lient aux acides sialiques. AAV-4 se lie à l'acide sialique 2-3, tandis que l'AAV-5 se lie à la fois aux acides sialiques 2-3- et 2-6, etc… Les AAVs sont donc très éclectiques. Le parvovirus B19 humain se réplique uniquement dans lignée erythroïde grâce à un récepteur globoside (antigène P). Mais lui aussi doit posséder des récepteurs alternatifs. Et cela est vrai pour tous ces virus, de plus la fixation du virion ne signifie pas que l'infection peut se dérouler normalement. 78. Le West Nile Virus (WNV) est préoccupant. BL Fredericksen et al.; Journal of Virology 78, n°14 (JUL04) 7737-7747, analysent les mécanismes de lutte contre ce virus et comment ce dernier les contourne. Les auteurs montrent que la cellule utilise l'interféron et les gènes induits, au cours de la phase tardive, par cette cytokine. Ce différé est dû au fait qu'IRF-3 (Interferon Regulatory Factor 3, (voir le Bulletin d'Août §66). 13 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 L'activation de la voie IRF-3 n'est cependant pas suffisante pour bloquer la réplication de virus, mais limite la diffusion du virus. 79. Des chercheurs suisses montrent qu'il existe une transmission naturelle dans les deux sens des lentivirus de petits ruminants (comme celui de l'arthrite-encéphalite caprine ou le Maedi-Visna) entre la chèvre et le mouton. C Shah et al.; Journal of Virology 78, n°14 (JUL04) 7518-7522. Ce sont des causes d'infections inflammatoires persistantes. Leur transmission peut avoir lieu par contact prolongé entre adultes mais également via le lait entre la mère et les petits. Le transfert se manifeste dans les séquences provirales (intégrées) du virus au niveau des gènes gag et pol. 80. Francisella tularensis, un des agents potentiels du bioterrorisme, car très infectieux, est une bactérie intracellulaire, donc difficile d'accès. On connaît quatre sous-espèces qui diffèrent par leurs écologies différentes, leur distribution géographique ainsi que par leur virulence. Pour essayer de trouver des traces génomiques de cette différence entre les sous-espèces américaines, MM Samrakandi et al.; FEMS Microbiology Letters 237 (01AUG04) 9-17 ont utilisé un réseau basé sur une bibliothèque shotgun de la souche de référence Francisella tularensis subspecies tularensis. Les auteurs ont détecté 13 segments contigus différents qui manquent spécifiquement chez toutes les souches de la sous-espèce Francisella tularensis subspecies holarctica analysées. Ceci est lié à des évènements de transposition. La comparaison de la souche vaccinante vivante dérivant de cette souche montre également trois délétions propres à ce vaccin. 81. ### La paratuberculose bovine, une entérite granulomateuse fatale, est due à la bactérie intracellulaire facultative Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis. Cette bactérie peut également s'attaquer aux monogastriques (volailles et porcs) et pourraient être en cause dans la maladie de Crohn toujours aussi énigmatique. Elle réside dans le phagosome ou les endosomes "jeunes" des macrophages, tout particulièrement ceux associées aux plaques de Peyer de l'intestin. Elle pénètre par les cellules M intestinales, à la surface desquelles elle reconnaît certaines protéines. L'infection persiste pendant plusieurs années notamment au niveau de la valvule iléo-cæcal et les ganglions lymphatiques voisins subissent une hyperplasie. Une revue sur cette bactérie pathogène comparant son infection avec celle d'autres mycobactéries vient de paraître. PM Coussens et al.; Infection & Immunity 72 (JUN04) 3089-3096. Les auteurs décrivent un modèle qu'ils considèrent comme plausible de l'infection. L'essentiel de la revue porte sur le comportement du système immunitaire qui semble central dans la pathologie. 82. Dans l'intestin, les nodules lymphoïdes, qu'ils soient dispersés ou agrégés en plaques de Peyer, sont des sites où la reconnaissance des antigènes de la 14 lumière intestinale et où la réponse immunitaire s'amorcent. Les cellules M de l'épithélium couvrant ces nodules sont spécialement différenciés pour capturer et transporter les antigènes et notamment les bactéries elles-mêmes à travers la barrière épithéliale. Les plaques de Peyer du tractus intestinal des autres mammifères et le jéjunum des ruminants, sont des organes lymphoïdes secondaires où des réponses immunitaires ont lieu, mais pas une différenciation, tandis que les plaques de Peyer continues de l'iléon des ruminants sont de vrais organes lymphoïdes primaires où le développement des cellules B a lieu. La fixation et l'incorporation de Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis dans l'intestin a été analysées par une autre équipe. TE Secott et al.; .Infection and Immunity 72 (JUL04) 3724-3732. Dans les cellules épithéliales en culture, la FAP-P (Fibronectin Attachment Protein homologue Protein) permet à M. avium subsp. paratuberculosis l'invasion des plaques de Peyer via les cellules M de l'iléon distal qui, contrairement aux autres cellules intestinales, expriment des intégrines sur leur face apicale. Beaucoup de bactéries Gram+ expriment des protéines de surface appelées adhésines. Celles-ci reconnaissent différents composants de la matrice extracellulaire tout particulièrement la fibronectine. Cette protéine multifonctionnelle circulante peut se lier, à la fois, aux cellules et aux bactéries, permettant ainsi l'adhérence des bactéries. Ses interactions avec les intégrines déclenche, en sus, des signaux intracellulaires pouvant faciliter la pénétration. C'est ce qui se passe pour M.avium subsp. paratuberculosis au niveau des cellules M de la partie distale de l'iléon du veau. 83. La peste est causée Yersinia pestis qui partage avec Y.enterocolitica et Y.pseudotuberculosis un plasmide de 70 kb porteur des gènes de protéines de virulence sécrétées (Yops, voir le §84), de régulation et de sécrétion (LcrV). La bactérie est représentée par plusieurs biovars : antiqua, mediaevalis et orientalis. Elles dérivent, respectivement, des pandémies de Justinien (5° et 6° siècle), de la peste noire du 13° au 16°siècle) et de la peste moderne (depuis 1870). On les distingue par leurs capacités à fermenter le glycérol et la réduction des nitrates. Deux de ces biovars ont été séquencés : CO92 (biovar orientalis) et KIM (biovar mediaevalis). Le biovar antiqua est probablement un résident d'Afrique et descend de la pandémie de Justinien. Le biovar mediaevalis est issu d'Asie centrale et dérive de l'agent de la peste noire, tandis que le biovar le plus récent, orientalis, est originaire de la Chine du sud. Il n'est donc pas étonnant que les militaires chinois s'intéressent à ces souches. Ils viennent de caractériser moléculairement un nouveau biovar, appelé microtus car ce rongeur en est le vecteur. D Zhou et al.; Journal of Bacteriology 186,n°15 (AUG04) 5147-5152. Le même groupe, D Zhou et al.; p. 5138-5146, a caractérisé la microévolution de Yersinia pestis en liaison avec l'adaptation à des niches particulières en utilisant des microréseaux. Ils constatent une dynamique non négligeable, malgré la persistance très longue de ces souches, dont on peut retracer l'histoire sur plusieurs siècles. Il semble que Y.pestis ait dérivé Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 de Yersinia pseudotuberculosis en un pathogène mortel. Si les transmissions horizontales de gènes semblent avoir eu fréquemment lieu provoquant une ségrégation spectaculaire de biovars et genomovars, Y.pestis semble avoir surtout subi des pertes de segments de son ADN. Leurs données indiquent que le biovar moderne (orientalis) est issu de la province du Yunnan et qu'il ait dérivé du biovar antiqua, plutôt que de mediaevalis. 85. La peste bubonique est transmise par les puces. On vient de montrer qu'un nématode comme Caenorhabditis elegans en est un vecteur involontaire dans le sol; quand il traverse un parterre de ces bactéries il est littéralement englué par elles grâce à sa constitution en biofilm. C'est également le cas pour les puces dont elle englue tout le tube digestif, l'empêchant de se nourrir. L Tan et al.; Journal of Bacteriology 186,n°15 (AUG04) 50875092. 87. ER Mulcahy et al.; Journal of Virology 78, n°13 (JUL04) 6792-6798 montrent que la transmission du prion au muscle à partir du système nerveux a bien lieu au niveau de la synapse neuromusculaire. Ils l'ont montré dans des muscles squelettiques et au niveau des papilles de la langue pour la souche HY du prion de l'encéphalite transmissible du vison. Il y aurait là une nouvelle voie de dissémination. En ce qui concerne les muscles, le consensus actuel est que le risque est, dans ce cas, limité, mais des personnes comme moi-même qui apprécie la langue de bœuf ont été exposées au prion (il n'y a qu'à attendre la confirmation). 88. Des anticorps monoclonaux contre des épitopes comprenant les acides aminés 96-104 et 133158 de PrPC inhibent fortement la conversion de PrPC en PrPSC, probablement en empêchant la formation de l'hétérodimère entre les deux protéines. Ces épitopes ont donc la conformation adéquate pour assurer cette dimérisation et, si on les transplante dans une protéine adéquate comme un anticorps, on devrait pouvoir détecter les molécules de PrP SC. Des chercheurs du Scripps Research Institute ont vérifié cette hypothèse en utilisant les séquences de PrP C des acides aminés 89-112 ou 136-158 pour remplacer la partie hypervariable (CDR-3) de la chaîne lourde d'un anticorps contre autre chose. Les animaux transgéniques 89. Une revue sur les transgenèses du bétail est parue dans AJ Thomson et al.; Molecular Biotechnology 27 (JUL04) 231-244. Les auteurs appartiennent au Roslin Institute. Les Productions Microbiennes 90. La stabilisation de vecteurs plasmidiques sans utilisation d'une sélection par antibiotiques. Des chercheurs suédois décrivent une sélection évitant la réprobation engendrée par cette pratique. Le plasmide vecteur exprime le petit gène infA codant le facteur d'initiation de la traduction IF1. On exprime les vecteurs dans des Escherichia coli dépourvues de ce gène, ce qui assure la disparition des cellules ayant perdu le vecteur sans avoir à utiliser d'antibiotiques de sélection et de gènes de résistance. P Hagg et al.; Journal of Biotechnology 111 (01JUL04) 17-30. 91.### On trouvera dans MR Parsek et al.; Journal of Bacteriology 186, n°14 (JUL04) 4427-4440, un compte-rendu du colloque sur les biofilms qui s'est tenu du 1° au 6 Novembre 2003 à Victoria au Canada. C'est il y a une dizaine d'années qu'on a pris en compte le fait que les bactéries ne vivent pas généralement en suspension mais fixées à des supports qui leur évite d'être emportées loin de leur casse-croûte. Une des difficultés dans ces études est l'absence de standardisation des méthodes. De plus ces études font appel à des disciplines parfois éloignées de la microbiologie proprement dite comme la physicochimie des surfaces, les sciences de l'ingénieur, etc… Une des caractéristiques marquantes des biofilms est que les bactéries qui les forment sont sensiblement plus résistantes aux antimicrobiens au sens large que les mêmes sous la forme planktonique. On admet que c'est une combinaison de trois facteurs qui intervient, avec les problèmes de pénétration des agents, les modifications du métabolisme bactérien et la variabilité génétique au sein de ces populations. La pénétration des agents est variable, car elle est liée à la nature des exopolysaccharides qui constituent la matrice extracellulaire. Ainsi, dans les films de Pseudomonas aeruginosa, les fluoroquinolones pénètrent bien, tandis que les aminoglycosides sont piégés par les alginates et divers glucanes. Cette matrice n'est pas forcément un obstacle mécanique pour les défenses immunitaires, car les leucocytes humains pénètrent dans les biofilms de P.aeruginosa, Staphylococcus aureus et Staphylococcus epidermidis, et des P.aeruginosa dépourvus du système de quorum sensing sont plus sensibles aux polynucléaires neutrophiles et des Pantoea stewarti dans ce cas sont relativement inaptes à former un biofilm. Par ailleurs et inversement, un traitement de P aeruginosa PA14 planctoniques par des antibiotiques semble sélectionner des variants hyperformateurs de biofilms. E Drenkard; Microbes & Infections 5, n°13 (NOV03) 1213-1219. Ceci semble lié à l'intervention d'un régulateur de transcription PvrR qui assure le basculement de ce phénotype vers le type normal. Le couplage entre résistances contre les antibiotiques et formation de biofilms doit être examiné avec prudence car on a montré, que le gène plasmidique TEM-1 codant une lactamase à large spectre, a un effet inhibiteur sur la formation de biofilms. Et cela est valable pour d'autres gènes de résistance à l'ampicilline et n'ets pas dû à un hasard. Le métabolisme dans un biofilm est probablement différent de celui à l'état planctonique du fait des gradient nutritionnels, de sorte que les cellules les plus profondes sont à l'état stationnaire, ce qui les rend, en passant, moins sensibles à certains antibiotiques. La limitation en oxygène dans les biofilms joue 15 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 également un rôle dans la résistance à divers antibiotiques comme tobramycine (un aminoglucoside), ciprofloxacine (une fluoroquinolone), carbenicilline, ceftazidime, chloramphénicol ou tétracycline (G Borriello et al.; Antimicrobial agents & Chemotherapy 48 (JUL04) 2659-2664). Même la nature des polysaccharides constituant la matrice est encore sujette à controverse. Chez des souches non mucoïdes de P.aeruginosa ont pensait qu'elle est constituée d'alginate (un polysaccharide formé d'acides mannuronique et guluronique). En fait, on a découvert que la production d'un autre polysaccharide formé de mannose et de glucose est codée par un locus particulier appelé psl. Cette multiplicité des polysaccharides est probablement un fait général. L'architecture du biofilm de P.aeruginosa, avec ses champignons caractéristiques, indique que la tige et le chapeau ne sont pas constitués des mêmes populations (très belle figure). En effet un mélange à parties égales de mutants non mobiles et de bactéries normales entraîne la formation des pieds par les mutants non mobiles, tandis que les chapeaux sont constitués par les bactéries normales (M Klausen et al.; Molecular Microbiology 50 (OCT03) 61-68). Par ailleurs, chez la souche modèle PAO1 de cette bactérie, le bactériophage PF1-like finit par tuer les plus vieilles cellules à l'intérieur du biofilm (JS Webb et al.; Journal of Bacteriology 185, n°15 (AUG03) 4585–4592. C'est également le cas pour Serratia marcescens, Vibrio cholerae et Pseudoalteromonas tunicata. (A Mai-Prochnow et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUN04) 3232-3228). Les effets de l'inhibition du quorum sensing continuent à être explorés. L'outil souvent utilisé est l'inhibiteur furanone halogénée de l'algue rouge Delisea pulchra (voir le Bulletin d'Août 2003 §35).. Même si on n'a pas le droit (il parait!!!) de parler de différenciation dans un biofilm, il n'en reste pas moins qu'il existe une diversification phénotypique qui est, probablement, une réponse particulière aux diverses niches dans un biofilm. Une observation intéressante est la répression, dans les biofilms, de tous les îlots de pathogénicité de Staphylococcus aureus sauf un, ce qui pourrait correspondre à la transition de l'invasion à la chronicité. D'autres travaux, chez Escherichia coli, montrent que l'expression de gènes de stress extracytoplasmique, comme l'opéron psp ou des éléments des voies cpx et rpoE sont des marqueurs de l'état "biofilm". Les interactions interspécifiques dans les biofilms composites, qui sont fréquents, ont été étudiées chez des bactéries pathogènes comme P. aeruginosa et Burkholderia cepacia dans un même biofilm. Curieusement, alors que P.aeruginosa soit capable de répondre à une addition du signal de B.cepacia (octanoyl-homosérine lactone) on n'a pas de trace d'une réponse en co-culture dans un biofilm. Cela doit être comme pour les odeurs une habituation. Par ailleurs, l'amorce d'une symbiose de légumineuses avec des bactéries rhizobiennes comme Sinorhizobium meliloti implique l'intervention de plusieurs facteurs dans la colonisation des surfaces 16 abiotiques et don quelque chose qui ressemble à la formation d'un biofilms. 92. Les catalases Mn-dépendantes (pseudocatalases) thermostables sont industriellement intéressantes pour leurs capacités à éliminer le peroxyde d'hydrogène, par exemple dans le traitement des textiles pour éviter des problèmes de teinture ultérieurs ou dans le lait après stérilisation par le peroxyde. On a essayé de produire une telle enzyme en provenance de la bactérie hyperthermophile Thermus thermophilus dans l'hôte commode qu'est Escherichia coli. Mais si l'enzyme est produite elle n'est pas fonctionnelle alors que d'autres protéines thermostables le sont. Des chercheurs espagnols ont donc sur exprimé l'enzyme directement dans T. thermophilus HB8 grâce à un promoteur inductible par l'anoxie et les nitrates de la nitrate réductase respiratoire de la bactérie. A Hidalgo et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3839-3844. C'est donc un hôte alternatif pour l'expression de protéines de thermophiles que les mésophiles comme Escherichia coli ne savent pas fabriquer sous une forme fonctionnelle. Or quatre de ces catalases à Mn sur cinq sont des enzymes thermophiles issues des bactéries Thermus YS8-13, Thermus thermophilus, Thermoleophilum album et Pyrobaculum calidifontis (la cinquième est présente chez le mésophile Lactobacillus plantarum). Ceci dit, la production dans une bactérie mésophile est souvent préférable, car l'étape de la purification est facilitée par une dénaturation thermique des protéines de l'hôte. Mais la production dans des hôtes thermophile est probablement requise pour diverses raisons, dont la nécessité de chaperones pour assurer une conformation correcte et l'insertion de co-facteurs, par exemple. 93. Des chercheurs de Grignon ont caractérisé deux -1,6-mannosyltransférases de Yarrowia lipolytica et qui sont les homologues de Anp1p et Och1p de Saccharomyces cerevisiae qui viennent s'ajouter à YlMnn9p et participent à la N-glycosylation et à la stabilisation de la paroi. S Barnay-Verdier et al.; Microbiology 150 (JUL04) 2185-2195. 94. La production microbienne de mono- et diterpénoïdes peut être de grand intérêt sur le plan industriel. Leur production chez Escherichia coli, est limitée par la quantité de géranyle diphosphate (GPP) et géranylgéranyle diphosphate (GGPP), précurseurs du polyprényle diphosphate. Des chercheurs de Berkeley ont bâti des opérons artificiels codant trois enzymes clés de la voie de synthèse de ces précurseurs : 1-déoxy-d-xylulose-5-phosphate synthase, IPP isomérase d'Haematococcus pluvialis et l'un de deux variants de IspA, la farnésyle diphosphate synthase donnant soit du GPP ou du GGPP. Après avoir démontré que l'on fabrique alors assez de précurseurs, les auteurs ont incorporé soit une diterpène cyclase du ricin (Ricinus communis) et une ent-kaurène cyclase de Phaeosphaeria sp. L487 (un champignon phytopathogène) ou une monoterpène cyclase de l'épicéa (Picea abies). On peut ainsi Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 produire in vivo les diterpènes casbène, kaur-15-ène, kaur-16-ène et les monoterpènes -pinène, myrcène, sabinène, 3-carène, alpha-terpinène, limonène, betaphellandrène, et terpinolène. KK Reiling et al.; Biotechnology & Bioengineering 87 (20JUL04) 200212. 95. On trouvera, dans DJ Adams; Microbiology 150 (JUL04) 2029-2035, une revue sur les chitinases et glucanases pariétales des champignons et de la levure et la régulation de leurs productions. 96. Des chercheurs de Taiwan polymérisent l'hémoglobine, après pyridoxylation, avec la reuterine (3--hydroxypropionaldéhyde) de Lactobacillus reuteri, ce qui en fait un substitut potentiel du sang. YC Chen et al.; Biotechnology & Bioengineering 87 (05JUL04) 34-42. On peut le faire en pontant avec la glutaraldéhyde, mais le procédé est trop efficace et on n'arrive pas à bien contrôler la taille des polymères, ce qui fait que l'hémoglobine prend en gel. De plus la glutaraldéhyde résiduelle est quand même cytotoxique (justement du fait de son efficacité de pontage). Or la reuterine est également un agent de pontage, mais apparemment plus souple 97. G Wilharm et al.; BMC Microbiology 4 (12JUL04) 27 montrent que les Yersinia pathogènes disposent d'un système de transport de protéines sous leur conformation finale, contrairement à ce qui se passe pour le système III où l'aiguille d'injection a un diamètre intérieur 2-3 nm, ce qui suppose un déroulement de la protéine au cours du transport. Les Protéines et les Enzymes 98. Les désaturases jouent un grand rôle dans la nécessaire diversité des acides gras. Leurs spécificités (substrat et localisation de la double liaison induite) a évolué en parallèle avec des mutations au niveau du site actif. Mais une idée qui est assez récemment apparue est que cette spécificité dépend également du métabolisme ambiant, ajoutant un degré de souplesse et d'adaptation. Quand on transplante dans le cytoplasme la 16:07 désaturase FAD5 (ADS3) plastidiale d'Arabidopsis, c'est une désaturation 9 au lieu de 7 que l'on observe. Inversement, deux désaturases cytoplasmiques 16:0 9 (ADS1 et ADS2) transférées dans le chloroplaste, entraînent une désaturation passant de 9 à 7. Ces trois désaturases sont toutes 9 chez la levure, où les produits désaturés sont pour l'essentiel, greffés sur la phosphatidylcholine. La coexpression, chez la levure, de chacune des enzymes avec la monogalactosyldiacylglycérol (MGDG) synthase du concombre provoque une désaturation 7, les acides gras 16:17 s'accumulant spécifiquement dans les MGDG chloroplastiques. Le corps (head group) du lipide agît comme un basculeur moléculaire dans cette spécificité de site de désaturation. La spécificité de la FAD5 7 est liée au ciblage qui implique l'addition d'un peptide de transit à la 9 désaturase cytoplasmique dans ce but. C'est ce dernier, plutôt que des mutations dans le site actif des FADs en général qui est responsable de ces différences de comportement. Or le génome d'Arabidopsis montre qu'il existe 239 familles de protéines dont les membres peuvent avoir des localisations alternatives dans la cellule. Ceci suggère que cette souplesse est beaucoup plus générale qu'on ne l'admet. Une telle distribution d'enzymes mono- ou multifonctionnelles accroît donc les possibilités métaboliques sans gaspiller des séquences génomiques. I Heilmann et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (13JUL04) 10266-10271. 98.bis ### La difficulté pour des réactions enzymatiques nécessitant des cofacteurs n'est pas d'immobiliser ces complexes, mais de régénérer le cofacteur. Beaucoup d'oxydoréductases peuvent catalyser des productions industrielles comme la production de composés chiraux, d'amino-acides, de stéroïdes, etc… Mais il faut leur fournir leurs cofacteurs pyridine nucléotides (NAD ou NADP) en quantités stœchiométriques, ce qui, vu le prix de ces cofacteurs, est prohibitif. Si on peut réduire sensiblement cette fourniture on peut ouvrir des possibilités intéressantes. La régénération du NAD se fait, classiquement, via une formate déshydrogénase (cas de Degussa pour la production de L-tert-leucine qui est le seul procédé industriel actuel), et du NADP via une glucose déshydrogénase. On consultera avec profit la revue de WA van der Donk et al.; Current Opinion in Biotechnology 14 (AUG03) 421-426 analysée dans le Bulletin d'Octobre 2003 §98. 99. La cellobiohydrolase Cel48C de Paenibacillus sp. BP-23 est une enzyme ayant une activité limitée sur la plupart des substrats cellulosiques. Si on l'associe à d'autres endo- ou exocellulases bactériennes ont augmente significativement cette activité. Il peut s'agir de l'endoglucanase endogène Cel9B (codée par le gène voisin sur le chromosome) ou des cellulases Cel6A (endo-) et Cel6B (exo-) de Thermobifida fusca. Il y a donc synergie entre ces diverses enzymes. La synergie maximale est observée avec Cel9B et Cel48C de Paenibacillus BP-23, associées à l'exocellulase Cel6B de T.fusca. On peut regrouper tout cela dans une seule bactérie recombinante. MM Sanchez et al.; Biotechnology & Bioengineering 87 (20JUL04) 161-169. 100. L'hydroxytyrosol (3,4-dihydroxyphényléthanol) est un polyphénol naturel de l'olivier qui a la plus forte capacité de protection contre les radicaux libres de tous les composés anti-oxydants naturels. Il est vendu sous des marques différentes pour les aliments (jus de tomate, beurre, huiles végétales) ou les crèmes pour la peau. Des chercheurs italiens ont produit, avec une grande pureté, d'hydroxytyrosol à partir de feuilles d'olivier, en utilisant une -glycosidase hyperthermophile semi-purifiée immobilisée sur chitosane. R Briante et al.; Journal of Biotechnology 111 (01JUL04) 67-77. Cette -glucosidase permet de libérer l'aglycone de 17 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 , l'hydroxytyrosol 4--D-glucoside auquel il est couplé. On peut également l'utiliser sur les effluents de moulins à huile qui sont très polluants et contiennent de l'oleuropéine qui peut être convertie. Les polyphénols les plus abondants de l'huile d'olive sont, en effet, les aglycones non polaires oleuropéine et ligstroside et les molécules polaires hydroxytyrosol et tyrosol. Le procédé avait été décrit par le même groupe en tirant parti de la fixation du produit par le chitosane. R Briante et al.; Journal of Biotechnology 93 (14FEB02) 109-119. 101. Clostridium cellulovorans dégrade les parois végétales en utilisant des enzymes cellulolytiques contenues dans des cellulosomes, complétées par des enzymes ancillaires libres. Le cellulosome comporte un axe protéique non enzymatique constitué par la protéine CbpA (alias CipA) sur laquelle sont greffés les sous-unités catalytiques grâce à séquence dupliquée appelée domaine dockerine qui reconnaît le motif hydrophobe cohésine de CbpA. Il y a manifestement des synergies entre elles. Des chercheurs de Davis et de Kyoto ont analysé l'attaque de cellobiose, cellulose, pectines, xylanes, fibres des raffles de maïs seuls ou en mélange. L'induction de l'expression des deux types d'enzymes dépend fortement du substrat offert. Les enzymes du cellulosome en sont plus dépendantes. Ceci explique que l'induction est plus générale en présence de substrats mixtes (qui sont la condition naturelle). Comme d'habitude on a une différence nette entre cellulose (le polymère) et cellobiose (un disaccharide). SO Han et al.; Journal of Bacteriology 186,n°13 (JUL04) 4218-4227. Le fait que l'enzyme cellulosomique EngB a une forte homologie, dans sa partie N-terminale avec l'endoglucanase non-cellulosomique a facilité le suivi de l'expression jusqu'au stade protéine de ces diverses enzymes. 102. Les catéchols substitués, tout spécialement ceux substitués en 3 (3-méthoxycatéchol, méthoxyhydroquinone ou méthylhydroquinone) sont utilisés comme point de départ de synthèses de différents médicaments, mais sont difficiles et coûteux à produire car ils le sont avec un mauvais rendement et impliquent des opérations de blocage et déblocage successifs de fonctions. La toluène 4-monooxygénase non hème (T4MO) de Pseudomonas mendocina KR1 peut réaliser trois hydroxylations successives, et assurer la conversion du benzène en phénol, catéchol puis 1,2,3trihydroxybenzène. Ceci correspond à trois hydroxylations du cycle aromatique en des sites différents (régiospécifiques). Cette enzyme a, en fait, un spectre de substrats beaucoup plus étendu. Elle permet l'oxydation de l'o-crésol en 3-méthylcatéchol (91%) et méthylhydroquinone (9%), l'oxydation du m- 18 crésol et p-crésol en 4-méthylcatéchol (100%), ainsi que le o-méthoxyphénol en 4-méthoxyrésorcinol (87%), 3-méthoxycatéchol (11%) et méthoxyhydroquinone (2%). L'enzyme présente une structure quaternaire de type ()2. Y Tao et al.; Journal of Bacteriology 186,n°14 (JUL04) 4705-4713 ont travaillé la protéine aux alentours du site catalytique à fer, notamment Ileu100, Gly103 et Ala107 de la sous-unité de l'hydroxylase (TmoA). Ils se sont basés sur ce que l'on sait de la toluène o-monooxygénase apparentée de Burkholderia cepacia G4 et du mutant déjà connu Gly103Leu de T4MO pour modifier le spectre de substrat et l'efficacité sur o-crésol et ométhoxyphénol, car ce sont ceux dont les produits hydroxylés sont les plus intéressants. (Voir également le Bulletin d'Août §127 avec une publication du même groupe). Les auteurs montrent que le variant TmoA Gly103Ala/Ala107Ser donne à 98% du 3méthylcatéchol deux fois plus vite que l'enzyme de départ. Il produit du 3-méthoxycatéchol à 82% à partir de o-méthoxyphénol sept fois plus vite. Le mutant Gly103Ser/Ala107Thr produit à 92% de la méthylhydroquinone à partir d'o-crésol quatre fois plus vite. Gly103Ser produit quarante fois plus de méthoxyhydroquinone à partir d'o-méthoxyphénolet de la méthylhydroquinone (80%) à partir d'o-cresol. On peut donc facilement (??) orienter la régiospécificité de l'enzyme. De plus les résultats cités montre qu'on peut obtenir une enzyme orthohydroxylante (Gly103Ser/Ala107Gly). Le variant Gly103Ser/Ala107Thr convertit la totalité du toluène en p-crésol et c'est donc une très bonne enzyme parahydroxylante. Les hydroxyles des acides aminés Ser103, Ser107 et Thr107 influence la nature du substrat préféré par leurs liaisons hydrogènes. 103. ### Des chercheurs coréens ont caractérisé le gène d'une glucoamylase thermostable de l'archée hyperthermophile Sulfolobus solfataricus (ssg). MS Kim et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3933-3940. Exprimé chez Escherichia coli les propriétés de l'enzyme ont été établies. Elle est très thermostable et sa Topt est de 90° et son pHopt est dans la fourchette 5,5 à 6,0, c qui en fait une enzyme bien adaptée à la production de sirops de glucose à partir de l'amidon, évitant d'avoir à ajuster pH et température dans la chaîne des conversions. Elle a pour substrat préféré le maltotriose (celui qui résulte de l'activité des pullulanases). On a déjà cloné plusieurs -amylases très thermoactives à partir d'archées hyperthermophiles comme Sulfolobus, Pyrococcus, et Thermococcus, mais les glucoamylases sont très rares chez les archées. Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 L'Agroalimentaire 104. Les composants majeurs de l'arôme des fromages à pâte cuite dont le caillé est chauffé pendant un certain temps à 50° dérivent du catabolisme des acides aminés ramifiés (3méthylbutanal, acides isobutyrique, isovalérique et leur esters) de la méthionine (méthional, méthanethiol et diméthyl trisulfure) ainsi que de la phénylalanine (phénylacétaldéhyde et acide phénylacétique). Ainsi l'acide isobutyrique apporte la note douce et l'acide isovalérique la note forte au fromage, tandis que le 3méthylbutanal confère un arôme "malté" et l'acide phenylacétique et le phénylacétaldéhyde une note fruitée. Par contre le méthional et les composés dérivant du tryptophane comme l'indole, sont désagréables au dessus d'un certain seuil. Des chercheurs de l'INRA à Jouy, associés à Entremont, analysent les capacités des bactéries lactiques thermophiles utilisées dans ces fromages à convertir les acides aminés en arômes. S Helinck et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3855-3861. On sait que ces bactéries en sont capables, mais les voies cataboliques exactes de production ne sont pas vraiment connues. Les auteurs ont examiné les capacités de Lactobacillus delbrueckii subsp. lactis, Lactobacillus helveticus et Streptococcus thermophilus (qui sont les composants majeurs de la flore, en sus des propionibactéries de ces fromages) à produire ces arômes à partir de leucine, phénylalanine et méthionine à pH 5,5, celui de la maturation de ces fromages. Chez les trois bactéries, la voie catabolique commence par une transamination qui donne l'céto-acide correspondant. Ceci suppose la présence d'un -céto-acide accepteur du groupement amine comme l'-cétoglutarate (-KG). Seul S.thermophilus possède une glutamate déshydrogénase donnant de l'-KG à partir du glutamate, de sorte que c'est la seule bactérie des trois qui peut cataboliser ces acides aminés sans apport exogène d'-KG. Par contre et à cette condition la production des composés aromatiques comme acides, aldéhydes et alcools est plus variée avec les Lactobacillus. L. helveticus produit surtout des acides à partir de leucine et phénylalanine, tandis que L.delbrueckii subsp. lactis donne surtout des alcools et des aldéhydes. L.delbrueckii subsp. lactisutilise une cétoacides décarboxylase, donnant des aldéhydes qui sont ensuite oxydés ou réduits. Chez L. helveticus et S. thermophilusla production des acides est liée à l'activité d'une -céto-acide déshydrogénase donnant des acyle coenzymes A. 105. La RAPD-PCR a été utilisée par des chercheurs de Lodi pour analyser des starters lactiques commerciaux, et plus particulièremnt pour analyser leur évolution au cours du temps. Il y a effectivement une évolution d'une année sur l'autre dans la composition de ces starters. Il semble qu'il y ait eu une introduction volontaire mais aussi une évolution spontanée. Il n'est pas sûr que cette évolution ait un effet bénéfique sur la production des fromages. G Giraffa et al.; FEMS Microbiology Letters 237 (01AUG04) 133-138. 106. On estime que la fermentation du vin est amorcée par des levures dites apiculées comme Kloeckera et Hanseniaspora. Elles ne peuvent subsister que deux à trois jours et disparaissent ensuite du fait de l'accumulation d'éthanol qu'elles ne supportent pas, laissant la place aux Saccharomyces cerevisiae beaucoup plus tolérantes. Mais la persistance des levures initiales dépend de la température de fermentation de l'abondance de S.cerevisiae concurrentes et de la présence du SO2. Mais les levures comme Brettanomyces et Zygossacharomyces, polluants du vin sont aussi résistantes que S.cerevisiae. Cette résistance est liée à la capacité des levures à réorganiser les lipides de la membrane plasmique face au stress éthanolique. Des chercheurs portugais ont mesuré cette résistance chez Hanseniaspora guilliermondii, H. uvarum, Torulaspora delbrueckii, Debaryomyces hansenii après des "préparations" différentes (aérobiose, anaérobiose, nutrition lipidique, etc…) ainsi que l'incorporation de lipides et stérols dans les membranes. C Pina et al.; Food Microbiology 21 (AUG04) 439-447. Ils ont constaté que, dans les conditions utilisées, Hanseniaspora guilliermondii présente une tolérance à l'ethanol du même ordre que S.cerevisiae, et très différente de la levue apiculée voisine, H.uvarum. Un petit accroissement de la tolérance est observé pour H.uvarum et Torulaspora delbrueckii après une culture en aérobiose. La croissance de ces levures en présence d'ergostérol et d'une source d'acide oléique (Tween 80) n'a pas d'effet très notable, bien que ces composants soient incorporés dans la membrane. Debaryomyces hansenii n'est pas capable de les utiliser et ne montre aucune amélioration de la tolérance. L'oxygénation peut avoir, pour certaines des levures un effet favorable (voir le Bulletin d'Août §106), mais pas pour toutes. 107. Des chercheurs de Dijon décrivent, dans C Beltramo et al.; FEMS Microbiology Letters 236 (01JUL04) 53-60, un nouveau vecteur, pGID052, utilisable pour les transferts de gènes chez Oenococcus oeni. g est la bactérie responsable de la fermentation malo-lactique du vin. C'est une bactérie très réfractaire à toute transformation, mais le transfert conjugatif du plasmide pGID052 de Lactocccus lactis vers O.oeni est possible. Ce plasmide dérive du plasmide pORI19, et comporte l'origine de réplication oriT de pIP501 (qui permet le transfert dans O.oeni), les gènes de réplication d'un plasmide de Leuconostoc citreum. Le vecteur est stable à faible nombred'exemplaires. 109. ### On trouvera, par ailleurs, dans S Gouin; Trends in Food Science & Technology 15 (JULAUG04) 330–347, de Danisco, une revue sur les 19 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 technique de microencapsulation avec un évaluation des techniques existantes et des tendances dans le domaine beaucoup plus qu'une description des techniques elles-mêmes. C'est un moyen de délivrer les ingrédients de façon contrôlée, ce qui les rend plus efficaces à une dose donnée, et élargit leur spectre d'utilisation. Des additifs instables comme des vitamines, arômes et autres substances volatiles peuvent ainsi être plus ou moins stabilisés. L'une des exigences est le coût du procédé qui doit être maintenu le plus bas possible de l'ordre de 0,1 Euro par kg dans l'industrie alimentaire (c'est ce que tolère le consommateur final pour une amélioration technique pour une portion). Divers matériaux ont été proposés pour l'encapsulation et divers procédés de libération de l'additif mis au point, comme des changements de pH, les stress mécaniques, la température une hydrolyse enzymatique, la pression osmotique, etc… Mais, dans l'industrie alimentaire on ne peut utiliser n'importe quel emballage, car il va persister dans l'aliment traité. Le séchage par pulvérisation (spray drying) permet une encapsulation. Il a été utilisé dès les années 50s pour protéger les huiles, comme les huiles de poisson, contre l'oxydation et autres dégradations. C'est une technique simple et peu coûteuse, mais limitée dans la diversité de l'enrobage utilisable. On a essayé d'utiliser d'autres polysaccharides (alginates, carboxymethylcellulose, guar) ou des protéines (de lactoserum, de soja ou caséinates), mais ces matériaux ont un défaut majeur: ils sont très peu solubles dans l'eau et il faut utiliser beaucoup trop d'eau qu'il faut ensuite éliminer lors du spray drying. Très peu de nouveaux matériaux ont été proposés ces dernières années. On peut mentionner la mesquite gum de Prosopis juliflora, une Légumineuse halophile du Golfe du Mexique jusqu'au Vénézuela). Une autre proposition est d'utiliser les produits de la réaction de Maillard (le brun de la croûte du pain) qui est une réaction à haute température des protéines et de polysaccharides, qui constituent une protection contre l'oxydation. Un autre procédé est le "spray cooling/chilling". Il consiste à mélanger dans une matrice lipidiques des ingrédients hydrosolubles ("matrix" encapsulation) qui laisse une partie de l'ingrédient à la surface, mais permet une stabilisation thermique et un relargage plus ou moins différé, au moins pour la partie noyée dans la matrice. L'utilisation de disques rotatifs pour disperser l'émulsion ou la solution est actuellement en développement car elle ne revient pas plus cher que le spray drying et le débit est du même ordre. La microencapsulation par extrusion est uniquement utilisée pour les flaveurs instables et volatiles. Elle est réalisée dans une matrice d'un polysaccharide "vitreux" (non cristallin). L'avantage de cette technique réside dans la très bonne protection de l'ingrédient, même très oxydable comme les essences d'agrumes, sur des durées très longues (cinq ans contre quelques mois à l'état naturel). L'inconvénient de ce procédé ancien (milieu des années 50s) est la faible charge (environ 8%) des enrobats. En effet une charge plus forte conduit à des fuites et oxydations. A ce niveau le procédé n'est pas intéressant, car son coût d'utilisation est trop élevé et conduit, en sus, à une charge importante de l'aliment en substances d'enrobage et il faut adapter chaque enrobage à un usage donné.. On peut cependant monter à 40% de charge en utilisant des amidons acylés. A 40% de charge on atteint près du double de la concentration en spray-drying et bien que ce procédé soit un peu plus onéreux que le spray-drying la plus grande durée de vie des préparations et sa résistance à l'oxydation peut permettre un coût à l'usage plus favorable. Pour les flaveurs volatile, il est évident qu'un procédé à basse température (pas plus de 50°) est plus particulièrement indiqué, même si la charge ne peut, en général, dépasser 5 à 30%. Un de des défauts deprocédé c'est que les cordons d'extrusion sont ensuite découpés mais done des particules relativement importantes (500–1000 m), ce qui est gênant pour les aliments où le goût à la bouche (mouthfeel) est important... Les Pré, Probiotiques et Autres 112. ### Contrairement au sevrage progressif des humains, les porcelets sont précocément sevrés et alimentés avec des solides. Ceci introduit des facteurs de stress pouvant entraîner des manifestations pathologiques qu'on pense diminuer par addition d'antibiotiques. Mais le développement de stratégies nutritionnelles avec une approche pro- et prébiotique est actuellement développée pour éviter ces traitements antibiotiques. On compte influer, ainsi, sur la résistance à la colonisation par des pathogènes, particulièrement lors de stress du sevrage. La réponse de la microflore intestinale iléale et colonique de porcelets au sevrage auxquels étaient administrés quatre polysaccharides fermentescibles (inuline, lactulose, amidon de blé et sucre de betterave sous forme de pulpe) a été étudiée par des chercheurs néerlandais SR Konstantinov et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3821-3830. Ces sucres répondent à la définition des pré-biotiques qui sont des substrats favorisant le développement de bactéries favorables à la santé (pro-biotiques). La stimulation de la flore existante de Lactobacillus plutôt que l'introduction d'une flore complémentaire (qui est un peu contradictoire avec l'utilisation d'une résistance à la colonisation) est une stratégie qui a pu être recommandée. Certains prébiotiques stimulerait spécifiquement certains des lactobacilles autochtones. 20 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 La sécurité alimentaire 113. ###. Le genre Listeria est divisé en six espèces: L. monocytogenes, L. seeligeri, L. ivanovii, L. innocua, L. grayi et L. welshimeri. Deux seulement sont pathogènes. L'une est L.monocytogenes, pathogène pour l'homme ainsi que pour plusieurs animaux. L'autre, L.ivanovii n'est pratiquement pathogène que pour les animaux. La plupart des cas humains sont dûs à une consommation d'aliments contaminés consommés crus. La maladie humaine est finalement très rare, mais on y fait très attention à cause de sa gravité (20 à 30% de mortalité). On arrive, de ce fait, à des exigences très sévères (pas de bactérie détectable). Il convient donc de ne pas se tromper dans le diagnostic sous peine d'erreurs ayant des incidences non négligeables, soit de santé soit économiques. TJ Ward et al.; Journal of Bacteriology 186,n°15 (AUG04) 4994-5002 ont raffiné l'analyse phylogénique intraspécifique de L.monocytogenes. Ils se sont basés les gènes prfA de virulence de 113 isolats de L.monocytogenes. On détecte au moins trois lignées de L.monocytogene dont les lignées 1 (la plus fréquente dans les cas de listériose humaine) et 3 (la moins fréquente) sont très proches. Le sérotype 4b y est le plus souvent associé Mais la relative rareté de la lignée 3 est liée à une exposition moins fréquente, car elle est aussi virulente que la lignée 1. Par contre, elle semble mieux adaptée au milieu animal qu'à celui des transformations alimentaires. Enfin l'analyse du génome de la lignée 1 indique qu'elle a subi une purge de la variabilité génétique qui n'est pas observée dans les autres lignées. On pourrait les considérer comme trois espèces distinctes (amis avec les réserves d'usage sur l'utilisation de ce thème (voir le §). 114. Les méthodes actuelles de détection des Listeria supposent une culture sélective, mais ces techniques sont génériques et répondent "Listeria" ou non, mais ne peuvent descendre au niveau de l'espèce. Il faut ensuite caractériser l'espèce par des critères métaboliques ou physiologiques. Mais il existe des cas où un des critères n'est pas satisfait ,et on ne fait alors plus confiance aux autres. Pour rendre les choses plus simples on considère que tous les L.monocytogenes sont virulentes. Mais on connaît des souches dont la virulence est atténuée. Il existe, ainsi des souches non hémolytiques, ou Rhamnose-. On se pose alors la question de savoir si l'isolat hémolytique Rha- est une L. monocytogenes ou une L.seeligeri hémolytique Xyl- anodine? On est alors contraint d'effectuer un essai sur souris ou L.monocytogenes est pathogène, alors que L.seeligeri ne l'est pas. On peut aussi appeler à l'aide les ARN 16S, ou un test api de naphthylamidase. On y arrive donc, mais cela exige des efforts supplémentaires. On vient de se heurter à un tel problème avec une L.innocua qui est, en principe, non hémolytique, mais qui, en l'occurrence, l'était, contrairement au dogme. Et cela ne semble pas être un cas isolé. Il faut rappeler que si on interpète mal les données on peut fort bien, à cause de la réglementation très stricte, expédier inutilement au crématoire un énorme stock de fromage au grand dam du producteur, ou vice-versa J Johnson et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 4256-4266 décrivent un cas de Listeria hémolytique, Rhamnose- et Xylose- se moquant de l'identificateur en brouillant les résultats des essais complémentaires. Il a fallu utiliser des hybridations sélectives et des réseaux de sondes. Ces techniques complémentaires indiquent que c'est bien une nouvelle souche hémolytique de Listeria innocua. Cette espèce, est en principe, non hémolytique mais a acquis tout l'îlot de pathogénicité 1 de L.monocytogenes. Elle reste nonpathogène pour la souris. Son avirulence est, au moins partiellement, due à l'absence de l'allèle iap de L.monocytogenes ainsi que d'une batterie d'autres gènes de cette dernière. Mais la souche exprime, pourtant, la listériolysine O et une enzyme typiques de L.monocytogenes 116. T Zhao et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3996-4003 ont analysé les biofilms de systèmes de drainage où Listeria monocytogenes a disparu pour y détecter des composants qui pourraient êre responsables de cette disparition. Ils ont, effectivement, détecté des activités antilistériennes dans plusieurs échantillons, associées à la présence d'Enterococcus durans (six isolats), Lactococcus lactis subsp. lactis (deux isolats) et Lactobacillus plantarum (un isolat). Certains d'entre eux semblent d'excellent compétiteurs par exclusion de L.monocytogenes dans les biofilms. 119. On trouvera dans S Burt; International Journal of Food Microbiology 94 (01AUG04) 223-253 une revue sur les propriétés antibactériennes des huiles essentielles végétales et leurs utilisations alimentaires On a pu démontrer ces effets contre Listeria monocytogenes, Salmonella typhimurium, Escherichia coli O157:H7, Shigella dysenteria, Bacillus cereus et Staphylococcus aureus à des concentrations comprises entre 0,2 et 10 l/ml. Les bactéries gram- sont un peu moins sensibles. Carvacrol, thymol, eugénol, périllaldéhyde, cinnamaldéhyde et acide cinnamique ont été identifiés comme les substances actives de ces essences in vitro aux doses précitées, mais il faut en ajouter nettement plus dans les aliments. Les conditions physicochimiques favorisant ces effets bactéricides sont une température ainsi qu'une tension d'oxygène et un pH bas. Une synergie est osbservée entre carvacrol et son précurseur le p-cymène et entre cinnamaldéhyde et eugénol. Certains de ces composants sont autorisés en Europe et aux Etats-Unis mais il faut éviter les effets organoleptiques indésirables par un dosage adéquat. 120. La zéaralénone (ZEN), la lactone de l'acide 6(10-hydroxy-6-oxo-trans-1-undécényl)--que), est une toxine œstrogène non stéoïdique produite par divers Fusarium, à la fois sur pied et dans les silos. On en trouve parfois une quantité anormalerment élevée due à des conditions de milieu particulières dans les grains de maïs, blé ou orge. Le problème est que le groupe cétone peut être réduit en -zéaralénol (nettement 21 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 plus œstrogène ou son stéréoisomère -zéaralénol qui est moins œstrogène que ZEN) par divers microorganismes dont des levures et des microbes intestinales humaines, ce qui est fâcheux. Tous ces composés ont un effet détestable sur le développement et le fonctionnement des organes reproducteurs (1 to 5 g de ZEN/g pour le porc). ZEN se fixe, en effet, sur les récepteurs des oestrogènes humains. A côté de cet effet œstrogène, on a découvert, dans des études à long terme chez la souris, un effet sur les croissances tumorales à des concentrations de ZEN supérieures à celles causant l'effet œstrogène. La détection n'est pas toujours facile à cause des faux positifs dûs à d'autres composés oestrogènes. L'élimination chimique est impraticable. C'est pourquoi N Takahashi-Ando et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUN04) 3239-3245 préconisent (après d'autres) de plutôt procéder à une élimination. Ils décrivent un processus de détoxification par un organisme exprimant un gène de lactonohydrolase de Clonostachys rosea. L'organisme peut être Escherichia coli, Saccharomyces cerevisiae (cette dernière étant moins efficace) moyennant une adaptation des codons. Cela ne devrait quand même pas encourager les négligences culturales. L'Environnement 121. Il est souvent difficile de définir une espèce bactérienne (ce qui entraîne de nombreuses synonymies quand on rassemble ou éclate des espèces existantes un jour donné). L'utilisation des ARNs ribosomiques 16S n'apporte pas toujours la solution (voir le §122). S Acinas et al.; Nature 430 (29JUL04) 551-554 ont analysé une population bactérienne marine côtière complexe. Mais mieux que de nombreuses autres études sur le sujet, les auteurs ont surtout travaillé à la réduction des artefacts liés à l'amplification par PCR et aux erreurs induites par la Taq-polymérase. Le résultat est une simplification étonnante des arbres phylogéniques qui peuvent être déduits des séquences des ARNs 16S. Les auteurs en déduisent que les fines ramifications terminales des arbres sont des populations présentant des adaptations à des niches écologiques voisines et peuvent donc être considérées comme écotypes d'espèces (éventuellement des espèces). De fait, quand on pioche un gène donné dans la nature et qu'on l'amplifie par PCR, les séquences sont rarement identiques, ce qu'on interprète comme une grande diversité. Ainsi JC Venter (JC Venter et al. Science 304 (02APR04) 66–74) a cloné, par la technique de shotgun, l'équivalent de 775 génomes microbiens complets de la mer des Sargasses. Mais la diversité était telle qu'il a affirmé que cela correspondait à 1800 espèces, en se basant sur une définition simple et classique qui est que si deux génomes diffèrent par plus de 3% dans leurs ARNs 16S, ils correspondent à deux espèces différentes. Mais si on applique cette règle aux séquences caractérisées par S Acinas et al. on a 99% d'identité, ce qui indique une seule espèce. Les Pelagibacter correspondent à 380 des 1412 rRNA 16S récupérés par Venter et al.. Mais le plus gros fragment qu'ils aient pu récupérer était relativement petit, avec environ 21 000 paires de bases, et cette séquence était relativement peu fréquente dans leur collecte. Ceci suggère une très grande diversité génétique dans ce groupe. Or Acinas et al. montrent que 50% des gènes de rRNA (et même les deux tiers, si on applique l'estimateur de diversité Chao-1) peuvent être regroupés en quatre à cinq groupes, ce qui indique une diversité relativement limitée. Mais le critère des 3%, comme d'autres règles empiriques, prend en compte des variations neutres 22 dans les séquences, n'ayant aucune incidence évidente sur les fonctions et qui s'accumulent dans les génomes en fonction du temps sans donner prise à une sélection. D'une façon générale, la notion d'espèce chez les bactéries est doublement fumeuse. Il n'y a pas de sexualité équivalente à celle des eucaryotes permettant de définir deux espèces comme deux entités ne communiquant plus génétiquement entre elles, alors que les transferts génétiques existent bien mais de façon tout à fait différente, chez les bactéries, grâce à des informations génétiques facultatives (plasmides conjugatifs, transposons et tous les ustensiles des transferts horizontaux), parasexualité qui ne nécessitent aucun lien entre la cellule donneuse et la cellule receveuse (voir la dissémination des résistances aux antibiotiques). Ceci a conduit dans les années 80s à une position extrême que les bactéries sont toutes un patchwork de séquences prélevées decidelà et que les bactéries sont une seule espèce. Le seul intérêt, dans ce cas, de la notion d'espèce est le rôle unique d'un groupe de bactéries dans la nature, les ramifications terminales correspondraient à une diversification élémentaire au sein d'une population de cellules jouant le même rôle. Mais ces transferts horizontaux sont-ils suffisants pour abolir toute différence entre les bactéries permettant une sélection? Les résultats de S Acinas et al. montrent bien que l'hypothèse pangénique des bactéries n'est pas valable et que la sélection a bien un rôle dans l'évolution des gènes, même de rRNA. La sélection permet l'apparition de populations ayant une niche commune et ayant le statut d'espèce dans le jargon des bactériologistes, car elles correspondent bien à un phénotype fonctionnel. Cela ne signifie pas pour autant une homogénéité fonctionnelle des génomes, car une variabilité peut permettre de briser certaines contraintes d'un milieu qui change. Par ailleurs, le milieu peut amoindrir la compétition. On a, par exemple, souligné que les prédateurs peuvent donner lieu à une contre sélection des phénotypes les plus performants. La génomique comparée a montré que les génomes peuvent être divisés en gènes stables et variables, considérés comme le noyau du génome (avec les gènes de ménage et les opérons ribosomiques) et la partie flexible/auxiliaire. Cette dernière se modifie continuellement par le biais des transferts Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 horizontaux par phages et transposons interposés, et comprend entre 1 et 18% des gènes présents, parfois jusqu'à 60%. Les groupes (clusters) de ribotypes devraient donc se retrouver au niveau des gènes "de ménage". Une corrélation de la variation génomique avec des paramètres écologiques n'a été clairement démontrée qu'entre deux souche de Prochlorococcus (G Rocap et al.; Nature 424 (28AUG03) 1042-1047 évoqué dans le Bulletin d'Octobre 2003 §5), mais ces deux souches ne tombent pas dans les groupes à microdiversité définis plus haut. Les résultats actuels de la diversité correspondent à une sélection qui a élagué les branches internes de l'arbre phylogénique en faveur de populations plus adaptées. Les fines ramifications terminales de l'arbre n'ont pas encore eu le temps de subir cet élagage, et la compétition est trop faible pour purger la diversité existante. La conclusion de tout ceci est qu'il existe une autre façon d'aborder la diversité génétique dans des milieux naturels et se méfier un peu des évaluations du nombre de variants significatifs dans la nature. Voir également le commentaire de S Giovannoni; Nature 430 (29JUL04) 515-516. 122. On trouvera dans MR Parsek et al.; Journal of Bacteriology 186, n°14 (JUL04) 4427-4440, un compte-rendu du colloque sur les biofilms qui s'est tenu du 1° au 6 Novembre 2003 à Victoria au Canada et dont une partie est traitée au §91. Les biofilms correspondent à une physiologie particulière des populations bactériennes. On en a beaucoup parlé dans le cas de la pathogénicité, de la résistance aux stress et anti-bactériens, mais ils sont également associés à des problèmes de corrosion dus, soit à la production d'acides corrosifs comme l'acide sulfurique en, conditions aérobies, soit à la formation de sulfures en milieux réducteurs. Ils peuvent également faciliter la formation de dipôles électrostatique entre le centre dela colonie et les régions dégagées. On a pu montrer que les oxydes de fer et les acides humiques favorisent la prolifération de communautés multispécifiques corrosives, alors que les éléments planctoniques sont beaucoup moins nocifs. Inversement les biofilms de bactéries réduisant le fer ferrique pour y éliminer les électrons d'une respiration sur le fer au lieu d'oxygène peuvent protéger l'acier dans certains cas. Des composés actifs sur le plan redox comme les phénazines peuvent servir de navettes à électrons stimulant la réduction du fer ferrique. La plupart des phénazines ont, en effet, un potentiel redox que le fer ferrique. On a montré que des Bacillus brevis (une bactérie anodine) modifiées pour produire de la gramicidine peuvent protéger les aciers doux des attaques de bactéries réduisant les sulfates (R Zuo et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (APR04) 275–283 (avec un article à venir dans la même revue. On commence à utiliser systématiquement des techniques combinées pour déterminer la disposition spatiale de bactéries individuelles ou de groupes phylogéniques avec la technique FISH (Fluorescent In-Situ sequence Hybridization) et la microscopie confocale, les profils des gradients chimiques (par microcapteurs) et le type des activités métaboliques par microautoradiographie avec sondes à isotopes stables. Une des difficultés des biofilms est l'impossibilité d'y mesurer l'expression génique autrement que par des moyennes, alors qu'on sait qu'elle varie selon la position d'une cellule dans le biofilm. On cherche à tourner cet obstacle, notamment en utilisant la technique IVET (In Vivo Expression Technology) .Je rappelle que la technique est plus intéressante, de ce point de vue, que la mutagenèse traditionnelle, car elle permet une sélection positive de gènes spécifiquement exprimés dans une condition environnementale donnée, et n'utilise pas l'inactivation de gènes essentiels. On crée des bibliothèques génomiques avec un plasmide portant un gène sans promoteur qui permet la détection des promoteurs actifs, tandis qu'un second gène reporteur, permet de distinguer les promoteurs inductibles ou permanents. Le gène de criblage est sacB sans lequel la bactérie ne peut pas pousser sur saccharose, par exemple. L'utilisation de modèles de biofilms a également été discutée. Parmi ces modèles il y a celui des tapis de cyanobactéries (dont des Synechococcus) des sources chaudes que le groupe de Ward utilise depuis un certain temps (voir la revue de DM Ward et al.; Microbiology & Molecular Biology Reviews 62 (98) 1353–1370). Ces biofilms sont des communautés très stratifiées et organisées en fonction de la lumière et parfois des gradients de température. Les différents constituants sont métaboliquement intégrés. Ces communautés sont protégés à ces températures de prédateurs eucaryotes et sont relativement stables Les Synechococcus sont, en réalité, métaboliquement diverses, bien qu'aucun marqueur moléculaire (ARN 16S) ne puisse les distinguer. Un des faits nouveaux est que si l'activité métabolique est très élevée dans ces biofilms la croissance est très lente (il n'est pas précisé si il y a émission de formes planctoniques qui expliqueraient ce résultat). Une autre catégorie de biofilms qui sont très étudiés est celle des biofilms des unités de traitement des eaux usées. On s'y intéresse beaucoup à cause de leurs capacités à éliminer beaucoup des polluants azotés et phosphorés. Il a été présenté une analyse de la distribution des populations de bactéries réduisant les sulfates dans des biofilms d'eaux usées en fonction des gradients d'oxygène, nitrates et des différents niveaux d'oxydation du soufre manipulés avec des électrodes. Un autre groupe a montré que le niveau des charges en azote détermine la nature des bactéries oxydant l'ammoniaque ou les nitrites dans ces biofilms. En excès d'ammonium on a coexistence de Nitrosomonas europaea, Nitrosomonas oligotropha et Nitrosomonas communis avec une distribution dans le biofilm dépendant des gradients d'ammoniaque et d'oxygène. Les biofilms sont des réservoirs potentiels pour certains pathogènes (voir le cas des Legionella). On a pu montrer que des bactéries du complexe Mycobacterium avium sont présentes dans les conduites et réservoirs d'eau chaude des hôpitaux, et que ces souches peuvent être retrouvées chez des patients immunodéprimés. On peut également les 23 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 retrouver dans les conduites d'eau potable, ce qui les rend encore plus communicables par cette voie. Des bactéries passagères planctoniques peuvent profiter de l'hospitalité ainsi offerte et des S.enterica serovar Typhimurium, des spores de B.cereus et des oocystes de Cryptosporidium parvum peuvent être ainsi hébergés et persister des semaines. La coexistence de plusieurs pathogènes voisins peut faciliter les transmissions horizontales de complexes géniques de virulence. On a ainsi pu montrer que le gène vanA, redouté, car conférant la résistance à la vancomycine peut être détecté dans un biofilm dans des conduites d'eau potable en l'absence de tout entérocoque, c'est à dire qu'il est déjà transmis.Une revue de FH Sharkey et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 3795-3806, fait le point sur la détection et la quantification de l'expression génique des bactéries dans leurs milieux naturels complexes. Les succès grandissants dans le domaine environnemental sont liés à la chute des coûts des techniques et à l'efficacité grandissante des techniques de prélèvement des ADNs dans l'environnement. 123. ### La octahydro-1,3,5,7-tétranitro-1,3,5,7tétrazocine est également un explosif dénommé HMX qui est un acronyme pour High Melting eXplosive. On l'appelle également octogène ou plus prosaïquement cyclotétraméthylène-tétranitramine, ou d'autres sobriquets. Cet explosif est utilisé dans des combustibles propulseurs de fusée. Il en est produit un peu lors de la production du RDX, dont il augmente l'efficacité du fait de sa vélocité de détonation. Plusieurs bactéries anaérobies fermentaires produisant de l'hydrogène, dont des Clostridium, Klebsiella et Fusobacterium dégradent le HMX en formaldéhyde et oxyde nitreux N2O. Parmi ces bactéries, Clostridium bifermentans HAW-1 est relativement efficace et on repère parmi les intermédiaires de la dégradation le composé mononitroso et la méthylènedinitramine. L'analyse de cette dégradation semble impliquer deux enzymes, l'une pour la dénitration et la seconde pour la réduction des dérivés nitroso. JS Zhao et al.; FEMS Microbiology Letters 237 (01AUG04) 65-72. 125. L'herbicide paraquat est accusé d'être un facteur de risque de par ses fonctions oxydatives, dans la genèse de la maladie de Parkinson. J Peng et al.; Journal of Biological Chemistry 279 (30JUL04) 32626-32632 montrent que cet herbicide induit une phosphorylation séquentielle de la c-Jun N-terminal kinase (JNK) et de c-Jun ce qui entraîne l'activation de la caspase-3 responsable de la mort neuronale in vitro et in vivo. On peut réduire cette dégnérescence sous l'effet de l'herbicide avec des inhibiteurs de JNK. 126. La dégradation des biphényles polychlorés (PCBs) par plusieurs bactéries dont la fameuse Burkholderia LB400, est incomplète et laisse subsister de nombreux intermédiaires qui ne sont pas 24 sans dangers. Des chercheurs de Valparaiso ont examiné la toxicité de ces intermédiaires. Des Escherichia coli recombinantes exprimant divers sous-ensembles de gènes bph de la souche LB400 accumulent certains de ces intermédiaires. Les effets sur le métabolisme de la bactérie ont été analysés. Les dihydrodiols et dihydroxybiphényls sont extrêmement toxiques pour la bactérie, beaucoup plus que les PCBs initiaux. Les E.coli recombinantes, mais également Burkholderia sp. LB400, sont détruites par une exposition au 2,3-dihydroxybiphényl. Cette toxicité explique, en partie la difficulté d'élimination de ces produits dans l'environnement, malgré la présence des enzymes adéquats. Cette conversion de xénobiotiques moins toxiques en produits plus toxiques est un peu l'équivalent du processus se déroulant chez les animaux. Ce n'est probablement pas le seul cas. 127. On trouvera dans MG LaMontagne et al.; Environmental Microbiology 6 (AUG04) 799-808 une étude sur l'effet des communautés bactériennes enrichies au niveau des fuites naturelles d'hydrocarbures comme celles détectées dans le Santa Barbara Channel (on doit trouver la même chose dans la Caraïbe ou dans l'embouchure de l'Orénoque) sur la microflore avoisinante. 128. ### Les alkylbenzènesulfonates linéaires (LAS) sont les surfactants les plus répandus dans le monde. On en distribue dans les égouts 3,1 g/personne/jour en Europe de l'Ouest soit 4% des déchets organiques. La biodégradation des LAS a été démontrée dès 1957, mais on ne connaît pas bien les voies de dégradation. Parvibaculum lavamentivorans DS-1T (au nom bien adapté) utilise les préparations commerciales d'alkylbenzènesulfonates linéaires (LAS) (qui comprend 20 congénères à chaîne alkyles de C10 à C13) comme source de carbone et d'énergie en grignotant la chaîne acyle. 129. Codakia orbicularis (une grosse coque blanche tropicale de 9 cm de diamètre, du Brésil jusqu'au Golfe du Mexique appelée Tiger Lucine ou Great White Lucine) pratique une symbiose avec des bactéries intracellulaires logées dans ses branchies et qui oxydent les sulfures (elles sont donc chimioautotrophes). Des chercheurs dont deux de l'Université des Antilles et de la Guyane à Pointe à Pitre ont analysé la stratégie respiratoire de ce bivalve. MR Duplessis et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 4144-4150. On avait déjà étudié la symbiose entre Lucinoma aequizonata et une autre bactérie qui utilise les nitrates comme accepteurs d'électrons, y compris en présence d'oxygène. Les symbiotes de C.orbicularis utilisent bien l'oxygène dans ce but, et aucune respiration sur nitrate n'est détectable. Les symbiotes consomment l'oxygène lorsqu'elles sont en suspension. Dans d'autre cas similaires la formation de sulfures semble avoir lieu quand oxygène et nitrates sont absents. Les auteurs montrent directement que c'est bien le cas pour ces symbiotes. Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 130. Les rideaux de douches sont un biotope intéressant. Au bout d'un certain temps d'utilisation, ils commencent à se couvrir de biofilms qui peuvent constituer (voir le §122) un bon réservoir de pathogènes. ST Kelley et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (JUL04) 4187-4192 se sont posé la question de savoir quelle était la composition de la microflore. L'identification a été classiquement réalisée par PCR des rDNAs entraîne. Cette flore est étonnamment complexe et variable. On y trouve en abondance des membres des protéobactéries, surtout des Sphingomonas et des Methylobacterium. Ces deux genres sont connus pour comporter des pathogènes opportunistes et plusieurs clones correspondent à des espèces proches de celles de pathogènes connus. De quoi ne plus se doucher dans les hôtels où il faudrait traiter énergiquement ou jeter périodiquement les rideaux de polyvinyle. 132. On trouvera dans R Bennett et al.; Plant Biotechnology Journal 2 (JUL04) 273-278, une étude sur l'impact sur l'environnement et la santé humaine de la culture de betteraves transgéniques résistantes au glyphosate (donc de Monsanto). Les résultats qui seront, évidemment, violemment contestés par certains; indiquent que, globalement, la diminution des transports et disséminations diverses des herbicides étant nettement inférieurs à ceux des betteraves conventionnelles, l'utilisation des betteraves transgéniques est de tous les points de vues moins agressive pour l'environnement. Les auteurs ont mesuré les émissions de gaz à effet sur le réchauffement planétaire et la destruction de la couche d'ozone et les produits carcinogènes aériens, l'écotoxicité des eaux et l'acidification des sols et des eaux, son nettement inférieurs à ceux d'un champ conventionnel. 133. Il ne suffit pas de calculer la maille des filets pour laisser passer les jeunes générations de poissons destinés à entretenir tant bien que mal les populations de poissons. Celles-ci dépendent des femelles les plus âgées pour leur maintien, car leurs descendants sont plus nombreux et plus compétitifs. Il est évident qu'avec la surpêche actuelle, ce sont elles que l'on élimine en premier, et que les élevages n'en produisent pas à cause de l'immobilisation de capitaux et le coût de la nourriture que cela suppose. On sait que chez le red snapper (Lutjanus campechanus) une femelle de 61 cm produit autant d'oeufs que 212 femelles de 43 cm. On a calculé qu'il suffirait que des réserves représentant 5% de l'habitat pourrait compenser les prises ailleurs. Des chercheurs de Santa Cruz ont étudié Sebastes melanops, dont les femelles de 12 ans donnent des larves croissant quatre fois plus vite que celles de femelles de 5 ans et résistent deux fois mieux aux carences alimentaires. Ceci est lié à la fourniture aux descendants d'une goutelette de lipide qui leur facilite la vie après que le vitellus ait été épuisé. S Berkeley,et al.; Ecology 85, (MAY04) 1258–1264. Celà signifie clairement qu'une femelle n'est pas équivalente à une femelle comme un calcul simpliste pourrait le faire croire. Ceci dit la situation globale chez les poissons est compliquée par le fait qu'ils changent souvent de sexe avec l'âge. Chez les groupers (Epinephelus si je me souviens bien) les petites femelles se convertissent en plus gros mâles, la pêche des gros diminuant donc le nombre des mâles. Dans les zones de pêche active, on en arrive à un mâle pour des dizaines de femelles. Cela les fatigue nettement. Chez les crevettes ou les crabes c'est plutôt l'inverse, avec des petits mâles donnant de grosses femelles. La pêche des gros est donc aux dépens des femelles. La Politique 134. ### M Harvey et al.; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 807-810 analysent la compétition qui a abouti à la publication de la séquence d'Agrobacterium tumefaciens C58 dans le même numéro de Science du 14 Décembre 2001 entre deux consortiums, celui de l'University of Washington Genome Center, the Institute of Computing, Unicamp (au Brésil) et DuPont d'une part, et Monsanto (Cereon) et Hiram College de Cleveland de l'autre. En fait plus que la double publication, c'est le défi pour préserver un bien public dans une collaboration avec l'industrie qui est son histoire. Dans le cas d'A.tumefaciens, la dépendance mutuelle entre les secteurs public et privé est illustrée. Mais la nature même de privé et public est ténue, car des données fondamentales ont été apportées par des institutions privées comme le TIGR (dont on oublie souvent que c'est quand même une organisation sans but lucratif). Mais DuPont et Monsanto comptaient bien renforcer leur propriété intellectuelle avec les apports du secteur public qui lui évite d'avoir à consacrer des ressources dans le développement de travaux plus fondamentaux. D'où leur intérêt pour les biens publics que sont ces recherches fondamentales assurées par le secteur académique avec leur conséquence, les publications . Mais ces intérêts souvent divergents ont été une source de tension continuelle. La première partie de l'article discute l'émergence des deux projets concurrents au vu de l'impossibilité (à l'époque) de mener à bien l'entreprise séparément dans les deux secteurs. La seconde partie analyse le déroulement de la course avec un schéma chronologique, avec une analyse des conflits que cela a soulevé à propos de la propriété industrielle. La dernière partie discute de l'asymétrie des interactions dans la création du savoir. Il y a eu une double course, l'une pour achever la séquence et la publier, et l'autre pour en acquérir une propriété industrielle formelle. La logique de l'entreprise a été différente entre les deux consortiums et conflictuelle au sein de chacun. Dans le domaine public, c'est l'antériorité qui est recherchée dans la compétition; il n'y a guère de place pour un second. Ceci confère un avantage dans la collecte de financements, ce qui facilite une antériorité ultérieure. Dans le cas d'un génome, l'achèvement complet de la séquence a certainement moins d'intérêt pour un 25 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 industriel qui peut l'exploiter à un stade bien antérieur, et son bénéfice décroît au fur et à mesure que la séquence ralentit (en général à cause de régions difficiles à séquencer qui sont souvent non codantes). DuPont comme Monsanto n'ont fourni qu'un accès très limité à leurs partenaires publics à travers un unique ordinateur localisé dans l'Université correspondante. Ils pouvaient ainsi piloter l'avancement de la séquence en n'y mettant que ce qu'ils voulaient bien y inclure. Le consortium Monsanto-Hiram, après un début assez lent pour mettre au point la collaboration, a rapidement progressé vers une séquence presque complète (avec les lacunes finales classiques) présentée en Novembre 2000. Ceci va placer le consortium en tête d'environ un an sur son concurrent. Ils avaient largement le temps d'achever seuls la séquence. Les progrès de l'autre consortium ont été plus chaotiques et ses progrès contrôlés par DuPont. Il n'avait achevé que trois fois la longueur du génome (il en aurait fallu six selon le contrat et l'University of Washington avait identifié 800–900 gènes pouvant avoir un intérêt commercial). C'est à peu près le moment où les deux partenaires industriels ont arrêté leur contribution, mais pour différentes raisons. Monsanto a tenu à assurer ses droits industriels, et il est devenu clair pour les partenaires que Monsanto n'était pas intéressé par une séquence complète. DuPont, par contre, a délaissé A. tumefaciens et non sa séquence, préférant s'intéresser à des hôtes microbiens à usage plus général comme Escherichia coli, se disant qu'il y avait des moyens de tourner la propriété industrielle recherchée par Monsanto. A ce moment là, les deux consortiums savaient qu'ils étaient en compétition, et le problème de la priorité pour la divulgation s'est posé de façon aigue. C'est la raison pour laquelle l'Université de Campinas (Unicamp) est entrée en jeu par le biais d'un bioinformaticien en année sabbatique à Seattle, Joao Setubal (ceux qui ont ensuite séquencé Xylella fastidiosa), et elle a pris la place de DuPont. Par un artifice parait-il légal, l'ensemble des données de DuPont a été déchargé, en l'ignorance de la firme, et traité par les logiciels d'annotation d'Unicamp auxquels l'University of Washington avait un libre accès, ce qui libérait le groupe de Seattle des contraintes et rigidités de DuPont sur ce plan. De toute façon, le fait que le financement de DuPont était clairement un financement-relai mettait le groupe de Seattle en bonne position dans ces conditions. La NSF, de son côté a permis la relance du projet à Hiram College. Tout ceci indiquait que la course était maintenant pour la publication académique de la séquence. L'annonce du dépôt d'une ébauche de séquence par Derek Wood en Juillet 2001 à GenBank pour le 15 Août 2001 a déclenché chez Monsanto la décision de libérer toutes ses données, ce qui a été fait cours d'une conférence de presse du 14 Août., rien que pour battre l'University of Washington sur le fil. Les deux consortiums ont publié dans le même numéro de Science du 14 Décembre 2001, leur séquence. 26 Il est clair, qu'au delà de la séquence proprement dite, le groupe de Seattle fournissait bien plus d'annotations que le consortium de Monsanto. Mais comme on a pu constater des différences entre les deux séquences, la question de savoir leur cause s'est immédiatement posée. Elle existe réellement entre deux souches C58. Et l'ensemble des partenaires (hors DuPont, mais avec Monsanto) a donc décidé de séquencer d'autres souches de la bactérie pour analyser la variabilité génétique entre elles. Comme quoi le privé, peut également s'intéresser à la connaissance au-delà des applications. Il faudrait lire le rapport de Lawrence Busch de l'Université de Chicago sur les accords entre Berkeley et une seule firme, Syngenta, dans le domaine végétal où il soulève les mêmes questions. Je tâcherai de me le procurer, car c'est un évaluateur objectif que j'ai eu l'occasion d'apprécier. 136. H Pearson; Nature 430 (22JUL04) 388, reprend la "sortie" assez générale de chercheurs américains contre la classification trop hâtive des agents pathogènes susceptibles d'être utilisés en bioterrorisme et les mesures imposées aux laboratoires en conséquence (voir le Bulletin de Juillet §155 par exemple). Elle commente plus en détail les propositions de A Casadevall et al.; Trends in Microbiology 12 (JUN04) 259-263 sur une reclassification moins manichéenne de ces agents qui regroupe Coccidioides immitis (un champignon pathogène relativement anodin et le virus de la variole dans une unique catégorie. Les auteurs suggèrent de faire intervenir plusieurs caractéristiques de ces agents mais les US Centers for Disease Control and Prevention (CDC) n'envisagent absolument pas de modifier la liste. 137. Les exigences plus strictes d'une brevetabilité, comme l'éclatement de la bulle spéculative en 2000 expliquent le ralentissement observé des demandes de brevets aux Etats-Unis et ailleurs. On peut y ajouter la publication complète d'un génome humain en 1998, ce qui expliquerait le différé de la régression de 3 ans qui est le délai d'examen des brevets à l'US Patent Office. Mais on prévoit un redémarrage prochain du flot. Au-delà de divergences de méthodes entre plusieurs des enquêtes sur le sujet, il se dégage un consensus pour affirmer que le nombre de dépôts a fortement décru en 2001 et 2002. Et cela semble se prolonger en 2003 et pendant le premier semestre de cette année. S Lawrence; Nature Biotechnology 430 22 (AUG04) 930-931. Il existe bien d'autres raisons comme la diminution des retours industriels sur les brevets pour cause d'enthousiasme excessif dans les années antérieures. Quand on analyse les courbes figurant dans l'article et qui portent sur la période 1983-2003, on constate que cette régression n'affecte pas toutes les demandes de brevets et que celles dans le domaine de l'internet croissent toujours exponentiellement alors que celles sur les séquences stagnent, après un pic en 1999. Le nombre des dépôts de brevets sur les ADNs a, Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 cependant, bondi de 7 902 en 2002 à 13 603 en 2003 pour diminuer de 23% au premier semestre de cette année. Un autre argument est le coût d'un brevet (de l'ordre de 50 000 dollars US) qui, en période de vaches maigres fait réfléchir sur les justification du dépôt, d'autant que l'USPTO renforce ses exigences et que "dépôt" ne signifie pas "brevet". Ceci est particulièrement vrai pour les dépôts d'origine académique Les demandes sur les technologies ADN semblent plus stables. Un outil de recherche ou une cible pharmacologique les universités vont céder une licence, mais ne breveteront pas. La poussée de 2003 qui est parallèle à l'intérêt renouvelé des investisseurs dans les biotechnologies devrait avoir un débouché dans les années prochaines du fait des améliorations des brevets les plus intéressants. 138. Alors que la tendance occidentale en biotechnologie est le repli vers des projets plus proches du débouché industriel, les japonais semblent maintenant s'intéresser à la partie amont du secteur. (S Louët et al.; Nature Biotechnology 430 22 (AUG04) 931-932). Ceci est un sérieux tournant pour un secteur industriel japonais très allergique aux risques. Jusque là la pharmacie japonaise a confié ses recherches à des filiales qu'elle finance entièrement, ou à des firmes ayant déjà des liens forts avec l'industrie japonaise. Ainsi Takeda Chemical industries a fondé sa filiale américaine Takeda Pharmaceuticals North America et Yamanouchi Europe, issue de Royal Gist-Brocades, dont la firme avait acquis la branche pharmaceutique. Mais des difficultés majeures sont apparues. Ainsi 70% des nouvelles molécules apparues sur le marché japonais sont d'origine étrangère. Du coup, les firmes et le gouvernement japonais insistent sur le financement japonais de recherches à l'étranger. En Mai 2004, Takeda Research Investment (TRI), une filiale de capital risque américaine a investi des sommes non dévoilées dans trois compagnies de biotechnologies, Lectus Therapeutics en Grande Bretagne et deux compagnies non indiquées aux EtatsUnis. La recherche de compagnies étrangères serait liée à l'incapacité de soutenir des start-ups au Japon. Les accords de licence et de R&D sont également de plus en plus nombreux. Un tableau résume des exemples de ces initiatives. 141. L'utilisation de l'exemption de redevances pour une utilisation expérimentale de techniques ou produits brevetés a toujours posé des problèmes juridiques et les décisions des tribunaux ont été fréquemment divergentes, ce qui peut handicaper les recherches, à la fois académiques et industrielles. Les australiens sont en train d'expérimenter la portée de cette exemption et un article d'A McBratney et al.; Nature Biotechnology 430 22 (AUG04) 1023-1025 analyse la situation depuis le jugement Madey v. Duke University traité, en son temps, dans ce Bulletin. Dans le cas des séquences géniques le problème est particulièrement aigus, car nombre de séquences sont publiques mais pas forcément leur utilisation. Dans l'Union Européenne plusieurs états reconnaissent cette exemption au niveau statutaire. Il en est de même au Canada alors que la Nouvelle Zélande a une exemption légale. Par contre l'Australie était resté dans le vague, sans décision statutaire, ni loi traitant de ce sujet, ni "précédents juridiques" utilisables. Deux enquêtes ont été diligentées dans le pays, au cours de 2004. Les deux ont analysé la situation dans les autres pays. Il se trouve que l'exemption en Grande Bretagne a été interprétée de façon restrictive par la justice. Ainsi l'utilisation d'une invention à des fins pédagogiques n'y est pas considérée comme une utilisation expérimentale. Par contre l'utilisation pour confirmer la faisabilité du procédé breveté en est une, même dans un contexte commercial. Mais des essais commerciaux avant une commercialisation ne sont pas exempts. Une exemption statutaire n'est pas forcément rassurante, car le chercheur n'est pas à l'abri d'une assignation devant un tribunal par le détenteur, ce qui limite la facilité d'utilisation de l'exemption. C'est ce qui se passe en Grande Bretagne. L'examen de la situation réelle en Australie montre qu'il n'y a pas de vrai frein à la recherche, mais ceci grâce à des subterfuges divers, dont l'ignorance délibérée du brevet. Ce qui avait déjà été signalé aux Etats-Unis après Madey v. Duke University. Mais comme le disent justement les auteurs "absence of evidence…is not evidence of absence". Beaucoup de chercheurs le font par ignorance, et ne sont pas gênés. D'autres croient que les exemptions sont générales. Enfin, les détenteurs de brevets sont souvent peu enclins à poursuivre les contrevenants académiques sauf si cela menace sérieusement leurs revenus.. Il faut, cependant, se méfier car les procès pour infractions à la propriété industrielle ont décuplé durant les 20 dernières années. Les auteurs, dont deux appartiennent à un cabinet d'avocats australiens, concluent que, d'abord, l'absence d'exemption ne gêne pas beaucoup la recherche et qu'ensuite les échecs étrangers, ne plaident pas en faveur d'une exemption statutaire. Il n'y a, par ailleurs pas d'exemption légale en Australie, bien que des alinéas dans un coin pourraient faire croire à des possibilités d'exemption. Les tribunaux ont toujours préféré une obligation faite au détenteur d'accorder une licence à un prix raisonnable. Les auteurs ont donc analysé les conséquences de cette attitude sur la recherche. La première constatation est que si un chercheur veut être en règle dans ces conditions il devra acquérir des quantités effrayantes de licences. Les auteurs concluent, donc, qu'une exemption serait utile pour trois raisons. Si l'utilisation dans le cadre de l'exemption ne cause pas de difficultés aux détenteurs, l'exemption donne un signal clair au chercheur qui ne cherche pas à l'exploiter commercialement. Une licence obligatoire est, par contre, mieux adaptée au développement et à la commercialisation d'un procédé ou d'un produit. Ces deux considérations permettent d'éviter une longue et 27 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 coûteuse recherche de l'Université dans le capharnaüm des brevets existants. De plus, au moins en Australie, le processus de la licence obligatoire est étonnamment rugueux et coûteux. Si on peut éviter de l'utiliser pendant la phase initiale d'une recherche, cela serait préférable, quitte à lancer la requête pour une R&D. Il faudrait donc une double réforme créer l'exemption et réformer le processus de licence obligatoire. La difficulté réside dans la rédaction de l'exemption pour que la situation idéale décrite se réalise. Prenant le cas des séquences géniques il est vraiment difficile de distinguer ce qui est momentanément sans applications évidentes, de ce qui peut en avoir plus tard. C'est précisément le fondement du cas Madey, où un chercheur en conflit avec Duke University est parti avec ses recherches sur un appareil que l'université n'avait pas voulu breveter, l'a fait avec sa nouvelle université puis a attaqué avec succès les développements fondamentaux qui se sont poursuivis dans son université d'origine. Du coup, bien des recherches dites de base peuvent se trouver à un moment ou à un autre à la marge du secteur commercial et interférer avec une propriété industrielle. Cette distinction fondamentale/commerciale est donc on ne peut plus vague, prise dans le temps. Il ne faut donc pas l'invoquer dans une réglementation quelconque. Un meilleur critère serait la recherche sur la recherche, mais qui doit être soigneusement rédigé. L'un des deux rapports australiens souligne que la recherche d'une autre fonction d'un gène breveté, ou ses interactions avec un autre gène, doivent clairement être exemptées. Il n'en serait pas de même pour les promoteurs ou suppresseurs car ce sont des outils de recherche. Mais ce critère ne résoudra pas toutes les difficultés. . 142. JL Fox; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 791 discute les opportunités actuelles pour les biotechnologie en faveur de l'agriculture. Les négociations internationales avancent et les autorisations de commercialiser en Europe débouchent. Le problème réside dans le marché et l'appétit des consommateurs pour ces techniques et leurs produits. Un point de discorde est que ces techniques sont surtout destinées au bonheur des semenciers, un peu des fermiers, mais pas du tout du public. Monsanto a compris cela et affirme, le 10 Mai, ne vouloir mettre dans le commerce, en Amérique du Nord, un blé résistant au glyphosate que quand un gène intéressant le consommateur sera introduit. Phrase un peu vague et qui peut masquer d'autres raisons. Le 19 Mai Syngenta ne commercialisera pas son maïs doux en Europe, bien que la société en ait obtenu l'autorisation. Bayer CropScience, de son côté renonce à commercialiser son maïs fourrager en Grande Bretagne. L'attitude agressive de certains industriels vis à vis des semences de "ferme" dans le domaine ainsi que l'insuffisance des recherches pour le tiers-monde est également d'actualité. L'auteur évoque les opinions des partisans et opposants à la décision confirmant la condamnation du fermier canadien Percy Schmeiser (voir le Bulletin d'Août §131) à propos du canola transgénique de Monsanto. En ce qui concerne le cas Schmeiser et celui, parallèle du cultivateur du Mississipi Homan McFarling sur des sojas, les dommages et intérêts demandés ont été rejeté au Canada comme aux Etats-Unis. Le rapport de la FAO sur les biotechnologies en faveur du tiers-monde critique l'absence d'initiatives industrielles (les industriels affirment que ce n'est pas leur sujet et que les gouvernements et fondations doivent s'en charger). D'accord, mais il ne faudrait pas que Monsanto utilise cet argument de promotion de la lutte contre la faim par les plantes transgéniques (sauf à dire ouvertement que les Etats-Unis se chargent de nourrir qui ils veulent dans le monde. Une autre querelle, déjà évoquée est celle de la production de substances à usage parmaceutique dans des plantes dont 16 demandes d'essais ont été déposées en 12 mois sans que les adversaires aient pu prendre connaissance des détails. Il n'est d'ailleurs pas sûr que ces données seront utilisées pour éclairer le public La Vie des Sociétés 143. Cargill Health & Food Technologies (H&FT) a obtenu le 15 Juillet une autorisation d'utilisation du tréhalose pour le renforcement des flaveurs des produits carnés, notamment dans les rôtis. La société va le commercialiser sous la marque Ascend™. Ce sucre permet de diminuer la sensation métallique ou astringente engendrée par l'utilisation de phosphate ou diacétate de sodium, sel, lactate de potassium. On sait que ce disaccharide est également un stabilisateur de protéines. Cargill Press Release (15JUL04). 144. DuPont a nommé un religieux, le père KT FitzGerald à son comité consultatif. Il est consultant en éthique pour la National Society of Genetic Counselors. Sven Thormahlen, qui est vice-président pour la recherche et l'organisation chez Danone, a également été nommé à ce comité consultatif créé le 22 Septembre 1999 et qui est facilité par le Keystone 28 Center de Keystone au Colorado. Il est chargé de publier des rapports sur les avancées des biotechnologies (http://www.dupont.com/biotech/difference/advisory.h tml pour le rapport 2002, le dernier disponible) chez DuPont. 145. Monsanto vient d'être confronté à l'apparition d'une résistance au glyphosate chez la ragweed (Ambrosia artemisifolia, une Composée causant une sévère allergie) dans un champ du centre du Missouri, et vient de lancer avec l'University of Missouri une analyse de la plante pour déterminer la cause de cette résistance. Monsanto accuse, le plus souvent, les cultivateurs de ne pas suivre les consignes d'utilisation. Les essais préliminaires confirment la résistance, mais on ne sait toujours pas en quoi consiste la résistance qui est notamment associée à Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 une morphologie particulière. Cette résistance est, pour l'instant, isolée dans un seul champ. 146. Depuis 2001, l'US Department of Energy (DOE), le National Renewable Energy Laboratory (NREL) et Novozymes ont entamé une collaboration dans le domaine de la production d'éthanol à partir de matériel cellulosique. Novozymes s'est occupé de l'amélioration de l'efficacité et des coûts de production des enzymes permettant d'obtenir les sucres qui vont être fermentés. En effet, la production actuelle est basée sur du glucose produit à partir d'amidon de maïs, ce qui entraîne une compétition avec les besoins alimentaires. En Février 2004 Novozymes annonçait avoir abaissé les coûts de production de 12 fois, excédant, ce faisant, l'objectif de 10 fois (à 0,30 dollars pour chaque gallon d'éthanol). Il faudrait pouvoir descendre à 0,1 dollars pour un gallon d'éthanol pour atteindre le niveau de compétitivité de la production à partir de l'amidon. Le NREL s'est consacré aux prétraitements de la cellulose (les rafles de maïs) et à la combinaison des enzymes améliorées. Novozymes Press Release (26APR04). 147. La firme belge UCB a racheté pour 1,5 millions de livres la firme britannique, Celltech, pour l'un de ses produits, le CDP 870 (un anticorps monoclonal contre le TNF- destiné à combattre l'arthrite rhumatoïde et la maladie de Crohn (une inflammation intestinale) et qui est "pegylé" (combiné au polyéthylène glycol selon un procédé de Nektar Therapeutics). C'est, selon P Mitchell; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 787, le signal que la "consolidation" des sociétés de biotechnologies est en cours. Celltech est la plus grosse firme indépendante de biotechnologie de Grande Bretagne avec 353 millions de livres de revenu et 50 millions de livres de bénéfice opérationnel. UCB est une relativement petite firme pharmaceutique (productrice de l'antihistaminique Zyrtec) avec 4,4 milliards de dollars US de ventes. Cela vexe beaucoup les britanniques, d'autant que Celltech aurait très bien pu rester indépendante. Les analystes (qui se trompent souvent, comme les scientifiques sur le sujet) prédisent un marché de 740 millions de dollars en 2010. Celltech avait besoin d'un nouveau partenaire pour développer le CDP870 depuis la défection, fin 2003, de Pfizer après sa fusion avec Pharmacia. GlaxoSmithKline et Aventis avaient, un moment, envisagé l'acquisition d'une licence. UCB a fait des propositions qui seraient équivalentes à celles de Pfizer. Cela correspond à un changement de cap de la stratégie d'UCB de la chimie (Union Chimique Belge, si je ne trompe) vers les biotechnologies. Il est vraisemblable que Celltech qui aurait pu se contenter de cet accord sur le CDP870 a préféré anticiper sur les besoins de financement de ses autres produits moins avancés pour lesquels il aurait, de toute façon fallu trouver des partenaires extérieurs, en gardant plus de possibilités. Le prix accepté montre que l'industrie biotechnologique est probablement très sous-évaluée. L'article cite plusieurs autres firmes qui, selon les "experts" sont également dans ce cas. Un des problèmes serait que les investisseurs européens ont tendance à ne vouloir investir que dans leur pays, or l'auteur soutient que les firmes européennes doivent absolument grossir si elles veulent tenir tête aux américaines. EuropaBio souligne que la consolidation ne pourra avoir lieu qu'à condition que les frontières, encore manifestes, soient oubliées, mais les gens "sérieux" ont beaucoup plus tendance à chercher outreatlantique, car l'argent y est plus abondant et les compagnies y seraient plus attractives techniquement et cela pourrait durer. 147. S Lawrence; Nature Biotechnology 22 (AUG04) 798 examine globalement les trois rapports de Ernst et Young de Juin sur les biotechnologies dans le monde. Le secteur des biotechnologies a vu ses revenus croître de 17% (pour atteindre 46,5 milliards de dollars US) une diminution des pertes de 65% à 4,6 milliards de dollars US, mais aussi une réduction des dépenses de recherche de 16% (à 18,6 milliards de dollars US). Le nombre des employés a cru à 200 000 dans les 611 compagnies cotées analysées, soit 9% de plus. Il existait dans le monde à la fin 2003, 4 471 compagnies. S Louët; Nature Biotechnology 22 (JUL04) 789-790, commente celle sur les biotechnologies de la région Asie Pacifique (c'est à dire incluant Nouvelle Zélande et Australie, mais hors Japon) intitulé "Asia-Pacific report, On the threshold", publié en Juin. Cette étude souligne leur développement rapide, alors que l'Europe est recul. La seule limitation est un capital risque très limité, compensé par une stimulation gouvernementale non négligeable. Une série de tableaux permet de visualiser les évolutions comparées en Amérique du Nord en Europe et dans la région Asie-Pacifique, globalement ou par pays. Mondialement, les Etats-Unis restent leader avec 1155 start-ups et 314 sociétés cotées en bourse, suivis du Canada avec 389 et 81, l'Europe avec 1765 et seulement 96 (surtout 43 sociétés cotées en bourse en Grande Bretagne) Cet essor est inégal suivant les pays. L'Australie compte 168 start-up (private companies) mais 58 cotées en bourse (en France on en compterait respectivement 240 et 6) mais Inde et Chine sont en rapide progression (Chine, plus Hong Kong, représentent 126 start-ups et 10 sociétés cotées en bourse, la Suisse ayant sensiblement le même nombre, mais avec seulement 5 sociétés cotées en bourse. Une des forces de la Chine, de l'Inde et de la Corée est le nombre des expatriés jeunes et compétents (je souligne depuis quinze ans le pourcentage de premiers signataires d'articles d'origine asiatique, sauf en Europe et surtout en France). L'avantage des asiatiques sur l'Europe est qu'ils ramènent plus facilement leurs idées et de l'argent qu'en une Europe très académique. Ce qui peut motiver les capitaux locaux est la taille des marchés (Inde et Chine) qui est potentiellement élargi par les accords entre la Chine et l'ASEAN (Brunei, Birmanie, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam) 29 Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 en Mai dernier. C'est trois fois l'Europe (1.7 milliards de personnes). Ceci incite des états comme Singapour à développer des technologies à destination d'un marché ainsi élargi. Le problème est d'adapter les structures au contexte économique et politique qui n'est pas le même qu'en Europe, passée la phase de stimulation publique. Les investisseurs occidentaux sont, de ce fait, très méfiants. Pour faciliter cette transition la Chine a ouvert un équivalent du Nasdaq. En l'absence actuelle de capitaux risques suffisants, les asiatiques développent un système hybride combinant des revenus à court terme comme des services techniques et une recherche de produits, ce qui les handicape dans la rapidité de mise en œuvre de nouveaux produits. Un autre aspect préoccupant, pour eux, est la fragmentation des autorités ce qui ralentit d'autant les mises sur le marché en fonction des pays et de l'efficacité de leurs autorités réglementaires. Le rapport de Ernst & Young souligne qu'il faudrait avoir une structure unique pour la région calquée sur les dispositions européennes (encore que dans le domaine des cultures génétiquement modifiées, nous ne soyons guère un modèle). 148. D McElroy; Nature Biotechnology 22 (AUG04) 817-822, de Verdia se penche, indirectement, sur l'évaluation des acquis intellectuels derrière la valeur d'une entreprise, particulièrement sur le calendrier d'un développement en biotechnologie agricoles On connaît les objectifs de ces améliorations moins sur les techniques qui pourraient être utilisées et amélioreraient le résultat final (par exemple la recombinaison homologue), soit en accélérant la mise sur le marché soit en réduisant les coûts (par exemple, les modalités de production dans les plantes). On n'a pas l'équivalent des trois phases d'essai des médicaments (en fait quatre, avec la phase préclinique) qui permettent de se faire une idée du stade de développement. En fait le profil des risques en ag-biotech est différent de celui de la pharmacie et on ne peut rransposer ce qui se fait dans ce dernier secteur. Il faudrait, selon l'auteur, créer une nomenclature spécifique dont il suggère quelques grandes lignes comparées à celle des médicaments. 149. Les firmes de biotechnologie ont un besoin urgent d'accéder à des financements (et les investisseurs initiaux à un retour sur investisement). L'introduction en bourse en est un qui assure le début de la maturité d'un projet. Une fenêtre vient de s'entrouvrir, mais pas pour tous. Elle s'est ouverte, en fait en Septembre 2003.et 20 compagnies ont pu collecter 1,17 milliards de dollars jusqu'à Avril 2004. L'enthousiasme n'y est quand même pas car, le premier jour de cotation, seules les actions d'Eyetech Pharmaceuticals (voir le Bulletin d'Août §137) a été coté au dessus du prix d'introduction. T Jacobs; Nature Biotechnology 430 22 (AUG04) 949, affirme que ce type d'évaluation de l'intérêt d'une action est erroné. 30 Il rappelle que généralement dans une introduction en bourse, c'est une banque d'investissement qui prend en charge la totalité des actions et , en tant que leader, les vend et a donc la responsabilité de l'opération. Elle agit alors en liaison avec un syndicat de banques auquel elle alloue un contingent d'actions avec un rabais de 7-8%, à charge pour chacun de placer les siennes. Le leader assure la promotion de la société auprès du public comme des investisseurs de toutes nature, pour vendre les actions le plus cher possible dans une sorte d'enchère forcenée. C'est là que réside une difficulté majeure entre l'entreprise et son promoteur banquier. Ce dernier doit laisser espérer aux investisseurs un bénéfice rapide, or la société a encore plusieurs années, le plus souvent, pour mettre quelque chose sur le marché. C'est donc un bénéfice spéculatif qui est recherché au début. L'entreprise a besoin d'un maximum de financement par ce biais et donc une action vendue cher lui plaira plus qu'à son banquier. Autrement dit, plus une action est réévaluée juste après l'introduction, plus la société a perdu d'argent dans l'introduction. L'auteur reprend l'exemple de l'action d'Eyetech, qui a un aptamère contre la dégénérescence de la macula, Macugen™ (pegaptanib sodium) pegylé selon la technique de Nektar. La société est entrée en bourse en Janvier et a récolté $167,2 millions, avant déduction des redevances à la banque introductrice. Offerte à 21 dollars l'action, cette dernière a pris 45% dès le premier jour de cotation. Quelle aubaine…sauf pour Eyetech qui estime avoir donc perdu $76,6 millions offerts aux nouveaux actionnaires. Les sociétés veulent bien perdre quelques pourcent (ce qu'elle font en utilisant une banque d'investissement) mais pas 45%. Ce ne serait que demi-mal si le prix de l'action reste élevé, ce qui facilitera un second round de financement par ce moyen, mais en général l'action retombe et on n'en a tiré aucun avantage compétitif pour l'avenir (il n'y a pas que les biotechnologies auxquelles cela arrive, voir ce qui s'est passé pour plusieurs privatisations). D'où l'avertissement de l'auteur. 150. Syngenta avait abandonné au début de l'année ses poursuites contre Monsanto à propos de la technique de transformation du coton par Agrobacterium. Les deux compagnies avaient décidé de ne pas se réclamer de redevances dans le cadre d'un accord non exclusif de licences sur les techniques de protection biologique contre les insectes et la tolérance aux herbicides. L'encre de l'accord signé entre Syngenta et Monsanto à peine sèche (Syngenta Press Release du 23FEB04), Monsanto attaque Syngenta, le 12 Mai, à propos de son acquisition des maïs GA21 de Bayer CropScience (issus des travaux de De Kalb selon Monsanto), lui interdisant de les commercialiser en 2005 via sa marque NK, ainsi que sous celles de Garst et Golden Harvest et sous licence par d'autres semenciers, et lui intimant de détruire toutes ses lignées. Monsanto affirme dans la même phrase que la technique GA21 est périmée et que sa technique NK603 est très supérieure, et pourtant la société poursuit!!!! Par ailleurs, Monsanto attaque Syngenta, le 10 Mai puis, sous une forme amendée le 27 Juillet, pour Le Bulletin des BioTechnologies – Septembre 2004 – n°221 rupture de contrat sur les sojas transgéniques négociés, à l'époque, avec Ciba-Geigy (prédécesseur de Syngenta). Syngenta Seeds en rajoute une couche en assignant, le 28 Juillet, Monsanto dans un nouveau procès antitrust à propos du maïs. Ce n'est pas tout, le 24 Août (Associated Press), Syngenta signe un accord de coopération avec Delta & Pine Land, un des grands semenciers du coton (filiale de Monsanto jusqu'à nouvel ordre) sur des cotons résistants aux insectes. Syngenta accorde une licence de ses technologies VipCot au détriment de la technique Bollgard™ et obtiendra, en retour, un paiement des licences et une part des bénéfices,mais sans autre détail. Selon Forbes (www.forbes com) c'est le premier pas dans une émancipation de Delta & Pine Land par rapport à Monsanto qui a été longtemps son fournisseur de cotons transgéniques. La raison de ce changement de technique n'est pas dévoilée (mais il y a eu plusieurs échecs dans la protection des plantations de coton dans le sud des Etats-Unis). Le bénéfice le plus probable est une diminution des redevances. La rapidité du basculement entre ces deux techniques sera une indication. Curieusement Monsanto n'avait pas réagi fin août (lors de la rédaction de ce Bulletin). 31