5
2. LES APPORTS EN SYNTHESE
2a. Les Musulmans et l’islam en Suisse
(conférence de Stéphane Lathion -Université de Fribourg et responsable du GRIS
-).
Cette conférence avait pour but de permettre d'amener quelques jalons nécessaires à la
connaissance du fait musulman en Suisse. Nous avions demandé à M. Lathion de bien vouloir
axer sa présentation sur les quelques repères utiles dans la connaissance de l'islam et ensuite
de nous présenter les caractéristiques et spécificités de l'islam en Suisse. Cette synthèse dite
réflexive, se veut un stimulant à la réflexion. Nous nous sommes parfois distancé de la
conférence afin de permettre une approche plus dynamique et directement utilisable dans une
réflexion sur notre métier. C’est pourquoi nous commençons par quelques éléments de base
qu’il nous faut avoir en tête afin de mener notre future réflexion.
La première constatation intéressante à faire pour comprendre les enjeux de la présence
musulmane en Suisse et plus généralement en Europe est d’être attentif à la constante qui se
dessine un peu partout, à savoir que les musulmans sont pour la plupart des citoyens
européens. Autrement dit, de plus en plus de musulmans sont nés ici, dans nos pays et vont
donc rester et construire leur vie ici. Cela implique un changement nécessaire du mode de
gestion du fait musulman et de notre appréhension de ceux-ci. Ils font désormais partie du
tissu citoyen et de par là même on ne peut plus avoir la pensée primaire: "ils vont repartir". De
plus cela nous oblige à reconsidérer nos catégories de pensée telles que "pays d'accueil" et
"pays d'origine". Il est donc vraiment nécessaire de pouvoir modifier notre gestion de la
présence musulmane, afin d'éviter un conflit avec nos propres citoyens.
Le deuxième constat important à poser est celui de la question socio-économique. Derrière
tous ces phénomènes d'intégration, d'exclusion, le véritable problème est socio-économique. Il
ne s'agit pas de l'origine, de la religion, mais c’est bien des facteurs tels que la place dans la
société, le pouvoir d'achat et l'héritage culturel qui induisent un phénomène d’inclusion ou
d’exclusion. Il nous faut bien garder cela à l'esprit afin de ne pas tomber dans une
stigmatisation facile. Un musulman riche, professeur d'université ne souffre que peu de
problème d'intégration en comparaison à un jeune musulman n'ayant pas fini sa scolarité,
étant illettré et issu d'une famille ne parlant pas français. La véritable grille de lecture pour ce
genre de problème d'intégration est une lecture de classe sociale et non une lecture ethnique
ou religieuse.
La dernière chose à rappeler, avant d'aller plus en avant dans l'exploration des enjeux du fait
musulman en Suisse, est de savoir que la majorité des problèmes de cohabitation viennent
avant tout de la méconnaissance réciproque. En effet, que ce soit nous, avec notre regard
influencé par des discours médiatiques hyper stéréotypés, ou eux, avec une vision imprégnée
des discours anti-occidentaux, la méconnaissance est au centre de la plupart des
problématiques rencontrées. Les causes de la méconnaissance réciproque viennent des
préjugés conscients ou inconscients que nous nous sommes construits au fil de notre existence
et qui régissent nos réactions face aux autres. La majorité du temps cette méconnaissance se
transforme en peur. Cette peur de l'autre est générale et n'est pas spécifique aux musulmans.
Avant les peurs étaient dirigées en direction des populations italiennes ou espagnoles, puis sur
les turques et bien d’autres. La différence aujourd’hui est que cette peur se traduit
verbalement de manière beaucoup moins violente qu'auparavant (comme avec les Italiens
dans les années 50-60).
De même les problèmes de cohabitation et d’incompréhension sont souvent qualifiés de
Groupe de Recherche sur l’Islam en Suisse