ii. donnees statistiques sur la consommation culturelle

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L'ECONOMIE DU SECTEUR CULTUREL
Dominique SAGOT DUVAUROUX - 2002
INTRODUCTION : ART ET ECONOMIE
Trois questions se posent pour l’économie de la culture :
 Problème de l’offre culturelle.
 Particularités des consommations culturelles.
 Intervention de l’Etat : fondements et conséquences.
La position de la culture dans la logique économique
Il existe 3 positions dans le monde de l'art :
 La culture est une activité économique comme une autre
Il n'y a pas lieu de faire de l'économie de la culture. Débat sur l'exception culturelle : on parle de
suppression des aides économiques au monde culturel dans les milieux libéraux, notamment EtatsUnis (# en Europe).
 Les activités culturelles sont irréductibles à la logique économique
Elles ne peuvent pas être comprises par les grilles économiques. Cette vision refuse de considérer
que la culture est confrontée au marché économique et que les artistes sont dépendants et influencés
par le milieu économique.
(Or, par exemple, un écrivain de théâtre a tendance à écrire des pièces contenant peu de
personnages pour diminuer les coûts de diffusion – Depuis 1940, le nombre de personnages a
diminué de moitié dans les pièces de théâtre).
 Les activités culturelles ont des spécificités fortes, qui impliquent donc des traitements
particuliers. De plus, elles ne sont pas dans une bulle étanche, coupée du reste du monde.
En réalité, il y a interférence permanente entre le mode de régulation économique et la
production culturelle.
Distinction entre activité culturelle et autres activités économiques
Différents points distinguent l'activité culturelle des autres activités :

Le risque :
L'activité culturelle a pour spécificité de confronter les producteurs (les artistes) mais aussi le public à
un risque.
Le consommateur est confronté à une abondance de choix avec une mauvaise connaissance de la
qualité du produit avant la "rencontre" : il lui faut payer pour connaître.
1
Pour limiter les risques, le consommateur adopte différentes stratégies : l'apprentissage personnel, le
mimétisme et l'utilisation d'intermédiaires (critiques, amis…) pour apprécier la qualité du produit, ce
qui tend à la concentration de la demande sur les biens qui ont été repérés.
Paradoxe de la culture : il existe une très grande diversité des produits offerts, mais les
consommateurs se concentrent sur une minorité d’œuvres repérées par les intermédiaires. Beaucoup
d’œuvres ne rencontrent donc pas leur public.
Les producteurs ne maîtrisent pas complètement la qualité des œuvres : la création est une alchimie
qui ne se résume pas à une fonction de production.
Au niveau de l’offre, tout est organisé pour faire face à une situation singulière : produire beaucoup
pour séduire peu (10%).

La faible productivité (surtout dans le spectacle vivant) :
L'économie de la culture est née dans les années 60 d'une étude de 2 économistes américains,
BAUMOL et BOWEN. Ils sont partis de l'observation de l'absence de gains de productivité dans les
activités de spectacle vivant (aujourd'hui, même durée de création, montage, répétitions de spectacles
qu'il y a plusieurs siècles), alors que dans les autres activités économiques, la valeur du temps de
travail a été multipliée par 25 par rapport au début du XIX° siècle.
Productivité = Volume de production / Quantité de travail nécessaire pour assurer ce volume
Se pose la question de la cohabitation, de la coexistence de ces activités.
 La dimension de bien public
Les activités culturelles ne sont pas utiles uniquement aux populations les consommant : elles
génèrent des externalités avec une dimension non monnayable. Par exemple, elles ont comme effet
économique induit l'économie du patrimoine mais aussi une dimension de mémoire collective.
L'économie de la culture, secteur non homogène
Les biens culturels peuvent être reproductibles / non reproductibles et appropriables / non
appropriables : le croisement des différents types de biens permet de repérer les différentes
économies de la culture.
Biens appropriables
Biens non appropriables
Biens reproductibles
Economie de l'édition
Efficacité : reproductibilité à
faible coût d'un original très
coûteux (répartition du coût fixe
original de la création)
Economie de l'audiovisuel (ou
des médias)
Efficacité : la difficulté de vendre
l'œuvre aux consommateurs
incite
à
vendre
les
consommateurs
à
des
annonceurs.
Biens non reproductibles
Economie de l'art
Efficacité : vendre très cher la
création originale en raison de
sa rareté
Economie des institutions
(notamment
économie
du
spectacle vivant et des musées)
Efficacité : repose sur des
subventions.
Deux handicaps : biens non
reproductibles
et
inappropriablesIl
faut
insister sur la singularité de
l’événement
Ces 4 modèles économiques se côtoient et sont de plus en plus mêlés ; la différence entre ces
économies a tendance à s'estomper :
2
 l'économie des multiples (photo, sculpture, lithographie…) : ces objets peuvent pencher vers
l'édition ou l'art.
Exemple : les photos vendues dans des livres ou dans les journaux appartiennent à l'économie de
l'édition à la différence des photos vendues sur le marché de l'art avec des conventions limitant le
nombre de tirages.
 les groupes multimédias : les mêmes entreprises contrôlent la production et les médias, rendant
floue la frontière entre économie de l'édition et de l'audiovisuel. De plus, un même produit est
souvent décliné sous forme de livre, de film…
 L’économie de l’art et des institutions : la distinction entre performances et installations est floue.
 les produits dérivés et subventions : les artistes réalisant des œuvres non reproductibles et non
stockables se font :
- subventionner, estompant les frontières entre économie de l'art et économie des institutions
- financer par la vente de produits dérivés, estompant les frontières entre économie de l'art et
économie de l'édition
 les archives : il est possible d'archiver des représentations de spectacle vivant, de téléviser des
spectacles, de réaliser des cassettes vidéo de musée…effaçant les frontières entre édition / médias et
institutions.
Conclusion : La typologie demeure intéressante, car elle identifie quatre matrices :
Institutions  Subventions.
Médias  Annonceurs, fonds publicitaires.
Art  Valorisation de la rareté, prix hauts.
Edition  Valorisation de la reproductivité, prix bas.
3
CHAPITRE I – LES SPECIFICITES DE L'OFFRE CULTURELLE
I.
LA PRODUCTIVITE : la loi de Baumol
Les économistes se sont intéressés aux activités culturelles à partir des années 60, sur l’observation
des spectacles vivants (puis, extension aux industries culturelles dans les années 80).
Baumol et Bowen ont été mandatés par la fondation Rockfeller pour étudier les problèmes
économiques des théâtres de Broadway. Le but était d’attirer l’attention des autorités américaines
pour procurer des avantages fiscaux. Constat de Baumol et Bowen : les spectacles vivants ne
peuvent pas réaliser de gains de productivité.
Le ratio de productivité a augmenté depuis la révolution industrielle permettant une augmentation du
pouvoir d'achat des salariés à partir de la seconde guerre mondiale. La productivité horaire en France
a été multipliée par 25 entre 1815 et 1990, la productivité par tête par 13.
Une partie des gains de productivité a permis de diminuer le temps de travail. Les secteurs d’activité
les plus dynamiques ont financé les salaires grâce à des gains de productivité importants. D’autres
secteurs, comme les spectacles, ont connu des gains de productivité moindres.
Parallèlement, des activités dont le ratio stagne ou augmente peu, ont été maintenues : police, santé,
spectacle, social, éducation…
Le modèle de BAUMOL repose sur la distinction entre 2 secteurs :

le secteur moderne
Il engendre des gains de productivité partagés différemment selon la conjoncture économique :
- affectés à l'autofinancement de l'investissement (bénéficiaire = entreprise)
- versés aux actionnaires sous forme de dividendes (bénéficiaire = actionnaires)
- permettant l'augmentation des salaires (bénéficiaire = salariés)
- permettant la diminution des prix (bénéficiaire = consommateurs)
A long terme, dans le secteur moderne les salaires augmentent.
Dans le secteur moderne, grâce aux gains de productivité, on peut maintenir des coûts constants.
Aujourd’hui, les bénéficiaires des gains de productivité sont les consommateurs (économie
mondialisée, pression de la concurrence, baisse des prix) et les actionnaires (renforcement de
leur pouvoir à travers le modèle de gouvernance).

le secteur traditionnel, archaïque
Il n'engendre pas de gains de productivité. Problème : il évolue au sein d’une économie de
marché. On doit proposer une rémunération à la main d’œuvre. Dans le monde du travail, il faut
proposer une rémunération équivalente aux autres secteurs : les salaires augmentent donc, ce qui
augmente les coûts.
Selon Baumol et Bowen, dans une économie de marché, il est normal que sur une longue
période, les coûts des secteurs archaïques (ex : théâtre, éducation, justice) augmentent, si on
veut maintenir la qualité des prestations. La prise en charge par l’Eta se justifie donc.
Il existe plusieurs solutions à cette augmentation des coûts :
 Trouver des stratégies.
4
 augmenter le prix des produits
Ce n’est pas toujours possible. Il faut donc mesurer l'élasticité, c'est-à-dire la sensibilité des
consommateurs à la variation de prix.
L’entrepreneur doit connaître la forme de la courbe de demande.
La forme de la courbe dépend de 2 critères :
 le revenu, le pouvoir d'achat des gens
Ainsi, pour faire basculer la courbe de demande de "très sensible" à "peu sensible au prix", il
faut se spécialiser dans les produits pour hauts revenus (élitisation).
 l'existence ou non de produits substituts
Il faut faire en sorte que les différents domaines ne soient pas concurrents en se singularisant.
Exemples : L'arrivée du cinéma a fait basculer la courbe du théâtre et a entraîné la fermeture
de nombreux établissements car le temps passé au cinéma était pris sur le temps de loisirs
consacré auparavant au théâtre. Maintenant, on n'attend pas la même chose du cinéma et du
théâtre. De plus, le théâtre est chargé d'une dimension sociale : c'est un lieu de distinction
avec un "effet club" garantissant la compagnie d'une certaine catégorie de personnes.
L'arrivée de la télévision a fait diminuer le public des cinémas ; mais ceux-ci se détachent
maintenant avec d'autres services (grands écrans, multiplexes…).
Pour se singulariser, il est également possible de réaliser des productions exceptionnelles
(pièces de théâtre avec des stars du cinéma, mise en scène avec implication du public…) afin
de créer un monopole.
MAIS cette croissance des prix provoque une élitisation de la consommation culturelle.
 la fermeture / la réduction de l'offre : la précarisation de l'emploi (fin 19ème siècle : l’intermittence
se généralise).
 l'élargissement de l'audience
- augmenter la taille de la jauge
augmentation des coûts de représentation et dégradation de la qualité
- diminuer les prix
 la modification du format des spectacles : la modification du répertoire (ex : succès de Beckett
et Ionesco, adaptés à l’économie de petit format).
Exemple : diminuer le nombre de comédiens sur scène. Baumol a montré qu’aux USA, le
nombre moyen de comédiens a été divisé par deux entre 1945 et 1980.
L’économie des arts de la rue, non subventionnée, est une économie de petit format.
Conclusion de Baumol  Pour maintenir la qualité du spectacle, à long terme la solution est
l'augmentation des prix et l'élitisme. D’où la proposition suivante :
 les financements extérieurs
Si l'on considère que la culture doit être ouverte à tous, il faut trouver des financements extérieurs
: mécénat et subventions, prélevés sur le secteur moderne, le risque étant que les gains de
productivité du secteur moderne soient entièrement engloutis dans le secteur traditionnel
entraînant un ralentissement de la croissance.
 Dilemme de Baumol : poids des prélèvements obligatoires.
L'augmentation des subventions à la culture peut avoir pour conséquence :
- la dégradation des autres secteurs traditionnels,
- une augmentation des prélèvements au risque de condamner la croissance.
Implication macro-économique :
5

le modèle américain privilégie le dynamisme des entreprises au prix de services publics
atrophiés : c'est une stratégie d'élitisation avec des services de qualité uniquement dans le
domaine privé.

Le modèle européen prône l'augmentation des prélèvements obligatoires (45% du PIB
français contre 30% aux Etats-Unis) au risque de perdre le dynamisme des entreprises.
MAIS les gains de productivité du secteur moderne sont liés à l'existence d'un secteur
archaïque : main d'œuvre bien formée, en bonne santé, avec un niveau culturel
satisfaisant…
Il ne faut donc pas s'inquiéter de l'augmentation des prélèvements si ceux-ci sont consacrés à des
secteurs essentiels comme l'éducation, la santé, la culture…
Le choix du modèle a des implications macro-économiques : selon Baumol, le coût des activités
archaïques doit augmenter si on veut que la qualité continue. Ex : les pays développés consacrent
une part croissante de leurs ressources à la santé, à la culture… et de moins en moins à la
production de biens matériels.
II.
LE RISQUE
Ou comment les entreprises culturelles s'adaptent à un risque supérieur à la moyenne des
autres secteurs d'activité : trois niveaux de gestion du risque :
1 - La structure du marché
Les entreprises s'organisent pour que les risques ne remettent pas en cause la structure du marché et
de leur entreprise.
Les risques remontent vers l'amont de la filière sur les créateurs et producteurs ; la structure
dominante est l'oligopole à frange.
L'oligopole est la structure de marché sur lequel ne se font concurrence qu'un petit nombre
d'entreprises : les entreprises se font concurrence durement mais elles peuvent s'entendre : les cycles
de concurrence succèdent aux cycles d'entente. (cf : théorie des jeux).
La frange concurrentielle est composée d'une myriade de petites entreprises indépendantes ayant la
charge de l'innovation : leurs faibles coûts fixes et leurs motivations artistiques leur permettent de
découvrir de nouveaux talents.
Cette structure se trouve dans les différents secteurs culturels (livre, disque, cinéma, télé…). Les
entreprises au cœur de l'oligopole sont présentes surtout dans la distribution, mais aussi dans la
production, la diffusion et la vente. La frange est généralement présente dans la production (partie la
plus risquée) et parfois dans la diffusion. Elle est beaucoup moins présente dans la distribution.
Mécanisme de gestion du risque :
Les majors contrôlent la distribution et délèguent la charge de la prise de risque, la production,
à la frange, qui a de ce fait une existence très volatile.
Quand la frange réussit dans son choix,
- l'oligopole "avale" le label indépendant qui devient une filiale,
- ou débauche les artistes du producteur indépendant,
- ou crée des "clones" des artistes du label indépendant.
Le risque est d'autant mieux géré que, depuis une quinzaine d'années, ce sont les mêmes entreprises
qui sont majors dans tous les secteurs d'activité avec une stratégie d'intégration verticale : elles
contrôlent des réseaux de diffusion pour écouler leur production.
Depuis une quinzaine d’années, les mêmes entreprises sont présentes au sein de chaque secteur
(majors + franges concurrentielles) et dans tous les secteurs : elles ont développé des stratégies
d’intégration verticale, qui permettent de contrôler les réseaux de distribution pour écouler leur propre
production.
6
Les grands groupes multimédias :

AOL-Time-Warner
Chiffre d'affaires : 38 milliards de $
80 000 salariés
AOL a racheté Time Warner alors que son chiffre d'affaires était 5 fois inférieur à celui de Time
Warner mais sa capitalisation boursière représentait le double.
Son intégration horizontale et verticale est permise par des synergies à partir de succès originaux.
Warner Bros ("Le seigneur des anneaux", "Harry Potter"…)
+ autres maisons de production
Warner Music (Madonna, MC Solaar…)
TBS + CNN + Time Warner Cable + HBO…
Time (64 magasines dont Time, Fortune…)
AOL
Cinéma
Musique
TV
Edition
Internet

Vivendi Universal
Chiffre d'affaires : 27 milliards de $

News Corp. (Murdoch)
Murdoch est un magnat de la presse australienne avec des idées libérales ; il veut construire un
groupe mondial de communication pour promouvoir ses idées.
Il investit en Europe avec Times et Sun et contrôle des journaux en Grande-Bretagne puis des
chaînes de TV (B sky B). Ensuite, il investit aux Etats-Unis en prenant le contrôle de la 21th Century
Fox et rachète un groupe d'édition.
Il n'est pas présent dans le disque mais détient une position très forte et internationale dans la presse,
l'édition et le cinéma.

Disney
C'est le 1er groupe à exploiter systématiquement les synergies entre les différents secteurs culturels. Il
produit un prototype qu'il décline sur tous les supports possibles contrôlés par lui-même : d'un long
métrage, il fait des dessins animés, des livres, des parcs d'attraction…
Le seul écart par rapport à cette stratégie a été le rachat dans les années 90 de la chaîne ABC.

Viacom
Chiffre d'affaires : 23 milliards de $
Ce groupe contrôle la Paramount, les réseaux MTV et CBS. Il est très présent dans le domaine du
cinéma et de la TV et dans l'édition avec Simon & Shuster.

Bertelsmann
C'est une très vieille famille de l'édition allemande avec une stratégie d'intégration verticale de la filière
éditoriale. C'est le 1er imprimeur allemand. Il a également des activités de presse.
7
Dans les années 80, il se diversifie et prend le contrôle de maisons d'édition avec le label BMG
(musique) et s'internationalise avec le n°1 de l'édition américaine, Random House (démission d’André
Schiffrin).
Radio – TV : RTL, Fun Radio
Presse : Géo, Capital
Groupe France Loisirs
Chaînes de librairies Barns & Nobel

Sony
C'est le groupe électronique qui invente la TV portable et le Walkman. Il participe au développement
du magnétoscope dans les années 80 mais c'est le standard VHS de Philips qui prend le dessus sur
le standard Betacam, car Philips propose tout de suite des cassettes préenregistrées.
A la fin des années 80, Sony acquiert CBS Music et Columbia et ajoute à son activité matérielle la
production de contenu.

Groupes littéraires français
2 grands groupes (65% du marché) :
 Hachette
Grasset, Fayard, Stock, Le Livre de Poche, Harlequin, Hatier…
 Groupe de la Cité
Nathan, Larousse, Le Robert, Laffont, Dunod, Bordas, Plon…
5 groupes indépendants de taille moyenne, plus spécialisés :
 Gallimard
 Le Seuil
 Actes Sud
 Les Editions de Minuit
 Albin Michel
Depuis une dizaine d'années, la concentration touche le marché de l'art : les grands groupes de luxe
prennent le contrôle des principales maisons de vente aux enchères (ex : rachat de Christies par
Pinault).
2 - La gestion de l'emploi
L'organisation du travail est très flexible et le mode de rémunération de la main d'œuvre est lié au
débouché de la production.
Dans le domaine du spectacle, l'adaptation du coût à la main d'œuvre est possible grâce à
l'intermittence, prise en charge par l'Etat : l'emploi se fait sur un projet et pour la durée de la
production.
Par ailleurs, les droits d'auteur sont un moyen de rémunérer la création dans un contexte d'incertitude.
En 1998, le secteur culturel employait en France 414 000 personnes, dont
- 220 000 dans l'industrie culturelle,
- 100 000 dans le spectacle vivant,
- 50 000 dans le patrimoine,
- 40 000 dans l'architecture.
L'emploi culturel concernait 385 000 personnes dont ¼ de non salariés.
En 1994, 150 000 personnes appartenaient au groupement des institutions sociales du spectacle
(GRISS) : 50 000 permanents et 100 000 intermittents.
8
Parmi ces derniers, 38% disposaient d'assez de cachets pour toucher l'indemnisation chômage, à
savoir 43 cachets discontinus ou 64 cachets continus, soit 507 heures de travail dans les 12 mois
précédant l'inscription (un cachet représente 8h de travail en continu et 12h en discontinu).
Evolution entre 1980 et 1992 :
1980 :
1992 :
3,2 millions de journées rémunérées
6,7 millions de journées rémunérées
1,7 million de journées indemnisées
11,2 millions de journées indemnisées
Les chaînes de télé ont de plus en plus souvent recours à des intermittents.
3 - Le choix de produit
Plusieurs stratégies existent :
 La standardisation
De nombreux produits culturels sont établis en fonction de l'étude des attentes du marché ou sont des
duplications de succès. Ce sont des produits substituables.
 Le star system
Le risque est limité par la participation des meilleurs acteurs, des meilleurs réalisateurs… Les œuvres
sont pré-achetées par les chaînes de TV.
Il reste un risque financier car cette stratégie coûte très cher.
 La répartition des risques (modèle éditorial)
Plusieurs œuvres sont produites simultanément dans l'espoir que le succès de l'une financera les
autres. Il faut qu'il y ait un grand écart entre le coût de production et les recettes potentielles (exemple
: coût de production 100 000 – recettes potentielles 1 000 000. Un seul succès financera 10 œuvres
produites). Ce modèle peut être appliqué au niveau de la production de films, d’où l’avantage de
l’augmentation de la taille des groupes multimédias.
9
CHAPITRE II – LA PARTICULARITE DE LA DEMANDE
A l’égard de la demande, l’enjeu est d’atténuer le risque lié à la consommation de biens et de services
culturels. Ce sont des biens d’expérience. Les économistes ont établi quatre catégories de biens.
I.
LES DIFFERENTS TYPES DE BIENS ET LEURS RISQUES
 Les biens de recherche
On peut en connaître la qualité avant l'achat (ex. : vêtements) : le risque à l'achat est faible.
 Les biens d'expérience
On ne peut pas en connaître parfaitement la qualité avant l'achat : on se fait une opinion en se fondant
sur son expérience personnelle de biens semblables consommés auparavant ou sur l'avis d'un tiers.
 Les biens de confiance
On ne peut pas en connaître la qualité, même après consommation (ex. : dentifrice). Ses
caractéristiques sont invisibles au consommateur : il faut faire confiance à des experts, seuls capables
d'attester de sa qualité, de son authenticité. Cela se retrouve dans le domaine des arts, à travers
l’authenticité : on doit faire confiance à des tiers (galeries, experts…). On est exposé au
comportement stratégique du vendeur qui peut transmettre de fausses informations (il existe
beaucoup de faux dans le marché de l’art).
 Les biens d'adoption
Leur qualité n'est pas connue tout de suite : elle évolue en fonction du nombre de leurs
consommateurs (ex. : téléphone, fax). La qualité est modifiée au fur et à mesure de la consommation
des autres. Dans ce domaine, se livre une bataille de standards technologiques. Les consommateurs
achètent en situation d’incertitude.
 Plusieurs attitudes sont possibles face à la prise de risque liée à l'achat de ces biens :
 Augmenter sa connaissance du bien
 Imiter les personnes censées être informées de la qualité (mimétisme)
Le stock de capital humain et l'environnement des individus doivent être pris en compte.
II.
DONNEES STATISTIQUES SUR LA CONSOMMATION CULTURELLE
Les dépenses culturelles
"Les dépenses culturelles des ménages" - Développement culturel n° 128 et 132 (1995)

6 700 F / an / ménage dépensés pour les produits culturels (y compris achat de matériel),
soit 3,7% du budget des ménages (pourcentage constant depuis 20 ans).
Répartition par filière :
- 1 893 F pour la filière image (28,6%) dont 2/3 pour les équipements et ¼ pour la
redevance TV
- 1 815 F pour la filière écrit (27,4%) dont 2/3 pour la presse
- 839 F pour les sorties (12,7%)
- 797 F pour la filière son (12%) dont 2/3 pour les disques et cassettes et 1/3 pour le matériel
- 1 000 F pour les pratiques amateurs (15,2%) dont 60% pour la photo
- 350 F pour le multimédia (5,2%)
Répartition en nature :
- 20% pour le matériel
- 41,5% pour le consommable
- 38,3% pour les services
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 Les 10 % de ménages les plus gros consommateurs dépensent en moyenne 60.000F/an
et assurent 42% des dépenses culturelles totales. Ce sont des actifs de 35 à 55 ans,
cadres, diplômés, habitant les grandes villes et en particulier Paris.
Les plus faibles consommateurs sont les personnes âgées, faiblement diplômées, habitant la
campagne.
 Le diplôme joue un rôle essentiel : les plus diplômés dépensent plus en sortie et
enseignement artistique. De Bac+2 à Bac+3, la consommation de livres double. Le diplôme
est particulièrement déterminant dans le domaine de la lecture.
 Il existe un fort effet du revenu sur les dépenses culturelles : les consommations culturelles
se juxtaposent plus qu’elles se substituent. Mais la sensibilité aux variations de revenu diffère
selon le domaine : elle est forte pour le théâtre et les musées mais faible pour les
équipements audiovisuels, la presse et le cinéma.
 Il y a une opposition entre la consommation au foyer / sorties et entre culture / divertissement.
Les pratiques culturelles
Pratiques
Pratiques audiovisuelles
Ecoute de disques et cassettes
Lecture d'un quotidien
Possession de livres
Lecture de livres
1973
16h /semaine devant la TV
15% au moins un jour sur 2
55% tous les jours
73% au moins un
70% au moins un dans l'année
22% au moins 25 dans l'année
Abonnement en bibliothèque
13%
Sorties culturelles (au moins une fois dans les 12 derniers mois) :
Spectacle de danse
6%
Spectacle de théâtre
12%
Concert classique
7%
Concert rock / jazz
6%
Cinéma
52%
1997
22h /semaine devant la TV
40% au moins un jour sur 2
38% tous les jours
91% au moins un
74% au moins un dans l'année
15% au moins 25 dans l'année
21%
8%
16%
9%
13%
49%
Remarques :
- explosion des pratiques audiovisuelles à domicile depuis trente ans.
- érosion des très gros consommateurs de livres
- augmentation du recours aux bibliothèques
- le gros effort des pouvoirs publics pour encourager les sorties culturelles n'a pas été efficace. La
pratique stagne.
Analyse : facteurs de consommation culturelle
 Revenu et prix
Les premières politiques de démocratisation culturelles se sont développées pour baisser le prix. Les
politiques ont proposé des équipements moins chers, voire la gratuité.
 pas efficace car d'autres variables entrent en jeu. (même si l’impact du prix n’est pas à négliger).
 Temps
Les activités culturelles prennent du temps mais beaucoup de ce temps est absorbé par l'audiovisuel.
Les politiques ont créé des institutions partout en France pour que les équipements culturels soient à
la portée de chaque Français, pour "réduire le temps".
 pas efficace car d'autres variables entrent en jeu. L’augmentation du temps disponible a été
absorbée surtout par la consommation à domicile.
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 Connaissances
La consommation culturelle est une "consommation addictive", c'est-à-dire que son intensité future
dépend du volume de consommation passée (si celles-ci sont positives). BECKER a assimilé la
consommation culturelle aux consommations de drogue.
La connaissance élargit les sources de plaisir possible des consommations culturelles.
 le risque est que les méthodes de l'école pour faire consommer la culture ne donnent pas envie aux
enfants de continuer.
Premier mécanisme : plus on a une forte connaissance d’un domaine, plus le risque d’incertitude se
réduit.
Deuxième mécanisme : la connaissance élargit les sources de plaisir possible des consommations
culturelles. Ex : théâtre : si on a vu plusieurs fois la même pièce, on peut comparer les mise en
scènes, les interprétations… C’est la même chose pour la musique classique.
Il est donc important de développer les apprentissages. Les études montrent que la relation entre les
expériences passées et futures ne sont pas forcément positives, si on a été déçu, par exemple.
 Environnement
L'environnement géographique renvoie au problème du temps et de la proximité des équipements.
L'environnement social est déterminant : on a les goûts de son milieu (cf : Bourdieu).
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