Colloque 2005 du Club « Contrôles et Mesures Optiques pour l’Industrie » de la Société Française d’Optique Marseille, 21-25 novembre 2005 Les Capteurs à Fibres Optiques pour la Biophotonique Yann Frignac, Guillaume Laffont, Véronique Dewynter, Sylvain Magne, Minh Chau Phan Huy et Pierre Ferdinand CEA-List-LMO DETECS / SYSSC - Centre d’Etudes de Saclay - F91191 Gif-sur-Yvette Cedex Tél. : 33-(0)1.69.08.83.39 - Fax : 33-(0)1.69.08.83.95 - email : [email protected] Mots clés : Biophotonique, Fibre Optique, Capteur à Fibre Optique (CFO), Réseau de Bragg (RdB), réfractométrie, Luminescence stimulée optiquement, Fluorescence. Introduction Les biotechnologies, dont le dynamisme actuel n’est plus à démontrer1, jouent un rôle de plus en plus important dans le secteur des industries de la santé, mais occupent aussi une place émergente dans ceux de l’environnement, de l’agriculture, de l’agro-alimentaire, … ce qui de facto requiert la mise au point de nombreux capteurs et systèmes de mesure aux fonctionnalités nouvelles. Le marché des biotechnologies pourrait, d’ici un petit nombre d’années, atteindre plusieurs milliards d’euros d’après la commission européenne, la France se situant au 3 ème rang européen derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni 2 ; nul doute que, dans un tel contexte de croissance, ‘l’instrumentation’ prendra des parts de marché prédominantes. Récemment, certains laboratoires de recherche impliqués dans « l’Optique » se sont découvert une vocation pour la Biophotonique, c’est-à-dire pour l’étude des interactions entre les photons et le vivant. Un certain nombre d’experts s’accordent désormais sur la ‘définition’ de ce nouveau domaine, comme étant « l’application de l’optiquephotonique à la Biologie et aux Sciences de la Vie plus globalement »3. En fait, soyons clairs, certains développements sous-jacents ou « briques de base » existaient d’ores et déjà dans les laboratoires, et sans plagier M. Jourdain, ils en faisaient sans le savoir … Cela étant, l’émergence des besoins, couplée aux avancées technologiques menées lors des deux dernières décennies dans plusieurs domaines technologiques comme l’optoélectronique, la micro électronique et la microinformatique, pour ne citer que ceux là, est sans aucun doute à l’origine de cet engouement. Plus spécifiquement, les avancées réalisées dans le domaine des Capteurs à Fibres Optiques (CFO) permettent aujourd’hui à cette technologie de répondre à de nombreuses problématiques du monde industriel. Elle permet conjointement d’offrir des opportunités et des approches nouvelles, tant pour la Biologie et la Médecine que pour d’autres secteurs, dans la mesure ou les grandeurs évaluées traditionnellement par les CFO sont très variées : température, pression, déformation, force, indice de réfraction, dose radioactive … Les nombreux développements réalisés autour de ces capteurs et des systèmes de mesure associés, ainsi que les avantages intrinsèques des fibres optiques justifient la mise en oeuvre de cette technologie pour des applications en biologie ou en médecine. La petitesse des fibres utilisées (diamètre 125 µm) leur confère une très faible intrusivité et permet d’effectuer des mesures localisées et déportées. Elles peuvent être connectées à des systèmes multiplexant, en temps réel, de nombreuses voies de mesure. Les fibres (majoritairement en silice) résistent aux radiations et la mesure optique est insensible aux perturbations électromagnétiques (mesures sous champs, rayons X, gamma). Enfin, le faible coût des fibres de télécommunications mises en œuvre dans la plupart de ces instrumentations autorise l’emploi de sondes à usage unique (jetables). De plus, les nouvelles technologies actuellement en développement (Fibres à Cristaux Photoniques, …) offrent de nombreuses perspectives d’avenir qu’il est intéressant d’explorer, et dont la conjonction constitue une rupture technologique porteuse d’avenir pour ce type d’instrumentation. Ainsi, nous présenterons quelques applications biomédicales fondées sur les CFO, certaines déjà expérimentées, d’autres en devenir : mesures d’indice de réfraction de cytoplasme cellulaire, mesures dosimétriques pour le suivi des patients en radiothérapie, détection et mesures quantitatives de biomolécules (anticorps, antigènes, protéines, ADN, 1 D’après l’OCDE, le nombre de brevets croît de 15 % l’an, et celui des créations d’entreprise est en forte hausse. 2 Etude Ernst et Young, en terme d’acteurs impliqués. 3 La Biophotonique Française, Perspectives et développement, Etude réalisé par Optics Valley et le Génopole d’Evry en collaboration avec l’ADIT, 5 juin 2003 www.opticsvalley.org. 1 toxines, etc.), mesures corporelles de température et de déformations (hypo- et hyperthermie, volume respiratoire, déformations osseuses, musculaires, etc.)4. Les deux premières applications sont fondées sur des mesures de puissance lumineuse d’un transducteur placé en extrémité de fibre tandis que les dernières impliquent l’utilisation de transducteurs à réseaux de Bragg gravés au sein même du cœur des fibres optiques. Une première partie de cet article détaille les principes techniques de fonctionnement des Capteurs à Fibres Optiques, tandis que les applications font l’objet de la seconde partie. Libre au lecteur averti ou uniquement intéressé par les applications de s’y rendre directement. 1 Rappels des principes techniques Nous appellerons dans la suite « capteur » un système complet permettant de déceler et/ou de quantifier les variations d’un paramètre physique. Celui-ci comprend plusieurs sous-systèmes : ceux dits de détection (perception d’un paramètre physique), d’autres pour la transduction (changement de nature physique du signal de détection) et d’autres enfin pour le traitement du signal (mis en forme du signal sous forme de données perceptibles par l’utilisateur). Comme indiqué schématiquement dans la Figure 1(a), la partie transductrice d’un CFO consiste en un composant (souvent la fibre elle-même) au sein duquel la lumière guidée subit une modification due à une perturbation extérieure, modification qui renseigne sur le paramètre physique, voire chimique à détecter. Outre le fait qu’une classification repose sur la nature de cette modification qui peut intervenir sur l’amplitude, la phase, la longueur d’onde ou encore l’état de polarisation, les CFO peuvent également être subdivisés en d’autres catégories (cf. Figure 1b) : les capteurs directs, intrinsèques ou extrinsèques [5] . Les capteurs directs consistent le plus souvent en des spectrophotomètres analysant la réflexion en bout de fibre optique et permettant des analyses directes in vivo sur des zones très localisées. Dans le cas des CFO intrinsèques les perturbations extérieures sont captées par le biais de modifications des caractéristiques opto-géométriques de la fibre optique. Enfin les capteurs extrinsèques incluent un élément transducteur supplémentaire qui convertit la perturbation induite par le phénomène à détecter sur la lumière transmise par la fibre. Fibre optique de déport Paramètre F. o. transductrice Transducteur (a) Type : direct intrinsèque extrinsèque (b) Figure 1 : Principe général de fonctionnement des Capteurs à Fibres Optiques (CFO) Les CFO que nous développons spécifiquement au laboratoire sont de type direct par reflectométrie en bout de fibre (Cf. § 1.1), de type extrinsèque en utilisant une transduction réalisée par luminescence stimulée optiquement (Optically Stimulated Luminescence : OSL, Cf. § 1.2), ou encore de type intrinsèque comme dans le cas des réseaux de Bragg photoinscrits au sein même du cœur des fibres (Fiber Bragg Gratings : RdB, Cf. § 1.3) voire des biorécepteurs (Cf. § 1.6). Nous décrirons également ici un nouveau type de fibre optique dites fibres microstructurées (Microstructured Optical Fibers : MOF, Cf. § 1.5) tant les nouvelles propriétés de guidage qu’elles offrent servent avantageusement les CFO dans le domaine de la Biophotonique. 1.1 La réflectométrie optique Il est plus habituel en biologie de parler de coefficients d’absorption et de diffusion de tissus biologiques que d’indice de réfraction ; pourtant cette grandeur peut s’avérer riche d’information. Une des méthodes possibles de mesure de l’indice de réfraction de milieux biologiques par fibre optique utilise avantageusement le principe de la réflexion de Fresnel en extrémité de fibre. Selon le schéma de la Figure 2, un réflectomètre optique (OTDR pour Optical Time Domain Reflectometer) émet des impulsions lumineuses répétitives injectées dans la fibre optique et mesure la lumière réfléchie par l’interface entre l’extrémité des guides et le milieu à ausculter placé en bout de fibre. Les fibres optiques sont aussi utilisées pour l’imagerie optique non invasive (visualisation des cavités, l’action de certaines thérapies : suivi des phénomènes de fluorescence ou de luminescence, …). Un bon nombre de ces approches sont fondées sur « l’OCT » pour Optical Coherence Tomography, tirant profit des propriétés de faible cohérence des sources à large spectre, pour réaliser la mise au point de l’image à une profondeur donnée. La PME Mauna Kea Technologies a ainsi développé le « Cell-viZio », utilisant la microscopie confocale, dédié à l’imagerie cellulaire in vivo de très haute résolution du petit animal. Pour cela, un petit endoscope contenant plusieurs milliers de micro fibres (bundle), est inséré via une petite incision et le praticien vient placer l’extrémité des fibres proche du contact tissulaire. La résolution de l’image obtenue est comprise entre 5 µm et 1 µm. Des expériences menées sur des tissus (épithélium) ont permis un diagnostic extrêmement précoce de lésions cancéreuses. Cette méthode est efficace dans le cadre de l’endoscopie d’organes creux puisqu’elle permet une pénétration optique du tissu. On parle dans ce cas de « biopsie optique » sans prélèvement chirurgical. 4 2 Fibre optique Traitement Réflectomètre Figure 2 : Schéma de principe de la réflectométrie optique en bout de fibre Le coefficient de réflexion de Fresnel (R) à cette interface est lié à la différence des indices du milieu (nm) et de la silice composant la fibre optique (nf) ainsi qu’à l’angle d’incidence de la lumière sur le plan de clivage de la fibre selon : 2 2 2 n f cos n m n f sin R n cos n 2 n 2 sin 2 m f f 1 2 1 2 2 R : coefficient de réflexion de Fresnel : angle d’incidence de la lumière sur le plan de clivage de la fibre nm : indice de réfraction du milieu à tester nf : indice de réfraction de la fibre Équation 1 Cette formulation est grandement simplifiée lorsque est nul et R vaut alors ((nf-nm)/(nf+nm))2. Ce coefficient de réflexion est accessible aisément via les mesures de pertes en réflexion (Return Loss) fournies par les réflectomètres commerciaux et il permet ainsi d’accéder à l’indice de réfraction nm du milieu à sonder. La réflectométrie peut également être réalisée à l’aide d’un montage plus simple (de type « échomètre ») contenant une source, un coupleur « 3 dB » et un photorécepteur, mais la mesure de l’écho en bout de fibre souffre alors de l’influence des pertes en ligne et plus globalement de la fonction de transfert en intensité du dispositif. A contrario, le réflectomètre résolu dans le temps (OTDR) permet intrinsèquement de normaliser le signal en se référant au niveau rétrodiffusé juste en amont de l’écho. Cette mesure d’indice de réfraction extrêmement localisée (en bout de fibre) est de grand intérêt pour les mesures des propriétés des tissus biologiques, voire des cellules vivantes comme nous le détaillerons au § 2.1.4. 1.2 La Luminescence Stimulée Optique (OSL) Une seconde technique développée au laboratoire consiste en la mesure extrinsèque de la dose des rayonnements ionisants. Elle fait également intervenir une mesure en bout de fibre mais cette fois par le biais d’un transducteur extrinsèque. Le principe de ce système de mesure est illustré par la Figure 3. Le matériau transducteur a la propriété de « conserver » l’information de la dose ionisante (photons ou électrons ionisants) via des excitations d’électrons vers des niveaux d’énergie dits « niveaux pièges », situés dans la bande interdite entre les bandes de valence et de conduction (Cf. schéma de droite de la Figure 3). La dose ainsi « enregistrée » peut être lue par Luminescence Stimulée Optiquement. Cette opération est réalisée par une excitation lumineuse apportée par la fibre optique. Celleci fait transiter les électrons précédemment « piégés » vers un niveau d’énergie supérieure (bande de conduction). Les électrons reviennent alors à leur état « stable » par émission lumineuse (via des centres de recombinaison). La luminescence ainsi produite est alors reconduite par la même fibre puis analysée. La quantification de cette énergie lumineuse permet de remonter à la dose « enregistrée » par le transducteur, laquelle est proportionnelle à la dose perçue localement. Nous utilisons comme matériaux transducteurs soit des polycristaux de type MgS (ou BaS) dopés par des ions de terres-rares soit des cristaux d’alumine ; ces derniers offrant une meilleure résolution en dose [8] . Lame séparatrice Source Lumineuse Dosimétrie localisée Composant transducteur Fibre optique Spectromètre intégré, Analyse des données Signal Lumière incidente dose temps Excitation par Irradiation ionisante Luminescence = électron Figure 3 : Principe de la Luminescence Stimulée Optique (OSL) Le système de mesure (transducteur + fibre) permet ainsi une analyse déportée de la dose déposée localement et il atteint, pour l’exemple du dosimètre à cristaux d’alumine, une résolution en dose de 20 µGy pour un déport de 20 m. Un procédé de compensation en énergie de photons et en dépendance angulaire a par ailleurs été développé pour les 3 besoins de la dosimétrie opérationnelle, permettant d’envisager une mesure normalisée H p10 (5) dans la gamme en énergie de photons [20 keV - 3 MeV] et sur un angle solide couvrant 95 % de l’espace, performance bien supérieure à la norme précitée[10] . Réflexion norm. 1 Ordre -1 2 Ordre 0 B 1 1 0 0 1545 1555 1565 Longueur d’onde (nm) Réseau en angle Transmission norm. Réseau droit Ordre -1 2 1 Ordre 0 (a) Transmission norm. 1.3 Les Capteurs à Fibres Optiques à Réseaux de Bragg (RdB) Les réseaux de Bragg fibrés (RdB) sont des réseaux de diffraction que l’on réalise par photo-insolation en lumière laser (continue ou pulsée) du cœur guidant de fibres optiques généralement monomodes. Ces fibres optiques sont rendues photosensibles, pour la lumière laser ultraviolette (= 244 nm pour cw = 193 nm), par adjonction de dopants tels que le germanium (Ge). Un réseau de Bragg consiste en une modulation submicronique de l’indice de réfraction du cœur de la fibre optique : un réseau de quelques millimètres de longueur comporte ainsi environ un millier de périodes ou « pas » (Cf. Figure 4a). De tels réseaux se comportent comme des réflecteurs (réponse spectrale en Figure 4a) pour une bande spectrale très fine centrée à la longueur d’onde caractéristique B dite de Bragg et définie par la relation B = 2.ne., avec le pas du réseau (~ 500 nm) et ne l’indice effectif du mode de propagation (~ 1,45). Toute modification de l’indice effectif ou du pas du réseau déplace proportionnellement la longueur d’onde B. Le suivi de ces déplacements spectraux permet donc de remonter aux paramètres physicochimiques inducteurs. 1 0 1500 1540 1580 Longueur d’onde (nm) (b) Figure 4 : Schémas et réponses de réseaux de Bragg fibrés : (a) RdB droit, (b) RdB en angle Ce principe est à la base de toutes les applications métrologiques des réseaux de Bragg [1] . Outre les intérêts usuels apportés par les fibres optiques que nous avons détaillés en introduction, les réseaux de Bragg fibrés présentent la propriété intéressante de pouvoir aisément être multiplexés. Il suffit pour cela de cascader plusieurs RdB avec des pas différents, chacun pouvant être interrogé par le système opto-électronique autour de sa longueur d’onde caractéristique dite aussi de « Bragg ». Un exemple de tels systèmes de mesure est présenté à la Figure 5 dans le cas d’une mesure de température. La lumière incidente est successivement réfléchie aux longueurs d’onde de Bragg B1, B2,B3, par les trois RdB. Le spectre en réflexion de la chaîne complète à la température T 1 est alors celui de gauche de la Figure 5. Pour une variation de température T, par exemple localisée uniquement sur le RdB 2, la longueur d’onde de Bragg B2 varie en proportion et le spectre en réflexion de la chaîne complète renseigne sur cette variation localisée de température. Compte tenu de la faible perte en signal des fibres optiques une analyse métrologique en temps réel, déportée sur de longues distances est monnaie courante. Intensité T1 T2 circulateur Intensité Lumière incidente B1 RdB1 Fibre optique B2 B3 B1 B3 Variation de température De T1 à T2 B3 Lumière réfléchie à T2 RdB3 B2 * B2 * B2 Lumière réfléchie à T1 B1 RdB2 * B2- B2 T Figure 5 : Exemple d’un système à réseaux de Bragg dans le cas d’une mesure de variations de température Ainsi, classiquement, les réseaux de Bragg permettent d’effectuer des mesures de température, de déformations, de pression et d’indice de réfraction. Leurs performances indicatives de sensibilité, résolution et gamme de mesure vis à 5 La norme de mesure Hp10 implique que le capteur fournit une valeur de dose équivalente (en énergie) à la dose que percevrait un tissu humain à 10 mm de profondeur. 4 vis de ces paramètres physiques sont consignées dans le Sensibilité Résolution typique 1 pm de rés. Spectrale à 0.1 pm de rés. Spectrale Gamme de mesure Température 12 pm/°C ~ 0,1 °C ~ 0,01 °C 0 K – 1000 K Déformations 1 pm/(m/m) 1 m/m 0,1 m/m 2% - 5 pm/MPa 0,2 MPa 0,02 MPa - 100 pm/MPa avec gainage* 0,01 MPa 0,001 MPa Pression 10-5 Indice de réfraction > 100 MPa ** 1,3-1,45 Tableau 1. La sensibilité est exprimée comme une variation de la longueur d’onde de Bragg en fonction d’une variation physique. La résolution quant à elle est obtenue sur la base de la sensibilité de chaque capteur en admettant que la résolution spectrale de mesure de la longueur d’onde de Bragg est de l’ordre de 1 pm voire 0,1 pm (elle peut atteindre le dixième de picomètre avec la dernière génération de systèmes de mesure développée par notre laboratoire). Nous préciserons au § 1.5 les méthodes de mesure de l’indice de réfraction pour lesquels nous montrerons l’intérêt d’utiliser des RdB avec une variation d’indice non orthogonale à la direction de propagation aussi appelés RdB en angle (ou réseaux blazés) tels que présentés à la Figure 4.(b). Sensibilité Résolution typique 1 pm de rés. Spectrale à 0.1 pm de rés. Spectrale Gamme de mesure Température 12 pm/°C ~ 0,1 °C ~ 0,01 °C 0 K – 1000 K Déformations 1 pm/(m/m) 1 m/m 0,1 m/m 2% - 5 pm/MPa 0,2 MPa 0,02 MPa - 100 pm/MPa avec gainage* 0,01 MPa 0,001 MPa Pression 10-5 Indice de réfraction > 100 MPa ** 1,3-1,45 Tableau 1 : Performances des CFO à réseaux de Bragg vis-à-vis des paramètres physiques (* : polymère amplificateur, ** : la mesure d’indice de réfraction n’étant pas directement liée à la mesure du décalage de la longueur d’onde de Bragg, la résolution spectrale n’intervient pas dans la résolution de mesure en indice de réfraction) 1.4 Les fibres optiques micro-structurées Un autre élément technologique, plus récent et complémentaire aux réseaux de Bragg montre des résultats prometteurs dans le domaine des CFO pour les analyses biologiques ou biomédicales. Il s’agit des nouvelles fibres optiques présentant une structure transverse plus complexe que les fibres traditionnelles (sauts ou gradients d’indice concentriques) et qui sont usuellement regroupées sous le terme de Fibres Optiques Microstructurées (MOF) [3] . Par rapport à la fabrication d'une fibre classique, la réalisation d'une fibre microstructurée diffère dans la conception de la préforme à étirer. Le procédé de fabrication de la fibre se déroule en plusieurs étapes : l'usinage du barreau de silice dopée pour le cœur, l'assemblage de la préforme de ce qui deviendra la future fibre et enfin le fibrage proprement dit. La préforme est un assemblage de capillaires et de barreaux pleins de silice, de quelques millimètres de diamètre. L'ensemble est introduit dans un tube qui maintient les différents barreaux et capillaires en place lors du fibrage. L’opération de fibrage est également plus complexe que pour une fibre standard (on doit éviter le rétreint) et fibrer à des températures plus faibles [16] . Les capillaires permettent de former les futurs canaux de la fibre et les barreaux pleins servent de matière et maintiennent la structure en place. Le barreau central, futur cœur de la fibre, peut également être dopé germanium en vue d’une inscription de réseaux telle que décrite au § 1.3. Des illustrations de préformes et de fibres étirées sont fournies par la Figure 6. Préforme Fibre étirée Modélisation gaine Fibre à 6 trous trous trous cœur trous gaine Fibre microstructurée Fibre en nid d’abeilles D’après Crystal Fiber A/S Denmark http://www.blazephotonics.com/ 5 Figure 6 : Illustration de la préforme et de la fibre étirée pour deux types de fibres microstructurées Les canaux de telles fibres peuvent être employés pour la circulation de fluides. Dans ce cadre, le principal avantage des MOF sur les fibres standard réside dans leur structure transverse qui renforce les interactions du champ optique de l’onde avec les fluides ou analytes biologiques présents dans les canaux[13] [14] . Des étapes expérimentales et numériques, aussi bien optique que microfluidique, permettent d’optimiser leur conception dans cette finalité. Mesures d’indices de réfraction 1.5 Nous nous concentrons ici sur les techniques développées pour la mesure d’indice de réfraction puisqu’elles présentent un intérêt particulier pour les biocapteurs, comme nous le détaillerons au paragraphe suivant. Parmi les techniques de mesure d’indice de réfraction recourant à des fibres optiques, les plus directes sont la réflectométrie (Fresnel) ou la réflectométrie résolue dans le temps (OTDR : Optical Time Domain Reflectometer). La première dont nous avons décrit le principe au § 1.1 est la plus simple à mettre en œuvre mais n’atteint qu’une résolution de quelques 10-4 sur la mesure d’indice. De plus, elle nécessite une référence pour la mesure du coefficient de réflexion. La seconde est fondée sur l’analyse du signal optique contrapropagatif généré soit par la rétrodiffusion de Rayleigh du matériau de la fibre soit par des réflexions dues à des changements brutaux de milieux de propagation. Si le signal optique rencontre un milieu d’indice différent l’appareil retourne un saut dans le tracé des pertes en réflexion, lequel est proportionnel à la différence d’indice rencontrée à l’interface. Il n’est donc pas nécessaire d’étalonner l’appareil ou d’acquérir des mesures de référence. Néanmoins cette dernière technique reste relativement onéreuse compte-tenu du coût d’un réflectomètre. Des solutions développées plus récemment au laboratoire incluent des réseaux de Bragg fibrés (Cf. § 1.3). Le schéma de principe de ce type de mesure est détaillé Figure 7. La lumière incidente est conduite via un circulateur vers le RdB, puis l’analyse de la lumière transmise et/ou réfléchie renseigne sur l’indice de réfraction du milieu (fluide) à tester. Les deux configurations possibles sont illustrées en Figure 7 (b) et (c). La première consiste en l’emploi d’un RdB en angle inscrit au cœur d’une fibre standard, le fluide se trouvant à l’extérieur de la gaine. La seconde réunie les deux technologies des RdB et des fibres microstructurées (décrites au § 1.4), le fluide circule cette fois dans les canaux de la fibre à trous. fluide Circulateur Lumière réfléchie gaine 2 1 cœur Fibre optique RdB fluide fluide Onde optique RdB fluide ou Lumière transmise (a) 3 (b) Mesure d’indice par RdB en angle dans une fibre standard. modes optiques guidés transmis ou réfléchis, modes de gaine, modes rayonnants. fluide trous fluide gaine RdB (c) Mesure d’indice par RdB (droit ou en angle) dans une fibre microstructurée. (zone d’interaction signal optique-milieu à tester : ondes évanescentes indiquées par des ellipses pointillées) Figure 7 : Schémas de principe pour les mesures d’indice par réseaux de Bragg Les réseaux de Bragg standard décrits au § 1.3 sont relativement peu sensibles à l’indice de réfraction du milieu extérieur à la fibre optique : le mode de propagation reste en effet confiné dans le cœur guidant de la fibre isolé du milieu extérieur par une couche de plusieurs dizaines de microns de silice (à la longueur d’onde de travail généralement de 1,55 m et avec un cœur qui a typiquement un diamètre de 10 µm pour un diamètre extérieur de 125 µm). Afin de développer les applications des réseaux de Bragg dans le domaine des mesures d’indice, nous utilisons des RdB dont la modulation d’indice présente un angle par rapport à la direction de propagation : on parle alors de réseaux de Bragg en angle (Cf. Figure 4.b). En rompant la symétrie de révolution du composant, on autorise des couplages entre le mode fondamental guidé (indicé en Figure 7.b) et des modes de gaine (indicés ) dont la partie évanescente du champ est susceptible d’interagir très fortement avec un milieu entourant la fibre optique. Ainsi, selon l’indice de réfraction du fluide extérieur, une partie du champ évanescent des modes de gaine peut être rayonné (). Les réseaux en angle présentent une réponse spectrale plus complexe que les réseaux simples, et dont le grand nombre de résonances spectrales traduit le caractère multimode de la cavité optique constituée par la gaine de la fibre (cf. Figure 4.b). Comme décrit à la Figure 8.(a), ce spectre est sensible à tout changement de l’indice de réfraction du milieu extérieur. Nous avons pu montrer[11] qu’une évaluation de la surface occupée par les raies spectrales des 6 modes de gaine renseigne précisément sur l’indice de réfraction du milieu extérieur. On peut alors obtenir une courbe de conversion aire-indice de réfraction. Le graphe de la Figure 8.(b) fournit des exemples de telles courbes pour différents angles de modulation d’indice des RdB. Ainsi, un tel réfractomètre peut être utilisé sur une plage d’indice allant de 1,3 à 1,45 avec une résolution typiquement de 10 -5 et de 1,45 à 1,7 avec une résolution de 10 -4 [12] . Le principe de la seconde solution, illustrée en Figure 7 (c), repose sur le fait que le champ optique des différents modes des fibres microstructurées est en interaction forte avec le milieu inséré dans leurs canaux. Lorsque l’indice de réfraction du fluide circulant dans les canaux change, les modes optiques d’ordre supérieur, dont l’étendue transverse est la plus vaste, voient leurs propriétés de guidage évoluer. Actuellement, cette méthode permet une mesure d’indice dans la gamme de [1,3 à 1,45] gamme dans laquelle une optimisation des fibres microstructurées et des réseaux de Bragg intégrés permet d’atteindre des résolutions de l’ordre de 10 -5 [15] . A l’inverse de la méthode précédente (fibre standard + RdB en angle), les mesures d’indice au delà de la valeur de l’indice de la silice (1,45) ne peuvent être atteintes. Ces performances actuelles sont d’ores et déjà prometteuses et nous espérons, par le biais d’une optimisation du profil d’indice transverse de ces fibres, repousser les limites de résolution et de gamme de ce type de mesure d’indice de réfraction. 1580 1 T. norm. 1540 fibre 0 n1=1.354 (nm) T. norm. Source 1 T. norm. Air (n=1) n2=1.387 (nm) Aire normalisée (nm) : 1500 0.5 0 1.3 1.34 1.38 1.42 Indice de réfraction extérieur Aire occupée par les raies (a) (b) Figure 8 : Mesure d’indice par RdB en angle dans une fibre standard. Cette mesure est réalisée en analysant les spectres de transmission de RdB en angle (a). Le calcul de l’aire occupée par les raies spectrales des modes de gaine fournit l’indice de réfraction du milieu entourant les RdB (b). Le graphe (b) donne la conversion aire-indice pour différents angles de modulation d’indice des RdB 1.6 Les Biocapteurs Nous présentons ici un survol simplificateur des biocapteurs en résumant les principes et en fournissant quelques exemples. Les détails ou prolongements pourront être obtenus dans les références citées en fin d’article[2] [4] [5] [6] . De manière générale les biocapteurs comprennent, comme indiqué à la Figure 9 des biorécepteurs qui, par reconnaissance moléculaire ou macromoléculaire, vont se lier sélectivement aux analytes cibles (i.e. les molécules potentiellement présentes et que l’on cherche à déceler dans une solution). Notons qu’une voire plusieurs étapes de transduction sont requises pour convertir l’information de ce lien sélectif dans un domaine physique de signaux facilement analysables [5] . Analytes Bio-récepteur Traitement des données Signal Transducteur Électrique Figure 9 : Principe général de fonctionnement des biocapteurs Une vue d’ensemble des biorécepteurs et transducteurs associés est proposée en Figure 10. Conformément au schéma supérieur droit de cette figure, la bioréception est de façon générique divisée en deux étapes. Une première étape connue sous le nom de « biofonctionnalisation » permet d’adapter le substrat (du transducteur) aux biorécepteurs. Puis, l’étape de bioréception comprend le plus souvent un ensemble de macromolécules organiques à même de se lier 7 sélectivement avec les analytes à détecter[2] . Dans la majorité des cas le substrat appartient aux domaines de la microélectronique6 ou de l’opto-électronique. En ce qui concerne les substrats proprement dits, il s’agit du silicium (Si), de la silice (SiO 2) voire de l’Arseniure de Gallium (AsGa) sur lesquels peuvent être ajoutés de l’or (Au) ou du Chrome (Cr). La fonctionnalisation peut être assurée par des thiols ou des silanes (à titre d’exemple l’APTS : AminoPropylTriethoxySilane)[19] composée d’une chaîne carbonée terminée par un groupe se liant de façon covalente au substrat. D’autres molécules poursuivent cette adaptation en se liant aux précédentes, généralement par liaisons hydrogène dont un terminal est reconnu par les biorécepteurs (à titre d’exemple le complexe avidine-biotine [20] ). Enfin, compte tenu des applications visées, les biorécepteurs sont le plus souvent empruntés au monde du vivant à savoir des macromolécules présentant des complémentarités immunologiques (Anticorps-Antigène), enzymatiques (procédé ELISA : Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay), ou génétiques (brins d’ADN ou d’ARN). De plus des reconnaissances artificielles rassemblées sous le terme de biomimétisme peuvent être mises au point, notamment par le biais de Polymères à Empreinte Moléculaire (PEM)[26] . Fonctionnalisation du substrat Biorecepteur Reconnaissance analyte/bio-lien Substrat Biocapteurs Anticorps RIA (Radio Immuno Assay) Enzyme ELISA (Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay) ADN Analytes cibles Cellule Biomimétique Bio-liens Electrochimique Transducteur Electrique Ampèremétrie, potentiométrie Conductivité Microbalance à quartz Piezo-électrique (QCM), Ondes Acoustiques de Surface (SAW) Thermique Calorimétrie Luminescence Bio- ou Chimiluminescence Fluorescence Par exemple les capteurs immunologiques (FIS) Raman Diffusion Raman auto-amplifiée (SERS) Absorption Spectroscopie dans le proche infrarouge (NIRS) Spect. à interférence d’ondes réfléchies (RiFS) Réflexion Optique Réflectométrie à balayage d’angle (SAR) Echométrie simple et Réflectométrie OTDR Résonance à plasmons de surfaces (SPRS) Réfraction Spectroscopie des modes optiques (OWLS) Réfractométrie à réseaux de Bragg fibrés (FBGR) Figure 10 : Familles de biorécepteurs et de transducteurs Reste maintenant au transducteur à convertir cet accrochage moléculaire idéalement sélectif en des signaux qui, plus en aval dans le système, seront traitables par l’électronique et les logiciels de traitement du signal. Pour ce faire, la liaison avec l’analyte cible déclenche, par exemple, une chaîne de réactions oxydo-réductives menant à la libération d’électrons et autorisant ainsi une transduction électrochimique (ampérométrie [21] , potentiométrie). Cette liaison peut également changer la conductivité (transduction électrique) du substrat ou son poids (transduction mécanique par Microbalance à cristal de quartz : QCM [4] ) ou encore sa capacité calorifique (transduction thermique). Enfin cette liaison est susceptible d’induire des variations de propriétés d’ondes acoustiques (SAW : Surface Acoustic Waves) ou électromagnétiques (transduction optique). Nous détaillons plus avant cette dernière catégorie de transducteurs puisqu’ils concernent plus particulièrement les fibres optiques. Ainsi, une énumération des principaux types de transduction optique est donnée à la Figure 10 selon le mode d’interaction lumière-matière en jeu. Citons les mesures de luminescence (dont nous avons discuté un cas particulier au § 1.2), de fluorescence (par exemple les FIS : FluoroImmuno Sensors), celles fondées sur l’effet Raman (capteurs à SERS : Self-Enhanced Raman Sacttering [24] ), ou l’absorption lumineuse (par exemple la spectroscopie dans le proche infrarouge, NIRS : Near-InfraRed Spectroscopy [2] ), la réflexion (RiFS : Reflectometric InterFerence Spectroscopy [25] , l’OTDR citée précédemment, ou la réflectométrie à balayage d’angle : SAR) voire encore la réfraction. Pour ce dernier type d’interaction lumière-matière, une des techniques qui a le plus percé industriellement est celle dite de résonance à plasmons de surface (SPR) 7 [22] . Cette technique est couramment employée pour le suivi en temps réel de la quantité de biomolécules cibles dans une solution. Citons également la technique de la spectroscopie des modes optiques (OWLS) [23] où cette fois c’est l’excitation des modes optiques d’un guide d’onde planaire qui est conditionné par l’accrochage des analytes cibles. la « fonctionnalisation » a connu un développement important à l’occasion de la conception des biopuces ces dernières années. Les plasmons de surface prennent naissance dans une très fine couche d’or lorsqu’elle est soumise à une excitation lumineuse ayant un angle d’incidence donné. Si maintenant cette couche d’or inclut des biorécepteurs, l’angle d’incidence d’excitation des plasmons dépend de la liaison avec des analytes cibles. 6 7 8 Enfin, la technique que nous utilisons plus particulièrement au laboratoire : la réfractométrie par réseaux de Bragg fibrés dont nous avons explicité les principes au § 1.3. Le principe de fonctionnement des biocapteurs à fibres optiques actuellement en cours de développement est décrit Figure 11. Dans ce dispositif, un circuit microfluidique permet le passage de la solution contenant les analytes cibles dans les canaux d’une fibre microstructurée (Cf. § 1.4). La surface interne de ces canaux doit être fonctionnalisée de manière à pouvoir se lier (généralement par liaisons hydrogènes) sélectivement aux molécules recherchées. Lors de la liaison de ces molécules, un film se forme à la surface des canaux. La détection de cette liaison est alors réalisée via la variation d’indice induite. La mesure d’indice est celle décrite au § 1.5 et elle se traduit par un décalage d de la longueur d’onde de Bragg du réseau inscrit au cœur de la fibre. Ce principe peut également être transposé au cas des fibres standard en fonctionnalisant cette fois la surface de leur gaine externe. De cette manière la détection de biomolécules peut bénéficier de tous les avantages des Capteurs à Fibres Optiques (déport important, faible intrusivité, légèreté, immunité électromagnétique, multiplexage, etc.) = Pompage Source Lumineuse Réseau inscrit dans la fibre à trous Solution avec analyte biologique à détecter Spectromètre intégré Analyte cible non fixé Fonctionnalisation biologique de la paroi des trous dsp d Analyte cible fixé Reconnaissance moléculaire Figure 11 : Principe des bio-CFO à réseaux de Bragg. Exemple d’insertion de biorécepteurs à l’intérieur des canaux d’une fibre micro-structurée Les principales techniques de mesure étant désormais présentées, des exemples d’applications des Capteurs à Fibres Optiques dans le domaine du vivant que nous développons ou projetons de développer au laboratoire sont décrits dans la seconde partie. Pour chacun d’eux nous nous référerons à un ou plusieurs principes techniques exposés dans cette première partie. 2 2.1 Domaines d’applications biophotoniques des Capteurs à Fibres Optiques Biomédical et biologie De nos jours, le domaine de la santé peut bénéficier des développements scientifiques et technologiques conduisant à des systèmes de mesure permettant de recueillir une quantité croissante d'informations utiles, de les analyser, de les intégrer de façon à appréhender au mieux les processus ou phénomènes dans toute leur complexité et in fine de les synthétiser de manière à ce que le praticien puisse intervenir rapidement et à bon escient sur le corps humain, naturellement de manière la moins invasive ou traumatisante possible. Ce domaine, en évolution rapide, couvre donc de vastes champs scientifiques, parmi lesquels l’optique et les fibres optiques jouent déjà, et vont jouer dans l’avenir, un rôle majeur compte-tenu de leurs avantages intrinsèques, tant en terme de performances (qualité des mesures …) que du point de vue des fonctionnalités offertes (faible intrusivité, nouveaux types de mesures, multiplexage des capteurs, …). 2.1.1 Applications de l’OSL en radiothérapie clinique. Dans ce contexte, et à titre d’exemple, la technique OSL (Cf. § 1.2) développée initialement pour les besoins de l’industrie électronucléaire, promet de nombreuses avancées dans le traitement du cancer par radiothérapie. En effet le nombre des cas de cancer recensés en 2000 dans le monde était voisin de 10 millions et en outre les experts s’accordent à prévoir une augmentation de 50 % d’ici 2020. Les améliorations de la radiothérapie requièrent une irradiation localisée au seul volume tumoral en épargnant les tissus périphériques sains et une mesure simultanée en 9 temps réel de la dose absorbée par ce volume tumoral. Dans ce cadre, le projet européen intégré (IP) MAESTRO 8 a été initié en 2004 en vue de promouvoir les efforts de recherche sur les techniques de traitement des cancers par radiothérapie. Parmi ces techniques, l’OSL à fibres optiques (décrite au § 1.2) y prend une part de choix dans la mesure où elle présente de nombreux avantages pour la mesure in situ et le suivi des doses déposées aux tissus et des débits de dose correspondants. Ainsi nous développons au LMO une instrumentation OSL pour la radiothérapie, susceptible d’interroger séquentiellement plusieurs points de mesure sur le corps des patients. Chaque capteur de cette instrumentation comprend une tête ‘transductrice’ conditionnant des cristaux d’alumine. Celle-ci placée en extrémité de la fibre de déport - de 8 m environ - est stimulée par une émission laser continue (laser YAG-Nd doublé, = 532 nm). Source Lumineuse Spectromètre, Analyse des données Figure 12 : Illustration de l’OSL appliquée à la radiothérapie L’IGR (Institut Gustave Roussy), partenaire du projet européen, intervient comme expert et offre un site expérimental dans le cadre des validations cliniques. D’ores et déjà, plusieurs applications biomédicales sont envisagées pour la technique OSL : La Radiothérapie conformationnelle par modulation d'intensité (RCMI), pour laquelle la mesure est effectuée après chaque séance. En RCMI, l'intensité du rayonnement et la forme du faisceau peuvent être adaptées pendant le traitement pour diminuer le plus possible la dose délivrée aux tissus sains. A la fin de la séance, une comparaison est effectuée entre la dose mesurée par OSL et celle prévue, L'Irradiation Corporelle Totale ICT (traitement réalisé en quelques séances, pour préparer un malade à une greffe de moelle osseuse), pour laquelle une mesure de dose en quasi temps réel (au cours du traitement) est impérative, La Curiethérapie Haut débit : l'utilisation de dosimètres OSL placés dans la sonde rectale au cours du traitement peut être envisagée pour mesurer la dose délivrée en quasi temps réel, L'imagerie par traceurs radioactifs : des radio-pharmaceutiques (sources radioactives non scellées associées à des traceurs spécifiques de la fonction à explorer) sont injectés aux patient. La distribution de ces radiopharmaceutiques dans l'organisme est ensuite déterminée à l'aide d'un dispositif de détection. Une mesure externe OSL de la dose interne au patient peut être envisagée. Cette application illustre bien l’intérêt de lier dans un même projet des chercheurs des disciplines de l’optique et du médical pour offrir aux praticiens des outils technologiques de plus en plus performants et ergonomiques. 2.1.2 Mesures respiratoires par réseaux de Bragg Du fait, d’une part de leur très bonnes caractéristiques métrologiques et d’autre part des possibilités de multiplexage de plusieurs transducteurs sur une même fibre, les réseaux de Bragg sont également des candidats particulièrement attractifs pour des mesures biomécaniques corporelles. A titre d’exemple, les mesures de capacité respiratoire de certains malades (asthmatiques), sportifs, … (Cf. Figure 13) [5] . voire le cycle respiratoire nocturne de patients atteints de troubles du sommeil, via la mesure externe des déformations de la cage thoracique constituent des applications médicales ou sportives au niveau du corps humain dans son entier, qui au final ne sont que la transposition au vivant de méthodes de mesures de déformations mises au point et validées pour la surveillance des matériaux et des structures. Bien entendu, la souplesse du corps est largement plus grande, et les niveaux de déformations plus importants, que pour des matériaux solides, même de type organiques comme les matériaux composites. De fait, les longueurs des fibres et des capteurs de Bragg doivent être adaptées à ces importants niveaux 8 MAESTRO : Methods and Advanced Equipments for the Simulation and Treatment in Radio Oncology 10 de déformation, pour d’une part délivrer un niveau de signal adéquate et d’autre part éviter leur rupture par allongement excessif. Capteur à réseau de Bragg Source Lumineuse Spectromètre, Analyse des données Figure 13 : Illustration d’un système de capteurs de déformations pour l’évaluation du volume respiratoire 2.1.3 Hyperthermie micro-onde Comme tout un chacun le sait, les phénomènes d’hyperthermie, et donc leur maîtrise, sont d’une importance cruciale en médecine dans la mesure ou tout échauffement local trop élevé peut détruire les tissus biologiques, induire des dommages cérébraux irréversibles, voire tuer le patient si sa température corporelle dépasse 42°C … Tant est si bien qu’une revue scientifique est même entièrement consacrée à cette thématique, il s’agit de l’International Journal of Hyperthermia. Un cas particulier d’importance est celui de la thérapie trans-urétrale par chauffage micro-ondes qui a pour objectif de traiter l’obstruction prostatique consécutive à l’hypertrophie bénigne de la prostate. La technique curative utilisée par les praticiens, consiste à délivrer une certaine dose d’énergie sous forme de micro-ondes de manière à détruire les tissus prostatiques indésirables. De fait, la dose délivrée est adaptée à la prostate du patient, pour ne pas créer d’endommagements tant au niveau de l’urètre que des structures anatomiques situées à proximité. Plus précisément, dès qu’un certain niveau de température est atteint, en l’occurrence environ 45°C, les cellules incriminées sont détruites. Le traitement complet nécessite de maintenir un certain temps ce plateau thermique au niveau des lobes pariétaux de la prostate, tandis que l’urètre est maintenue à un niveau de température inférieur. Le contrôle s’effectue par l’intermédiaire de capteurs de température à fibres optiques. Pour cela, le système Prostatron de Technomed, société située près de Lyon et présente depuis plus de 15 ans sur l’instrumentation médicale destinée à ce type de traitement, intègre un système breveté permettant de gérer, par conduction, le refroidissement de l’urètre, tout en chauffant de manière radiative la prostate à l’aide du flux micro-ondes. Le traitement est réalisé en ambulatoire, sans anesthésie. Lors du traitement, les niveaux de température tant de l’urètre (1 point de mesure) que du rectum (3 points de mesure) sont déterminés, en temps réel, à l’aide des sondes à fibres optiques, permettant ainsi sans risque l’émission de la dose optimale de micro-ondes. Ce contrôle en temps réel permet d’augmenter la profondeur de pénétration des micro ondes à partir de l’urètre, de diminuer les douleurs chez le patient, et d’éliminer le risque de nécrose voire de fibrose urétrale. Le CFO mis en œuvre est fondé sur le procédé mis au point par la société américaine Luxtron dans les années 80, et utilise la variabilité thermique de la photoluminescence d’un élément spécifique placé en bout de fibre et mis en contact avec les tissus. Ce principe fut très tôt à la base de nombreuses études, si bien que le premier Capteur de température à Fibre Optique commercialisé au début des années 80, par Luxtron, était de ce type, bien que leurs applications fussent plutôt de type industriel à cette époque. Puis dans la foulée, d’autres sociétés, comme ASEA en Suède et Omron au Japon, introduisirent ce type de produit sur le marché. Produits qui, bien que développés autour d’éléments sensibles de types différents, s’appuient sur le même principe de base décrit succinctement ci-dessous. Luxtron a donc proposé fin des années 80, une génération de thermomètres dénommés Fluoroptic. Celle-ci est fondée sur la mesure du temps de décroissance de la fluorescence d’un composé de terres rares[17] . Cette technique dite FDT9 - bien connue et abondamment étudiée en physique, permet dans ce cas de s’affranchir du niveau de signal reçu, et donc des pertes en ligne et du vieillissement des composants de la chaîne de mesure ... Le transducteur est excité par la partie bleue du spectre d’émission d’une lampe flash au xénon (350 nm à 550 nm), tandis que la 9 FDT : Fluorescence Decay Time (Temps de Décroissance de Fluorescence). 11 fluorescence (de type ‘Stokes’) est observée dans le rouge du spectre visible (600 nm à 700 nm). La température est obtenue par comparaison avec une table de correspondance contenue dans la mémoire de l’appareil. Technomed, détentrice d’une licence de fabrication des capteurs, réalise des sondes à usage unique en grand nombre, et les insère dans le Prostatron. La précision de mesure du système complet est comprise entre 0,3°C à 0,4°C sur la plage d’utilisation requise par ce type d’application [25°C ; 50°C]. Il faut noter que ces sondes à usage unique ont été agréées par la FDA10. Elles sont interchangeables au niveau de l’électronique, et sont réalisées de manière très simple et fiable, avec un coût de revient réduit (l’extrémité de la fibre optique multimode est tout simplement trempée dans un bain contenant le composé de terres rares en solution, avant d’être polymérisé). Le volume produit annuellement dans le monde est d’environ 5000 sondes. Plusieurs centaines d’appareils Luxtron ont déjà été vendus pour cette application, et le marché mondial potentiel est d’environ 1500 sites hospitaliers. Luxtron, bien que continuant à commercialiser son modèle historique de mesure de température, dénommé 3100, n’est bien entendu pas resté inactif, et offre désormais des solutions techniques destinées aux applications médicales, telles que son « m3300 medical Lab Kit » (www.luxtron.com) capable de fonctionner à 4 Hz entre 0°C et 120°C, avec une résolution de mesure annoncée de 1/100°C pour une précision de 1/10°C. Ce système de mesure a, tout comme le Prostaton, obtenu l’accord FDA 510(k) des autorités sanitaires américaines avant d’être commercialisé sur ce marché. Au-delà des mesures de température liées aux phénomènes d’hyperthermie (traitement de la prostate, contrôle de température pour la résonance paramagnétique électronique, contrôle du flux sanguin lors d’hyperthermie locale, …), de nombreuses autres applications médicales sont désormais accessibles à ce type de capteurs de température. Citons le contrôle de la coagulation du sang par laser, les mesures thermique en imagerie magnétique, le contrôle de l’ablation thermique des tissus, ou celui de l’exposition des tissus aux champs magnétiques. Bien entendu, les sondes de fluorescence présentées dans ce paragraphe ont été les premières utilisées par le corps médical du fait de leur disponibilité à cette époque, mais d’autres technologies, dont celle des réseaux de Bragg peuvent tout à fait être mises en oeuvre dans ce type d’application, avec pour ces derniers des avantages spécifiques liés au multiplexage de plusieurs capteurs sur une même fibre, à la petitesse de ces dernières (125 µm), etc. 2.1.4 Mesure d’indice de réfraction de cytoplasme cellulaire : santé des cellules Un autre exemple d’application des CFO pour la biologie et le biomédical consiste à analyser la santé des cellules par le biais de la mesure d’indice de réfraction de leur cytoplasme. La technique retenue pour cela est celle de la réflectrométrie présentée au § 1.1. A titre d’exemple probatoire cette méthode de mesure a été mise en œuvre, conjointement par le LMO et le laboratoire LPMC11, pour déterminer l’indice de réfraction de cytoplasme de cellule de carcinomes de souris nommées OE 21. Celles-ci ont été disposées dans une solution tampon RPMI permettant leur maintien en vie pendant 20 à 30 minutes. Le contact entre les cellules et l’extrémité de la fibre optique est garanti par leur regroupement en amas en fond de culot après centrifugation. Notons enfin que la fibre optique utilisée pour la mesure est de type monomode de diamètre de cœur typiquement 9 µm inférieur au diamètre de cellules OE 21. Cette précaution permet d’assurer un bon recouvrement de la zone de mesure (section du cœur de la fibre) par la cellule. Ont été réalisées successivement des mesures dans la solution tampon en surface du tube à essai puis dans les cellules amassées en fond de culot (Figure 14.a). Chaque mesure est moyennée sur environ 1 minute. Dans la gamme d’indice de 1,37, la précision de la mesure sur l’indice de réfraction est de l’ordre de 8 10 -4. Nous avons parfaitement mesuré le saut d’indice entre les deux environnements. L’indice moyen mesuré pour le cytoplasme des cellules est de 1,3746 pour la première série de mesures (Cf. Figure 14.b), valeur tout à fait en accord avec les valeurs précédemment connues seulement à 10-2 près (1,37). Un quart d’heure après, une seconde série de mesures dans le cytoplasme donne une valeur moyenne décroissante de 1,3698, certainement liée à la mort des premières cellules. Cette mesure par réflectrométrie en bout de fibre permet d’atteindre une précision de deux ordres de grandeurs plus élevée que celle des valeurs connues et semble à même de renseigner en quasi temps réel sur la santé des cellules. Mesures de l'indice du cytoplasme de cellules OE 21 de carcinomes de souris Moyenne : 1.374(6) 1,3750 1,3730 1,3710 1 3 5 7 Moyennes statistiques 2ème mesure Première 15 min. après mesure 1,38 9 11 13 Indice moyen Indice de réfraction 1,3770 1,3620 Mesures de l'indice du RPMI sur 20 acquisitions avec une fibre monomode Moyenne : 1.361(2) 1,3616 1,3612 1,3608 1,3604 1 3 5 7 1,3698 1,3612 1,362 1,36 1,35 RPMI 9 11 13 15 17 19 21 Acquisitions 1,3746 1,37 (a) OE21 RPMI OE21 Type de solution (b) Food & Drug Administration, c’est-à-dire le ministère de la santé Américain qui délivre les autorisations de mise sur le marché outre atlantique des produits médicaux et pharmaceutiques. 11 LPBC : Laboratoire de Physico-chimie Biomoléculaire et Cellulaire (Université Pierre et Marie Curie Paris VI). 10 12 Figure 14 : (a) Acquisition par réflectométrie de l’indice de réfraction d’une solution tampon (RPMI) et du cytoplasme des cellules; (b) Moyennes des deux précédentes mesures suivies de leurs équivalentes pour des acquisitions réalisées 15 minutes plus tard 2.1.5 Applications des biocapteurs au biomédical Les biocapteurs par réfractométrie optique dont nous avons développé le principe au § 1.6 offrent de très nombreuses applications dans le domaine biomédical et en particulier dans le diagnostic de différentes pathologies [2] . Les instruments utilisant la technologie SPR (Biacore®) sont aujourd’hui les plus répandus mais ils peuvent être relayés par des réfractomètres à fibres optiques lors de mesures à déport important ou à faible intrusivité. Citons principalement la détection de virus variés dans des échantillons biologiques : détections du virus de l’herpes, de la rougeole ou du virus HIV. La détection de l’herpes a été réalisée par des biocapteurs optiques en utilisant un modèle de virus de l’herpes simple (simplex virus Type 1 : HSV-1). Celui-ci, dilué dans un milieu de culture contenant 10 % de sérum bovin fœtal est détectable via la technique de la SPR avec une limite de détection de l’ordre de 10 unités infectieuses (50 % Tissue Culture Infective Dose : TCID5012). Pour le cas de la rougeole la même technique permet de détecter un peu moins de 500 unités infectieuse de virus dans 100 ml de solution [27] . La détection du virus HIV a été l’objet d’intenses recherches dans les vingt dernières années. La réfractométrie SPR est utilisée ici pour la détection d’un changement de conformation de protéines enveloppant le virus HIV (Gp120 et Gp41). Cette technique utilisant des biocapteurs optiques fournit, en plus des constantes d’affinité, un suivi cinétique de l’interaction des macromolécules [28] . La réfractométrie SPR s’applique également à la quantification de facteurs sanguins. Elle a été mise en œuvre pour évaluer la concentration d’héparine dans le sang. La surface du biocapteur doit être agrémentée de divers composés chimiques (protamine et poly-ethylene-imine PEI) ayant une affinité importante avec l’héparine. L’adsorption sélective d’hérapine dans la plasma sanguin a ainsi pu être obtenue avec une limite basse de détection de 0,2 U/ml [30] . La détection de toxines fait également intervenir des Capteurs à Fibres Optiques. La ricine, une protéine potentiellement toxique. La protéine est décelée via des anticorps (anti-ricin IgG) immobilisés à la surface de la fibre optique. Cette immobilisation dont le principe est décrit au § 1.6 est réalisée ici, d’une part par la silanisation de la surface de la fibre et, d’autre part, par l’intermédiaire du complexe avidine-biotine qui lie les silanes à l’anticorps IgG. La gamme de détection offerte par cette technique pour le cas de la ricine s’étend de 100 pg/ml à 250 ng/ml [29] . Ces quelques exemples montrent bien les potentialités de biocapteurs optiques pour la détection de macromolécules extrêmement variées lesquelles intervenant dans le processus de diagnostic de maladies, de détection de toxines ou d’analyses médicales. 2.2 L’environnement La mesure de salinité constitue un exemple typique d’application du réfractomètre dont les principes ont été détaillés au paragraphe 1.5. Pour valider cette application une expérience de comparaison avec un réfractomètre d’Abbe commercial (Arias500) a été réalisée au laboratoire. Dans cette expérience, différentes masses de cristaux de sel de haute pureté, allant de 0 gramme à 34 grammes par pas de 2 grammes (précision à 0,01g), sont dissous dans 100 ml d'eau distillée. Pour chaque solution, nous mesurons la température à l'aide d'une thermistance et l'indice de réfraction, à 589 nm, à l'aide d'un réfractomètre de type Abbe. En parallèle, pour chaque solution saline, nous utilisons un réseau de Bragg en angle (θ = 11°) calibré pour des mesures d’indice sur la plage 1,3-1,43 à 1550 nm. Pour pouvoir comparer les résultats fournis par le réfractomètre d'Abbe et le réseau à traits inclinés, nous utilisons une relation empirique, indiquée dans la référence [18] , et donnant l'évolution de l'indice de réfraction de l'eau avec la longueur d'onde et la température. Les résultats de mesure après corrections sont présentés à la Figure 15. Indice de réfraction (à 1550 nm et 25 °C) 1.37 1.34 1.31 0 10 20 30 Concentration en NaCl (g/dl) Figure 15 : Comparaison des mesures de concentration en NaCl (salinité) réalisées par un réfractomètre commercial (Arias 500) et par les CFO à réseaux en angle TCID50, Tissue Culture Infective Dose : Niveau de dilution d’un virus pour lequel 50 % des échantillons de laboratoire contiennent des virus actifs. 12 13 L'écart moyen entre les valeurs d'indice de réfraction fournies par chaque réfractomètre est de l'ordre de 5×10 -4. Ces écarts proviennent probablement à la fois de la connaissance relativement imprécise de la loi d'évolution en longueur d'onde de l'indice de réfraction de l'eau et de d'éventuelles inhomogénéités des solutions salines. 2.3 2.3.1 La sécurité et la défense Application de l’OSL à la protection du personnel lors du démantèlement d’installations nucléaires Les CFO extrinsèques fonctionnant sur le principe de transduction de l’OSL décrit au § 1.2 et dont nous avons exposé une application dans le domaine de la radiothérapie clinique (§ 2.1.1) ont été développés en premier lieu à des fins de démantèlement d’installations électronucléaires. Cette première génération de capteurs ‘OSL’ utilise des polycristaux de type MgS ou BaS dopés par des ions de terres-rares comme éléments détecteurs et reliés, par fibres optiques, à une instrumentation de lecture transportable. Contrairement aux capteurs OSL du biomédical, le déport pour cette application atteint l’ordre de grandeur du kilomètre. La résolution en dose est quant à elle de l’ordre du mGy. Cette génération est désormais mise en œuvre au sein de l’Atelier Pilote de Marcoule (CEA-DEN) pour le suivi déporté de l’assainissement de leurs installations. Cette instrumentation est ainsi devenue un outil d’investigation primordial grâce à sa capacité à effectuer des relevés d’activités in situ et en opération dans les réservoirs et les tuyauteries au fur et à mesure de leur décontamination [8] . 2.3.2 Le combattant français du futur Les « nanotechnologies » au service des secteurs de la Défense se développent fortement depuis plusieurs années. Une étude ministérielle indique un budget de 322 millions de dollars débloqué au département de la Défense américain pour l’année 2003 sur ces nouvelles technologies. Les acteurs français développent également des thématiques de recherche et développement pour ces applications. Les capteurs interviennent dans ce cadre plus spécifiquement sur des fonctions de protections des soldats (textiles intelligent) sur les détections d’irradiations et/ou de toxines chimiques/biologiques (NRBC : Nuclear Radiactive Biological and Chimical). Les besoins de la Défense sont ainsi clairement exprimés et les biocapteurs à fibre optique (Cf. § 1.6) apparaissent comme des candidats intéressants pour ces applications puisqu’ils présentent les propriétés recherchées de sélectivité, de légèreté et de faible coût et sont de surcroît relativement compatible avec la notion de textile intelligents. Certaines start-up américaines se positionnent d’ores et déjà sur de telles applications de Sécurité/Défense comme par exemple IBIS THERAPEUTICS (détection d’agents biologiques et chimiques) ou NANOSPHERE (système biomoléculaire pour la détection d’agents tels que l’Anthrax). Conclusion Dans cette présentation des apports de l’optique et plus particulièrement des fibres optiques pour les sciences du vivant, nous avons, après avoir effectué certains rappels sur les principes physiques et les techniques optiques mises en œuvre, abordé plusieurs domaines applicatifs –tant pour la biologie, la médecine que pour l’environnement, la sécurité voire la Défense-, sans aucunement prétendre à l’exhaustivité mais plus modestement en tant qu’exemples. Cette ‘nouvelle’ discipline que l’on nomme désormais la Biophotonique se situe à la convergence de la physique (optique, optoélectronique, informatique, théorie du signal et de l’information…) et des sciences du vivant (biologie, médecine, sécurité sanitaire ...). Nous avons montré que les briques technologiques de base nécessaires à la réalisation de démonstrateurs de capteurs et d’instruments de mesure, utilisant les nouvelles technologies, et destinés à ces différents secteurs sont présentes dans les laboratoires de recherche, du fait des importants efforts consentis depuis 20 ans pour les besoins d’autres marchés (télécoms, micro-informatique, instrumentation industrielle, etc.). Du fait de l’émergence des besoins du « vivant », leur intégration puis certaines applications commencent à voir le jour d’une manière plus structurée que durant la dernière décennie, et un certain nombre de travaux conduisent d’ores et déjà à des résultats très encourageants comme présenté plus en amont. Ainsi, en ce qui concerne les fibres optiques et les technologies associées (réseaux de Bragg, OSL, ..), les tendances techniques actuelles, permettant de répondre au mieux aux besoins, ont pour maîtres mots : intégration (taille), intégration fonctionnelle (aspect multi-mesures), déport et multiplexage des points de mesure, intégration du traitement du signal et fusion de données, fourniture à l’utilisateur de résultats pré traitées comme aide à la décision … Concluons en rappelant que les besoins sont réels, la demande sociétale étant forte et croissante notamment en ce qui concerne la santé. De fait, l’aventure ne fait que commencer et souhaitons que les efforts engagés se poursuivront de manière soutenue dans l’avenir pour que de l’instrumentation Biophotonique performante puisse voir le jour, pour une meilleure santé et une sécurité accrue des citoyens. Remerciements Nous tenons à remercier la Commission Européenne pour le financement du projet Européen Intégré MAESTRO ainsi que le Ministère de la Recherche et l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS) pour le 14 cofinancement du projet ACI n°20 NMAC 2003 (Monte Cristo), sans oublier bien entendu nos divers partenaires dans tous les projets cités. Références [1] [2] [3] [4] [5] [6] P. Ferdinand, « Techniques de l'ingénieur : Capteurs à fibres optiques à réseaux de Bragg » (1999). T. Vo-Dinh, « Biomedical Photonics Handbook », CRC Press (2003). A. Bjarklev, J. Broeng, A. S. Bjarklev, « Photonic Crystal Fibres », KAP (2003). J. E. Pearson, A. Gill and P. Vadgama, « Analytical aspects of biosensors », Vol. 27, pp. 119-145, juillet 2000. A. Grazia, F. Baldini,“Fibre-optic sensors in health care“, Phys. Med. Biol., Vol. 42, pp. 967-979, 1997. G. Boisdé et A. Harmer, “Chemical and Biochemical Sensing with Optical Fibers and Waveguides”, Massachusetts: Artech House, 1996. [7] O. 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Ferdinand, « Tilted short-period fibre-Bragg-grating-induced coupling to cladding modes for accurate refractometry », Vol. 12, n°7, pp. 765-770, janv. 1900. [12] G. Laffont, P. Ferdinand, « Sensitivity of slanted fibre Bragg gratings to external refractive index higher than that of silica », Vol. 37, n°5, pp. 289-290, janv. 1900. [13] P. Mach, M. Dolinski, K. W. Baldwin, J. A. Rogers, C. Kerbage, R. S. Windeler, and B. J. Eggleton, « Tunable microfluidic optical fiber », Vol. 80, n°23, pp. 4294-4296, avril 2002. [14] J. B. Jensen, L. H. Pedersen, P. E. Hoiby, L. B. Nielsen, T. P. Hansen, J. R. Folkenberg, J. Riishede, D. Noordegraaf, K. Nielsen, A. Carlsen, A. Bjarklev , « Photonic crystal fiber based evanescent-wave sensor for detection of biomolecules in aqueous solutions », Vol. 29, n°17, pp. 1974-1976, sept. 2004. [15] M. C. Phan Huy, G. Laffont, V. Laffont, V. Dewynter-Marty, P. Ferdinand, P. Roy, J.-M. Blondy, D. Pagnoux, W. Blanc, B. 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