Introduction au raisonnement sociologique :concepts,
méthodes, enjeux actuels.
Philippe Urfalino
Le cours est en fait destiné à présenter les grands courants sociologiques (plus que les
« méthodes »)
1ere séance : Les définitions du social.
Qu’est-ce que la sociologie ?
La socio n’a pas le monopole de l’étude de la société ni de l’analyse du fait social.
Souvent l’utilisation du mot « sociologie » (par ex dans une librairie) renvoie aux « faits de
société » ou simplement au mot « société ».
Comment distinguer la sociologie des autres modes de réflexion ?
La sociologie c’est l’étude de l’appartenance à une société. => approche intéressante
mais insuffisante.
Exemple de la maladie : phénomène qui n’est pas social.
Mais certaines maladies ne sont observables que dans certaines sociétés.
La maladie n’est donc pas sociale mais les conditions d’apparition de la maladie– les facteurs
susceptibles de la faire apparaître - sont sociaux.
La sociologie serait donc l’étude de la dépendance d’un phénomène par rapport à son
appartenance à la société, par rapport à son environnement (société dans laquelle il est
observable).
La sociologie est en plus difficile à définir en raison de la variété de ses objets : (ex
tirés de revues de sociologie) discriminations au travail, ségrégation, étude du marché de l’art
ancien etc.
De plus l’ambition de la sociologie est vaste.
Les pères fondateurs de la sociologie :
Max Weber (1864-1920) : fondateur de la sociologie allemande.
Il voulait fonder une nouvelle discipline spécifique : la sociologie pour rendre compte de la
spécificité de l’Occident dans l’histoire commune de l’humanité.
Cette spécificité se caractérise par : le développement du capitalisme & le développement des
sciences.
Emile Durkheim (1858-1917) : fondateur de la sociologie française.
Souhaitait rendre compte de la société moderne et la situer dans l’histoire de l’humanité.
La société moderne se caractérise selon lui par : le culte de l’individu, « l’individu » comme
valeur suprême & la modification de la nature des liens sociaux.
D’autre part, une autre difficulté pour définir la sociologie vient du fait que les
méthodes utilisées sont elles aussi diverses.
Quelle est la spécificité de la sociologie ?
Elle prétend rendre compte d’un réel. Elle doit trouver le moyen de démontrer et
contrôler ses hypothèses (contrôle la réalité par le biais de méthodes)
Elle repose sur une spécificité conceptuelle.
Les pères fondateurs de la discipline voulaient fonder la spécificité de la sociologie par
rapport aux autres disciplines.
Ils se sont donc attachés à donner une définition du social.
Max Weber dans Economie et société (1920 posthume, qui rassemble plusieurs textes)
dans la 1ère sous partie de la 1ère partie ; pour lui la propre du social est la conscience
collective.
Emile Durkheim dans La division du travail social (1893) veut aussi définir ce qu’est
le social. Le « social » = aspect qui n’est pas étudiable par d’autre discipline.
Dans Les règles de la méthode sociologique (1895) le premier chapitre est consacré à la
question : « qu’est ce qu’un fait social ? »
Cette question posée par Durkheim est encore pertinente aujourd’hui. Il faut se demander en
quoi le sociologue va-t-il faire un travail différent qu’un économiste ? Qu’un haut
fonctionnaire spécialiste dans tel ou tel domaine ? (ex : étude du problème des retraites)
Qu’est -ce qu’un fait social ?
1) Le social comme interaction
2) Le social comme sujet pluriel
3) Le socialcomme institution
Textes à lire dans le corpus :
Marcel Mauss et Fauconet.
Marcel Mauss est le neveu de Durkheim. Il travail sur le monde dans son ensemble (pas
seulement le « monde occidental ». Son travail est souvent associé à de l’anthropologie.
Remarque : avant la seconde guerre mondiale, il n’y avait pas de différence de nature entre
anthropologie et sociologie.
Dans ce texte, les deux auteurs se posent la question « qu’est ce que la sociologie ? »
Margaret Gilbert.
Elle est philosophe. Son texte montre un type de réponse à la question : le social comme sujet
pluriel.
I. Le social comme interaction
Max Weber
Il différencie le comportement / action.
L’action est un comportement avec quelque chose de plus : un sens. Ex : ouvrir la fenêtre
parce qu’on a chaud.
Une action sociale est une action dans laquelle le sens prêté à l’action incluse la considération
d’autrui – que ce soit un autrui dont je perçois, dont j’anticipe ou dont je me souviens de
l’action.
Ex : 2 cyclistes s’entrechoquent = action
2 cyclistes se perçoivent et s’évitent =action sociale.
=> L’interaction entre les individus, l’interdépendance des actions et pensées = définition du
social qui domine.
II. Le social comme sujet pluriel.
Il existe du social quand un groupe s’affirme comme sujet.
Margaret Gilbert : article « Marcher ensemble ». Elle s’inspire beaucoup de Georg Simmel
(sociologue Allemand 1858-1918)
La définition de Weber est insuffisante. Il se posait la question : parmi les actions lesquelles
sont sociales ?
La question que se pose Gilbert est : qu’est ce qui fait qu’on a affaire à un groupe ? = qu’est
ce qui fait qu’on a du social ?
Exemple de la promenade :
2 personnes qui marchent ensemble
2 personne qui se croisent et se dépassent
Différence de situation ; quel est le statut de cette différence ?
Il y aura communauté, groupe de promeneurs dès lors qu’il y a obligation. Il y a lien social
quand il y a lien d’obligation.
Je connais la personne qui marche devant moi :
-soit je ralentis pour ne pas la voir
- soit j’accélère pour lui parler
=> action sociale au sens wébérien.
Dans une promenade à plusieurs il y a une sorte d’obligation de suivre le rythme du groupe
dans son ensemble. Quand apparaît cette dimension d’obligation ?
Quand un des 2 promeneurs aura proposé à l’autre : « Promenons-nous ensemble ! »
=>énonciation d’une instance collective, d’un sujet pluriel « nous »
=> « Chaque personne exprime une forme spécifique d’engagement conditionnel ». « Chacun
doit agir comme les composantes d’une seule personne ou comme le sujet d’une action ».
Cette définition est assez semblable à celle de Rousseau Du Contrat social, chap 7, I et chap
4,II
III. Le social comme institution
L’Ecole française de sociologie (fondée par Durkheim).
Durkheim, Les règles de la méthode sociologique :
Dans toute société il ya des phénomènes qui ne peuvent être étudiés ni par la biologie ni par la
psychologie ni par toute autre discipline. Ce sont des phénomènes qui doivent être saisis par
la sociologie :
- ma tâche de frère, d’époux et de citoyen
- remplir mes devoirs établis par le droit et les mœurs
- les croyances et les pratiques religieuses
- les systèmes de signes qui permettent de m’exprimer (le langage par ex)
- le système de la monnaie, ce que j’utilise pour échanger
Ces phénomènes sont extérieurs aux individus et indépendants de leur volonté.
Cependant pour Durkheim, le social ne se limite pas à ça.
Il parle aussi de sentiments collectifs : mouvements de foule, d’enthousiasme, de pitié etc qui
sont aussi extérieurs aux individus et propres au groupe.
Le social c’est des manières de penser et d’agir et de sentir des manières objectives
extérieures aux consciences individuelles et qui s’imposent aux individus.
=> « est fait social toute manière de faire, fixée ou non, susceptible d’exercer sur l’individu
une contrainte extérieure, ou bien encore qui est générale dans l’étendue d’une société donnée
tout en ayant une existence propre, indépendante de ses manifestations individuelle ».
Comment penser le social comme être extérieur à l’individu et se manifestant pourtant par les
individus ? La notion de contrainte en fait articule les 2.
La conscience collective : « l’ensemble des croyances et sentiments ………-il me manque un
bout de la citation ! si vous l’avez notée, n’hésitez pas à me la donner- ……..forment un
système collectif propre… »
2 types de conscience : conscience individuelle : états personnels à chacun de nous et qui nous
caractérisent
Conscience collective : états personnels extérieurs à nous communs à
tous les individus . Sentiments différents des miens mais qui me meuvent.
Critique adressée à Durkheim : sa théorie semble dire que les individus sont écrasés par le
poids du collectif. C’est une conception quasi-réactionnaire qui tend à se rapprocher de celle
d’un Bonald. Surprenant pour un grand républicain (dreyfusard aussi) comme lui !
Mauss et Fauconet reprennent la théorie de Durkheim et la modifiant.
Le social est pour eux toujours la manière d’agir et de penser difficile à appréhender.
Les manières de penser, agir et sentir ont une dimension normative et précèdent les individus.
Mais elles ne sont pas que contrainte. Elles peuvent contraindre mais surtout elles permettent.
Ex : le langage permet plus qu’il ne contraint.
Ex : les rituels de deuil : ne sont pas une contrainte et permettent de m’ajuster à la douleur
d’autrui pour montrer ma solidarité avec les proches du défunt ou d’exprimer ma douleur tout
court.
Le social est donc science des institutions.
Institution = toute manière d’agir et de penser qui précède l’individu et qui permet d’agir et de
penser dans la société.
Ex d’institution : le calendrier
Annexe : différence entre interaction et interdépendance.
Interaction : sport de combat : mes actions sont déterminées par celles de mon adversaire. Il
y a aussi interdépendance des actions.
Interdépendance : ma réussite en médecine dépend du niveau des autres. Mais mes actions ne
sont pas déterminées par celles des autres candidats.
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