agricoles, industrielles, de services ou de résidence, composent un tout interdépendant, expression géographique
de cet aménagement territorial.
Et pourtant, la géographie science des paysages, science de l'organisation et de la différenciation de l'espace
représente la conception la plus sûre de la géographie, celle qui lui donne tout à la fois un but, une méthode et
des possibilités d'application. " P. Pinchemel, 1968, " Redécouvrir la géographie ",
Annales de l'Université de Paris, 3, p. 350-360.
" Pour la commodité de l'exposé de cette longue marche de la géographie à la recherche de sa vocation on a
procédé par ordre successif. En fait, la périodisation des orientations et de la finalité de la géographie ne peut être
qu'approximative et indicative. Les périodes se chevauchent. Les tendances d'une phase se dégagent
progressivement des credos de la phase précédente. Dans la même génération se côtoient ceux que l'on qualifie
de passéistes, les détenteurs des méthodes et des orientations du moment et les sceptiques ou les audacieux qui
cherchent d'autres voies. Mais, dans l'ensemble, au niveau des plus grands nombres, des institutions, des
organismes de recherche et de dialogue, sur le plan national et international, chaque période se caractérise par
une démarche principale, qui occulte jusqu'à un certain point la genèse de nouveaux systèmes de pensée, de
nouvelles affirmations d'une vocation, qui contribue en son temps et à sa manière à l'intelligence de l'espace, du "
sien ", de l'espace local, régional ou national, et de celui des autres, avec la nécessaire compréhension des
différences autant que des solidarités. En tout temps, la géographie est une science politique dans la mesure où
elle fournit les informations sur lesquelles se construit l'action ; c'est aussi une science morale parce qu'elle
donne les orientations du comportement quotidien. Mais être une science politique n'est pas être une politique,
être une science morale n'est pas être une morale : c'est beaucoup plus une philosophie de l'existence dans ses
contingences spatiales. " P. George, 1990, Finalité de la géographie,
Encyclopoedia Universalis, Symposium, Les enjeux, p. 1016-1023.
II- Science, lois, causalité
" Une science qui analyse et compare, qui dispose d'un assez nombre de données précises pour déterminer des
types et essayer des classifications, qui démêle dans les réalités qu’elle étudie l'effet combiné de lois générales,
porte les caractères de l'âge de la maturité. Le chemin a été long ; mais au fond il n'y a rien eu que de régulier et
de naturel dans la marche de la science géographique. "
P. Vidal de la Blache, 1899, " Leçon d'ouverture du cours de géographie ",
Annales de Géographie, p. 109.
" Qu'est-ce donc, en définitive, que la géographie ? On peut répondre que c'est d'abord une méthode, ou, si l'on
préfère, une manière de considérer les choses, les êtres, les phénomènes dans leurs rapports avec la Terre :
localisation, extension, variations locales et régionales de fréquence ou d'intensité. Dès lors, la carte est un
instrument indispensable, non seulement d'expression, mais encore de recherche. Si entre deux ordres de faits
bien définis, bien caractérisés, il y a coextension précise ou variations parallèles dans l'espace, on peut conclure
avec assurance à une relation causale. Cette méthode est employée couramment par toutes sortes de sciences,
physiques et humaines, depuis la séismologie jusqu'à l'économie et à la linguistique. Mais le rapport n'est pas
toujours direct : le plus souvent, il consiste en un enchaînement dont les termes peuvent être ou physiques, ou
humains, ou l'un et l'autre à la fois, et relever par conséquent de toutes sortes de sciences. Il est donc
indispensable que le géographe engagé dans un certain ordre de recherches soit assez familier avec les sciences
connexes, non seulement pour bien saisir leurs conclusions, mais encore pour être capable d'en apprécier la
valeur. Cela conduit à pousser les recherches dans des directions multiples sur le plan local, régional ou
planétaire, dans l'espoir de restituer de proche en proche les maillons de la chaîne " ... " La géographie est-elle
une science ? non certes, au sens ordinaire du mot ; tout au plus un faisceau de sciences bien différentes,
pourvues chacune de ses méthodes propres et par conséquent de son autonomie. Mais alors, à mesure que ces
sciences dites géographiques se détachent du tronc commun, que restera-t-il de la géographie ? Il faut répondre :
une certaine manière d'envisager les choses, un mode de pensée, peut-être une catégorie nouvelle de
l’intelligence, à laquelle l'esprit occidental, et lui seul, vient d'accéder. De même que l'histoire, une tard-venue
elle aussi, s'efforce de penser les choses du passé dans le temps, et chacune dans son temps, ce qui est bien le
meilleur moyen de situer le présent à sa vraie place et de se préparer à le comprendre, de même la géographie
s'applique à penser les choses et les événements terrestres en fonction de la Terre, conçue non comme un support
inerte, mais comme un être doué d'une activité propre qui commande quelquefois, qui conditionne toujours celle
des êtres qui la peuplent. Ces complexes se présentent à lui sous la forme d'aspects, de paysages, au sens le plus
large du terme : non seulement ce que l'oeil aperçoit d'un point de vue bien choisi, voire du haut des airs, mais
encore ce que l'esprit embrasse dans sa vision du monde, paysages locaux, régionaux - les " pays ", ensembles