pt 5 CA AICESIS Seoul - International Association of Economic and

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Association internationale des conseils économiques et sociaux
et Institutions similaires
(AICESIS)
IMPACTS DE LA CRISE
MONDIALE:
LA VISION DE LA SOCIÉTÉ CIVILE
Décembre 2012
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Le présent document a été préparé dans le cadre de l'Association internationale des Conseils
économiques et sociaux et Institutions similaires (AICESIS). En 2012, l'AICESIS comptait
71 pays issus de quatre continents: Afrique, Asie, Europe et Amérique latine.
L'AICESIS est composée de Conseils économiques et sociaux, c'est-à-dire d'institutions
consultatives incluant des organisations représentant les partenaires sociaux (employeurs,
syndicats) ainsi que d'autres parties prenantes de la société civile. Ces instances sont des
composantes essentielles de la gouvernance participative dans les sociétés modernes. Les
Conseils nationaux et macro-régionaux qui sont des membres actifs de l'AICESIS sont des
assemblées autonomes dotées de compétences nationales et régionales.
Agissant en tant que réseau, l'AICESIS s'est donné trois objectifs principaux, dans le plein
respect de l'indépendance de chacun de ses membres : premièrement, encourager l'échange
d'expériences entre les membres ; deuxièmement, encourager le dialogue social et civil entre
partenaires économiques et sociaux et promouvoir la démocratie participative dans le monde
entier ; enfin, renforcer la capacité des CES existants et encourager la création de CES dans
les pays qui n'en comptent pas encore.
Le présent document représente donc la synthèse des avis exprimés par des organisations
nationales sur le développement de l'analyse et des propositions en matière de démocratie, de
développement durable et de réalisation des objectifs du millénaire pour le développement.
Des représentants des Conseils et institutions similaires de plus de 70 pays ayant des niveaux
très différents de développement ont débattu de façon continue de l’agenda et des aspects
pertinents de situations locales ou mondiales causées par les conditions actuelles du
développement, en analysant les défis et les opportunités suscités par la situation critique
dans laquelle se trouvent les sociétés tant à l'échelle locale que mondiale.
La contribution de l'AICESIS au G20 se penche d'une part sur les principaux défis politiques
et d'autre part sur le rôle de ses membres dans ces processus. Ce faisant, elle vise à aider à
l'élaboration d’un diagnostic et de propositions pertinentes et à mieux les faire comprendre et
accepter par les gouvernements, la société civile et l'ensemble de la population.
IMPACTS DE LA CRISE MONDIALE: LA VISION DE LA SOCIÉTÉ CIVILE
L'expérience d'extension de la démocratie au moyen de mécanismes de participation sociale
intégrés juridiquement dans les processus de formulation, de gestion et de résolution des
politiques publiques s’est multiplié dans plusieurs pays. Plusieurs approches existent en
matière, mais celle des forums ou Conseils de développement économique et social prévaut,
certains de ces organismes se voyant doter de compétences de surveillance et de contrôle. Ils
sont composés de représentants des organisations patronales, des syndicats et d'autres
organisations de la société civile. Ce processus d'ouverture de la relation entre les
gouvernements et la société civile a produit des effets positifs, quoiqu'encore limités, sur le
plan de la consolidation de formes de développement qui se rapprochent progressivement des
besoins sociaux et des intérêts organisés au niveau national ou régional.
Les propositions présentées ici découlent de la compréhension de la nature
pluridimensionnelle de la crise mondiale, ainsi que des mutations économiques, sociales et
politiques qui sont essentielles à la construction du développement durable.
La photographie de la crise mondiale
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La crise financière mondiale est un défi pour les marchés, les États nationaux et les
organisations internationales qui a galvanisé la société civile. La recherche d'une réponse
appropriée à la crise semble être impossible sans une participation directe et active des
structures sociétales fondées sur les concepts de solidarité, de droits de l'homme et de
tolérance, unis sous l’appellation « société civile ». La nature planétaire des défis nous incite
à rechercher un large consensus quant à l'interprétation à donner et l’analyse à faire des
principales caractéristiques de ces défis ainsi que des manières de les surmonter.
La complexité de la crise mondiale nécessite une réflexion quant aux actions qu'il convient
d'entreprendre pour relancer le développement national et international. L'instabilité mondiale
et la perte de dynamisme des économies constituent les aspects les plus visibles de la crise,
avec ses réverbérations sociales, environnementales, politiques et culturelles, qui nécessitent
un nouveau paradigme de la société et du développement. La crise a eu un profond impact
négatif sur les stratégies de développement dans de nombreux pays et a mis en évidence les
déséquilibres régionaux sur les plans économique et social. Les pays pauvres ont été
particulièrement touchés par cette crise et ils méritent qu'on les aide afin de restaurer un
équilibre économique et une confiance à l'échelle internationale.
Cette instabilité s'étend à des pays avec des niveaux de développement et des caractéristiques
géographiques variés, ce qui souligne le caractère systémique de la crise. Cela démontre le
caractère non durable du modèle de mondialisation et des normes de développement actuelles
de la plupart des pays.
L'internationalisation des systèmes financiers a modifié la nature et les déterminants des
dynamiques économiques mondiales : la juxtaposition de la déréglementation des marchés et
des innovations financières, la mobilité des capitaux, la volatilité des taux d'intérêt et les
« guerres entre les monnaies » ont, d'une part, limité les résultats susceptibles d’être atteints
par les politiques macro-économiques nationales et, d'autre part, elles sont à l'origine de la
crise de la balance des paiements à laquelle les économies émergentes et avancées sont
confrontées.
L'aggravation de la crise a provoqué une augmentation du chômage dans le monde entier,
restreint l'accès aux droits sociaux, suscité l'incertitude quant à l'avenir, en particulier parmi
les jeunes, les femmes et les autres groupes sociaux vulnérables. Dans le secteur de la
production, la perte de confiance et de dynamisme a réduit l'emploi dans l'industrie et
l'agriculture et accéléré les mutations structurelles de l'emploi dans le secteur des services,
tout cela exacerbant les tensions sociales.
Le progrès technologique, les tendances démographiques et le passage progressif à une
économie à faible teneur en carbone suscitent des changements rapides en ce qui concerne les
qualifications et les compétences nécessaires sur le marché du travail, marqués par une forte
croissance de nouvelles activités. Toutefois, la plupart des pays ne sont pas en mesure de
faire des politiques de l'éducation une priorité pour l'insertion des jeunes dans le monde
productif, ce qui limite le potentiel de développement après la crise et réduit la demande de
politiques urgentes ou compensatoires.
La réduction des taux de croissance fait que l'on porte moins attention à l'utilisation
responsable des ressources environnementales, ce qui accroît les problèmes des communautés
locales et suscite à long terme des obstacles au développement.
À mesure que la crise s'est approfondie, les niveaux d'inégalité entre les pays et à l'intérieur
de ceux-ci, indépendamment de leur degré de développement, ont fait de même. La
perspective d’une croissance de la population mondiale vivant dans une pauvreté absolue est
synonyme de nouvelles famines et d'insécurité alimentaire, de travail précaire, de maladies,
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de guerres, de trafic de drogue, parmi d'autres problèmes qui font déjà parti de la vie
quotidienne de populations entières. Selon la FAO, 22 pays qui traversent une crise
alimentaire prolongée, sont confrontés à des catastrophes naturelles récurrentes et/ou des
conflits internes, à une crise des modes de vie et à une capacité institutionnelle ne permettant
pas de répondre aux crises.
Par ailleurs, le modèle de production et de consommation basé sur l'utilisation intensive des
ressources naturelles exacerbe la dévastation des forêts, la pollution de l'eau, du sol et de l'air,
ce qui favorise l'accroissement et l'intensité du phénomène climatique, la pénurie de terres
arables et d’eau potable et la réduction de la biodiversité.
La conscience de la nature finie des ressources de la planète est bien ancrée dans plusieurs
organismes représentant la société civile, la prise de conscience revêtant donc un caractère
mondial. L'on est conscient de l'impossibilité de remplacer les ressources physiques et la
biodiversité qui sont affaiblis par le rythme insoutenable de la production et de la
consommation ainsi que par la croissance de la population mondiale. L'accroissement de la
fréquence et de l'intensité des phénomènes climatiques extrêmes augmentent les inégalités,
dès lors que les populations les plus touchées sont celles qui sont confrontées aux degrés les
plus aigus de pénurie des ressources affectées aux infrastructures sociales.
Dès lors, les impacts du processus de mondialisation, la crise économique et financière
mondiale et les changements climatiques à l'échelle planétaire appellent des décisions
acceptées au niveau des principales instances multilatérales afin de créer les conditions du
progrès dans le monde de l'après crise. Il est nécessaire de transformer le modèle de
développement des pays en changeant leurs normes de production, de distribution et de
consommation, en œuvrant à d'autres normes reposant sur les liens vitaux entre l'économie, la
société et l'environnement.
La contribution de l'AICESIS au G20
En soumettant ce document au G20, l’AICESIS veut contribuer au débat stratégique sur le
développement mondial mené dans le cadre du G20. L'objectif des institutions représentées
par l'Association est de contribuer activement aux processus délibératifs multilatéraux sur les
sujets d’intérêt mondial. En particulier en cette époque de crise, les processus de gouvernance
en matière de développement doivent être fondés sur un équilibre entre les différents niveaux
de gouvernement, la société civile et le marché, et reposer sur les valeurs fondamentales que
sont l'équité et l'intérêt commun.
Le rôle consultatif de la société civile doit être considéré comme complémentaire par rapport
à la démocratie et comme faisant partie intégrante du processus décisionnel des
gouvernements. Il convient de créer les conditions d'un engagement de la société civile:
 Les États devraient expliquer leurs positions et prêter attention aux points de vue de la
société civile.
 Les acteurs de la société civile devraient être associés au dialogue et à la coopération au
niveau national et international.
 Les activités des ONG devraient être encouragées, ainsi que les efforts en matière
d'éducation et de promotion de la santé.
Pour surmonter la crise mondiale actuelle, il est impératif de déployer un ensemble de
politiques nationales et internationales permettant d'engendrer un cycle durable de
développement économique, social, environnemental et politique tenant compte des
spécificités nationales.
Dans ce sens, l’AICESIS présente au G20 les critères suivants :
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 Veiller au respect des principes et des objectifs du millénaire pour le développement.
 Renforcer la démocratie, l'État de droit, le respect des droits de l'homme, la
participation de la société civile et le dialogue social en tant que facteurs primordiaux
pour la construction d'une société toujours plus durable et équitable à l'échelle de la
planète. La gouvernance des stratégies de confrontation déployées à tous les niveaux de
gouvernement face aux défis sera renforcée par la participation de la société au processus
décisionnel et par un contrôle social des résultats des politiques de développement.
 Restaurer la fonction sociale de l'économie au moyen d'une redistribution des revenus et
de la richesse, en luttant contre le chômage et pour la promotion de l'équité. En outre,
réhabiliter les politiques sociales revêtant un caractère complet et universel en tant que
facteurs générateurs de stabilité économique de la population et de préservation des flux
de production économique et de consommation.
 Établir un cadre global pour une croissance économique durable. Des progrès doivent
être accomplis afin de rompre le cercle vicieux qui existe entre des banques faibles, la
dette souveraine, la spéculation et le manque de crédibilité. Il est nécessaire d'établir des
ensembles cohérents regroupant les politiques budgétaires, financières et économiques, à
partir desquels construire afin de maximiser les effets multiplicateurs d'une action à
l'échelle mondiale. Parmi ces éléments, il faut renforcer les recettes des États au moyen
de nouvelles ressources budgétaires et de mesures contre l'évasion fiscale, ainsi
qu'orienter les investissements vers une économie durable sur le plan social et
environnemental.
 Œuvrer à un système alimentaire durable qui fonctionne pour tout le monde et partout
dans le monde, encourage les petits exploitants agricoles, respecte l'environnement et
protège les plus vulnérables dans les pays qu'ils soient en développement ou non. Une
politique mondiale de la sécurité alimentaire devrait s'attaquer au problème que
représentent les larges fluctuations des prix des denrées alimentaires, développer les
capacités des organisations de producteurs agricoles, promouvoir le rôle des femmes dans
les zones rurales et se concentrer sur la nécessité d'une coordination et d'une cohérence
entre politiques au niveau international. Des efforts nationaux, régionaux et
internationaux sont nécessaires pour accroître l'approvisionnement alimentaire et garantir
l'accès quotidien de chacun à une alimentation adéquate et saine.
 Œuvrer à la réussite des négociations pour un cadre mondial d’action climatique qui
devrait aboutir à l’adoption en 2015 et la mise en œuvre dès 2020 d'un instrument
juridiquement contraignant en vertu duquel tous les pays s'engageraient à réduire leurs
émissions sur la base du principe de responsabilités communes mais différenciées et sur
une mise en œuvre efficace des obligations internationales au titre de la CCNUCC. Les
engagements universels devraient comprendre un système commun de comptabilisation ;
un système de mesure, de rapport et de vérification qui permette de comparer les actions
menées dans différents pays ; et des mécanismes de surveillance de tous les secteurs
économiques, avec la participation des organisations de la société civile.
 Construire des modèles globaux de croissance et de développement durables,
dynamiques, nationaux ou régionaux, dans lesquels les citoyens peuvent se reconnaître et
les investisseurs, les producteurs, les travailleurs et les consommateurs peuvent avoir
confiance, non en tant que spectateurs passifs, mais en tant que partenaires actifs de ces
modèles qu'ils s'approprient. Des partenariats public-privé et des titres de créance
appropriés ont un rôle à jouer pour orienter l'épargne privée vers des investissements en
faveur de la croissance, de l'emploi et de la réduction de la pauvreté.
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 Adopter des politiques actives pour l'éducation, l'emploi et la génération de revenus
qui incluent les jeunes et les femmes dans de nouvelles activités productives dérivant des
innovations technologiques, qui nécessitent une adaptation des qualifications et des
compétences des personnes.
 Faciliter le développement d'un nouveau système financier mondial qui soutienne
l'économie réelle tout en étant bénéfique pour les citoyens et assure une réglementation et
une surveillance efficaces des banques, des fonds spéculatifs et des fonds de capitalinvestissement. La suppression des paradis fiscaux, du secret bancaire et de certains des
mécanismes pervers du passé, liés aux instruments spéculatifs, contribuerait à la
réalisation de cet objectif.
 Introduire une taxe mondiale sur les transactions financières. Cela garantira que le
secteur financier apporte une contribution équitable et effective à la consolidation
budgétaire, à la croissance et au développement. Elle permettrait également de stabiliser
les marchés financiers et de renforcer leurs liens avec l'économie réelle en accroissant les
bénéfices des investissements à moyen et long termes susceptibles d'être dirigés vers les
entreprises.
 Renforcer la responsabilité civile des agences de notation et améliorer la protection
des consommateurs de produits financiers. À cette fin, un dialogue spécifique est
nécessaire entre l'industrie financière et les organisations delà société civile en ce qui
concerne la réglementation, l'autorégulation, l'éducation financière et l'accès à des
produits et services financiers transparents.
 Mettre au point des normes internationales de comptabilité assorties d'indicateurs qui
tiennent compte des exigences économiques, sociales et environnementales du
développement durable et des mécanismes de transparence et d'accès à l'information
permettant une participation et un contrôle sociaux.
 Encourager un soutien accru des États aux organisations représentatives de la société
civile aux niveaux national, régional et international, ce qui ne manquerait d'accroître la
transparence et la responsabilisation.
Le développement durable, qui est un objectif à poursuivre dans la construction du monde
d'après la crise, suppose de prendre des décisions stratégiques qui incluent les relations
organiques entre les éléments économiques, sociaux et environnementaux des actions
déployées. Le dialogue et la participation de la société civile, en tant que volet essentiel des
structures et pratiques de la gouvernance multilatérale et des gouvernements, peut apporter
une contribution significative pour identifier des alternatives et effectuer les choix critiques
les plus appropriés en vue de relever de nouveaux défis et d'exploiter de nouvelles
opportunités.
La construction de l'avenir relève de la responsabilité de chacun et repose au plus haut point
sur le respect du principe de durabilité, tant pour les populations que pour la planète. Une
nouvelle économie de la croissance ne doit jamais perdre de vue son objectif global, qui est
de promouvoir le bien-être et le progrès social. En définitive, le développement durable n'est
pas une question qui se conçoit en termes de « gagnants » et de « perdants » : il ne doit y
avoir que des gagnants. Les objectifs de développement durable post "Rio+20" offrent une
superbe occasion de s'attaquer à cette question importante.
L'AICESIS et ses membres sont prêts à contribuer à la promotion et à la mise en œuvre de
ces orientations.
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Pour sa part, l'AICESIS, dans les limites de ses compétences :



intensifiera les échanges d'expériences et de bonnes pratiques entre ses membres sur ces
questions ;
accroîtra les informations fournies à ses membres sur les priorités du G20 ;
coopèrera avec les agences compétentes des Nations unies. En particulier, elle
collaborera avec l'OIT aux niveaux international, régional et sous régional afin
d'encourager le dialogue social et d'établir des structures et/ou des processus dans ce
secteur.
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