HISTOIRE DES ARTS – LANGUES ANCIENNES RAPHAËL : L'École d'Athènes (1510-1511) Sources : http://www.histoire.ac-versailles.fr ; Wikipédia, article L’Ecole d’Athènes ; L’amour de la peinture (D. Piper, éd. Nathan) Rappels préliminaires : Qu’est-ce qu’un mouvement artistique ? C’est une période de création ou un ensemble d’œuvres d’art (arts plastiques : peinture, sculpture / littérature / musique…) dans lesquels on retrouve des caractéristiques communes. Qu’est-ce que la Renaissance ? (en italien : il Rinascimento) C’est un mouvement artistique qui apparaît en Italie du Nord au XIVème siècle ; il se développe ensuite dans l’Europe entière, pour atteindre son apogée au XVIème siècle. En Italie, la période du XVIème siècle est appelée le Cinquecento (« les années 500 »). C’est une période de renouveau qui touche les arts et les sciences. C’est une véritable révolution de la pensée et de tous les champs artistiques, qui débouche sur une nouvelle façon de créer. La Renaissance artistique succède à l’esthétique médiévale, dont elle remet en cause les codes et les canons (règles). Cette nouvelle forme de culture se caractérise en premier lieu par le regard porté sur l’Antiquité : les artistes cherchent à restaurer la grandeur passée de la civilisation et de la création grécoromaines. Parallèlement se développe l’Humanisme, mouvement culturel et artistique qui correspond à une nouvelle façon de percevoir l’Homme : il est désormais considéré comme l’élément central du monde grâce à sa raison, qui lui permet d’avoir accès à tous les savoirs, qui assure sa liberté et qui le pousse à faire le bien. 1) Je présente l’œuvre et je la situe dans son contexte : Cette œuvre a été peinte par Raphaël entre 1510 et 1511. La technique utilisée est la fresque. Qu’est-ce qu’une fresque ? C’est une technique de peinture qui consiste à appliquer des pigments sur un enduit* encore frais, « a fresco ». Cette technique nécessite rapidité et habileté de l’artiste. Les pigments pénètrent dans l’enduit frais et durent plus longtemps qu’une simple peinture de surface. *couche externe = sable fin, poudre de marbre ou pouzzolane, chaux, eau (Attention : Dans le langage courant, « fresque » est devenu synonyme de peinture murale, indépendamment de la technique.) Mouvement artistique : Raphaël est un peintre et architecte italien, né en 1483 à Urbino et mort en 1520 à Rome. C’ est un artiste de la Haute Renaissance (1500 – 1530), qui correspond au début du Cinquecento (XVI ème siècle), période la plus florissante de la Renaissance italienne. Contexte historique et géographique : En 1508, Raphaël est nommé officiellement peintre de la papauté ; il réalise la fresque pour orner une des pièces des appartements du pape Jules II au palais du Vatican (Rome). Cette pièce, à la fois et bureau et bibliothèque privée, est appelée « Chambre de la Signature ». Ses dimensions sont impressionnantes : 770 × 440 cm, dont une partie arrondie de 770 × 250 cm. 2) Je décris l’œuvre : Cette fresque représente des personnages situés dans un espace architectural. L’ensemble est organisé selon 2 directions dominantes : - Une direction verticale : l’espace est partagé en 3 bandes verticales : 2 bandes latérales encadrant une bande centrale, qui s’étend du 1er plan jusqu’à un arrière-plan qui plonge vers l’infini ; les personnages et le décor s’organisent de façon symétrique par rapport à un axe vertical central - Une direction horizontale : on distingue 3 plans horizontaux : 1er plan comportant 2 groupes de personnages, 1 à gauche et 1 à droite 2ème plan entièrement occupé par une rangée de personnages et borné à gauche et à droite par 2 murs percés de niches accueillant 2 statues de divinités antiques arrière-plan réduit à la bande centrale, et constitué d’un alignement de 3 voûtes qui laissent apparaître le ciel, grâce à un effet de trompe l’œil qui donne une impression de très grande profondeur Grâce à cette composition et à l’utilisation des couleurs vives (rouge / orangé et bleu), l’œil du spectateur est attiré tout d’abord par les 2 groupes du 1er plan, puis se déplace vers le personnage isolé assis au milieu des marches, pour enfin s’arrêter sur les 2 personnages situés au centre du groupe du 2ème plan et qui se détachent sur le ciel et sur l’infini de l’arrière-plan. 3) J’explique sa signification : Cette fresque exprime quelques-unes des grandes caractéristiques de la Renaissance et de l’Humanisme : - La place centrale de l’Homme et de la connaissance ; en effet, le groupe de personnages, qui constitue l’élément central de la fresque, représente les grands philosophes (= penseurs et savants) de l’Antiquité : en bas à gauche Pythagore (Il a cherché à expliquer le monde à partir d’une théorie des nombres.) à sa droite, accoudé sur un bloc d’architecture, Héraclite (Pour lui, tout est perpétuellement en devenir et en mouvement : « Tout s’écoule. ») allongé sur les marches, Diogène le Cynique (Il méprise la société et toutes les conventions sociales.) au centre, Platon et Aristote : leurs gestes opposés (Platon montre le ciel, Aristote la terre) indiquent qu’ils sont en désaccord sur la façon de parvenir à la connaissance (Platon pense que la vérité ne peut pas se trouver dans la réalité que l’on perçoit grâce à nos sens, car elle est trompeuse, mais dans le monde des « idées » ; Aristote, ancien disciple de Platon à l’Académie, pense au contraire que la vérité doit se chercher dans la réalité.) - L’importance de l’héritage gréco-romain, représenté par : les philosophes antiques les divinités Apollon (qui représente les arts, et que l’on reconnaît grâce à sa lyre) et Minerve /Athéna (qui représente l’intelligence et la raison, et que l’on reconnaît grâce à son casque guerrier et à son égide, peau de chèvre aux vertus protectrices ornée de la tête de Méduse) les éléments d’architecture romaine : pilastres (supports rectangulaires encastrés dans un mur, à fonction décorative), voûtes (ouvrages cintrés, c’est-à-dire courbés, recouvrant un espace construit), plafonds à caissons (compartiments creux disposés de façon géométrique), coupoles (voûtes hémisphériques couvrant un bâtiment), niches et statues - L’utilisation de la perspective : perspective géométrique (avec point de fuite et succession des voûtes de plus en plus petites au fur et à mesure que l’on s’éloigne), renforcée par la perspective chromatique (utilisation des couleurs : couleurs chaudes ou contrastées réservées aux plans rapprochés, couleurs froides ou estompées à l’arrière-plan) - Le rapport entre l’artiste et le pouvoir : les artistes s’affirment désormais, et manifestent leur reconnaissance aux hommes de pouvoir qui leur permettent d’exercer leur art (mécénat : cf. Mécène, richissime ami d’Auguste et protecteur des arts) : Les penseurs antiques sont en effet représentés sous les traits des artistes contemporains de Raphaël (Héraclite sous les traits de Michel-Ange, Platon sous les traits de Léonard de Vinci, le peintre grec Apelle sous les traits de Raphaël, à l’extrême droite avec la coiffe sombre) ; de plus la présence d’Apollon et de Minerve place sur un pied d’égalité les savants antiques et les artistes de la Renaissance. Le duc d’Urbino, Federico della Rovere (en blanc à droite de Pythagore), est le neveu de Jules II et protège les artistes : la fresque est une œuvre à la gloire de Jules II, dont la cour brillante est comparée aux génies de la Grèce antique Ainsi, cette œuvre fait l’éloge de la raison païenne qui fit rayonner la Grèce antique (représentée par les savants grecs), mais aussi de l’art de la Renaissance (représenté par Raphaël et ses contemporains), qui se met au service de la foi chrétienne (représentée par le neveu du pape, mais aussi par le pape luimême, commanditaire de la fresque) : c’est donc la foi chrétienne qui a le dernier mot, ainsi que l’Humanisme, qui met l’Homme (et ses facultés intellectuelles ) au centre de la Création divine. L. Ghirardi