constitution européenne

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Udas / constitution européenne
« CONSTITUTION EUROPÉENNE »
Le texte officiel est lisible sur : http://ue.eu.int/uedocs/cmsUpload/cg00087-re02.fr04.pdf
Il s’intitule en réalité :
« Traité établissant une Constitution pour l'Europe »
Ce dossier est bien sûr à mettre en parallèle avec le dossier « la directive Bolkestein »
qui regroupe une série d’articles sur cette directive souvent citée dans le débat sur la
constitution européenne.
Ces dossiers seront prochainement accessibles sur le site de l’Udas ( http://udas.org ) comme
beaucoup d’autres sur d’autres sujets.
Chaque article est accessible par le sommaire automatique : il suffit de cliquer sur le
numéro de page. Chacun est aussi imprimable séparément (saut de page).
Quelle belle lecture d’ici le 29 mai !
MP
Sommaire
LECTURE D’ELECTEUR .................................................................................................................................. 2
RÉPONSES AUX ÉLÉPHANTS QUI TROMPENT ÉNORMÉMENT .......................................................... 3
« REJETER LE TRAITE CONSTITUTIONNEL, C’EST REFUSER L’ULTRALIBERALISME » .......... 8
« SUPER MENTEUR » BATIT DES CHATEAUX EN ESPAGNE .............................................................. 10
L’EUROPE, C’EST L’ABSENCE TOTALE DE DEMOCRATIE ..................................................................................... 10
L’EUROPE, C’EST TOUJOURS MOINS DE SOCIAL .................................................................................................. 10
L’EUROPE C’EST L’UNITE POLITIQUE A MINIMA SOUS LE CONTROLE DES USA .................................................. 11
« EUROPE, LA TRAHISON DES ELITES » .................................................................................................. 13
LE PARLEMENT EUROPEEN VOTE CONTRE LES HOPITAUX ET LE LOGEMENT SOCIAL...... 14
CONTRE LA « CONSTITUTION » NOUS PROPOSONS UNE AUTRE EUROPE .................................. 15
I. L’EUROPE CONTRE LE CHOMAGE ......................................................................................................... 15
II- DES REGLES SOCIALES EUROPEENNES .............................................................................................. 17
III- DEFENDRE ET ETENDRE LES SERVICES PUBLICS ........................................................................... 17
DIRE "NON" AU TRAITE CONSTITUTIONNEL, POUR CONSTRUIRE L’EUROPE ! ....................... 20
___________________
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33 RAISONS DE VOTER ... OUI ...................................................................................................................... 22
DIX BONNES RAISONS DE VOTER NON... ................................................................................................. 24
Dix bonnes raisons, chacune suffisante, de voter NON ................................................................................ 24
Mais on vous objectera ces dix arguments … ............................................................................................... 26
FAITES L’EFFORT DE VOUS INFORMER... .............................................................................................. 30
NON AU PROJET DE TRAITE CONSTITUTIONNEL EUROPEEN. ....................................................... 32
la question de la souveraineté populaire ...................................................................................................... 32
Les droits et les devoirs du citoyen ............................................................................................................... 32
Séparation des pouvoirs et contrôle .............................................................................................................. 32
Le statut de Constitution ............................................................................................................................... 33
Publicité ........................................................................................................................................................ 33
Constitution ou programme politique ? ........................................................................................................ 34
« Non au traité » contre « Oui au traité » ..................................................................................................... 34
Certains préconisent le « oui » de combat. ................................................................................................... 35
POURQUOI LE PROJET DE CONSTITUTION EUROPEENNE EST-IL UN PIEGE POUR LES
FEMMES D’EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE ? .............................................................................. 37
POURQUOI JE NE VOTERAI PAS "NON" A LA CONSTITUTION ........................................................ 41
LE OUI SOCIALISTE ....................................................................................................................................... 44
POURQUOI LES SOCIALISTES VOTENT OUI AU TRAITE CONSTITUTIONNEL ?.................................................. 44
SI OUI… SI NON… ! .......................................................................................................................................... 45
Le traité constitutionnel ne contient que des avancées sur le plan social et démocratique .......................... 45
par rapport au traité existant. ....................................................................................................................... 45
POUR EN SAVOIR PLUS ................................................................................................................................. 48
Lecture d’électeur
La Constitution européenne
1) Comment consulter le texte définitif du traité, où se le procurer?
=>Réponse: outre le texte commenté dans le supplément (toujours disponible ici pour 3 €:
L'Humanité, Service Vente Militante, 32 rue Jean Jaurès, 93528 Saint Denis Cedex.) de
l'Humanité Dimanche, le texte officiel (daté du 29/10/2004) est disponible ici: (349 pages au
format .pdf):
http://ue.eu.int/uedocs/cmsUpload/cg00087-re02.fr04.pdf
2) Où trouver les commentaires du Praesidium qui doivent servir à interpréter
la charte des droits fondamentaux?
=>Réponse: le texte (121 pages au format .pdf contenant les différents protocoles annexés à
la constitution; à partir de la page 26, on peut trouver les fameuses explications sur les droits
fondamentaux) est ici:
http://ue.eu.int/igcpdf/fr/04/cg00/cg00087-ad02re02.fr04.pdf
En somme, pour bien voter, il faudrait que chaque électeur ait lu 349+121=470 pages
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RÉPONSES AUX ÉLÉPHANTS QUI TROMPENT ÉNORMÉMENT
Raoul Marc JENNAR
Les partisans du « oui » au traité constitutionnel européen, singulièrement lorsqu’ils émanent de la socialdémocratie et des Verts, ne répugnent pas à des manipulations du texte en lui faisant dire ce qu’il ne dit pas et en
taisant ce qu’il dit.
L’argumentaire du PS en faveur du oui, intitulé « Le vrai/le faux sur le Traité constitutionnel », fournit un
catalogue de citations tronquées, d’omissions, et de contrevérités. Il va devenir un modèle pour travaux
universitaires sur le mensonge en politique.
Le livre de Strauss-Kahn, cette figure emblématique du libéralisme de gauche, invite à voter « oui » non pas à
cause du texte, mais à cause de ce qu’on pourrait y ajouter le jour où on le changera. Voir en particulier les pages
sur la démocratie où il n’hésite pas à affirmer que « la Commission va devenir le gouvernement démocratique de
l’Union » - pages 41 à 47. Quand on sait que les électeurs n’ont aucune possibilité de sanctionner la
Commission par leur vote, quand on sait que le Parlement européen, ni aujourd’hui, ni dans le cadre de la
Constitution, ne peut imprimer de choix politiques à la Commission, on mesure l’inexactitude d’une telle
affirmation.
Quant à l’appui de Jospin à ce traité constitutionnel, personne ne peut oublier qu’il fut, face au patronat qui fait
des bénéfices et qui licencie, l’incarnation de l’Etat qui ne peut rien, qu’il fut, en France, le recordman absolu,
toutes catégories, des privatisations et qu’il fut, à l’Europe, le soutien inconditionnel des politiques néolibérales
proposées à l’OMC par Pascal Lamy. Le premier responsable du 21 avril ne peut faire autre chose que soutenir
une Constitution qui lui ressemble.
Enfin, le chantage à la peur auquel se livrent ces sociaux-démocrates et ces écologistes est indigne de gens qui se
disent de gauche. Une des valeurs de la gauche a toujours été de faire appel à la raison et à l’intelligence et non
aux sentiments et aux passions. C’est la droite qui a toujours eu recours à l’argument « dites oui ou bien c’est le
chaos. » En faisant appel à la peur, ceux qui usent de ce procédé signent ce qu’ils sont devenus.
Mon propos, en relevant quelques-uns - pas tous, loin s’en faut - des propos les plus mensongers est de
m’appuyer sur le texte, rien que le texte, mais tout le texte, pour corriger ces erreurs volontaires de ceux qui sont
contraints de mentir, espérant éviter que leur « oui » s’identifie au « oui » de Chirac, de Balladur, de Raffarin, de
Sarkozy, de Madelin et du MEDEF et de la Table Ronde des Industriels Européens. On ne peut pas dire « non »
à Raffarin en France et « oui » à la droite la plus agressivement néolibérale lorsqu’il s’agit de l’avenir de
l’Europe.
« La Constitution sauvera les services publics en leur donnant, pour la première fois, une base légale »
(Argumentaire PS oui, Aubry, Hollande, Jospin, Strauss-Kahn,….)
Ce n’est pas la première fois qu’un traité européen introduit, non pas la notion de service public, mais bien le
concept de « service d’intérêt économique général.» Celui-ci est apparu dans le traité d’Amsterdam. On le
retrouve à l’ Article II-96 de la Constitution : « L’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt
économique général tel qu’il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la
Constitution, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union.»
La Constitution ne fournit aucune définition du « service d’intérêt économique général.» Par contre les
documents de la Commission européenne (Notes de 2000, Livre Vert de 2003, Livre Blanc de 2004) sont
éloquents : les pouvoirs publics ne peuvent créer des services d’intérêt économique général (SIEG) que si deux
conditions sont remplies :
a) que le marché (l’initiative privée) ne fournisse pas le service
b) que ce SIEG respecte les règles de la concurrence.
Les partisans socialistes et Verts du « oui » n’hésitent à dire tantôt que le passage des mots
« service public » aux mots « service d’intérêt économique général » n’est qu’un « glissement
sémantique » (les Verts) et que SIEG «signifie service public dans le langage européen »
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(argumentaire PS-oui). Rien n’est plus faux, comme on vient de le voir. D’ailleurs, l’annexe 1
du Livre Blanc apporte sur ce point une clarification intéressante : « les termes « service
d’intérêt général » et « service d’intérêt économique général » ne doivent pas être confondus
avec l’expression « service public » (p.23).
En outre, la Constitution précise en son Article III-166, 2 : « Les entreprises chargées de la gestion de services
d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de
la Constitution, notamment aux règles de concurrence. »
Enfin, le traité constitutionnel proclame que la liberté d’établissement et la liberté de circulation des services sont
des « valeurs fondamentales » de l’Union européenne (article I-4). La proposition de directive déposée par le
Commissaire européen Bolkestein sur « les services dans le marché intérieur » fournit la démonstration,
confirmée par des experts de tous bords, que l’application intégrale de cette « valeur fondamentale » conduit à la
disparition des services publics, de nos systèmes de sécurité sociale et du modèle européen de solidarité.
Avec cette Constitution, c’est la fin de la capacité des pouvoirs publics locaux, régionaux et nationaux de
procurer des activités de service auxquelles tous ont accès et dont les coûts sont mutualisés. Et l’impossibilité de
créer des services publics européens. L’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) de l’OMC
pourra s’appliquer totalement sans que les Etats ne puissent s’y opposer vu l’existence de cette Constitution.
« La 2e partie du traité, la Charte des droits fondamentaux, correspond au Préambule de la Constitution
française et à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen » (Strauss-Kahn, p. 33)
Dans le Préambule de la Constitution française (comme dans la Constitution belge, celle d’Allemagne, du
Danemark, de l’Espagne, de Finlande, de l’Italie, de l’Irlande, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Portugal, de
Suède), le droit au travail, le droit à un revenu minimum, le droit à un salaire minimum, le droit à une allocation
de chômage, le droit à une pension de retraite, le droit à la couverture des soins de santé, à un logement décent
sont garantis.
Dans la Constitution européenne, ces droits ne figurent pas. S’agissant de la santé et de la sécurité sociale, le
texte « reconnaît et respecte » ce qui se fait dans les Etats. Sans plus. Ce qui n’engage à rien de la part de l’Union
européenne. Le droit au travail devient le droit à en chercher. Ce qui est très différent.
L’Union européenne n’adhère pas à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948) qui reconnaît ces
droits sociaux collectifs. Par contre, elle adhère à la Convention européenne des Droits de l’Homme qui ne les
reconnaît pas.
Il ne faut pas se laisser abuser par quelques paragraphes bien ronflants (comme l’article I-3). Cette Constitution
contient ici et là des formules « tape à l’œil » qui n’engagent à rien juridiquement et qui sont vidées de tout sens
par des dispositions contraignantes répétées systématiquement, comme par exemple, l’obligation de respecter
« la concurrence qui doit être libre et non faussée. »
Strauss-Kahn manipule la présentation du texte pour le rendre acceptable.
« Le traité constitutionnel va donner au Parlement européen la capacité de prendre lui-même l’initiative
de lois » (Hollande)
La Constitution réduit à néant ce mensonge : Article I-26, 2 : « Un acte législatif de l’Union ne peut être adopté
que sur proposition de la Commission, sauf dans les cas où la Constitution en dispose autrement. »
Le monopole de l’initiative de la Commission est maintenu. Et la technique de la codécision tant vantée par les
partisans du « oui » a pour effet que le Parlement européen ne peut modifier les textes soumis par la Commission
que si celle-ci marque son accord.
« Le traité ne dit rien sur les orientations politiques que l’Europe doit prendre à l’OMC » (Strauss-Kahn, p.
97)
L’article III-314 qui introduit la politique commerciale commune et donc notre rôle à l’OMC, stipule : « l’Union
contribue conformément à l’intérêt commun, au développement harmonieux du commerce mondial, à la
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suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs et
à la réduction des barrières douanières et autres. »
On se trouve clairement en présence d’un choix politique. Un choix politique dont même la Banque Mondiale
remet en cause, aujourd’hui, l’efficacité pour la création d’emplois. Mais supprimer les restrictions aux
investisseurs qui ne supportent pas les lois sociales, les lois environnementales, le respect des droits humains
fondamentaux, c’est une exigence du MEDEF et des organisations patronales européennes.
La première tentative de supprimer les restrictions aux investissements étrangers directs porte un nom : Accord
Multilatéral sur l’Investissement (A.M.I.). Strauss-Kahn y était d’ailleurs directement associé et soutenait cette
démarche (voir ses réponses aux interpellations à l’Assemblée Nationale).
Si la Constitution est adoptée, il ne sera plus possible, comme l’a fait Jospin en 1998 sous la pression des
associations, des syndicats, du PCF et des Verts, de dire que l’AMI doit être négocié non pas à l’OCDE, mais à
l’OMC. Comme, depuis, la négociation a échoué à l’OMC, le patronat exige que l’AMI revienne dans le cadre
européen. D’où sa présence dans la Constitution. On mesure ainsi l’incohérence de ceux qui ont combattu
l’AMI en 1998 et qui le soutiennent aujourd’hui.
« La victoire du « non » réduira durablement la capacité de l’Europe à peser sur les grandes affaires du
monde » (Aubry, Argumentaire PS-oui, Hollande).
Mais quelle est cette capacité aujourd’hui ? Sans parler des régions du monde qui nous sont éloignées, en quoi
intervenons-nous efficacement dans l’interminable conflit israélo-palestinien ? En quoi sommes-nous capables
de donner du contenu à ce dialogue euro- méditerranéen dont on parle depuis 30 ans ? En quoi sommes-nous
capables de régler le problème de Chypre? Nous n’avons même pas été capables de régler un conflit entre
l’Espagne et le Maroc à propos de quelques arpents de terre sur une île inconnue de tous ; c’est le Secrétaire
d’Etat US Colin Powell qui s’en est chargé.
Est-ce que notre capacité à peser dans les grandes affaires du monde se résume à se féliciter d’un coup d’Etat
inspiré par Washington contre le président démocratiquement élu du Venezuela avant d’apprendre qu’il a
échoué ?
On ne peut pas affaiblir ce qui est déjà faible. Et ce n’est pas parce qu’on disposerait d’un ministre européen des
affaires étrangères que celui-ci aurait de l’influence s’il n’est pas soutenu par les 25 gouvernements. Les
profondes divergences entre Européens sur le principe de la guerre préventive, qui est la négation même de la
Charte des Nations Unies, montrent qu’aussi longtemps qu’il n’y a pas consensus entre les 25, il est impossible
de peser sur les affaires du monde. Avec ou sans « ministre des affaires étrangères européen ».
« La victoire du « non » sera une victoire des USA de George W. Bush » (Lionel Jospin, Claude Allègre et
Pierre Mauroy)
C’est exactement le contraire ! Bush espère la ratification de la Constitution puisqu’elle consolide le lien de
soumission des Européens aux USA : article I,41,2 : « La politique de l’Union (…) respecte les obligations
découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains Etats membres qui considèrent que leur défense commune
est réalisée dans le cadre de l’OTAN et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense
arrêtée dans ce cadre » et article I,41,7 : « Les engagements et la coopération dans ce domaine [en cas
d’agression] demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’OTAN qui reste, pour les Etats qui
en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre. »
Qui détient la plus haute responsabilité militaire à l’OTAN ? Un officier US. Qui est le chef suprême de cet
officier ? Le Président des USA.
Il suffit de lire le Livre Blanc publié par le gouvernement de Tony Blair pour se rendre compte à quel point ce
traité constitutionnel consacre la victoire du modèle anglo-saxon et l’avancée vers une zone euro américaine
dans laquelle disparaîtra le modèle européen. D’ailleurs, un partisan du « oui » ne l’a pas caché. Dans « Le
Monde » des 25-26 juillet 2004, Jean-Claude Casanova écrivait : « cette Constitution consacre le triomphe
politique de la Grande Bretagne puisqu’elle aboutit à une Europe dans laquelle le Royaume-Uni serait à la fois
le pivot politique parce qu’elle en aurait fixé les règles et les limites, et la charnière avec les Etats-Unis dont il
est le voisin et parent. Dans l’Euramérique qui se profile, l’Angleterre tient un rôle central.»
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« Ce traité est le plus dynamique de tous les traités européens » (Strauss-Kahn, p.99).
Invoquant ce que, dans le jargon, on appelle les « clauses passerelles » et les « coopérations renforcées », il
prétend qu’ainsi la clause de l’unanimité peut être surmontée, ce qui fournirait des opportunités d’avancées
significatives.
C’est passer sous silence que « en cas d’opposition d’un parlement national [à l’usage de la clause passerelle] la
décision européenne n’est pas adoptée » (article III-444,3) et que « l’autorisation de procéder à une coopération
renforcée est accordée par une décision européenne du Conseil, statuant à l’unanimité » (article III-419,2).
Dans tous les cas de figure, on retrouve d’une manière ou d’une autre, l’exigence de l’unanimité. Une réalité
s’impose : si cette Constitution est ratifiée, il sera impossible de la modifier avant de très nombreuses années.
Nos enfants comme nos petits enfants auront à la subir.
« Un million de citoyens pourront modifier la Constitution » (Cohn-Bendit, Lipietz, Mamère)
Le droit de pétition (dont on sait à quel point il est peu efficace sur le plan national) ne permet pas de modifier la
Constitution ; un million de personnes pourront proposer à la Commission un texte qui applique la Constitution.
Et la Commission en fera ce qu’elle voudra comme le précise l’Article I-47, 4 : « Des citoyennes et citoyens de
l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatifs d’Etats membres, peuvent
prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition
appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyennes et citoyens considèrent qu’un acte juridique de
l’Union est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution. »
« Notre « oui » est un « oui de combat » (les partisans PS et Verts du « oui de gauche »)
Ces gens nous disent : le texte n’est pas franchement bon ; à bien des égards, il ne répond pas à nos attentes ;
mais il faut l’adopter pour conserver les quatre ou cinq points positifs qu’il contient ; quant au reste, nous allons
nous battre, après la ratification, pour l’améliorer ; notre « oui » s’inscrit donc dans la perspective de ce futur
combat. Etrange perversion du raisonnement ! Pour trois raisons, au moins :
1) s’il s’agissait d’enregistrer les quelques progrès résultant des négociations, pourquoi ne pas s’être contenté
d’un simple traité s’ajoutant aux quatre venus modifier le traité de Rome depuis 1957 ? Pourquoi avoir donné
une force constitutionnelle (article I-6) à un texte qui, avant tout, va donner cette force à un projet politique
néolibéral ?
2) parce que cela revient à dire : nous ne nous battons pas aujourd’hui contre ce texte, mais rassurez-vous, nous
nous battrons demain, une fois qu’il sera devenu la Constitution. Quel crédit peut-on accorder à un tel
engagement de la part de ceux qui, aujourd’hui, alors que la plupart des 25 gouvernements de l’Union sont
conservateurs, promettent une Europe sociale qu’ils n’ont pas réalisée lorsqu’ils dirigeaient douze des quinze
gouvernements de l’Union et la Commission européenne ?
3) ils savent pertinemment qu’ils ne pourront pas modifier ce texte. Parce que, cas unique au monde, la
Constitution européenne va exiger l’unanimité pour être modifiée. Il sera plus aisé de modifier la Constitution
des Etats-Unis que celle de l’Union !
Mais, disent les partisans de ce texte, l’unanimité est requise depuis 1957 pour modifier les traités ; il n’y a rien
de nouveau ! C’est un peu vite oublier que cette unanimité se pratiquait d’abord entre 6 Etats, puis 9, puis 12,
puis 15 et que les grosses difficultés surviennent depuis que les négociations ont lieu à 25. C’est oublier aussi
que les dix Etats qui viennent de rejoindre l’Union n’ont pas vraiment de tradition démocratique, que ces pays, à
l’exception de l’ancienne Tchécoslovaquie, n’ont connu pendant des siècles, que des régimes autoritaires et que
la plupart d’entre eux apprennent depuis une dizaine d’années l’art du compromis consubstantiel de la
construction européenne.
C’est oublier enfin que, pour les huit pays qui furent jusqu’il y a peu des satellites de Moscou, ce qu’ils vivent
aujourd’hui, c’est comme une accession à l’indépendance. Leur demander de renoncer dans l’immédiat à cette
souveraineté retrouvée ou découverte pour se placer sous les ordres de Bruxelles, c’est ignorer une réalité qui
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domine le paysage politique de ces pays. Ecoutons leurs intellectuels, lisons leurs éditoriaux et nous saurons
qu’il faudra du temps, beaucoup de temps avant qu’ils acceptent de renoncer davantage à leur souveraineté que
ce qu’ils ont déjà dû concéder pour adhérer à l’Union européenne.
La règle de l’unanimité fige la construction européenne dans son état actuel. Elle bloque toute espérance
d’approfondissement avant de nombreuses années.
Le « oui » de combat, ce n’est rien d’autre qu’une promesse. Comme celle de Jacques Delors qui, en 1992,
promettait : « acceptez le traité de Maastricht et nous ferons l’Europe sociale tout de suite après » Il y a douze
ans…
Pour conclure :
On peut tromper les gens un temps ; on ne peut pas les tromper tout le temps. Agissons
pour que le jour du référendum, les partisans d’un « oui de gauche » n’aient trompé
qu’eux-mêmes et que triomphe un « non de gauche » qui est en fait un « oui » à
l’Europe, mais à l’Europe des peuples, pas à celle des marchands et des marchés.
"Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire ; c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui
passe, et de ne pas faire écho. . . ." (Jean Jaurès)
Raoul Marc JENNAR
Docteur en science politique,
Chercheur auprès de l’Unité de Recherche, de Formation et d’Information sur la Globalisation -URFIG,
Militant de gauche, signataire de « l’Appel des 200 »
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« Rejeter le traité constitutionnel, c’est refuser l’ultralibéralisme »
Humanité – Édition du 10 février 2004
Émile Zuccarelli, ancien ministre, député et maire de Bastia, et président d’honneur du PRG,
s’explique sur son opposition au projet de constitution européenne.
En quoi le projet de traité constitutionnel soumis aux citoyens outrepasse-t-il les
prérogatives d’une constitution ?
Émile Zuccarelli. Par nature, une constitution définit le rôle, la portée et les modes de
fonctionnement des institutions qu’elle crée. Mais pas les politiques que ces institutions
auront à mettre en œuvre. Tel n’est pas le cas de ce traité qui, non seulement précise le cadre
d’organisation des institutions européennes, mais, surtout, consacre près de la moitié de ses
articles aux politiques communes. Ce n’est plus une constitution, c’est un inventaire à la
Prévert qui vise à interdire demain au pouvoir politique national ou européen de sortir du
cadre ultralibéral que ses concepteurs ont assigné à l’Europe.
Pourquoi jugez-vous ce projet de constitution incompatible avec le projet d’une Europe
sociale ?
Émile Zuccarelli. Les politiques européennes définies dans la troisième partie du projet de
traité n’ont rien de commun avec l’Europe sociale que j’appelle de mes vœux. Aucune
harmonisation vers le haut n’est en outre envisagée ni même souhaitée dans ce domaine par
les signataires. Et si, pour satisfaire les uns et les autres, on évoque dans le corps du texte
quelques bons sentiments tout à fait louables, leur concrétisation est entravée par toute une
série de règles et de principes qui ont un objectif : empêcher la construction d’une véritable
Europe sociale. Le maître mot de cette constitution, rappelé des dizaines de fois dans le texte,
reste et demeure : « la concurrence libre et non faussée » qui n’a pas grand-chose à voir avec
la conception que je me fais d’une Europe sociale.
Pour vous, l’architecture institutionnelle proposée pour l’Union européenne est porteuse de
« régressions démocratiques ». Lesquelles ?
Émile Zuccarelli. Je suis un fervent partisan de la construction d’une Europe forte. Pas de
l’Europe molle et sans perspective que l’on nous propose. Pour moi, une Europe ambitieuse
passe par un vrai Parlement disposant du pouvoir d’initiatives des lois, de la censure, du
contrôle de l’exécutif. Un Parlement dont émanerait d’ailleurs ce pouvoir exécutif. Bref, une
structure démocratique traditionnelle dont le suffrage universel fonderait la légitimité. Tel
n’est pas le cas dans la constitution que l’on nous soumet. Pire, demain, de grands pays,
fondateurs de l’Europe, tels l’Allemagne ou la France pourront être écartés de cette
Commission européenne à laquelle on voudrait accorder tant de pouvoirs.
Quelle serait pour vous, à grands traits, l’alternative au projet européen inscrite dans ce
projet de constitution ?
Émile Zuccarelli. Il faudra d’abord dissocier les politiques européennes de l’organisation des
institutions et en revenir à un traité constitutionnel au sens propre du terme. Quitte à « codifier
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» les politiques européennes dans un document spécifique à même d’évoluer en fonction des
choix politiques des dirigeants élus.
S’agissant de l’organisation institutionnelle, elle devrait être plus démocratique, revoir les
règles de majorité et d’unanimité, permettre de véritables coopérations renforcées et renoncer
à tout alignement de ses choix sur ceux de telle ou telle autre organisation internationale
comme l’OTAN.
Quant au volet récapitulatif des politiques - qui n’a rien à faire dans un traité constitutionnel -,
il nous faut travailler à un projet politique alternatif profondément différent, moins inspiré par
le modèle anglo-saxon, plus ouvert sur la dimension sociale et sociétale, prenant mieux en
compte les valeurs dont la France est porteuse comme les services publics.
À ce titre, rejeter le traité constitutionnel, c’est aussi refuser l’ultralibéralisme. Ce serait une
avancée importante. Car loin d’inscrire ces politiques dans le marbre, ce rejet ouvrirait
l’opportunité, pour une majorité progressiste, de les faire évoluer.
Une victoire du « non » au référendum ouvrirait-elle une « crise » ?
Émile Zuccarelli. C’est la thèse des tenants du « oui », autant je ne méprise pas leurs
arguments de fond sur le contenu du texte. Autant je trouve d’un autre âge ces pratiques qui
visent à surfer sur la peur. La dialectique : « c’est "oui" ou le chaos » est extrêmement
dommageable pour la qualité du débat. Car chacun sait que la victoire du « non », loin
d’ouvrir une crise, serait l’occasion de reposer l’Europe sur de nouvelles bases, de renégocier
le traité. Ce qui ne sera plus possible s’il est ratifié, les conditions de sa révision étant
inaccessibles.
En 2003, les électeurs, en Corse, avaient rejeté, contre le consensus entre les « grandes »
formations politiques, le projet modification du statut de la collectivité territoriale, qui
n’était pas sans rapport avec une certaine conception de l’Europe. Croyez-vous qu’un tel
scénario soit possible à l’issue du débat sur ce projet de constitution ?
Émile Zuccarelli. Le parallèle est audacieux. C’est vrai que quelques mois avant le
référendum en Corse le « oui » était donné largement vainqueur. On promettait aux
défenseurs du « non » une défaite humiliante. On a vu ce qu’il en a été. Le résultat en Corse
fut le fait de plusieurs éléments. L’un d’entre eux a été, à l’évidence, la campagne
d’explication que nous avons lancée dans toute l’île sur le vrai contenu du texte. À une autre
échelle, c’est à une campagne d’explication, le texte en main, qu’il nous faut nous atteler pour
démontrer les dangers de ce projet et rassembler, demain, une majorité pour son rejet. Je crois
que c’est possible.
Entretien réalisé par Rosa Moussaoui
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« Super menteur » bâtit des châteaux en Espagne
Venu soutenir Monsieur Zapatero à Madrid dans sa campagne en faveur du oui au référendum pour le traité
instituant une constitution pour l’Europe, Monsieur Chirac a expliqué qu’il fallait voter OUI parce que la
constitution, c’est une Europe plus démocratique, plus sociale et plus d’unité politique.
Un triple mensonge qu’il faut dénoncer.
L’Europe, c’est l’absence totale de démocratie
En effet, de très nombreux domaines échappent aux parlements nationaux (qui ont des comptes à
rendre aux citoyens) pour passer sous le contrôle des commissaires qui n’ont de compte à rendre à
personne. Le pouvoir législatif est d’initiative exclusive de la commission, cette assemblée de
commissaires qui ont individuellement plus de pouvoir que chaque chef d’état, et qui sont désignés
par marchandage. Ils cumulent le pouvoir législatif, exécutif et judiciaire car ils peuvent émettre des
directives et sanctionner ceux qui ne s’y conforment pas.
Article I–26–2 : « Un acte législatif de l'Union ne peut être adopté que sur proposition de la Commission »
Article I–26–4 : « Les membres de la Commission sont choisis en raison de leur compétence générale et de leur
engagement européen et parmi des personnalités offrant toutes garanties d'indépendance. »
Article I–26–7 : « La Commission exerce ses responsabilités en pleine indépendance. Sans préjudice de l'article
I-28, paragraphe 2, les membres de la Commission ne sollicitent ni n'acceptent d'instructions d'aucun
gouvernement, institution, organe ou organisme. Ils s'abstiennent de tout acte incompatible avec leurs fonctions
ou l'exécution de leurs tâches. »
De plus, contrairement à ce que l’on entend, il n’y a pas d’initiative citoyenne possible pour modifier la
constitution :
Article I–47–4. « Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre
significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission, dans le cadre de ses
attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent
qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application de la Constitution
Le Parlement ne peut se saisir d’un projet de loi. Il ne peut que statuer sur les propositions de la
commission. Il n’a que le pouvoir de dire NON, pas celui d’amender sans l’accord de la commission.
ARTICLE III-332 : « Le Parlement européen peut, à la majorité des membres qui le composent, demander à la
Commission de soumettre toute proposition appropriée sur les questions qui lui paraissent nécessiter
l'élaboration d'un acte de l'Union pour la mise en œuvre de la Constitution. Si la Commission ne soumet pas
de proposition, elle en communique les raisons au Parlement européen. »
Le Parlement n’a que le pouvoir de dire oui ou non, ce qu’il ne fait que très rarement à cause d’une majorité
centriste objet de fortes pressions.
L’Europe, c’est toujours moins de social
Certes, le mot social apparaît souvent, mais surtout dans l’expression « conseil économique et
social ». Il n’y a jamais de mesure véritablement sociale contraignante.
Le mot apparaît la première fois pour caractériser une économie de marché hautement compétitive,
donc du social à minima qui ne trouble pas l’économie (à moins que le compétitif ne se rapporte au
dumping social ?) :
Article I–3–3. « L'Union œuvre pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique
équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive… »
De plus, l’union ne s’engage pas. Elle veut bien reconnaître que ça existe, dans le sens où ceux que
cela intéressent peuvent en parler entre–eux :
ARTICLE I-48 « L'Union reconnaît et promeut le rôle des partenaires sociaux à son niveau, en prenant en
compte la diversité des systèmes nationaux. Elle facilite le dialogue entre eux, dans le respect de leur
autonomie. Le sommet social tripartite pour la croissance et l'emploi contribue au dialogue social. »
Les vieux et les handicapés ont, tout de même, le droit de vivre :
ARTICLE II-85 « L'Union reconnaît et respecte le droit des personnes âgées à mener une vie digne et
indépendante et à participer à la vie sociale et culturelle. »
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ARTICLE II-86 « L'Union reconnaît et respecte le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures
visant à assurer leur autonomie, leur intégration sociale et professionnelle et leur participation à la vie de la
communauté. »
Et un peu de sécurité sociale, sous contrôle et dans les pays où ça existe :
ARTICLE II-94–1 « L'Union reconnaît et respecte le droit d'accès aux prestations de sécurité sociale et aux
services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maternité, la maladie, les accidents du travail,
la dépendance ou la vieillesse, ainsi qu'en cas de perte d'emploi, selon les règles établies par le droit de l'Union
et les législations et pratiques nationales. »
Le droit d’accès à l’électricité par exemple, c’est à cela que se résume la politique de cohésion sociale
de l’Union ! ! !
ARTICLE II-96 « L'Union reconnaît et respecte l'accès aux services d'intérêt économique général tel qu'il
est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la Constitution, afin de promouvoir la
cohésion sociale et territoriale de l'Union. »
…/…
Dans la section III–2 intitulée « Politique sociale », la confiance dans le marché est telle que l’harmonisation
sociale se fera naturellement (on évite de préciser : par le bas !), la diversité favorisant la concurrence.
ARTICLE III-209 « …l'Union et les États membres agissent en tenant compte de la diversité des pratiques
nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de
maintenir la compétitivité de l'économie de l'Union. Ils estiment qu'une telle évolution résultera tant du
fonctionnement du marché intérieur, qui favorisera l'harmonisation des systèmes sociaux,… »
Il y a toutefois un cas où la volonté sociale de l’Union est clairement affirmée, c’est pour faire la leçon
au reste du monde, mais à ses propres conditions :
ARTICLE III-292–2. « L'Union définit et mène des politiques communes et des actions et œuvre pour assurer un
haut degré de coopération dans tous les domaines des relations internationales afin: …
d) de soutenir le développement durable sur le plan économique, social et environnemental des pays en
développement dans le but essentiel d'éradiquer la pauvreté;
e) d'encourager l'intégration de tous les pays dans l'économie mondiale, y compris par la suppression progressive
des obstacles au commerce international; »
Pour illustrer la politique africaine de l’Union, voir l’article du Monde Diplomatique de février
2005 page 10 : (extrait de la dernière partie) «L’Union s’efforce d’imposer lors de ces
négociations ce que, dans trois domaines, elle n’a pu obtenir dans le cadre de l’OMC : la
concurrence dont il faut assurer, selon une expression du traité constitutionnel européen, le
caractère « libre et non faussé », les marchés publics, où elle entend qu’entreprises
étrangères et entreprises nationales soient traitées sur un pied d’égalité, et enfin
l’investissement, où elle réclame une dérégulation des régimes en vigueur dans les pays ACP.
Pour illustrer ces exigences, l’Union ressasse le discours des groupes de pression patronaux
selon lequel les dérégulations favorisent les investissements… Les firmes européennes
entendent opérer en toute liberté là où elles investissent, et tirer le profit maximum de
l’absence d’exigences salariales, de législations sociales et de contraintes environnementales.
Leur bras séculier, la Commission, est donc priée d’insister… La Commission s’emploie à les
imposer aux pays ACP après les avoir divisés. »
L’Europe c’est l’unité politique à minima sous le contrôle des USA
Et d’abord, qu’entend–on par « politique » ?
Si c’est la politique économique et monétaire, la politique financière avec l’indépendance de la Banque Centrale
Européenne, alors oui il y a unité (tandis que tout état contrôle sa banque nationale, instrument de sa politique,
l’Europe laisse monsieur Trichet agir en toute indépendance, dans l’intérêt exclusif des milieux d’affaires, voire
des intérêts américains).
Si c’est la politique internationale, les prises de position à l’ONU, la prudence vis à vis de la politique belliciste
des USA, la politique sociale, alors il n’y a pas de politique commune (voir les gesticulations de messieurs
Berlusconi et Barroso –l’actuel Président de la Commission– pour soutenir l’engagement américain en Irak).
Les politiques (au pluriel, en, effet !) sont définies à la partie III (322 des 448 articles) là où s’affirment à
longueur d’article le « principe d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre et non faussée ».
Il est toutefois prévu que le Conseil Européen (les chefs d’états et de gouvernements) s’efforcent de définir une
politique commune.
ARTICLE III-295–1. « Le Conseil européen définit les orientations générales de la politique étrangère et de
sécurité commune, y compris pour les questions ayant des implications en matière de défense. »
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ARTICLE III-294–2. « Les États membres appuient activement et sans réserve la politique étrangère et de
sécurité commune dans un esprit de loyauté et de solidarité mutuelle. Les États membres œuvrent de concert au
renforcement et au développement de leur solidarité politique mutuelle. Ils s'abstiennent de toute action contraire
aux intérêts de l'Union ou susceptible de nuire à son efficacité en tant que force de cohésion dans les relations
internationales. »
Mais ils n’y sont jamais parvenus à 12 puis à 15. Il est à parier qu’ils n’y parviendront encore moins à 25, avec le
poids de l’histoire passée et les alliances de chacun, ainsi que les pressions des USA par l’intermédiaire de
l’OTAN. La politique de cette dernière prend le pas sur celle de l’Union :
ARTICLE I-41–2 « La politique de l'Union au sens du présent article n'affecte pas le caractère spécifique de la
politique de sécurité et de défense de certains États membres, elle respecte les obligations découlant du traité de
l'Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le
cadre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord et elle est compatible avec la politique commune de sécurité
et de défense arrêtée dans ce cadre. »
Le traité proposé institue donc une constitution qui balaye la démocratie, écrase toute velléité sociale, rend
quasiment impossible une politique internationale commune.
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« Europe, la trahison des élites »
avec Raoul
Marc JENNAR (*)
« Je suis irréductiblement attaché à l’idée d’Europe. Parce que cette idée recèle un modèle original, unique, de
structuration des rapports humains. C’est dans l’espace européen que sont nées à la fois l’exigence des droits
individuels créateurs de la liberté, mais également la revendication des droits collectifs qui organisent la
solidarité. Cette double exigence n’a été formulée nulle part ailleurs sur notre planète avant qu’elle le soit par
les Européens. Elle fonde l’Europe. Si l’Europe sans la liberté n’est pas l’Europe, l’Europe sans la solidarité, ce
n’est pas davantage l’Europe.
Je me suis attaché, dans un livre paru il y a peu (Europe, la trahison des élites, Paris, Fayard, 2004), à
démontrer, exemples concrets à l’appui, le caractère hémiplégique de ce qu’il est convenu d’appeler « la
construction européenne. » Tout pour le commercial, l’économique, le financier ; rien ou très peu pour le social,
le fiscal, l’environnemental. Des pouvoirs de plus en plus considérables concentrés dans des mains de moins de
moins en moins contrôlées. Des traités et des directives qui expriment les attentes des intérêts privés sans que le
service de l’intérêt général soit privilégié, ni même protégé. Des comportements impérieux, arrogants et égoïstes
dans les négociations internationales au service exclusif des patrons européens, au mépris des droits des
peuples. L’ensemble institutionnel baptisé « Union européenne » incarne une Europe qui ne correspond guère à
l’Europe espérée et promise il y a une cinquantaine d’années. Ratifier la Constitution adoptée par les Chefs
d’Etat et de gouvernement aura pour effets de renforcer, de légaliser et de pérenniser une Europe qui est de
moins en moins européenne et qui s’identifie de plus en plus au modèle de société développé aux Etats-Unis. »
Plan de l’exposé : Introduction / 1. Quel est le statut de ce texte baptisé « Constitution » ? / 2. La Constitution
est-elle neutre philosophiquement ? / 3. La Constitution est-elle neutre idéologiquement ? / 4. Le principe de la
souveraineté du peuple est-il respecté par la Constitution proposée ? / 5. La Constitution offre-t-elle des garanties
pour l’indépendance et la neutralité de la Commission européenne ? / 6. La Constitution représente-t-elle « un
pas en avant » social ? / 7. La Constitution permet-elle l’existence de services publics ? / 8. La Constitution
offre-t-elle la garantie de pouvoir mettre en œuvre une politique étrangère et de défense européennes ? / 9. La
Constitution protège-t-elle les Européens contre la mondialisation néolibérale ? / 10. Comment pourra-t-on
modifier la Constitution dans l’avenir ? / 11. Par rapports aux traités en vigueur, en quoi la Constitution apportet-elle des éléments positifs ? / 12. Quelles seraient les conséquences du rejet de la Constitution proposée ? /
Conclusion : Une formidable régression qui consacre une restauration conservatrice.
(*) soirée co organisée avec ATTAC 38. Raoul Marc JENNAR est docteur en science politique, animateur de l'équipe de
recherche URFIG, signataire de l'Appel des 200. le prix du Livre des Amis du Monde diplomatique a été décerné en
Novembre 2004, à l'unanimité des membres du jury, à l'ouvrage de Raoul-Marc Jennar : Europe, la trahison des élites
(Fayard, 18,05 euros). Ce livre, pour reprendre les termes du jury, "met [...] en avant les pouvoirs exorbitants de la
Commission et de ses fonctionnaires. Il révèle le caractère néfaste de l'Union européenne vis-à-vis des pays du Sud, en
particulier au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Il montre que l'opposition supposée Union européenne/EtatsUnis est fictive et instrumentalisée en vue de la construction d'un grand marché transatlantique".
- Autres rencontres-débats (consulter notre site pour vérifier la confirmation Merci.). FEVRIER : - Le Lundi 7 à 14h30 & à
20h30 (1) & (2) « Santé et Sécurité Sociale », avec Hubert SAGE, Pt de l’association UFAL 38. - Le Lundi 14, à 20h30
rencontre -débat (2) « Les trois modèles de gouvernance mondiale » avec Bernard Billaudot. - Le Mardi 15, de 14h30à
17h30 rencontre atelier (1) « Les trois modèles de gouvernance mondiale » avec Bernard Billaudot. - Le Mercredi 16, à
14h30 & à 20h30 (1) & (2) « 1° volet : guerre impériale, lutte anti sociale » avec Jacques Bidet ( Actuel Marx).
MARS : - Le Mardi 8 à 20h30 « Considérer l’information autrement » avec ..... - Le Mercredi 23 à 20h30 « Union
Européenne : Traité ou Constitution ? » avec Paul ALLIES, professeur des Universités. AVRIL : - Le Mercredi 6, à
14h30 & à 20h30 (1) & (2) « 2° volet : guerre impériale, lutte anti sociale » avec Jacques Bidet ( Actuel Marx).
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Le Parlement européen vote contre les hôpitaux et le logement
social
Strasbourg, le 22 février 2005
Bernard Hayette
Délégation PS belge
0475/52.53.75
Communiqué de presse
Le Parlement européen a adopté le rapport de Sophia In't Veld sur les aides d'Etat sous
forme de compensation de service public. Pour rappel, en juillet 2003, dans l'affaire
"Altmark", la Cour de Justice avait estimé que certaines formes d'aides gouvernementales aux
services publics ne constituaient pas une "aide d'Etat".
Le Parlement européen a rédigé un rapport d'initiative en estimant que l'arrêt de la
Cour de Justice avait laissé un certain flou juridique.
La délégation PS belge a défendu une position bien isolée même au sein du groupe
socialiste et a voté contre ce rapport car il témoigne d'une dérive très libérale du Parlement
européen. En effet, la majorité démocrate-chrétienne libérale soutient l'idée que les aides
gouvernementales octroyées aux hôpitaux et au logement social ne peuvent se faire que sous
réserve que l'Etat membre présente à la Commission une description détaillée de
l'organisation et de son mode de financement. Cet excès de bureaucratie paralysera des
services essentiels, pour les citoyens, plus occupés à répondre à des questionnaires qu'à
œuvrer au bien être des gens.
Autre point inacceptable pour la délégation PS belge, le fait que lorsqu'une aide d'Etat
est autorisée pour des services d'intérêt général, elle devrait toujours être soumise à une
procédure transparente d'appel d'offres. Cette disposition aurait pour effet de supprimer la
libre administration des collectivités locales autrement dit le risque pour les services sociaux
d'être subsidiés suivant des critères ne tenant pas compte des réalités locales.
La délégation insiste auprès des autorités européennes à engager une réflexion sur la
place et le financement des services publics au sein de l'Union européenne via la rédaction
d'une directive-cadre. Enfin, signalons la position ambiguë du groupe des verts notamment
sur leurs amendements différenciant les services publics alors que la législation européenne
ne le prévoit pas.
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CONTRE LA « CONSTITUTION » NOUS PROPOSONS UNE AUTRE
EUROPE
par Yves Salesse, co-président de la Fondation Copernic
Fondation Copernic
Pour remettre à l’endroit tout ce que le libéralisme fait fonctionner à l’envers
Fondation Copernic—BP 32—75921 Paris cedex 19
Tel : 06.75.25.77.76 Email : [email protected]
Http : //www.fondation-copernic.org
Nombre d’hésitants nous reprochent de nous limiter à la critique et à la dénonciation de l’actuelle construction
européenne et du projet de « constitution ». Il est vrai que beaucoup de documents issus de la « critique de
gauche » poussent l’analyse mais restent évasifs sur les alternatives. Il nous faut être capables de montrer que
nous proposons d’autres politiques européennes, qu’elles sont possibles mais se heurtent au projet de
constitution.
C’est une dimension importante de notre campagne. A ce stade, nos propositions alternatives doivent porter
prioritairement sur quelques sujets qui sont les plus sensibles pour l’ensemble de nos concitoyens. Ce Copernic
Flash apporte des propositions sur la lutte contre le chômage, les règles sociales, les services publics.
Je résume ici, à usage de la campagne, certains points traités dans mon Manifeste pour une autre Europe
(éditions du Félin 2004 ; 10,50 €) auquel ont peut se reporter pour des développements plus complets. On peut
également consulter la note Copernic sur l’Europe (Europe : une alternative) éditée chez Syllepse.
I. L’EUROPE CONTRE LE CHOMAGE
1. Une politique de croissance économique socialement utile.
La première action des pouvoirs publics contre le chômage consiste à stimuler l’activité économique
générale essentiellement en encourageant l’investissement et en développant le pouvoir d’achat. Ils
utilisent pour cela le budget, la monnaie, la réglementation.
La croissance ne doit pas être un objectif en soi. Celle que nous préconisons sélectionne les
activités dont l’utilité sociale est reconnue. Ce ne sont pas les besoins qui manquent.
Nous voulons que l’Europe mène une telle politique. Les propositions existent. En 1993, la
Commission a présenté un projet de grands réseaux transeuropéens (transport, énergie) et de «
société de l’information ». En 1993 aussi, deux économistes classiques ont chiffré un plan riche en
emplois, reprenant en partie les réseaux transeuropéens mais aussi le logement, la rénovation
urbaine et les transports urbains. En 2003, la Commission a soumis de nouvelles propositions au
Conseil européen. Les propositions chiffrées existent donc, les financements sont précisés. Il est
aisé de compléter ces propositions par d’autres dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la
défense de l’environnement, de la recherche-développement, etc.
Une telle politique européenne se heurte directement au «traité constitutionnel » :
- Le budget européen doit être strictement équilibré (articles I-53 et III-407), ce qui complète l’interdiction
faite à la banque centrale européenne de faire crédit aux institutions européennes (article III-181).
- On ne peut utiliser l’instrument monétaire, l’injection de liquidités dans l’économie portant toujours un
risque inflationniste ; or la mission de la Banque centrale européenne (BCE) est la stabilité des prix (articles I30 et III-185).
- L’indépendance de la BCE interdit aux instances politiques de peser sur elles pour qu’elle assouplisse sa
politique monétaire afin de lutter contre le chômage ou toute autre raison (articles I-30 et III-188). Son refus
d’agir aujourd’hui face au cours très bas du dollar, qui facilite les exportations US et freine les exportations des
pays de la zone euro, en est une éclatante illustration.
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- Il faut ajouter que la faiblesse du budget européen (1,27 % du PNB) limite étroitement la capacité d’action à ce
niveau. Ce plafonnement n’est pas dans les textes : il résulte d’une décision des gouvernements. Mais on
retrouve la « constitution » qui exige l’unanimité en la matière et donc pour modifier ce plafond (article I-54).
2. L’action des institutions européennes doit être complétée par une action coordonnée des
États
En 1998, le gouvernement allemand à proposé que des États s’entendent pour engager une politique
de relance concertée. Le gouvernement italien était d’accord. Jospin a refusé au nom du pacte de
stabilité.
L’action des États se heurte directement aux articles suivants :
- leurs capacités budgétaires sont réduites par le pacte de stabilité (article III-184)
- un article nouveau prévoit le renforcement de la discipline budgétaire (article III-194)
- dans la zone euro, ils ne disposent pas de l’instrument monétaire
- ils ne peuvent emprunter auprès de la Banque centrale européenne ni auprès de leur propre
banque centrale (article III-181).
3. Réduire le temps de travail et contrôler les licenciements
3.1 La directive sur le temps de travail doit être corrigée en sens opposé de ce qui est aujourd’hui proposé par la
Commission. La directive de 1993 fixe la durée légale de travail au maximum à 48 heures par semaine assortie
de dérogations. La Commission propose un assouplissement supplémentaire qui autoriserait la semaine de 65
heures ! Nous combattrons évidemment ce projet.
Au contraire, nous demandons, comme première mesure, la suppression de ces dérogations telles que le
consentement du salarié à travailler plus.
3.2 Réduire le temps de travail. On ne peut attendre de la seule croissance la résorption du chômage. La baisse
du temps de travail est une autre voie. Malgré ses insuffisances, la décision française sur les 35 heures, a montré
une certaine efficacité pour l’emploi. Une réduction européenne aurait un impact supérieur.
3.3 Introduire le contrôle des licenciements collectifs dans la directive qui leur est consacrée. En application du
principe de subsidiarité, chaque État déciderait les formes précises de ce contrôle, administratif, syndical,
juridictionnel. Mais la règle européenne lui interdirait de n’en avoir aucun.
Ces mesures se heurtent directement à :
- l’encadrement de la politique sociale qui doit tenir compte de la nécessité de maintenir la compétitivité de
l’économie de l’Union (article III-209)
- la limitation des compétences de Union (qui ne peut ne peut par exemple harmoniser les règles nationales en
matière de lutte contre l’exclusion sociale) et l’unanimité (article III-210)
- en tout état de cause, elle évite d’imposer des contraintes administratives, financières ou juridiques telles
qu’elles contrarieraient la création de PME (même article).
- la recherche de la flexibilité de la main d’œuvre et du marché du travail (article III-203)
- l’Union et les États membres veillent à ce que les conditions nécessaires à la compétitivité de l’industrie
soient assurées et son action vise à accélérer l’adaptation de l’industrie et à encourager un environnement
favorable à l’initiative et au développement des entreprises (article III-279).
4. Mettre fin au dumping fiscal se heurte directement à l’unanimité requise pour modifier les règles fiscales
(article III-171)
5. Des actions sectorielles
5.1 L’arrêt de l’offensive contre les services publics dépasse la question du chômage, mais en est un volet non
négligeable : les ouvertures à la concurrence (décidées au niveau européen) et les privatisations décidées
nationalement, se traduisent toujours par des suppressions massives d’emploi. Or la poursuite de l’offensive
contre les services publics est programmée (voir plus loin).
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5.2 Les États ont toujours eu des politiques de soutien à certains secteurs de l’économie. Elles sont maintenant
généralement prohibées puisque sont interdites les aides accordées par les États membres qui faussent ou
menacent de fausser la concurrence (article III-167).
II- DES REGLES SOCIALES EUROPEENNES
1. Remettre la charte des droits en chantier
1.1 La rédaction de la Charte est restée prisonnière de la négociation avec les gouvernements. Une Charte des
droits nécessite un débat en profondeur dans chaque État et ne peut être bornée par les principes libéraux qui
encadrent les traités actuels. Droit au travail ! Droit au logement ! Droit aux soins ! Droit à l’éducation ! Bref,
droit de vivre.
Nous énonçons cette revendication insensée : le droit de vivre décemment pour tous. Que l’Europe garantisse ce
droit, et donc ces droits ! Aucun des droits énoncés ne peut être soumis au « respect des dispositions de la
constitution et du droit national ». C’est, au contraire, à celles-ci de se soumettre aux droits fondamentaux.
1.2 Énoncer un principe général du droit européen : le principe de non-régression. Sur bien des sujets, le droit
européen doit tenir compte du niveau de développement des États. S’il représente une avancée pour les pays en
retard, il est en deçà de ce qui a été conquis ailleurs. Par ce principe, la Charte garantira que l’on ne peut se
fonder sur une règle européenne pour faire reculer le droit national là où il est plus avancé.
1.3 Poser l’obligation qu’existent dans chaque État membre un revenu minimum et un salaire minimum garantis.
1.4 Supprimer le droit de grève pour les employeurs (article II-88) qui a été l’arme redoutable souvent utilisée
par le patronat contre les gouvernements de gauche (cfr. Chili sous Allende et Venezuela récemment).
2. Des mesures concrètes
Le droit social européen n’est pas destiné à remplacer le droit national. Il serait illusoire ou dangereux, en raison
de différences historiques et économiques des États, de prétendre y instaurer une réglementation uniforme.
2.1 Contre le dumping social
Il est déjà pratiqué et favorise les délocalisations. Il faut faire échec à la directive Bolkestein qui vise à
l’institutionnaliser pour les services avec le « principe du pays d’origine ».
2.2 Un salaire minimum dans chaque État
L’harmonisation n’est pas toujours possible immédiatement au plus haut niveau acquis dans l’un des États.
Ainsi, après avoir adopté l’existence d’un salaire minimum dans tous les États, se pose la question de sa
quantification. Il ne peut être le même partout. On doit alors inventer des formules qui tiennent compte des
différences : les marches européennes contre le chômage ont adopté la revendication d’un salaire minimum
défini en pourcentage du PIB par tête.
2.3 Dans certains domaines l’harmonisation doit d’emblée se faire par le haut. Il en est ainsi pour la répression
du harcèlement, la protection des jeunes au travail, le maintien du contrat de travail en cas de rachat d’entreprise.
Sur tous ces sujets des réglementations nationales existent qui peuvent être rapidement étendues à l’ensemble des
États membres.
2.4 L’Europe doit intégrer les conventions internationales existantes en matière sociale.
2.5 Une règle européenne doit obliger immédiatement tous les États membres à se doter d’une inspection du
travail et en fixer les compétences minimales.
Ces mesures se heurtent aux articles cités précédemment.
III- DEFENDRE ET ETENDRE LES SERVICES PUBLICS
L’ouverture à la concurrence, conduite au niveau européen, est l’un des modes majeurs d’attaque contre les
services publics. Elle se combine avec les privatisations décidées nationalement. Avec les services publics nous
tenons une alternative concrète, expérimentée. Deux conceptions de la société s’affrontent. A la logique du profit
nous opposons celle des besoins. A la marchandisation du monde nous opposons les biens communs. A la
concurrence généralisée nous opposons la solidarité. Au creusement des inégalités nous opposons l’égalité.
Au niveau européen, il est temps, raisonnablement, de prendre certaines décisions immédiates, de faire un bilan.
Elles prépareront des mesures plus ambitieuses.
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Un observatoire et un moratoire des libéralisations
Partout, la fable libérale a été démentie : chemins de fer, électricité, eau, transports, télécommunication. Ni
l’amélioration du service, ni la baisse des prix, ni les économies budgétaires ne sont au rendez-vous. Ce bilan
universel n’empêche pas la Commission, les gouvernements, des forces de gauche même, de trouver des vertus à
cette politique.
Nous proposons la mise en place d’un observatoire européen, appuyé sur des observatoires nationaux et locaux
pour tirer un bilan complet. Il ne saurait être, évidemment, sous la coupe de la Commission. Les résultats des
travaux de l’observatoire seront soumis au débat de tous les parlements nationaux et du Parlement européen.
Aucune nouvelle ouverture à la concurrence ne sera décidée avant la conclusion de ces débats.
Mettre fin à la concurrence déloyale contre les services publics
La loyauté de la concurrence, dont l’institution communautaire est habituellement si soucieuse, joue à sens
unique.
L’exemple des transports terrestres est éclairant. Le transport routier, premier concurrent du chemin de fer,
profite d’avantages qui constituent d’authentiques distorsions de concurrence : réglementation sociale médiocre,
règles de sécurité inférieures et largement inappliquées en raison du très grand nombre des entreprises et de
l’insuffisance des contrôles. L’égalisation des conditions de concurrence est un premier pas que l’Europe
actuelle n’a jamais voulu accomplir.
Modifier la place des services publics dans le droit fondamental de l’Union
La première mesure consiste à affranchir les services publics des règles de la concurrence. Il faut remettre en
cause le statut dérogatoire que leur réserve le droit européen aujourd’hui en vigueur : la concurrence est a loi
fondamentale ; le monopole de service public n’est toléré que par exception, sous conditions et dans une
acception restrictive.
Le service public réclame, pour jouer son rôle, une place au moins aussi importante que la concurrence. La
suppression de son statut dérogatoire et l’inapplicabilité des règles de la concurrence se traduiraient
concrètement par les règles suivantes : les aides publiques directes ou indirectes aux entreprises de service public
sont autorisées, proportionnées aux objectifs ; les ententes entre entreprises de services public sont licites
lorsqu’elles visent à améliorer le service ou le rendre à moindre coût. Une orientation plus volontaire consistera à
encourager les financements publics nationaux et locaux et la coopération entre les entreprises de service public.
Respecter le principe de subsidiarité
L’Europe ne doit prendre en charge que ce que les États ne peuvent faire. Chaque État disposera du droit de
décider les activités auxquelles il entend conférer le statut de service public et de les organiser comme il
l’entend.
Construire des services publics européens
Il est des secteurs pour lesquels une organisation européenne du service public est nécessaire. C’est clair dans le
domaine des transports, de la poste, des télécommunications. Dans certains cas l’intervention européenne
consistera à impulser la coopération des services publics nationaux. Dans d’autres, parce qu’ils s’agit d’un
nouveau service et que les acteurs nationaux n’existent pas, elle prendra d’emblée la forme d’une organisation
européenne : ce sera le cas, par exemple de la localisation par satellite si le projet Galileo aboutit. On aura besoin
alors de rendre possible et de définir la propriété publique européenne.
Exclure les services publics des négociations commerciales internationales telles que celles de l’AGCS
Tout ceci se heurte directement au « respect du principe de l’économie de marché ouverte où la concurrence est
libre et non faussée » (articles III-177), le monopole ou les droits spéciaux destinés à protéger le service public
étant par nature des atteintes à ce principe; au commerce libre dans les relations avec le reste du monde (article
I- 3 ; III-292) ; à la suppression progressive des restrictions aux investissements étrangers directs et à la
réduction des barrières douanières et autres (article III-314) ; à l’interdiction d’entraver la libre circulation des
capitaux (article III-156), puisqu’il s’agit de protéger des secteurs d’activité ; à la soumission des services
publics aux règles de concurrence (article III-166) et aux articles sectoriels qui visent à rendre les
libéralisations irréversibles : les transports, les télécommunications, l’énergie sont des marchés ouverts
(articles III-246, III-256).
Tout cela illustre bien nos deux critiques essentielles :
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1° Le traité constitutionnel, qui serait la norme supérieure pour les institutions de l’Union
et les États membres, est truffé d’obligations et d’interdictions très précises qui n’y ont pas
leur place, qui seraient ainsi soustraites au débat, à la décision courante des instances
politiques et donc au changement. Il faut noter que les défenseurs du Oui ne répondent
jamais à cette critique première sur ce vice anti-démocratique radical ; quand ils ne
mentent pas délibérément en affirmant que ce texte n’est qu’un contenant et que l’on
décidera plus tard du contenu.
2° Toutes ces dispositions sont la traduction juridique des politiques libérales et font
obstacle à la mise en œuvre de politiques différentes.
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DIRE "NON" AU TRAITE CONSTITUTIONNEL, POUR CONSTRUIRE
L’EUROPE !
Appel contre le "Traité constitutionnel" européen
Face à la mondialisation libérale et aux firmes transnationales, nous avons besoin d’Europe. Mais
celle qui se fait aujourd’hui n’est pas l’Europe dont nous avons besoin.
L’Europe qu’on nous demande d’avaliser est totalement organisée autour d’un principe unique : le
marché, la généralisation de la concurrence. C’est cela qui autorise l’attaque contre les services
publics, l’incitation à l’allongement de la durée du travail et sa flexibilisation, l’encouragement à la
régression sociale dans chacun des pays de l’Union européenne. Cette Europe-là est menée par le
haut, par des négociations opaques entre les gouvernements et par des instances qui ne sont pas
soumises au contrôle démocratique, telles la Commission ou la Banque centrale européenne.
Les peuples ne se reconnaissent pas dans cette pseudo-Europe qui a le marché pour idole et la
négociation secrète pour liturgie. Il est urgent de sortir de cet engrenage.
Le "traité constitutionnel" adopté par les chefs d’Etat et de gouvernement le 18 juin 2004 constitue
l’ensemble juridique libéral le plus complet et contraignant de la planète. Il grave dans le marbre les
dogmes et les politiques inscrites dans le Traité de Rome aggravé dans un sens néo-libéral par les
traités ultérieurs.
Il ouvre la voie à une politique militariste subordonnée à l’OTAN. Il refuse l’égalité des droits à ceux
qui résident en Europe sans posséder la nationalité d’un Etat membre et les désigne au harcèlement
administratif et policier. Il remet en cause le principe de laïcité auquel nous tenons. Enfin, il laisse les
citoyens à l’écart des lieux de décision.
Il n’est d’ailleurs une constitution ni par son mode d’adoption, ni par son mode d’élaboration, ni par
son contenu. S’il est ratifié, l’unanimité des 25 Etats membres sera ensuite requise pour le modifier.
Cela, alors même qu’il fixe dans le détail des choix politiques, économiques et sociaux essentiels qui
ne pourront donc plus être remis en cause. Ce vice anti-démocratique affecte déjà les traités actuels ;
il est incorporé avec eux.
Cette masse de stipulations précises et contraignantes va toujours dans le même sens : la domination
du marché, la liberté d’action des capitaux et des firmes transnationales. Au fronton de cet édifice est
inscrit un principe primordial, décrété intangible : « le principe d’une économie de marché ouverte où
la concurrence est libre et non faussée ».
Cette Europe-là n’est pas la nôtre.
C’est pourquoi il est urgent de donner à l’Europe de nouvelles fondations qui l’émancipent du
capitalisme financier, prédateur et belliciste, qui la réconcilient avec le progrès social, la démocratie,
un développement soutenable, la coopération entre les peuples, qui portent la paix sur une planète
déchirée par les guerres.
Nous sommes des partisans résolus d’une Europe du droit pour toutes et tous à l’emploi, mobilisée
contre le chômage, la précarité et la dégradation du cadre de vie. Une Europe qui renforce les
garanties sociales, met en œuvre un développement économique compatible avec les équilibres
écologiques, défend la diversité culturelle, respecte la laïcité et veille à la stricte application de l’égalité
entre les hommes et les femmes.
Nous voulons une Europe démocratique, fondée sur la pleine citoyenneté de tous ses résidents. Nous
proposons une Europe dont les peuples seront les acteurs d’un authentique processus constituant,
qui leur permette de décider vraiment des choix politiques et de contrôler leur mise en œuvre.
Pour que cette Europe si nécessaire devienne possible, il faut partout donner la parole aux citoyens et
refuser cette prétendue " constitution " européenne.
Nous entendons l’argument de celles et ceux qui combattent avec nous le néolibéralisme et craignent
pourtant qu’un tel refus serve les forces réactionnaires. Mais laisser l’Europe actuelle continuer sur sa
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lancée favorise l’essor dangereux des populismes réactionnaires, des droites "souverainistes ", de
l’extrême droite xénophobe.
Cette Europe-là représente une grande menace pour l’idée européenne elle-même.
C’est pourquoi nous appelons à opposer un "non" majoritaire au "traité constitutionnel". Un "non" de
gauche, en rupture avec le système libéral, qui puisse traduire dans les urnes ce que les mobilisations
sociales et alter mondialistes de ces dernières années ont exprimé avec le soutien de la majorité de la
population, des salariés, de la jeunesse.
Appel national initié par 200 signataires dont on peut trouver la liste sur le site http://www.appeldes200.net
Sur les bases de cet appel, les personnes ci-dessous, habitant et militant dans le Nord-Isère,
ont décidé de créer un collectif d’initiatives visant à permettre l’expression d’un « NON DE
GAUCHE » au projet de traité constitutionnel. Elles appellent l’ensemble des citoyennes et
citoyens, militantes et militants du Nord-Isère à signer cet appel et à les rejoindre pour
construire toutes et tous ensemble les actions qui permettrons de mettre en échec ce projet de
traité constitutionnel.
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33 raisons de voter ... OUI
(Clin d'œil du collectif du Pays de Rennes pour une autre Europe.)
mis en ligne le 2 mars 2005
Constitution Européenne : 33 raisons de voter OUI !
Vous voulez :
1. que les capitaux et les marchandises aient autant sinon plus de liberté que les humains ?
(art. I-2) Alors votez oui !
2. que la liberté du travail soit une valeur de l'Europe mais pas le droit au travail, ni le droit
du travail ? (art. II-75) Alors votez oui !
3. que la création d'un marché libre soit un objectif de l'Europe mais pas le plein emploi sauf
s'il ne " fausse " pas la concurrence ? Alors votez oui !
4. que la première chose à sauver en cas de crise sociale ou de guerre, ce soit « le
fonctionnement du marché » ? (art.III-131) Alors votez oui !
5. que la banque centrale européenne, hors de tout contrôle, fasse crédit aux spéculateurs
mais pas aux Etats qui voudraient relancer l'emploi ? (art.III-181) Alors votez oui !
6. que l'euro serve à protéger les avoirs financiers ? (art.I-53 et I-54) Alors votez oui !
7. qu'un pays en récession soit pénalisé une deuxième fois par une sanction financière
imposée par ceux qui sont plus forts ? (art.IIII-184) Alors votez oui !
8. que le moins disant fiscal se généralise dans toute l'Europe, car il faut baisser les
allocations chômage et les impôts des riches ? (art.III-171) Alors votez oui !
9. que le Président de la République se fasse le champion de la taxation de la spéculation
pour aider les pauvres quand il va à New York et à Davos, mais qu'il l'oublie quand il
revient en Europe ? Alors votez oui !
10. que le Président de la République soit écologiste dans les grands sommets de l'ONU et
productiviste quand il visite les campagnes ou inaugure les autoroutes pour les camions ?
Alors votez oui !
11. que les droits sociaux soient abandonnés à la « nécessité de maintenir la compétitivité » ?
(art. III-209) Alors votez oui !
12. que la « liberté de chercher un emploi » soit reconnue même si l'emploi n'existe pas ou est
supprimé ? (art. II-75-2) Alors votez oui!
13. que le droit de grève soit reconnu pour les...« employeurs » ? (art. II -88) Alors votez oui !
14. que la durée maximale du travail passe de 48 par semaine à 65h ? (directive temps de
travail) Alors votez oui !
15. que toute harmonisation des rémunérations, du droit d'association, du droit de grève, soit
exclue ? (art . III-210) Alors votez oui !
16. qu'une entreprise de services ne soit soumise qu'à la législation de son pays d'origine en
matière de droit du travail, de normes environnementales ou de protection des
consommateurs ? (directive BOLKESTEIN [1]) Alors votez oui !
17. que la Constitution ne comporte pas une seule fois les mots "services publics" ? Alors
votez oui !
18. que tous les services soient concernés par la mise en concurrence et la libéralisation ? (art.
III-145) Alors votez oui !
19. que l'éducation, la santé et les services liés à l'environnement soient les prochaines cibles
de la privatisation ? (accords AGCS) Alors votez oui !
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20. que les transports, les télécommunications et l'énergie soient libéralisés ? (art. III 246 et
III-256) Alors votez oui !
21. que la moitié des bureaux de poste soient fermés ? (art. III-148) Alors votez oui !
22. que toute aide aux services qui subsisteraient encore soit interdite ? (art. III-167) Alors
votez oui !
23. que la Constitution soit une photocopie de l'AGCS qui prévoit de tout libéraliser «
notamment l'éducation, la santé et les services liés à l'environnement » (dixit la Banque
mondiale) ? (art. III-145 à III-147 et III-166 et III-167) Alors votez oui !
24. qu'une Constitution détermine les politiques à suivre ? (titre III en entier) Alors votez oui !
25. que ces politiques soient exclusivement et définitivement libérales ? (art. III-177) Alors
votez oui !
26. qu'en guise de démocratie participative, les citoyens ne puissent qu' « inviter » la
Commission européenne à faire des propositions pour « faire appliquer la constitution » ?
(art. I-47,4) Alors votez oui !
27. que toute révision de la constitution soit soumise à la règle de l'unanimité ? (art.IV-443)
Alors votez oui !
28. que le principe de la laïcité soit absent de la Constitution ? art.I-51) Alors votez oui !
29. que la séparation des églises et des Etats soit remplacée par la possibilité d'exprimer ses
convictions religieuses publiquement ? (art.- II-10) Alors votez oui !
30. que la défense de l'Europe et ses interventions extérieures soient inféodées à l'OTAN ?
(art.I-41) Alors votez oui !
31. que l'égalité entre les femmes et les hommes soit une valeur commune aux Etats membres
renvoyant à une loi future devant être adoptée à l'unanimité entre des Etats dont certains
rendent illégal l'avortement ? (art.III-124) Alors votez oui !
32. que le droit de se marier et de créer une famille soit reconnu mais pas celui de divorcer ?
(art.II-69) Alors votez oui !
33. que le droit de vote et de circulation soient limités aux seuls citoyens de l'Union et que
cette citoyenneté exclut de fait les résidents des Etats tiers ? (art. I-10, II-72 et II-99 et II100) Alors votez oui !
Vous avez aimé la réforme des retraites. Vous avez donc dû adorer celle de l'assurancemaladie. Vous devriez vous pâmer devant la Constitution libérale !
Si vous n'êtes pas convaincu et qu'en revanche, vous sentez la cohérence du rouleau
compresseur qui s'est mis en branle depuis des décennies, nous ne serons pas de trop pour lui
barrer la route !
Rejoignez les collectifs pour le NON au projet de traité constitutionnel.
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Dix bonnes raisons de voter NON...
par A-J Holbecq.
28 février 2005
Dix bonnes raisons, chacune suffisante, de voter NON
au référendum sur la constitution européenne.
Car si elle était approuvée...
1 - signée par les 25, elle ne pourra être modifiée qu’à l’unanimité.
Donc le Luxembourg ou Malte, avec leurs 400 000 habitants chacun, soit un centième de la population
européenne, ou le Royaume-Uni dont la population n’est pas franchement pro-européenne, ou certains des dix
derniers petits arrivés dont le PNB par habitant sont au dixième de celui du Luxembourg, pourront s’opposer
avec les mêmes droits à toute modification de la Constitution !
2 - les ultra libéraux auront enfin la garantie que les principes qu’ils défendent sont garantis et sanctuarisés,
qu’on ne pourra plus revenir dessus :
La constitution américaine est écrite sur moins de 20 pages. La constitution européenne fait 350 pages, et plus de
850 avec les annexes ! Cela signifie que tous les détails et les lois sont "gravées dans la pierre" et qu’il sera
quasiment impossible de les changer, impossible par exemple de changer la politique économique de l’Europe
(ou d’un quelconque des sujets soulevés dans cette listes) d’une manière démocratique par une législation
débattue au Parlement Européen. La constitution deviendra la base jurisprudentielle pour les futures législations
ainsi que pour la Cour européenne du Luxembourg.
3 - compte tenu de la réaffirmation de l’indépendance de la BCE, qui ne peut "solliciter ni accepter des
instructions " des Etats, l’Europe deviendra le seul et unique pays au monde et dans l’histoire où l’indépendance
absolue d’une Banque Centrale aura été constitutionnalisée dans un cadre définitif d’une politique prédéterminée
que les citoyens ne pourront même plus orienter.
Aucune Constitution dans le monde ne verrouille à ce point le champ de la politique économique et monétaire.
Une véritable Banque centrale devrait au contraire être mise au service du développement et de l’harmonisation.
L’emploi devrait être sa priorité, des objectifs de change devraient être fixés de manière coordonnée, une
inflation différenciée devrait être tolérée, et la Banque centrale devrait pouvoir financer les politiques
structurelles. ARTICLE III-177 ... conduite d’une politique monétaire et d’une politique de change uniques dont
l’objectif principal est de maintenir la stabilité des prix et, sans préjudice de cet objectif, de soutenir les
politiques économiques générales dans l’Union, conformément au principe d’une économie de marché ouverte
où la concurrence est libre. ARTICLE III-185 L’objectif principal du Système européen de banques centrales est
de maintenir la stabilité des prix [...] Le Système européen de banques centrales agit conformément au principe
d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre. ARTICLE III-188 Ni la Banque centrale
européenne, ni une banque centrale nationale, ni un membre quelconque de leurs organes de décision ne peuvent
solliciter ni accepter des instructions des institutions, organes ou organismes de l’Union, des gouvernements des
États membres ou de tout autre organisme.
4 - le gouvernement, et donc en définitive chacun des citoyens de nos pays, devra payer un intérêt à un système
bancaire privé pour l’usage de sa propre monnaie, qu’il pourrait émettre lui-même, sans intérêt !
C’est, hélas déjà le cas depuis le Traité de Maastricht.. Mais est ce qu’une erreur doit être, pour autant,
constitutionnalisée ? ARTICLE III-181 Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales
des États membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d’accorder des découverts ou tout autre
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type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités
régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États
membres [...]
La masse monétaire qui nous permet de produire et de consommer a donc maintenant pour seule contrepartie les
emprunts émis auprès des banques privées par les entreprises et les ménages, emprunts chargés d’intérêts
conséquents...
Thomas Edison écrivait déjà : "Il est absurde de dire que notre pays peut émettre des millions en obligations, et
pas des millions en monnaie. Les deux sont des promesses de payer, mais l’un engraisse les usuriers, et l’autre
aiderait le peuple. Si l’argent émis par le gouvernement n’était pas bon, alors, les obligations ne seraient pas
bonnes non plus. C’est une situation terrible lorsque le gouvernement, pour augmenter la richesse nationale, doit
s’endetter et se soumettre à payer des intérêts ruineux."
5 - la Charte des droits fondamentaux, reprise dans la partie II du projet, n’aura pas de valeur contraignante et sur
certains points, elle se situera même en deçà de la législation internationale : ainsi le revenu minimum ou le droit
au logement ne sont-ils pas reconnus, alors qu’ils le sont dans la Déclaration universelle de 1948.
6 - elle érigera en "objectif de l’Union" (article I-3-2) "un marché intérieur où la concurrence est libre et non
faussée" et en disposant dans son article III-148 que "les Etats membres s’efforcent de procéder à la
libéralisation des services au-delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi cadre européenne [...]. La
Commission adresse aux Etats membres intéressés des recommandations à cet effet".
La Commission Européenne refuse de retirer la directive Bokelstein et objecte déjà que si on veut faire de
l’Europe une économie performante et réellement compétitive, les dispositions de la charte ne sont pas
négociables.
Ce projet de directive concerne l’ensemble des services dont la fourniture implique une contrepartie financière, à
quelque niveau que ce soit, indépendamment des missions d’intérêt général qui peuvent être les leurs, sans
adoption préalable d’une directive cadre sur les services publics ou d’intérêt général. Considérés comme des
entraves au développement du marché intérieur, les agréments exigés par les Etats sont réputés illégaux. Les
procédures de contrôle échappent aux Etats sur le territoire desquels le service est fourni et relèvent du pays dans
lequel le prestataire est établi : c’est le principe dit du "pays d’origine".
En rupture totale avec la démarche classique d’harmonisation "par le haut" par l’édiction de règles ou principes,
le projet ouvre donc un marché hautement concurrentiel sur le plan social et juridique, au prétexte de simplifier
les procédures d’établissement et/ou de prestation de services au sein de l’Union. Or qui pourrait accepter sans
broncher de voir la législation sociale, les conventions collectives ou la protection des consommateurs rabaissées
au rang d’avantages commerciaux ?
7 - le droit de vote et l’éligibilité aux élections municipales ne seront accordés qu’aux citoyens de l’Union, alors
que la citoyenneté - à ne pas confondre avec la nationalité - devrait être accordée à tous les résidents, sous
condition de résidence pendant un certain temps.
8 - la politique agricole commune restera productiviste,
Alors qu’elle a largement démontré sa capacité de nuisance non seulement sur le plan environnemental, mais
aussi en ce qui concerne l’exode rural, le chômage des paysans et l’écrasement des agricultures non européennes.
9 - des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’États
membres, pourront prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une
proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union
est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution.
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Donc, si 1 000 000 de citoyens européens font la demande d’un acte législatif, la commission Européenne pourra
y donner suite, dès lors que cette proposition entre dans le cadre de la constitution. Mais il y a deux verrous :
Premier verrou : la commission pourra, elle ne doit pas. Si ça ne lui plaît pas, elle ne fait rien. C’est la
commission, et elle seule, qui décide si elle donne suite ou pas !
Deuxième verrou : ça ne pourra se faire que dans le cadre de la constitution, les principes de la constitution. Par
exemple, pour la taxe Tobin, la commission dira : "Désolé, il y a un article qui dit qu’on n’a pas le droit
d’empêcher la totale liberté de circulation des capitaux, ou bien il faut l’unanimité ". Donc votre pétition s’arrête
là. Par contre, si vous voulez plus de libéralisme il n’y aura pas de problème ! Si on dit par exemple : " On va
abolir la durée maximum de travail ", il n’y aura aucune difficulté, la commission donnera suite.
ARTICLE I-47 Principe de la démocratie participative 1. Les institutions donnent, par les voies appropriées, aux
citoyens et aux associations représentatives la possibilité de faire connaître et d’échanger publiquement leurs
opinions dans tous les domaines d’action de l’Union. 2. Les institutions entretiennent un dialogue ouvert,
transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile. 3. En vue d’assurer la cohérence
et la transparence des actions de l’Union, la Commission procède à de larges consultations des parties
concernées.4. Des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif
d’États membres, peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à
soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte
juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution. La loi européenne arrête les
dispositions relatives aux procédures et conditions requises pour la présentation d’une telle initiative citoyenne, y
compris le nombre minimum d’États membres dont les citoyens qui la présentent doivent provenir.
10 - ce projet de constitution ne mentionnera pas le droit des femmes à disposer de leur corps et donc du droit à
l’avortement.
Chacune des dix bonnes raisons qui précèdent suffirait à elle seule pour que vous votiez "NON" au
référendum.
Mais on vous objectera ces dix arguments …
1 - " Si on ne vote pas ce traité, c’est le chaos, la catastrophe ".
Actuellement nous vivons dans le cadre du traité de Nice et il n’y a pas de catastrophe ! Et nous y vivrons au
moins jusqu’en 2009... On est dans ce traité, et on ne s’en porte pas plus mal,... ni mieux d’ailleurs. Mais si le
traité de constitution est ratifié, elle prendra la suite en 2009 (et certaines de ses dispositions d’ailleurs ne
prendront corps qu’en 2014), donc nous avons pas mal de temps devant nous encore... Qu’est-ce qui se passe si
le traité est refusé ? Sur le plan juridique il ne se passe rien : les traités antérieurs continuent, la situation dans
laquelle nous sommes se poursuit. Mais nous remettrons en chantier un autre traité, avec tout le temps
nécessaire. Il n’y a pas le feu, aucune urgence.
2 - " La France va être isolée. "
Ce n’est pas si sûr que ça ! Dans les pays procédant par référendum le résultat n’est pas connu d’avance ! On a
bien vu que ce qui est isolé, ce sont les politiques libérales qui ne recueillent nulle part l’adhésion des
populations qui s’opposent à la contrainte, au libéralisme, au chômage, à la précarité, à la baisse des revenus, à la
délocalisation ! Comment voulez-vous que cette idée soit populaire ?
3 - " La 2e partie du traité, la Charte des droits fondamentaux, correspond au Préambule de la Constitution
française et à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ".
Dans le Préambule de la Constitution française (comme dans la Constitution belge, celle d’Allemagne, du
Danemark, de l’Espagne, de Finlande, de l’Italie, de l’Irlande, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Portugal, de
Suède), le droit au travail, le droit à un revenu minimum, le droit à un salaire minimum, le droit à une allocation
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de chômage, le droit à une pension de retraite, le droit à la couverture des soins de santé, à un logement décent
sont garantis.
Dans le projet de Constitution européenne, ces droits ne figurent pas. S’agissant de la santé et de la sécurité
sociale, le texte " reconnaît et respecte " ce qui se fait dans les Etats. Sans plus. Ce qui n’engage à rien de la part
de l’Union européenne. Le droit au travail devient le droit à en chercher. Ce qui est très différent.
L’Union européenne n’adhère pas à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948) qui reconnaît ces
droits sociaux collectifs. Par contre, elle adhère à la Convention européenne des Droits de l’Homme qui ne les
reconnaît pas.
4 - " La Constitution sauvera les services publics en leur donnant, pour la première fois, une base légale "
La Constitution ne fournit aucune définition du " service d’intérêt économique général.". Par contre les
documents de la Commission européenne (Notes de 2000, Livre Vert de 2003, Livre Blanc de 2004) sont
éloquents : les pouvoirs publics ne peuvent créer des Services d’Intérêt Economique Général (SIEG) que si deux
conditions sont remplies : a) que le marché (l’initiative privée) ne fournisse pas le service b) que ce SIEG
respecte les règles de la concurrence.
Enfin, le traité constitutionnel proclame que la liberté d’établissement et la liberté de circulation des services sont
des " valeurs fondamentales " de l’Union européenne (article I-4). La proposition de directive déposée par le
Commissaire européen Bolkestein sur " les services dans le marché intérieur " fournit la démonstration,
confirmée par des experts de tous bords, que l’application intégrale de cette " valeur fondamentale " conduit à la
disparition des services publics, de nos systèmes de sécurité sociale et du modèle européen de solidarité.
Avec cette Constitution, c’est la fin de la capacité des pouvoirs publics locaux, régionaux et nationaux de
procurer des activités de service auxquelles tous ont accès et dont les coûts sont mutualisés. Et l’impossibilité de
créer des services publics européens. L’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) de l’OMC
pourra s’appliquer totalement sans que les Etats ne puissent s’y opposer vu l’existence de cette Constitution.
D’autre disent que cette constitution, pour la première fois, reconnaît les services publics. Absolument pas !
Mensonges ! Ils le sont moins qu’ils ne l’étaient auparavant... ! Pour le coup, le traité est en retrait sur le traité
d’Amsterdam. Le traité d’Amsterdam considérait que les services publics étaient des valeurs, comme la liberté,
l’égalité. Mais le traité, là, ne les reconnaît plus comme des valeurs, il dit : " Les services d’intérêt économique
général, - il ne parle pas de services publics - auxquels les Etats attachent de la valeur "... Ca n’a rien à voir ! Le
mot y est, mais il ne signifie pas la même chose. Ces services publics, dits " services d’intérêt économique
général ", sont subordonnés aux règles de la concurrence dans le Traité, c’est-à-dire qu’on peut faire tous les
services publics que l’on veut, mais il faut qu’ils soient soumis à la concurrence ! C’est-à-dire exactement
l’inverse de ce qu’est un service public qui n’est pas là pour concourir ou pour être rentable, mais pour remplir
des missions particulières !
Et le texte dit : " La loi détermine les services publics " mais on ne dit même pas comment cette loi va être votée.
Le traité est muet sur ce point capital ! Même avec le traité d’Amsterdam où les services publics étaient reconnus
comme valeur, on a continué à démonter les services publics. Alors là, quand ils ne sont même plus reconnus
comme valeur, il n’y a aucune raison de penser que quoi que ce soit va changer !
5 - " Le traité constitutionnel va donner au Parlement européen la capacité de prendre lui-même l’initiative de
lois "
La Constitution réduit à néant ce mensonge : Article I-26, 2 : " Un acte législatif de l’Union ne peut être adopté
que sur proposition de la Commission, sauf dans les cas où la Constitution en dispose autrement. "
Le monopole de l’initiative de la Commission est maintenu. Et la technique de la codécision tant vantée par les
partisans du " oui " a pour effet que le Parlement européen ne peut modifier les textes soumis par la Commission
que si celle-ci marque son accord.
6 - " Le traité ne dit rien sur les orientations politiques que l’Europe doit prendre à l’OMC "
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L’article III-314 qui introduit la politique commerciale commune et donc notre rôle à l’OMC, stipule : " l’Union
contribue conformément à l’intérêt commun, au développement harmonieux du commerce mondial, à la
suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs et à
la réduction des barrières douanières et autres. "
On se trouve clairement en présence d’un choix politique. Un choix politique dont même la Banque Mondiale
remet en cause, aujourd’hui, l’efficacité pour la création d’emplois. Mais supprimer les restrictions aux
investisseurs qui ne supportent pas les lois sociales, les lois environnementales, le respect des droits humains
fondamentaux, c’est une exigence des organisations patronales européennes.
Si la Constitution est adoptée, il ne sera plus possible, comme l’a fait Jospin en 1998 sous la pression des
associations, des syndicats, du PCF et des Verts, de dire que l’AMI doit être négocié non pas à l’OCDE, mais à
l’OMC. Comme, depuis, la négociation a échoué à l’OMC, le patronat exige que l’AMI revienne dans le cadre
européen. D’où sa présence dans la Constitution. On mesure ainsi l’incohérence de ceux qui ont combattu l’AMI
en 1998 et qui le soutiennent aujourd’hui.
7 - " Ce traité est le plus dynamique de tous les traités européens ".
Invoquant ce que, dans le jargon, on appelle les " clauses passerelles " et les " coopérations renforcées ", certains
prétendent qu’ainsi la clause de l’unanimité peut être surmontée, ce qui fournirait des opportunités d’avancées
significatives. C’est faux : dans tous les cas de figure, on retrouve d’une manière ou d’une autre l’exigence de
l’unanimité. Une réalité s’impose : si cette Constitution est ratifiée, il sera impossible de la modifier avant de très
nombreuses années. Nos enfants comme nos petits enfants auront à la subir.
8 - " la Commission va devenir le gouvernement démocratique de l’Union "
Cette affirmation est inexacte car les électeurs n’ont aucune possibilité de sanctionner la Commission par leur
vote, et le Parlement européen, ni aujourd’hui, ni dans le cadre de la Constitution, ne peut imprimer de choix
politiques à la Commission. De plus, le droit de pétition ne permet pas de modifier la Constitution puisque la
commission en fera ce qu’elle veut...
9 - " La victoire du " non " sera une victoire des USA de George W. Bush ".
C’est exactement le contraire ! Le traité, reprenant en cela les dispositions de Maastricht, rappelle que la
politique de défense commune éventuelle doit être compatible avec les obligations des pays membres de
l’OTAN, c’est-à-dire que c’est l’OTAN qui donne le feu vert à une politique de défense Européenne. Or
l’OTAN, ce sont les Etats-Unis. Qui détient la plus haute responsabilité militaire à l’OTAN ? Un officier US.
Qui est le chef suprême de cet officier ? Le Président Bush qui espère la ratification de la Constitution
puisqu’elle consolide le lien de soumission des Européens aux USA ARTICLE I,41,2 : " La politique de l’Union
(...) respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains Etats membres qui considèrent
que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’OTAN et elle est compatible avec la politique
commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre " ARTICLE I,41,7 : " Les engagements et la
coopération dans ce domaine [en cas d’agression] demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de
l’OTAN qui reste, pour les Etats qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa
mise en œuvre. "
10 - " Notre " oui " est un " oui de combat "" (disent les partisans du " oui de gauche ")
Le " oui " de combat, ce n’est rien d’autre qu’une promesse. Comme celle de Jacques Delors qui, en 1992,
promettait : " acceptez le traité de Maastricht et nous ferons l’Europe sociale tout de suite après "... Il y a treize
ans... Ils nous disent "le texte n’est pas franchement bon et il ne répond pas à nos attentes, mais il faut l’adopter
pour conserver les quatre ou cinq points positifs qu’il contient ; quant au reste, nous allons nous battre, après la
ratification, pour l’améliorer ; notre " oui " s’inscrit donc dans la perspective de ce futur combat". Raisonnement
perverti pour trois raisons, car :
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1) nous pouvions nous contenter d’un simple traité
2) cela revient à dire : nous ne nous battons pas aujourd’hui contre ce texte, mais rassurez-vous, nous nous
battrons demain, une fois qu’il sera devenu la Constitution.
3) ils savent pertinemment qu’ils ne pourront pas modifier ce texte. La règle de l’unanimité fige la construction
européenne dans son état actuel. Elle bloque toute espérance d’approfondissement avant de nombreuses années.
Il faut donc se donner le temps de discuter !
Une Europe solidaire veut dire une Europe qui pratique la justice sociale, qui élève le niveau de vie des plus
démunis. Il faut répartir la richesse autrement, il faut consacrer les ressources nécessaires à la solidarité, et ce
n’est pas le libre-échange qui va faire ça, ce sont des investissements massifs dans les infrastructures, dans la
santé, dans l’éducation. Et donc la perception de taxes globales, qui par définition toucheront plus les riches que
les pauvres... Ceci est totalement absent du projet !
La solidarité envers les générations futures, c’est se soucier de ce que sera la planète dans un futur maintenant
proche, ne pas gaspiller l’énergie comme nous le faisons, bousiller les paysages et l’atmosphère. Donc ça veut
dire revenir sur l’absurdité de ces échanges commerciaux tous azimuts ! Il faut tout remettre à plat en quelque
sorte, et c’est pour ça qu’il est indispensable de se donner le temps de discuter, un an, deux ans, trois ans. Ca le
mérite ! Pour repartir dans la bonne direction ! Or, c’est toute une construction sociale qui est rendue absolument
impossible par ce projet de Constitution.
A-J Holbecq
5 février 2005 http://tiki.societal.org
Compilation des argumentaires de Bernard Cassen (Emission Des Sous...et des Hommes du 22 Octobre 2004 sur
AligreFM), Yves Cochet (Question à Assemblée Nationale) , Michel Husson (Rouge n°2092), Raoul Marc
Jennar (Indymedia), et moi-même.
Source : www.monde-solidaire.org
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2104
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Faites l’effort de vous informer...
Plaidoyer pour le "NON"
par Danielle Bleitrach.
11 février 2005
10 février 2005
Tous les jours, la télé, la presse vous inocule une vision du monde complètement mensongère. Et cette vision
n’est que l’accompagnement idéologique d’une terrible répression sur des peuples réduits à la misère et dont il
s’agit d’empêcher la rébellion... Non parce qu’ils sont la proie d’une idéologie ou d’un fanatisme religieux mais
parce qu’ils n’ont plus les moyens de la survie...
Dans notre propre pays, nous avons un think tank www.confrontations.org ( un groupe type la fondation Saint
Simon qui est chargé de se concerter pour promouvoir des idées - voir ci-dessous des extraits ) qui regroupe des
députés de droite, socialiste et un communiste député européen Francis Wurtz, le grand patronat, celui des
entreprises publique que l’on privatise, les sociétés d’assurance comme AXA, des technocrates comme Lamy ou
Davignon, des dirigeants de la CGT au plus haut niveau comme Le Digou, et tout ce beau monde promeut
études, orientations, et aujourd’hui mène campagne pour le "OUI" ou tentent de dévoyer le "NON", de le
technocratiser...
Les mêmes expliquent soit qu’il faut accepter le "OUI" parce qu’il n’y a pas d’autres choix que l’Europe, ou
tentent de transformer le "NON" en simple "NON" à une Constitution, en évitant soigneusement d’expliquer que
l’Europe telle qu’elle est ne peut qu’engendrer une Constitution néo-libérale... Voire parlent de "démocratie"
syndicale violée, pour mieux interdire aux militants de la CGT de prendre position, alors que la CSE a pris
position pour le "OUI"... Ou à la limite éviter de remettre en cause l’Europe elle-même en technocratisant le
débat... Cette orientation est à l’œuvre dans la CGT dans le PCF... Transformer la CGT en CFDT, le PCF en
PSU... Dites vous bien que vous priver d’organisations collectives pour vous défendre est une des pires atteintes
à la démocratie et que les défendre c’est défendre votre salaire, votre santé, l’éducation de votre enfant...
Ils ont même le front d’intituler leur groupe de pression comité de "Lisbonne", là où a été décidé la privatisation
d’EDF... Parce que leur hypothèse est d’accompagner les privatisations avec un peu de "social", le pâté
d’alouette, un cheval, une alouette...
La presse, qu’elle soit de droite ou de gauche, relaye soit les opinions gouvernementales, soit celles de ces
pseudos opinions de gauche, concoctées avec le patronat, les autres n’ont pas droit à la parole, ils se débattent sur
internet. Pour vous tromper les uns utilisent les moyens du lion dans les animaux malades de la peste, c’est la
faute à l’âne qui a tondu le pré, aux syndicats qui revendiquent, au pauvre qui refuse la misère, à toutes ces
forces "conservatrices" qui s’opposent aux "réformes" nécessaires, ça c’est Sarkozy, Raffarin... Mais il y a aussi
les moyens du renard : vous dessiner un cadre de pensée obligatoire (L’Europe, mais aussi la sécurité, la lutte
contre le terrorisme, l’obligatoire alliance atlantiste comme garantie de paix), pour à l’intérieur inventer des
pseudos-solutions dites progressistes, comment articuler une soumission totale au patronat, aux privatisations en
dégageant un peu de social, un peu de "régulation" ? Tout en abandonnant les instruments nationaux de
maîtrise... Comment donner aux luttes le seul débouché d’élections avec alternance sans alternative ?...
Tous prétendent à "l’objectivité", transforment la politique en "technique" à l’intérieur de laquelle des "experts"
dans une "grande réconciliation avec le patronat", qui les finance abondamment, pensent pour vous... Et vos
choix n’en sont plus...
Il s’agit de savoir si vous mangerez votre hot dog avec du ketch up ou de la mayonnaise, mais ce seront toujours
les mêmes marchands de saucisse... Il n’y a plus d’alternative. Le cadre de l’opinion publique étant ainsi posé,
l’affrontement peut avoir lieu sur les rivalités entre Chirac et Sarkozy ou entre Fabius et Hollande, les mêmes
marchands de saucisse, avec plus ou moins de ketch up... Celui qui dit je ne veux pas manger de saucisse est un
fou qui doit être censuré... Quelqu’un qui viole "la démocratie"...
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Mais un immense espoir est en train de naître, partout les peuples résistent et ici même le "NON" devient une
ligne de partage, de recomposition des forces organisées, de résistance populaire et pas seulement à la
Constitution... Les contre-feux politiciens sont balayés...
Voilà ou vous faites l’effort de lire, de vous informer, ou ne vous étonnez pas demain de ce qu’il adviendra de ce
monde, de la guerre ou de la paix, de la destruction de votre environnement, de votre mise au chômage, vous ou
vos proches, de la pression sur vos salaires, sur votre santé, sur l’école...
Il est possible de résister, de savoir dire "NON", non seulement à une Constitution, mais à ceux qui utilisent le
mensonge ici comme ailleurs pour rendre votre vie impossible. Ayez un peu de la force de l’Indien des Andes
qui s’oppose au pillage des ressources de son pays par les mêmes, au prix de sa vie... Face à la mondialisation
capitaliste, il faut développer les solidarités, connaître nos ennemis ici et sur la planète... C’est ça ou la mise en
concurrence, les délocalisations vers des peuples misérables prêt à tout accepter et votre mise au chômage, les
"guerres préventives" pour piller, guerres qui ne réjouissent que les marchands d’armes comme les patrons de
presse, Dassault ou Lagardère... Tout est désormais lié...
Danielle Bleitrach
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2072
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Non au projet de traité constitutionnel européen.
3 mars 2005
Par Jean-Claude Deroubaix*, Groupe de recherche sur les acteurs internationaux et leurs discours.
Le projet de traité constitutionnel proposé par la Convention, modifié et approuvé par le Conseil des ministres
européens pose quantité de problèmes pour l’ensemble de la vie sociale des peuples de l’Union européenne. Que
ce soit du point de vue du droit social, du droit du travail, de la lutte contre la pauvreté ou des conditions de
travail et d’existence, ce traité est à proprement parler imbuvable. Sur le plan constitutionnel et démocratique,
son statut et sa nature sont également fondamentalement critiquables. C’est sur ces deux derniers aspects que
porte essentiellement le présent article.
Constitution ou Traité :
La question de la souveraineté populaire
Une constitution est un texte fondateur d’un État de droit. Elle prend sa source dans la volonté du peuple de se
donner un cadre de vie en société réglé. C’est de l’expression de cette volonté que naît la légitimité de la
délégation de souveraineté aux organes qui seront décrits dans la constitution. C’est l’héritage principal de
l’histoire politique et sociale des plusieurs siècles de lutte. En cela les constitutions s’écartent des Chartes
octroyées par un gouvernant dont la souveraineté trouvait une source mythique ou divine.
Selon l’article 1 du projet, le traité constitutionnel est « inspiré de la volonté des citoyennes et citoyens » mais le
reste de l’article ne parle plus que d’États membres. La source de souveraineté est floue. Si de fait ce sont les
États qui sont à la source du fondement constitutionnel puisqu’ils attribuent les compétences, le peuple ne faisant
qu’inspirer, encore faudrait-il, pour un semblant de démocratie que ces États aient reçu un mandat (populaire)
explicite de faire une constitution. On verra qu’il n’en est rien. En ce sens nous sommes très éloigné d’une
constitution mais plus proche d’un traité international normal, négocié et signé entre États. La Convention qui a
rédigé ce texte est un organe non élu, dont les membres ont été désignés par les États, sans élection. Par exemple
le vice-président de cette convention M. Dehaene, était un élu communal de Vilvoorde ! Quelle était sa légitimité
européenne et démocratique à rédiger une constitution pour 450 millions de personnes ? Les parlements
nationaux n’ont pas été en tant que tels associés aux travaux. Certes la Belgique a demandé au Sénat et à la
Chambre d’envoyer des représentants mais ceux-ci n’étaient pas toujours des élus fédéraux (M. Di Rupo, par
exemple). Quel était en fin de compte leur lien démocratique avec la population européenne ? En outre le
fonctionnement de la Convention a été tout sauf démocratique, un présidium prenant des décisions qui n’ont
même pas été soumises au vote de l’assemblée.
Les droits et les devoirs du citoyen
Une constitution définit les droits et les devoirs du citoyen, du membre de la société politique dont procède la
légitimité.
Le traité constitutionnel reprend comme définition des droits des citoyens le texte de la Charte des droits
fondamentaux et, dans quelques articles, le contenu d’une citoyenneté européenne distincte de la citoyenneté
nationale. Cette charte, cela a déjà été abondamment démontré est en retrait tant par rapport aux constitutions des
États membres mais aussi par rapport aux conventions des droits de l’Homme que ce soit la Charte de l’ONU ou
la Convention du Conseil de l’Europe (1). En outre un protocole d’interprétation de la charte restreint encore le
peu de droits « concédés » aux citoyens (2). Les droits politiques attachés à la citoyenneté sont : la liberté de
circuler et de s’établir dans chaque pays membre, le droit de vote et d’éligibilité au parlement européen et au
niveau local (on évite de donner le droit de vote au niveau où peut encore s’exercer un semblant de contrôle
démocratique !), le droit de pétition, et celui de s’adresser aux organes de l’UE dans sa propre langue et de
recevoir une réponse dans sa langue (ce que n’accomplit déjà plus l’Union actuelle, cf. nombreuses informations
en anglais uniquement, etc.)
Séparation des pouvoirs et contrôle
Une constitution décrit les organes qui vont diriger la société. Une constitution démocratique veille à ce que ces
organes soient contrôlés par le peuple, et que les fonctions de faire les lois, de les mettre en œuvre, et de juger les
écarts éventuels soient exercées par des organes distincts : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, le pouvoir
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judiciaire. Les pouvoirs dont les membres sont des élus directs disposent évidemment de la plus grande
légitimité (parlements, parfois présidence de la République, comme en France).
Or, les organes de gouvernement que prévoit le texte de traité ne sont pas contrôlés. Les pouvoirs du parlement
européen, seule instance élue, sont ridicules par rapport à ceux du Conseil des ministres. Il est autorisé à codécider dans certains domaines. Mais une co-décision est-elle une forme de contrôle de l’exécutif ? ou le moyen
de sceller une complicité entre exécutif et parlement ? Il ne dispose toujours pas du droit d’initiative législative,
il ne légifère que sur ce que veut bien lui proposer la commission européenne. Cette dernière est un organe nondémocratique, bureaucratique, qui ne représente rien ni personne. Ses membres sont désignés par les
gouvernements des États membres. Ce sont en quelque sorte des experts et comme tels irresponsables. Certains
arguent que le fait que des gouvernements les ont désignés est un gage démocratique : sachant que les membres
des gouvernements ne sont généralement pas des élus directs, que leur légitimité est limitée au mandat que leur
donne leur constitution nationale et leur parlement, que seul ce dernier est généralement composé d’élus, leur
part de légitimité est donc fort indirecte, pas plus grande que celle de n’importe quel fonctionnaire belge nommé
par le gouvernement. Mais ce fonctionnaire est autrement mieux contrôlé. Le Conseil des ministres comme son
nom l’indique réunit des ministres nationaux, il dispose de l’essentiel du pouvoir législatif de l’Union. Son mode
de fonctionnement a été largement critiqué, la constitution n’y change pas grand chose.
Une modification est importante, ses débats seront désormais publics lorsqu’il agira en tant que législateur. C’est
important car la publicité des débats est évidemment un gage de démocratie. Pour le reste, il s’agit d’un organe
qui agit sans contrôle puisque le parlement européen ne peut le censurer et que le contrôle des parlements
nationaux est morcelé en autant d’États que comporte l’Union. Les ministres ont d’ailleurs beau jeu de répondre
aux interrogations des parlementaires nationaux en rappelant que ce qu’ils font au conseil ne relève plus du
contrôle parlementaire national. Cela ne changera pas. Un exécutif formé d’une commission de fonctionnaires
irresponsables et d’un conseil qui se rend incontrôlable, un législatif composé de la même commission (à
l’initiative des lois européennes), du conseil, et pour certains domaines du parlement européen. On est loin d’une
quelconque séparation démocratique des pouvoirs et de l’organisation d’un contrôle démocratique de l’exercice
des pouvoirs européens.
En outre et c’est extrêmement important, le traité coule en forme de décision constitutionnelle le dogme de
l’indépendance de la Banque centrale européenne. Ceci signifie que nous devrions parler d’un quatrième pouvoir
: la Banque centrale, qui n’est contrôlée par aucun organe démocratique ni de l’Union, ni des États membres. La
Banque dont le seul objectif est d’empêcher l’inflation monétaire dispose d’un droit exclusif à la politique
monétaire, un des droits constitutifs de la souveraineté, sans aucun contrôle. Cela revient d’ailleurs à lui donner
une capacité de contrôle exorbitante sur les politiques économiques de l’Union et des États membres ! C’est la
seule construction régionale ou nationale qui admet une telle dépendance du politique par rapport aux « experts
financiers » !
Le statut de Constitution
Une Constitution est supérieure en droit aux lois et règlements qui sont pris en vertu des dispositions
constitutionnelles. Elle qui contient des principes que les lois mettent en œuvre. Elle doit pouvoir être révisée,
mais s’agissant d’un pacte fondateur d’une société, cette révision doit se faire plus difficilement que la
modification d’une simple loi afin de garantir que le fonctionnement même de la société politique ne soit modifié
qu’avec l’approbation du peuple, et non d’une fraction de celui-ci. En Belgique cela impose qu’il y ait des
élections entre la décision de modifier quoi que ce soit dans la constitution et l’examen par le parlement de la
modification. En France, on peut recourir au référendum.
La hiérarchie des normes est explicite dans le texte du traité : le traité constitutionnel agit comme une
constitution il est supérieur aux lois européennes et aux lois-cadre européennes. Mais qu’en est-il des lois
nationales et des constitutions nationales ? Par un coup d’Etat « soft » qui est passé inaperçu, en réalité, toutes
les constitutions européennes, par le biais de décisions de la Cour de justice de Luxembourg, sont déjà
considérées comme des sources de droit inférieures aux lois européennes (directives), alors qu’aucune des
nations qui constituent l’UE n’ont explicitement abdiqué la supériorité de leur Constitution. Le projet de traité «
constitutionnel » en mettant en avant son aspect constitutionnel tend à couler définitivement dans le bronze ces
décisions de la Cour de Justice. Le « législateur », le constituant, national, qui fonde la légitimité de la loi sur le
peuple, abdique devant les juges européens, qui ne sont en fait que des experts du droit communautaire (3).
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Les lois, et donc surtout la Constitution, la loi fondamentale, doit être connue de tous les citoyens. C’est le
présupposé de la capacité sociale donnée au juge de condamner des infractions. On ne peut enfreindre une loi
que l’on ne connaît pas ou à laquelle on n’a pas accès (4).
Les constitutions nationales qui donnent les moyens de comprendre le fonctionnement général des démocraties
nationales sont généralement des textes brefs, assez clairs. La prétendue constitution européenne est un texte
flou, long, très long, et qu’on ne peut comprendre sans ses annexes. Au total, une constitution qui est près de 15
fois plus longue que la constitution de la République française.
L’aspect hybride de ce texte de traité constitutionnel n’est pas le fruit d’un hasard mais d’une nécessité politique:
Si c’est un traité, il suffit de le faire ratifier par les États membres comme une loi ordinaire de ratification de
traité international, on évite les procédures lourdes de modification ou d’innovation constitutionnelles.
Si c’est une constitution, alors elle prévaudra sur les lois et constitutions nationales.
Un « traité constitutionnel » est donc une tentative de détournement des procédures démocratiques par un jeu de
mots. Ce traité révise les constitutions nationales du fait de la « primauté accordée au droit européen sur les
droits nationaux, mais il sera adopté (ratifié) par les parlements belges à la majorité simple, court-circuitant ainsi
toutes les procédures démocratiques de révision de la constitution !
Constitution ou programme politique ?
Ce Traité contient un Titre 3 explicitement intitulé « Les politiques et le fonctionnement de l’Union ». Que vient
faire dans une constitution un programme politique ? C’est du jamais vu. Le programme est d’ailleurs
explicitement énoncé à l’article III-69 : « ...l’action des États membres et de l’Union comporte, dans les
conditions prévues par la Constitution, l’instauration d’une politique économique fondée sur l’étroite
coordination des politiques économiques des États membres, sur le marché intérieur et sur la définition
d’objectifs communs, et conduite conformément au respect du principe d’une économie de marché ouverte où la
concurrence est libre ». (...) Cette partie soulignée est un leitmotiv du Titre III. En fait toutes les autres politiques
de l’Union et des États membres sont subordonnées à ce credo libéral. Et par exemple, si l’objectif « d’un niveau
élevé d’emploi est pris en compte dans la définition et la mise en œuvre des politiques et des actions de l’Union
» (Article III-99) ce sera néanmoins dans le respect du principe d’une économie de marché ouverte où la
concurrence est libre, car celui est un principe à suivre obligatoirement et l’autre n’est qu’un objectif qui ne peut
contredire le principe de libre concurrence.
La politique sociale doit être menée dans « la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de l’Union »
(article III-103), elle est donc constituée d’objectifs subordonnés au principe du libre marché. « La politique de
l’Union dans le domaine de l’environnement vise un niveau de protection élevé » (Article III-131) il s’agit donc
d’un objectif pour lequel des mesures peuvent être prises mais : « Ces mesures doivent être compatibles avec la
Constitution » (Article III-131), c’est-à-dire respecter le sacro-saint principe du libre marché qui ne supporte pas
d’entraves.
Il en va de même pour l’ensemble des politiques qui sont systématiquement soumises au strict respect du marché
libre, du capitalisme.
Cet aspect là du traité dépasse largement ce qui se trouve dans une constitution. Loin de régler un
fonctionnement des institutions, le traité institue une politique contraignante sous forme de dogme.
Le suffrage universel est nié. Pourquoi voter pour des partis, des hommes et des programmes politiques, si le
programme politique est déjà figé pour « un temps illimité » par le traité. Il ouvre ainsi une véritable autoroute au
vote d’extrême droite puisque les partis « traditionnels » ne pourront plus avoir de programmes politiques autres
que celui de la partie III du traité, tous identiques, sans possibilité de changer !
« Non au traité » contre « Oui au traité »
À gauche et chez les écologistes, certains des éléments du traité font hurler, que ce soit des dispositions
institutionnelles (« déficit démocratique », impuissance du parlement européen, etc.), des dispositions portant sur
les valeurs démocratiques et les droits collectifs (la charte sociale marque une régression par rapport à la
déclaration des droits de l’homme de l’ONU, à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme
et aux dispositions constitutionnelles et légales de nombreux États membres), des dispositions entraînant par
effet automatique la fin des services publics (financement tari par les politiques de stabilité et de déficit zéro de
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la banque centrale et par les pressions à la baisse des impôts, mise en concurrence systématique avec les services
privés dérégulés par la directive Bolkestein) et pourtant cela n’aboutit pas à un NON franc et massif des partis
socialistes et écologistes.
Certains préconisent le « oui » de combat.
Il s’agit d’une position insensée.
Ils disent « acceptons le traité sinon il y aura un vide juridique, ou une impossibilité de fonctionner à 25, ou la fin
de l’Europe et de la paix, le chaos ! Ensuite, nous améliorerons ce traité et corrigerons son aspect peu social. ».
Qu’en est-il ?
le traité « constitutionnel » est un traité international. Les parlements nationaux ne peuvent dire que « oui » ou «
non » il n’est pas question d’amender ce projet. Le combat pour l’amélioration (« oui de combat ») n’aura donc
pas lieu dans les parlements nationaux. Il s’agit du dernier avatar de la diplomatie secrète, les gouvernements (le
Prince) négocient les traités, discrètement, les parlements n’ont le droit de les connaître que lorsque le traité est
signé et alors ils peuvent ou non le ratifier mais sans changer une virgule au texte.
le combat peut-il avoir lieu au Parlement européen ? Non, car la modification du traité constitutionnel n’est pas
réellement du ressort du Parlement européen. Celui-ci pourra proposer une révision (Article IV-7), il sera
consulté par le Conseil européen. Mais c’est exclusivement ce dernier qui décidera ou non de convoquer une
convention pour réviser le traité, cette convention elle-même « adopte par consensus » (c’est-à-dire à
l’unanimité, une recommandation de révision adressée à une « conférence des gouvernements qui amendera
éventuellement la constitution, qui devra ensuite être ratifiée par les États membres. Hormis le droit d’initiative
(sous tutelle du Conseil) et le droit d’être consulté au début de la procédure, le Parlement européen est hors jeu !
On ne s’y battra donc pas vraiment !
certains voient dans le droit de pétition garanti à l’article II-46 et à l’article III-236 la possibilité pour des
citoyens ou des groupes de citoyens de pousser à une révision de la constitution, à condition de réunir un million
de signatures. Cependant cette pétition est adressée à la Commission européenne. Il est exclu par le texte que
cette pétition puisse concerner la modification de la Constitution, elle ne peut viser qu’à améliorer l’application
de la Constitution en restant en outre dans le cadre des compétences de l’Union sans pouvoir les étendre. Cerise
sur la gâteau : la Commission est libre de tenir compte ou non de ces recommandations. Beaucoup d’efforts donc
pour récolter des signatures, et les soumettre à l’arbitraire du Prince, de la Commission.
La conclusion est claire : s’il faut se battre, c’est maintenant, car : « Le présent traité est conclu pour une durée
illimitée » (Article IV-7).
La seule question qui se pose est : « oui » ou « non » acceptons-nous ce traité ? il n’y pas de place pour un oui,
mais... ou un oui de combat. D’ailleurs il y a une certaine schizophrénie à vouloir empêcher la directive sur les
services (Bolkestein) ou la signature de l’AGCS et à dire oui au projet de traité constitutionnel qui renforce la
légitimité de l’Union à adopter ces deux textes plus que libéraux ! La cohérence intellectuelle, politique et
sociale mène à une position unique : Non à l’AGCS, non à la directive Bolkestein et non au projet de traité «
constitutionnel » européen.
Le chaos ? Le projet ne change pas grand-chose à la gestion de l’UE, les règles actuelles (traité de Nice) restent
d’application, les institutions disposent déjà de leur statut, d’ailleurs la mission attribuée à la Convention excluait
explicitement toute extension de champ de compétence, toute modification profonde du fonctionnement
institutionnel. La plus grande innovation est l’inclusion des politiques néo-libérales comme dispositions
constitutionnelles et non plus comme politiques sujettes à discussion. Donc si on vote « non » il n’y aura aucun
vide juridique, ni impossibilité d’agir et de décider (5). Mais on pourra plus efficacement contester toutes ces
politiques anti-démocratiques et anti-sociales.
Dire non au traité c’est dire non à l’Europe qui nous a garanti la paix depuis 1958. C’est un peu rapide : l’Irlande
du Nord et le Pays basque espagnol nous montrent que la paix intérieure est loin d’être acquise, sans oublier
Chypre. La paix aux frontières est tout aussi instable : l’ex-Yougoslavie en est un exemple mais la question
kurde en Turquie pourrait en fournir un autre. L’UE et son marché intérieur libre ne sont pas des garanties de la
paix. La libéralisation des marchés, parfois appelée mondialisation, parce qu’elle entraîne la paupérisation est au
contraire la source de la renaissance des communautarismes et des guerres civiles. La démocratie, la vraie, celle
qui manque tant au projet européen, est au contraire un espoir de résolution pacifique des conflits. Alors une
constitution pour l’Europe, pour la paix et la démocratie, pourquoi pas ? mais pas cette mascarade de projet de
traité constitutionnel.
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* Dr en sciences du langage, lic. en sociologie, membre du Groupe de recherche sur les acteurs internationaux et
leurs discours (GRAID, Inst. de sociologie, ULB), membre de l’association belge de sciences politiques (Com.
Française)
Notes :
(1) En effet, même si l’UE adhère à la convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme, ce n’est
que dans le cadre limité de ses compétences ; en outre, les droits parfois largement définis dans la Charte, sont
restreint par l’imposition par le présidium d’interprétations très restrictives, Cf. Déclaration n°12 annexée au
traité, les déclarations annexées font en réalité intégralement partie du traité et ont même valeur.
(2) Rosa Moussaoui, « La face cachée de la constitution », le Web de l’Humanité, 14 décembre 2004.
(3) Une sociologie des juges et de leur mode de désignation serait évidemment à faire, conjointement à une
sociologie des « experts européens » en tous genres.
(4) C’est pour obtenir ce droit à connaître les lois qui régissaient la cité de Rome qu’eut lieu la première grève
politique connue de l’histoire : seuls les patriciens possédaient les textes de la loi romaine, les membres du
peuple étaient donc condamnés au nom de lois dont ils ne pouvaient avoir connaissance. Il se retira sur
l’Aventin, une des collines de Rome, bloquant la société. Il obtint la publicité des lois. (Cf. Norbert Rouland,
Rome démocratie impossible, Actes Sud)
(5) Si chaos il devait y avoir à cause du rejet de ce traité « constitutionnel », nous serions déjà dans une situation
chaotique ! L’Union fonctionne aujourd’hui sur la base du traité de Nice et peut continuer à fonctionner ainsi .
Le rejet du traité « constitutionnel » ne rendra pas la situation pire. Par contre, son acceptation n’augurera rien de
meilleur dans le fonctionnement mais une dégradation des droits de l’homme, des droits sociaux collectifs et
individuels et des conditions de vie des populations européennes.
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2110
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Pourquoi le projet de Constitution Européenne est-il un piège pour
les femmes d’Europe Centrale et Orientale ?
par Monika Karbowska.
11 mars 2005
Voici 13 ans que les pays d’Europe Centrale et Orientale détruisent leurs bases sociales et économiques pour
adapter leurs sociétés et leurs économies aux dogmes ultralibéraux les plus intégristes. Après l’abolition du
communisme en 1989, les sociétés d’Europe Centrale ont recherché une troisième voie économique et sociale
dans une sorte d’économie de marché contrôlée et mise au service du développement des structures sociales et de
la démocratie. Mais 3 ans plus tard, les élites de ces pays ont décidé d’appliquer à la lettre les programmes
politiques ultralibéraux de l’OCDE en échange de l’annulation de leur dette colossale. Je rappellerais ce que
cette politique a entraîné sur l’exemple de la Pologne, mais le même modèle a été appliqué partout ailleurs des
pays Baltes jusqu’en Macédoine.
La privatisation de pans entiers de l’économie, en particuliers des industries et des services les plus rentables et
lucratifs, s’est traduite dans les années 90 par un chômage sans indemnités ni possibilité d’une reconversion. Ces
licenciements ont causé un choc psychologique immense et entraîné un grand désespoir. Le chômage est devenu
structurel malgré une croissance élevée entre 1995 et 2000, due généralement aux délocalisations des industries
d’Europe Occidentale en Europe Orientale et à l’implantation massive des multinationales au détriment des
acteurs locaux. En Pologne il est actuellement de 16 % de la population active pour 38 Millions d’habitants ! Il
s’agit toujours d’un chômage sans indemnités, celle-ci n’étant que de trois mois.
Les programmes économiques ultralibéraux ont entraîné la destruction de l’économie de régions entières minées
par ce chômage massif. De ces régions sinistrées sont issus les centaines de milliers de travailleurs polonais dans
l’Union Européenne. Ils travaillent majoritairement dans le bâtiment pour les hommes et dans les soins aux
personnes pour les femmes, le plus souvent illégalement malgré l’adhésion à l’Union, car la plupart des pays
n’accordent pas le droit au travail aux citoyens des pays entrants.
Le sous-investissement chronique est la cause de l’indigence des services publics tels que santé et éducation dont
le niveau de prestations est très bas, de même que les salaires dans ce secteur malgré les compétences des
travailleuses. Car ce sont les femmes qui occupent à 90% les emplois d’enseignantes, de médecins etc. Il en va
de même pour la culture qui ne subsiste qu’avec des soutiens privés selon le modèle américain prédominant.
La destruction de la rentabilité de l’agriculture familiale est due à la soumission de celle-ci aux prix mondiaux
entre 1991 et 1998. C’est bien sûr aussi la raison de la désertification de régions entières et de la fuite des jeunes
vers les villes ou à l’étranger en quête d’un hypothétique travail de femme de ménage ou d’employée de MacDo.
Alors que 35% de la population habite à la campagne, elle n’y survit que grâce à l’économie agricole domestique
de subsistance.
L’ingérence massive et continue de l’Eglise Catholique dans la vie politique en Pologne est tellement visible
qu’on peut parler d’absence de démocratie dans ce domaine. C’est ainsi que la laïcité a disparu avec le
Concordat de 1995, le mariage civil a été limité par le mariage concordataire, l’avortement a été interdit en 1993.
L’Eglise possède un énorme pouvoir économique du fait de ses privilèges fiscaux. Elle a aussi le droit de faire sa
propagande politique non seulement via les partis qu’elle crée, via sa presse, sa radio et sa télévision, mais aussi
directement dans les lieux de cultes pendant ou après les offices religieux où elle appelle à voter pour ses
candidats. Enfin, elle s’immisce dans l’éducation des jeunes du fait de sa participation aux conseils de classes
dans les écoles publiques par le biais de l’enseignement du catéchisme introduit en 1989. Elle influence aussi les
politiques publiques en matière de contraception et de prévention du sida.
De ce fait elle entretient, de concert avec les partis d’extrême droite très virulents qu’elle n’a jamais désavoué,
un climat très homophobe. Des manifestions LGBT ont été interdites dans certaines villes ou lynchées par les
militants d’extrême droite comme à Poznan en 2004 sans que la police intervienne. Dans un pays où un appel
public au meurtre tel que « les lesbiennes au bûcher » ou « les féministes doivent être traitées à l’acide » est
considéré comme une opinion respectable, l’Eglise entretient ce climat d’hostilité vis à vis de ce qu’elle appelle
« la culture de la mort ». Et « la culture de la mort », ce sont des droits des femmes, le droit à l’avortement , le
droit des individus non-mariés ou les droits d’opinion des athées et agnostiques.
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Pourquoi dans cette situation le projet de Constitution Européenne est-il néfaste pour l’évolution de l’Europe
Centrale ?
Ce projet est tout d’abord néfaste parce qu’il ne mentionne pas la laïcité. Il s’avère, selon ce projet, que la laïcité
ne fait partie ni des valeurs, ni des objectifs ni des bases de la construction de l’Union Européenne. Ce principe
serait pourtant indispensable pour contrecarrer l’influence exorbitante de l’Eglise et empêcher des aberrations
délirantes telles que la présence du chef de l’Eglise Polonaise aux cérémonies publiques ou ses interventions au
parlement pour influencer les votes. Récemment l’Eglise a mené une vaste campagne de propagande et a
multiplié les pressions sur le gouvernent socialiste pour obtenir qu’il limoge Magdalena Środa, ministre de
l’égalité femmes-hommes, coupable d’avoir affirmé dans une interview à un journal suédois que le modèle
familial patriarcal prôné par l’Eglise favorise la violence domestique des hommes sur les femmes !
Une redéfinition du religieux dans un sens restrictif comme affaire privée serait aussi utile pour limiter la
propagande politique de l’Eglise dans les lieux de cultes en guise de sermons pendant la messe. Ce serait
également bon pour l’Europe que l’Eglise n’hésite pas à vilipender à tout bout de champ pendant les sermons
comme étant responsable de la « culture de la mort » !
Le silence total du projet de Constitution sur les droits reproductifs et l’IVG à côté du « droit à la vie » est de très
mauvais augure pour ce droit fondamental des femmes. Dans le pire des cas, cette omission permettra
notamment à l’Eglise d’utiliser les moyens de pressions dont elle dispose pour faire du lobbing antiavortement
au sein de l’UE. Si cette offensive échoue, ce qu’on espère toutes et tous, les Polonaises, les Irlandaises, les
Portugaises et les Maltaises resteront pour longtemps des Européennes de seconde catégorie privées de la liberté
essentielle de disposer de leur corps. Cette inégalité de traitement au sein de l’Union Européene est intolérable et
met immédiatement en doute tous les objectifs affichés d’égalité, de solidarité ou de démocratie.
Le projet de Constitution ne parle d’égalité femme-homme que de façon très générale et uniquement dans le
cadre (II-83) de l’emploi, du travail et de la rémunération. De droits à la contraception, à l’avortement, point.
Rien non plus sur les violences sexistes qui sont un fléau dans tous les pays européens. Rien non plus sur la
prostitution quand on sait qu’elle affecte en majorité les femmes d’Europe de l’Est paupérisée ! Nulle part de
trace de parentalité non plus : il n’y a que la maternité qui est protégée et la femme invitée à concilier vie privée
et professionnelle ! (II 93-2)
L’article II 69 garantie le droit au mariage mais ne mentionne nul part le droit au divorce. Ceci est très
préoccupant quand on sait que l’Eglise fera tout pour finir par introduire des limitations de ce droit en attendant
de l’abolir comme à Malte. Le mariage concordataire imposé en Pologne en est le premier pas. Même si le
divorce civil existe encore, l’Eglise se sert de ce mariage dont elle gère les registres pour empêcher les gens de
divorcer en les stigmatisant. L’union libre et le pacs ne sont pas mentionnés dans le projet de constitution
européenne. Comme ils n’existent pas juridiquement, ils ne bénéficient pas de protection au contraire du
mariage. Connaissant la pression qu’exerce l’Eglise pour le mariage et la stigmatisation des célibataires et du
concubinage, il est clair que l’UE aurait pu apporter plus de liberté individuelle aux sociétés traditionnelles
d’Europe Centrale. Mais il n’en sera rien grâce à la future Constitution Européenne, alors que cela serait si
important dans des sociétés sacralisant le mariage. En effet, la Constitution polonaise, votée en 1997 selon les
critères d’exigence de l’UE afin de permettre le début des négociations d’adhésion en 1998, mentionne le droit
au mariage et la protection de la famille pas moins de 3 fois !
C’est pour cette même raison que le droit de vivre en union homosexuelle devrait être clairement affirmée afin
d’éviter que des homosexuel/les soient attaquées suite à la propagande de l’Eglise et de l’extrême droite déversée
quotidiennement dans leurs médias et dans les lieux de cultes.
La Constitution Européenne serait en deçà même de la Constitution Polonaise en ce qui concerne la scolarité
obligatoire, elle ne fixe en effet aucun âge alors que la Constitution Polonaise le fixe à 18 ans. Cette omission
permettrait à la longue d’introduire le travail des adolescents via l’apprentissage, cher aux ultralibéraux, alors
que les sociétés d’Europe Centrales sont très attachées à l’éducation et soucieuses de permettre à leurs enfants
une scolarité aussi longue que possible. Selon un sondage de mai 2004, la première valeur des Polonais reste
l’instruction, loin après l’argent et la religion !
Enfin, le projet constitutionnel constitue une menace réelle pour l’agriculture familiale polonaise qui assure la
subsistance de centaines de milliers de familles. Ces micro-exploitations assurent au moins l’autosuffisance
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alimentaire et sont largement l’œuvre des femmes. En effet, la Constitution Polonaise stipule que la base sociale
de l’agriculture est l’exploitation familiale, ce qui est complètement étranger aux valeurs de l’UE libérale dans
laquelle le but de l’agriculture est (III 227) la productivité agricole et la baisse des prix ! Ceci est donc
incompatible avec cette économie de subsistance et avec le développement durable. L’objectif de l’UE est-il la
disparition de la paysannerie polonaise et sa transformation en main d’œuvre « adaptable » entassée aux portes
des mégalopoles dans des banlieues-gettos ? Les paysans polonais, qui ont combattu victorieusement contre la
collectivisation stalinienne, ne vont certes pas se laisser faire, au risque de nouer des alliances avec l’extrême
droite hostile à l’Europe et de se faire manipuler par l’Eglise dans sa croisade « contre la culture de la mort ». Ce
risque est un danger mortel pour les droits des femmes et pour la démocratie en général !
Ce qui est tragique, c’est que l’ultralibéralisme et la mainmise du religieux sur le politique sont allées tellement
en loin en Europe Orientale que le projet de Constitution Européenne risque de paraître un progrès face aux
destructions déjà opérées avant l’adhésion à l’UE. Notamment de nombreuses féministes escomptent que la
Constitution les aidera à améliorer les droits des femmes et pensent que la sacralisation des dogmes ultralibéraux
n’est qu’un petit prix à payer pour obtenir ces droits, prix qui a déjà été payé par l’Europe Centrale avant
l’adhésion. Vivant dans une culture ultralibérale depuis 15 ans, ayant consenties à d’immenses sacrifices pour
l’adhésion à l’Union, elles conçoivent mal que le projet de Constitution Européenne soit un outil de destruction
de droits des femmes en Europe Occidentale, notamment de leurs droits sociaux.
Voici quelques exemples de régression politique en Europe Centrale et Orientale qui risquent de faire paraître le
projet libéral européen comme progressiste et social.
L’article II 70 du TCE qui donne le droit de manifester collectivement sa religion en public est déjà inscrit dans
la Constitution polonaise. (Art 52.2). Mais il est assorti dans cette constitution du droit à l’enseignement de la
religion dans les écoles publiques ce que le projet européen ne mentionne pas aussi explicitement. Cela peut
donc paraître un progrès aux yeux des Polonaises !
Par rapport au droit au mariage, l’article II 69 peut aussi paraître un progrès puisqu’il ne mentionne pas le sexe
des parties contractantes contrairement à la Constitution Polonaise qui dit explicitement qu’il s’agit d’un homme
et d’une femme. Il n’est donc pas étonnant que les lesbiennes et gays polonais comptent sur l’UE pour
reconnaître leurs droits puisqu’il faut une révision de la constitution pour leur garantir le droit au mariage en
Pologne !
Ils et elles comptent aussi sur l’article anti-discrimination (III 124) pour lever ces obstacles sans prendre garde
qu’à 25 pays dont 10 d’Europe Centrale avec les mêmes hostilités ouvertes vis à vis de l’homosexualité,
l’unanimité sera pratiquement impossible.
Comme la Constitution Polonaise ne connaît plus le droit au travail, à peine « le libre choix et exercice d’une
profession », le « droit de travailler » du projet constitutionnel européen apparaît comme un progrès !
C’est la même chose pour les services publics d’intérêt général : comme il n’y a plus de notion de service
public dans la Constitution Polonaise, les SIEG représentent alors un progrès social....
Un article très important stipule que les restrictions à la liberté de travailler et de s’établir dans l’Union pour les
citoyens de l’Union doivent être levées par les Etats (III 134). C’est en échange des restrictions à l’émigration de
leurs travailleurs que les 10 pays entrants ont obtenu quelques aides structurelles ou les subventions agricoles
tant convoitées. Il est évident que pour des pays dont le chômage frise des 20% de la population active, cet
article est une bénédiction. Les Etats se débarrasseraient ainsi à bon compte de leurs chômeurs en les incitant à
chercher un hypothétique travail « en Occident » et éviteraient de mettre en œuvre des politiques d’aide à
l’emploi aujourd’hui inexistantes. Pour les citoyens concernés, cette mesure leur apparaît comme une justice
rendue après des décennies d’humiliation infligée par « l’Europe forteresse ». L’idée de mettre fin au double
standard européen selon lequel « ceux de l’Ouest ont le droit de s’installer à l’Est, mais ceux de l’Est ne sont
bons que pour le travail au noir » est très forte dans cette opinion publique et ce projet constitutionnel sera
encore une fois pour cette raison perçu comme une avancée vers l’égalité.
Personne n’informe vraiment les citoyens d’Europe Centrale et Orientale du chômage en Europe Occidentale.
Personne ne les mets en garde contre la loi capitaliste qui veut que l’afflux de main d’œuvre immigrée massive et
bon marché contribue à faire baisser les salaires et entraîne l’appauvrissement de tous les travailleurs. Seule la
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solidarité entre les travailleurs d’ici et de là-bas ainsi qu’une politique industrielle et agricole durable et
européenne digne ce de nom pourraient freiner cette course vers la dégradation des conditions de vie de tous.
13 ans de politique ultralibérale en Europe Centrale et Orientale ont creusé un fossé culturel entre Est et Ouest
qui paraît aussi grand que du temps de la guerre froide... L’érosion des droits sociaux y a été telle qu’on voit mal
comment une communauté d’intérêt entre les travailleurs des deux parties de l’Europe pourrait bien se faire.
Pour sauvegarder quelques principes généraux, les travailleurs d’Europe Centrale sont prêts à sacrifier les droits
de ceux de l’Europe Occidentale. Le tout sous le chantage permanent d’une extrême droite violemment antieuropéenne au nom de certains principes nationaux parfois justifiés. De même les femmes, opprimées par la
politique du Vatican, sont également prêtes à sacrifier les droits sociaux de leurs consœurs occidentales au nom
d’une hypothétique égalité des droits que l’Europe ne leur garantie pourtant pas dans le domaine essentiel, les
droits reproductifs.
Cette contradiction est largement le fruit de l’absence de débats au sujet de la pertinence de la construction
européenne. Il est temps que nous, citoyens d’Est et d’Ouest, prenons enfin part aux décisions qui nous
concernent tous. Une première contribution urgente au débat est de refuser cette Constitution inique, ultralibérale
et conservatrice.
Monika Karbowska vit en France. Elle est restée en contact avec les militantes et les militants de son pays. Ici,
elle fait partie d’un groupe de jeunes altermondialistes intitulé : " alternatives féministes" qui a animé une
rencontre de jeunes femmes altermondialistes au point G lors du contre-G8 a Annemasse en 2003.
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2127
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Pourquoi je ne voterai pas "non" à la Constitution
par Viktor Dedaj.
1er mars 2005
Dieu sait si je m’étais pourtant promis de ne pas m’en mêler. Dieu sait combien de fois je me
suis répété "non, Viktor, tiens toi à l’écart". Parfois ma main se glissait subrepticement vers le
clavier de mon ordinateur, l’air de rien. Je faisais semblant de ne rien remarquer, juste pour
voir de quoi la fourbe était capable. En sifflotant un petit air de Silvio, je regardais le plafond,
ou mes doigts de pied, c’est selon.
Je la regarde s’emparer silencieusement de la souris. Click sur l’icône de Word. Du coin de l’oeil, je
surveille les basses manoeuvres de celle qui a décidé de me trahir.
A présent, une page blanche s’affiche sur l’écran, comme un appel à céder à la tentation. Je gémis
"non, non, je ne veux pas". Elle me susurre "kesstananafout’ ? Tu te dégonfles ?". Mais j’avais fais
une promesse ! "Une promesse ? A qui ?" ricane-t-elle. "Tu ne t’étais pas promis aussi d’arrêter de
fumer ?". Silence coupable. Je baisse la tête, un peu honteux, un peu pour la garder dans mon champ
de vision. Ma main se détend afin de me permettre de reprendre le contrôle. Elle sent qu’elle a gagné.
Click en haut à gauche. La main est sur le clavier, l’autre main finit par choisir son camp et se joint à
la félonie. Elles me défient. Le putsch a réussi. Les premières lettres s’incrustent comme à regret :
"Pourquoi je ne voterai pas "non"...". L’entrain dont je fais preuve n’a égal que celui ressenti lors de la
rédaction d’un testament. La Constitution Européenne ? Mon Dieu, comme tout ceci me paraît être
d’une gaieté folle.
****
Bonjour les Européens,
Ca vous dirait une bonne Constitution ? Je ne parle pas de votre santé, je parle d’un texte rédigé par un
cabale masqué de technocrates décatis qui tentent désespérément d’entrer dans l’Histoire par la petite
porte des manuels scolaires : "La première Constitution Européenne, rédigée par les Pieds Nickelés,
entra en vigueur en 2000 et quelques. Ses auteurs sont appelés les Pères Fondateurs de l’Europe
Moderne". Ouaaaahhhh. C’est Giscard d’Estaing qui va être content. Se faire virer comme président
d’un pays comme la France pour devenir le papa d’un kyrielle d’états touts neufs, ça vous requinque
une retraite morose, ça.
Il paraît même que la Turquie pourrait faire partie de la famille adoptive. Ca tombe bien, j’aime bien le
café turque. Et, à tout prendre, un état laïque de plus ne ferait pas de mal aux rapports de forces au sein
de l’Union. Mais il reste à la Turquie de faire ses preuves. Normal, un club est un club et le
membership n’a plus de sens si on laisse entrer n’importe qui. Vous êtes priés d’essuyer vos
babouches avant d’entrer. Oui, je sais, la Constitution et la Turquie n’ont rien à voir.
A vrai dire, les plus convaincants dans ce "débat" sur la Constitution ont été les partisans du "oui".
Redoutables débatteurs, leurs arguments m’ont profondément touché. Leur côté visionnaire ferait
passer Nostradamus pour un météorologue. Et je ne me lasse pas de les reprendre.
"L’Europe a besoin d’une Constitution". Ah ? Si vous le dites, d’accord.
"Donc, il faut adopter cette Constitution". Ah bon ? On peut en discuter ?
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"Le débat est ouvert mais c’est à prendre ou à laisser. Petit détail : si vous n’adoptez pas cette
Constitution, il pleuvra pendant 40 jours et 40 nuits, des nuages de sauterelles s’abattront sur vos
champs de maïs transgénique, un tsunami balayera vos côtes en emportant vos meubles de jardin en
plastique blanc et tous vos nains de jardin. Vous serez obligés de dormir sous des tentes chauffées au
gaz naturel et de bouffer des rations alimentaires rassis que nous renverront, hilares pour une fois, les
pays du tiers monde. Fidel Castro enverra une brigade de médecins cubains qui vous enfonceront dans
les fesses de grosses aiguilles rouillées datant de l’époque soviétique. Condoleezza Rice jouera du
piano lors d’une soirée de solidarité organisée au Théatre du Rond Point à Paris. Alors ?...."
Hum, ça mérite réflexion. Mais je n’ai pas de nain de jardin. On peut en discuter ?
"Le débat est ouvert mais c’est à laisser ou à prendre. Petit détail : si vous ne prenez pas, l’Europe sera
rebaptisée l’Atlantide et votre tout nouveau système de navigation par satellite que vous avez pris en
option pour votre 4X4 ne vaudra plus rien - puisqu’il n’y aura plus d’Europe ! Alors ?..."
J’ai pas de 4X4. Alors, on en discute ou pas ?
"Le débat est ouvert, mais c’est à prendre ou à prendre. Petit détail : si vous ne prenez pas, Les EtatsUnis seront libres de tous leurs mouvements, et des hordes d’évangélistes viendront endoctriner vos
enfants et vous vous retrouverez autour d’un feu de camp en train des chanter les louanges du Christ
sur des airs de Gospel. Vous serez obligés de répéter le mot "liberté" toutes les 30 secondes pour
prouver votre attachement aux valeurs occidentales qui nous lient. Alors ?..."
Ca nous changera des Polonais avec leur Pape. C’est tentant. Cela dit, l’Europe, un contre-poids aux
Etats-Unis ? Dans combien de pays européens l’avortement est-il encore interdit et combien
participent ou ont participé à la "coalition" illégale qui occupe l’Irak ? Soi-dit en passant, la Turquie a
fait preuve d’un esprit bien plus grand d’indépendance en refusant son territoire aux opérations
d’invasion. Et si on en discutait ? (Oui, je sais, la Constitution et la Turquie n’ont rien à voir.)
"Le débat est ouvert, mais l’affaire est close. Il faut adopter cette Constitution, et uniquement celle-ci.
On pourra toujours la modifier plus tard."
Ah bon ? Il m’a toujours semblé plus facile d’adopter une Constitution (50% des voix suffisent) que
de la modifier. Pour la modifier, il faudra quoi ? Une majorité des trois-quarts ou l’unanimité ? Autant
dire qu’elle ne sera pas modifiée. Alors, on en discute avant ou pas ?
"Le débat est ouvert, mais l’affaire est dans le sac. Tout espoir de changer cette
Constitution est illusoire. Il y a 25 pays, et les forces progressistes ne sont pas
majoritaires. Il faut voter "oui". Alors ?..."
Etrange argument. Il faut voter "pour" pour un truc pour lequel on serait "contre" parce que voter
"contre" n’apporterait rien. Et c’est un député français (Jack Lang) qui a sorti cette énormité. Question
: à quoi occupe-t-il ses journées à l’Assemblée Nationale, ce député socialiste, lorsque la droite
propose une loi avec laquelle il n’est pas d’accord ? Vote-t-il "pour" juste parce que la gauche est
minoritaire à l’Assemblée ?
"Bon, on peut toujours faire mieux mais là il faut faire avec. L’important, c’est d’avoir une
Constitution, point barre. Cela dit, dépêchez-vous, le débat reste ouvert jusqu’à 18 heures, sauf les
dimanches et les jours féries".
C’est comme si on disait "l’important, c’est d’avoir une loi, bonne ou mauvaise". Et si elle est
mauvaise, faut l’avoir quand même ? Et si on en discutait ?
"En discuter ? Mais comment, bon sang ? On peut pas discuter sur 450 articles, soyez raisonnables...
Alors ?..."
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Non, mais on pourrait proposer aux gens de choisir quelques directives. Après tout, certains articles
d’ordre "techniques" ne sont pas forcément très "structurants" pour l’avenir. D’autres auront un effet
direct et concret. Je pense notamment aux questions des services publics, de la laïcité, des choix
économiques...
"Pour ça, il faudrait organiser des référendums, t’imagines le boulot ? Laisse tomber. Alors ?..."
Ben justement, on nous propose un référendum... Pourquoi pas deux ? On aurait pu nous proposer des
textes et laisser les gens choisir l’Europe qu’ils auraient aimé voir. Peut-être que les Européens
n’auraient pas choisi le démantèlement des services publics au profit d’une privatisation - par
exemple. On ne nous demande pas de choisir, mais de répondre "oui ou merde". Franchement, quand
on me pose une telle question, je choisis rarement "oui".
Alors, on en discute ?
Au delà du contenu même de cette Constitution, je note surtout le "modus operandi" qui a entourée sa
conception et la conception de la politique qui s’en dégage. Une conception qui va à l’encontre de
pratiquement toutes les aspirations citoyennes de tous les pays. Une conception qui prend totalement à
contre-pied tous les discours sur une politique "plus à l’écoute". Une politique qui se résume à "nous
savons... faites nous confiance" et qui ne montre au fond qu’une seule chose : l’arrogance et le mépris
qu’ils ont pour nous.
Si je ne voterai pas "contre" cette constitution, c’est pour une raison bien simple : c’est que je ne suis
pas ressortissant d’un pays de l’UE et je ne peux donc pas voter. Il manquera donc une voix au camp
de ceux qui savent encore se tenir debout. J’en suis désolé.
Ils nous disent qu’il faut un contrepoids aux Etats-Unis et tout ce qu’ils nous proposent c’est une
"américanisation" de l’Europe. Lorsqu’ils nous auront fourgué leur Constitution libérale, bigote et
hypocrite, l’Union Européenne pourra s’appeler l’Empire Européen et il ne nous restera plus qu’à élire
un G.W. Bush version Vieux Continent. Mon Dieu, comme tout ceci me paraît être d’une gaieté folle.
Heureusement, il nous reste encore la "liberté" de dire "non". Et ça, c’est une belle leçon de
démocratie que NOUS leur donnerions, puisqu’ils en sont incapables.
Viktor Dedaj
"non, parce que pas oui"
février 2005
[email protected]
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2105
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Le OUI socialiste
Pourquoi les socialistes votent oui au traité constitutionnel ?
Le traité constitutionnel est-il le plus progressiste des traités européens ? Oui !
Par rapport aux traités antérieurs, tout ce qui est nouveau est positif et il n’y a aucun recul à déplorer. Certes, le
traité n’est pas « idéal », mais un traité européen est toujours le fruit d’une négociation entre Etats membres. Le
traité constitutionnel a le soutien de l’unanimité des partis socialistes et sociaux-démocrates européens, comme
le soutien de la Confédération européenne des syndicats. Tous les syndicats des pays entrants votent pour le
traité car ils y voient un point d’appui pour faire avancer leurs droits sociaux.
Le traité constitutionnel est-il le plus démocratique des traités européens ? Oui !
Extension des pouvoirs du Parlement européen. (co-législateur à égalité avec le Conseil européen dans 80
domaines, pouvoirs budgétaires égaux à ceux du Conseil).
Droit de contrôle sur les législations européennes accordé aux parlements nationaux pour faire respecter les
compétences des Etats membres.
Election du président de la Commission par le Parlement européen en fonction du résultat des élections
européennes.
Responsabilité de l’euro est confiée à un gouvernement économique et ne relève plus seulement de la Banque
centrale européenne.
Nomination d’un ministre européen des Affaires étrangères qui exprimera la parole commune des Européens
sur la scène internationale.
Application de la majorité qualifiée dans 20 nouveaux domaines.
Introduction de mécanismes de démocratie participative avec le droit de pétition reconnu aux citoyens de
l’Union pour faire voter une loi européenne.
Le traité constitutionnel est-il le plus social des traités européens ? Oui !
Force juridique donnée à la Charte européenne des droits fondamentaux,
Reconnaissance des partenaires sociaux à travers l’instauration d’un sommet social annuel pour la croissance et
l’emploi,
Introduction, dans les objectifs de l’Union, de l’économie sociale de marché, du plein emploi, du progrès et de
la justice sociale, de la lutte contre l’exclusion sociale, de l’égalité femmes-hommes, du développement durable
etc.
Institution d’une clause sociale qui garantira, y compris par les tribunaux, une protection sociale adéquate, la
lutte contre l’exclusion, un niveau élevé d’éducation et de formation, la protection de la santé.
Le traité constitutionnel reconnaît-il les services publics ? Oui !
Pour la première fois est reconnue une base juridique pour les services publics. Les Etats membres pourront
financer leurs services publics en dérogation aux règles de la concurrence. La défense des services publics, c’est
d’abord une politique de l’Etat, un choix de solidarité territoriale et un engagement budgétaire pour assurer leur
présence.
Le traité permettra-t-il une Europe plus forte face aux Etats-Unis ? Oui !
L’Europe s’est construite d’abord autour d’un marché commun puis d’une monnaie unique. Elle est une
puissance économique incontestable ; elle n’est pas une puissance politique. Son élargissement à 25 exige de la
doter de mécanismes de décisions plus clairs et plus simples, au moment où la réélection de Bush confirme la
volonté des Etats-Unis de décider seuls du sort du Monde. Dire « non » aujourd’hui, c’est paralyser durablement
la construction européenne et briser le lien qui nous unit à la gauche européenne.
Le traité constitutionnel donne-t-il la priorité à l’emploi ? Oui !
Pour la première fois, le plein emploi est un objectif clair et affiché. La « Constitution européenne » crée, en face
de la Banque Centrale Européenne (BCE), un gouvernement économique ; le premier à se plaindre de cette
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évolution a été Jean-Claude Trichet, gouverneur de la BCE. C’est bon signe... Les pays non-membres de l’Euro
ne pourront pas bloquer les initiatives des 12 de la zone Euro.
Le traité constitutionnel reconnaît-il le caractère laïque de l’Europe ? Oui !
Comme l’a confirmé notre conseil constitutionnel, le traité autorise chaque Etat à appliquer ses propres lois. La
loi sur les signes religieux à l’école ne pourra pas, par exemple, être remise en cause. Le sort qui a été réservé
récemment au commissaire Butiglione témoigne bien de cet état d’esprit et de cette vigilance des Européens.
Le traité constitutionnel est-il révisable ? Oui !
Le traité constitutionnel est un traité comme les autres. Du traité de Rome au traité de Nice, c’est la règle de
l’unanimité qui s’est toujours appliquée. Jamais elle n’a empêché l’Europe de progresser par bonds successifs.
Si le traité constitutionnel était repoussé, c’est le traité de Nice qui s’appliquerait et c’est à l’unanimité qu’il
devrait être renégocié dans des conditions bien plus défavorables.
Le traité constitutionnel introduit des dispositions nouvelles qui rendront la révision plus facile que par le
passé.
Le traité constitutionnel permet-il de mener une politique de gauche ? Oui !
Les partisans du « non » prétendent, à tort, que le traité constitutionnel serait un « carcan » qui interdirait la
conduite d’une politique de gauche. Rien n’est plus faux. Pas une ligne, pas un mot qui interdise à un
gouvernement ou à l’Union européenne de conduire une politique de gauche. Les gouvernements nationaux qui
ont le courage de conduire une politique de changement ne sont pas entravés par l’Union européenne.
L’Europe n’a pas empêché le gouvernement Jospin de voter la CMU, les 35 heures, l’APA, etc.
Demain, si la gauche européenne remporte les élections, elle disposera, avec ce traité, de plus de moyens pour
agir.
Lisible sur : http://www.ouisocialiste.net/article.php3?id_article=368
Si oui… si non… !
Le traité constitutionnel ne contient que des avancées sur le plan social et démocratique
par rapport au traité existant.
Le traité, c’est + de
Si le nouveau traité n’est pas adopté
social
Avec le nouveau traité

La charte européenne des droits
fondamentaux n’est qu’indicative. Elle n’a
pas de valeur contraignante pour les Etats
membres. Les droits (par ex : information et
consultation des travailleurs dans l’entreprise)
qu’ignore notre propre constitution ne sont pas
opposables juridiquement.

La charte européenne des droits fondamentaux
est constitutionnalisée, elle contient
notamment : le droit de grève, le droit à
l’information et la consultation des
travailleurs, la protection contre les
licenciements abusifs, le droit aux congés
payés et à une limitation de la durée maximale
du travail…(partie II)

Pas de reconnaissance du rôle et de
l’autonomie des partenaires sociaux.
Pas d’engagement en faveur du dialogue

Reconnaissance du rôle des partenaires
sociaux et constitutionnalisation du sommet
social tripartite annuel pour la croissance et

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l’emploi (art I-48)
social européen

Pas de base juridique spécifique pour protéger
les services publics (Services d’intérêt
économique général) dont on reconnaît
seulement la place et le rôle dans l’Union.

Le plein emploi, le progrès et la justice
sociale, la diversité culturelle etc … ne
figurent pas au titre des objectifs de l’Union
inscrits dans le Traité. L’Union demeure
basée sur l’objectif d’une concurrence non
faussée, comme c’est le cas depuis le traité
de Rome en 1957.

Les mesures législatives et
réglementaires contraires aux objectifs de
promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la
garantie d’une protection sociale adéquate, à
la lutte contre l’exclusion ainsi qu’à un niveau
élevé d’éducation, de formation de protection
de la santé humaine ne pourront être annulées
par la Cour de Justice de l’Union européenne.

Reconnaissance des services publics.
Création d’une base juridique permettant
d’adopter une loi cadre pour leur permettre
d’accomplir leur mission de cohésion sociale
et territoriale (art (II-96 - III-122).
 Les objectifs de l’Union incluent désormais :
- le plein emploi,
- le progrès et la justice sociale,
- le combat contre l’exclusion sociale,
- la lutte contre les discriminations,
- l’égalité entre les femmes et les hommes,
- la cohésion territoriale,
- le développement durable,
- la diversité culturelle et linguistique,
- la paix, la solidarité entre les peuples
 Instauration d’une clause sociale
horizontale (art III-117). Désormais dans
l’ensemble de ses
politiques et actions,
l’Union doit prendre en compte « les
exigences liées à la promotion d’un niveau
d’emploi élevé, à la garantie d’une protection
sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion
sociale ainsi qu’à un niveau élevé
d’éducation, de formation et de protection de
la santé humaine ».
Le traité, c’est + de
Si le nouveau traité n’est pas adopté

Avec le nouveau traité
La règle de l’unanimité demeure,
notamment pour la gouvernance
économique et l’Union Economique et
Monétaire, la justice et les affaires
intérieures, le budget européen, les accords
commerciaux, l’agriculture, propriété
intellectuelle, les sanctions financières contre
les personnes ou les groupes criminels, ou
l’énergie…
 Parlement européen
Le Parlement européen n’est co-législateur avec le
Conseil que dans 37 domaines. Le Conseil
conserve le dernier mot en matière de « dépenses
obligatoires ».

démocratie
L’information des Parlements nationaux
continue de dépendre de leur
gouvernement respectif. Pour la révision des
traités, les Parlements nationaux ne sont

Extension du champ d’application de la
majorité qualifiée à une vingtaine de
nouveaux domaines parmi lesquels :
la justice et les affaires intérieures
(III-262-265-266-270-271-272-276)
l’agriculture (III-230-231)
les sanctions financières contre les
personnes ou les groupes criminels (III-160)
l’énergie (III –256)
certains aspects de la Politique
Etrangère et Sécurité Commune – (art. III 300.2)
 Le Parlement européen :
- devient co-législateur à égalité avec le Conseil
dans 80 domaines
- étend ses pouvoirs budgétaires et obtient un droit
de décision égal à celui du Conseil dans ce
domaine (art III –404)
- élit le Président de la Commission, qui est
désigné par le Conseil en fonction du résultat des
élections européennes. Si le Parlement rejette le
candidat, le Conseil dispose d’un mois pour en
proposer un nouveau (I-27)
 Les Parlements nationaux obtiennent :
. Un droit de contrôle sur les législations européennes
pour faire respecter les compétences respectives des
Etats membres et de l’Union Européenne.
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éventuellement associés qu’au stade de la
ratification.
. La reconnaissance de leur rôle dans les procédures de
révision future de la Constitution par la prorogation de
la méthode de la Convention (IV- 443).
 Le Président du Conseil européen est élu
 La Présidence du Conseil tourne
mécaniquement tous les six mois. Chaque
pour 2 ans et demi à la majorité qualifiée par le
Etat préside l’Union tous les 12,5 ans, il ne
Conseil, c’est le moyen d’assurer une stabilité
reflète pas la majorité politique des Etats.
nouvelle.
 La Présidence de la Commission est le
 Le Président de la Commission est désigné
résultat d’une négociation entre Etats.
par le Conseil puis élu par le Parlement européen en
fonction du résultat des élections européennes.
 Les nominations des commissaires sont le
fruit d’une tractation diplomatique. La logique
 Le président de la Commission nomme et
majoritaire n’est pas la règle.
révoque ses commissaires.
 La présidence tournante du Conseil des
 Conseil des ministres : La présidence
Ministres est assurée par un Etat membre tous tournante est assurée par groupe de 3 Etats (rotation
tous les 18 mois.). L’eurogroupe qui rassemble les
les six mois.
ministres des Finances de la zone euro est reconnu et se
dote d’un Président stable pour deux ans et demi. La
responsabilité de l’euro devient aussi politique et ne
relève plus uniquement de la Banque Centrale.
 Majorité qualifiée : mécanisme de triple
 Mécanisme de double majorité
majorité conduisant irrémédiablement à la
(au moins 55% des Etats représentant 65% de la
paralysie de l’Union (74% des voix pour
population) (art-25). Les minorités de blocage sont plus
obtenir une décision : pondération Etat / voix difficiles à constituer.
au Conseil / population).
 Pour les Affaires Etrangères de l’Europe :
 Création d’un Ministre européen des
maintien d’un binôme avec d’un côté un
Affaires Etrangères permettant l’expression d’une
Haut Représentant pour la PESC et de l’autre parole commune des Européens sur la scène
un commissaire chargé des relations
internationale (nommé par le Conseil Européen).
extérieures au sein de la Commission.
Si le nouveau traité n’est pas adopté
Avec le nouveau traité


Aucun mécanisme de démocratie participative
n’est prévu.

L’unanimité est requise pour autoriser la
mise en place d’une coopération renforcée
(possibilité ouverte de créer une avant-garde à
ceux qui veulent aller plus vite et plus loin sur
certains sujets).

Pour réviser le traité de Nice L’unanimité
des gouvernements et les ratifications
nationales sont requises (par la voie
parlementaire ou référendaire).
Les révisions sont négociées entre Etats,
aucune Convention (composée de
parlementaires nationaux, européens et de
représentants des Etats) n’est convoquée
pour une procédure de révision. Pour
mémoire, le contenu du traité de Nice est
infiniment moins satisfaisant que celui du
traité constitutionnel de Bruxelles. Pourtant à
Nice la négociation s’effectuait à 15 et à
Bruxelles à 25. La différence ? Le travail
préparatoire de la Convention.

Création d’un droit d’initiative populaire
qui permet à un million de citoyens de l’Union
d’inciter la Commission à soumettre une
proposition législative (I-47)
 Possibilité de coopérations renforcées
facilitée et étendue à tous les domaines
(peuvent être autorisées par le Conseil à la
majorité qualifiée si elles réunissent un tiers
des Etats membres).
 La constitution d’une avant-garde devient
possible.
 Procédure de révision
assouplie: l’unanimité est requise comme pour
tous les traités antérieurs mais introduction de
dispositions nouvelles – art IV – 443 et 444 :
- Pouvoir d’initiative conféré au Parlement
européen
- Possibilité de passer à la majorité qualifiée sans
passer par une révision constitutionnelle
générale (« clause passerelle »)
- Le recours à la Convention (organe composé de
parlementaires nationaux, européens et de
représentants des Etats) est pérennisé pour les
révisions ultérieures.
http://www.ouisocialiste.net/article.php3?id_article=29
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Pour en savoir plus
% ATTAC Isère : http://www.local.attac.org/attac38/europe.html
« Dans électeur il y a lecteur »
La constitution européenne dans le texte
Téléchargez le document en .PDF : http://www.pourmoicestnon.com/images/lisez.pdf
« Il faut lire le projet de constitution européenne »
par Robert Joumard / 12 janvier 2005
Lisible sur http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2081
Le « traité constitutionnel », clé de voûte d’une construction méthodique, la
constitutionnalisation du capitalisme
par Yves Bonin.
15 février 2005
Lisible sur : http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2083
« Le vrai / Le faux sur le Traité constitutionnel »
Arguments pour le oui sur www.ouisocialiste.net
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