L`Étranger

publicité
Envoyé par Frédérique.
Préparation à l’oral : explication de texte
Baudelaire Les Petits Poèmes en Prose, Le Spleen de Paris I.
L’étranger
Qui aimes-tu le mieux , homme énigmatique, dis ? Ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère ?
- Je n’ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.
- Tes amis ?
- Vous vous servez-là d’une parole dont le sens m’est restée jusqu’à ce jour inconnu.
- J’ignore sous quelle latitude elle est située.
- La beauté ?
- Je l’aimerais volontiers, déesse et immortelle.
- L’or ?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu.
- Eh ! qu’aimes-tu donc, extraordinaire étranger ?
- J’aime les nuages…les nuages qui passent…là-bas…là-bas…les merveilleux nuages !
Explication :
Poème paru en 1862 parmi 14 poèmes en prose précédés de la dédicace à Arsène Houssaye,
Puis dans l’édition posthume de 1869, placé en tête du recueil comme ouverture.
I . Aspect et Structure :
Ce texte se présente sous la forme d’un interrogatoire tendant à percer le mystère d’une
identité, consciente de sa différence.
Disposition typographique particulière du texte : des tirets, des interrogationssystématiques
qui accrochent l’œil.
Contraste entre questions et réponses :
-
Parfois brutales, raccourcies jusqu’au monosyllabe avant de s’étirer à nouveau, à la
fin.
Réponses toujours en contradiction avec les questions, les niant fortement.
Tutoiement du questionneur et vouvoiement de l’étranger.
= refus de la familiarité, désir de maintenance d’une distance entre le moi et les autres.
Communication :
Effet de mise en relief du verbe dis ? dès le début : c’est à la fois une expression familière et
aussi une fausse interrogation = langage qui renseigne et éclaire.
Echec de la compréhension :
Phrases de + en + lapidaires qui suggèrent une certaine irritation du questionneur, qui apparaît
encore + nettement dans la dernière question.
L’identité de l’étranger :
Sens de l’article défini dans le titre ?
= un effet puissant de chiasme entre le début et la fin.
TRANSITION :
Un texte quI cherche à dévoiler l’autre par une série de ? qui veulent caractériser ses goûts,
ses passions : progression de la famille à des idéaux spirituels (la beauté) et matériels ( l’or).
II. La différence de l’étranger :
Texte qui joue sur 2 champs antithétiques : l’amour et la haine ou l’indifférence.
Le verbe aimer encadre le texte mais avec 1 différence : de qui on passe à que comme si le
questionneur prenait conscience de l’impossibilité de l’étranger à aimer quoi que ce soit.
Refus d’ordre affectif :
-
de la cellule familiale (révolte ? refus d’emprisonnement ? )
la reprise en symétrie insiste sur une solitude pathétique.
-
des amis (progression car si la famille n’est pas choisie, les amis le sont par affinités)
tournure plus complexe pour nier encore une fois cette relation affective.
Refus d’ordre social :
- remise en question des valeurs morales et sociales reconnues
les thèmes énoncés le sont plus fortement : un seul nom ( patrie, beauté, or )
Les questions prennent une portée plus générale : progression des adjectifs possessifs à
l’article défini.
-
l’idéal pur de l’homme et de l’artiste : la beauté. ( je l’aimerais _ irréel du présent)
-
l’idéal impur de l’homme : l’or ( la richesse et la puissance )
Comparaison suggestive qui confère une valeur mythique à l’or ( rapprochement avec Dieu)
- Elle dénonce : l’asservissement de l’homme à des besoins matériels
Le pouvoir d’illusion , le besoin auquel on ne peut pas échapper.
Conclusion :
Une forme prosaïque en apparence très structurée et vivante un exemple réussi de poème en
prose.
Un langage d’une extrême simplicité, mais riche de sens.
Une définition du poète et de son sentiment moderne d’étrangeté face aux autres et au monde.
Ce 1er poème du recueil énonce la plupart des thèmes importants qui constituent la difficile
condition du poète :
La solitude face aux autres
Le mépris du matérialisme
La quête difficile et vaine de la beauté
Le goût, la passion vitale pour les voyages, l’évasion les nuages…
Téléchargement