La reprise en symétrie insiste sur une solitude pathétique,
mais qui semble revendiquée par la détermination du ton :
à la répétition des adjectifs possessifs répond le martèlement des ni.
- des amis (progression car si la famille n'est pas choisie, les amis le sont par affinités)
Tournure plus complexe pour nier encore une fois cette relation affective : resté jusqu'à ce jour inconnu.
Le ton emphatique ne cache-t-il pas un désarroi profond ? Le "jusqu'à ce jour" n'indique-t-il pas un espoir Qui subsiste
malgré tout.
Le terme de parole confère au mot amitié un sens abstrait, virtuel, jamais perçu dans le concret, la chair et le cœur.
2. Refus d'ordre social
Remise en question des valeurs morales et sociales reconnues
Les thèmes sont énoncés plus fortement, nettement : un seul nom (patrie, beauté, or)
- refus par "j'ignore" de l'étroitesse du nationalisme et du patriotisme : impossibilité de fixer le lieu de séjour, de vie.
Le terme de latitude prépare l'évasion, le voyage, le refus de l'enracinement dans le réel.
Les questions prennent une portée plus générale : progression des adjectifs possessifs à l'article défini.
- l'idéal pur de l'homme et de l'artiste : la beauté
Pas de terme indiquant un refus, mais l'irréel du présent "je l'aimerais" accentué par l'adverbe modalisateur "volontiers"
traduit bien l'impossibilité de la côtoyer, dans sa forme idéale, sacralisée, qu'il définit rapidement dans les épithètes
détachées : déesse et immortelle (cf La Beauté dans les Fleurs du Mal)
- l'idéal impur de l'homme : l'or (richesse et puissance)
force plus grande des sentiments par ma reprise du verbe haïr
comparaison très suggestive : elle confère une valeur mythique à l'or (rapprochement avec Dieu)
elle dénonce
- l'asservissement de l'homme à des besoins matériels
- le pouvoir d'illusion, le besoin auquel on ne peut échapper
Si les autres haïssent Dieu, mais en ont besoin, la comparaison ne traduit-elle pas aussi un déchirement intérieur de celui
qui hait les richesse matérielles, mais … les envie parfois ?
Dernière interrogation entraîne enfin une réponse positive rendue par le verbe aimer, l'adjectif merveilleux, la répétition
ternaire du terme nuage.
Derrière le symbole, l'allégorie : revendication de l'immatériel, du mouvant, de l'évasion et du rêve, de l'imagination.
Syntaxiquement les points de suspension, l'exclamation ont remplacé les points qui concluaient jusqu'alors définitivement
les rejets successifs, comme une invitation à partir, à prolonger l'émotion et la rêverie.
Conclusion
- une forme prosaïque en apparence, très structurée et vivante, un exemple réussi de poème en prose
- un langage d'une extrême simplicité, mais riche de sens
- une définition du poète et de son sentiment moderne d'étrangeté face aux autres et au monde.
Ce 1er poème du recueil énonce la plupart des thèmes importants qui constituent la difficile condition du poète :
- la solitude face aux autres
- le mépris du matérialisme de la réalité, du vil intérêt, de l'or
- la quête difficile, vaine, de la beauté
- l'absence d'un univers réel, appartenant au poète : la patrie
- le goût, la passion vitale, pour l'évasion, le voyage, les nuages