perspective est loin d’être assurée à court terme, tant les gouvernements semblent enclins à
apporter des réponses nationales à un problème dont les origines sont pourtant globales. La
crise sociale et écologique, conséquence de la marchandisation de l’homme et de la nature, est
tout sauf contenue : crise alimentaire, crise du pouvoir d’achat, changements climatiques et
compétition mondiale pour l’accès aux ressources naturelles rythment l’actualité quotidienne.
L’équilibre des puissances, fondée sur la charte des Nations unies et, depuis la fin de la guerre
froide, sur la Pax Americana, est ébranlé par les entorses répétées au droit international (guerre
préventive en Irak, indépendance du Kosovo, conflit russo-géorgien), le déclin de
l’hyperpuissance américaine et la résurgence de visées nationalistes dans un monde qui devient
multipolaire. Il en résulte un monde qui, dans le contexte actuel de crise du multilatéralisme,
prend la forme de rivalités entre puissances régionales.
Alors que s’est effondrée à nouveau sous nos yeux l’utopie du marché autorégulateur, il est
urgent de définir un nouveau système capable d’endiguer les conséquences possibles d’une
nouvelle « grande transformation ». Car si l’histoire ne se répète jamais, c’est surtout vrai quand
toutes les leçons en ont été tirées. C’est à cette tâche que le G20 a affirmé s’atteler. Or son bilan
est jusqu’ici très maigre.
Le G20 de Washington : des têtes de chapitre et une page blanche
Loin d’aboutir à un « nouveau Bretton Woods », tel qu’annoncé un peu vite par le président
français Sarkozy, le sommet du G20 de Washington de novembre 2008 a cependant eu le mérite
de réunir les grandes puissances du nouveau monde multipolaire pour débattre des mesures à
prendre pour réguler le système financier international, quelques semaines après le cataclysme
financier provoqué par la faillite de Lehman Brothers. Après tant d’années d’inaction en la
matière, ce fut déjà en soi une avancée significative. Mais le sommet a été le théâtre de
l’opposition entre la volonté affirmée par le président français de « refonder le capitalisme » et le
dogme réaffirmé par le président Bush en fin de mandat selon lequel « cette crise n’est pas
l’échec de l’économie de marché et la réponse n’est pas de réinventer ce système ». Le président
chinois Hu Jintao a quant à lui prôné « un nouvel ordre financier international loyal, juste,
inclusif et ordonné ».
La déclaration finale, après avoir prôné des plans de relance budgétaire concertés et l’absence de
protectionnisme commercial, définit des principes communs pour réformer les marchés
financiers. Certes, reflétant l’allergie de certains de ses membres envers la création d’un
superviseur mondial, le G20 commence par souligner que « la régulation relève avant tout de la
responsabilité des régulateurs nationaux », mais il admet dans la foulée qu’étant donné le
caractère global des marchés financiers, « une coopération internationale intensifiée entre
régulateurs et des normes internationales renforcées » sont nécessaires.
La déclaration définit ensuite un plan d’action à court et moyen terme fondé sur cinq principes
de réforme : le renforcement de la transparence et de la responsabilité des opérateurs
financiers, l’application d’une saine régulation, la promotion de l’intégrité des marchés
financiers, le renforcement de la coopération internationale et la réforme des institutions
financières internationales.
Après avoir d’abord rappelé la nécessité de renforcer la transparence des institutions
financières, le plan d’action aborde la nécessaire régulation « de tous les marchés, de tous les
produits et de tous les opérateurs financiers », ce qui implique notamment d’éviter les conflits
d’intérêt des agences de notation, de renforcer les ratio de solvabilité des banques et de réguler
les marchés de produits dérivés de gré à gré
, dont les fameux CDS (credit default swaps).
Le troisième pilier du plan d’action porte sur l’intégrité des marchés et aborde le dossier aussi
sensible que fondamental des paradis fiscaux… mais en les citant de manière métaphorique. Le
G20 prône en effet des mesures pour « protéger le système financier international des
Les marchés dérivés de gré à gré représentent les deux tiers des opérations dérivées et sont des marchés non organisés, donc hors marché et
sans surveillance de régulateur. Les ventes de produits dérivés de gré à gré atteignent le montant astronomique de 683.725 milliards de
dollars fin juin 2008 selon la BRI !