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En raison de leur vulnérabilité, les personnes âgées dépendent souvent de leurs aidants pour leurs activités
quotidiennes et sont susceptibles d’éprouver des problèmes dus à l’absence de dents. Des données suisses de
2002 ont montré que, parmi les personnes de plus de 85 ans, 4 sur 10 n'ont plus de dents naturelles et 9 sur 10
portent une prothèse amovible. L'hygiène dentaire des personnes âgées hospitalisées constitue un problème
particulier, car le personnel hospitalier ne sait souvent pas comment prendre soin correctement des dents de
leurs patients. La situation est encore plus grave chez les patients atteints de démence, qui dépendent
entièrement de leurs aidants et sont plus facilement sujets aux caries dentaires, aux poches parodontales
profondes et aux problèmes de santé bucco-dentaire que les personnes non atteintes de démence. Sachant
que la population atteinte de démence augmentera au cours des prochaines années, il s'agit là d'un problème
auquel il faut s'attaquer. Enfin, la sécheresse de la bouche, un effet secondaire de nombreux médicaments
administrés aux personnes âgées, peut favoriser une progression incroyablement rapide des caries dentaires ;
en quelques semaines, les patients souffrant de sécheresse de la bouche et dont l'hygiène bucco-dentaire n'est
pas correcte commencent à perdre leurs couronnes cliniques sous l’influence de caries des racines, et courent
le risque de les avaler. La Professeure Müller présente une
synthèse des preuves scientifiques
aujourd'hui disponibles qui démontrent les
liens entre la maladie parodontale et les
maladies cardiovasculaires, le diabète,
l'ostéoporose et la pneumonie par aspiration.
Il peut également exister une relation entre
l'état dentaire et la fonction cognitive ; une
étude a montré que le nombre de dents a une
influence sur les déficiences cognitives chez
les personnes âgées, ce qui pourrait être lié
au fait que la mastication augmente
l'irrigation du cerveau et améliore les
performances cognitives. La présence des
dents naturelles est reconnue en tant que facteur influençant la longévité et la mortalité des individus. La santé
bucco-dentaire détermine l'état de nutrition du patient ; ceci est très important, car la nutrition et le poids sont
des éléments essentiels dans les soins gériatriques et des études récentes montrent que, chez les patients
âgés, un IMC plus élevé, d’environ 28, est associé à une mortalité réduite. Il a été constaté que, chez des
personnes institutionnalisées, un brossage régulier et efficace des dents prévient 1 décès sur 10 consécutifs à
la pneumonie que peuvent contracter les patients dont l’hygiène bucco-dentaire n’est pas suffisante et qui
aspirent la plaque dentaire et les bactéries présentes dans leur bouche.
La prévention par l'hygiène bucco-dentaire est nettement plus
économique que le traitement dentaire. Contrôle des infections,
maîtrise de la douleur et meilleur confort des patients sont d’autres
avantages de la prévention chez les personnes âgées. Le
rétablissement de la fonction bucco-dentaire présente également des
avantages fonctionnels pour la mastication, l'élocution et l'occlusion (le
contact entre les dents), ainsi que des avantages psychologiques et
psycho-sociaux, par l'amélioration du bien-être et de l'estime de soi.
Les soins dentaires chez les personnes âgées nécessitent un travail en équipe, avec d'autres professionnels de
la santé. Toutefois, il est très rare que les dentistes et les hygiénistes dentaires soient impliqués dans les soins
aux personnes âgées. Différentes formules ont vu le jour, comme la visite de dentistes ou d'hygiénistes
dentaires indépendants dans les homes pour personnes âgées ou le passage, plusieurs fois par an, de
camions de soins bucco-dentaires auprès des maisons de repos.
L'enseignement de la gérodontologie, l'étude de la dentisterie par rapport au vieillissement, est une question
très importante. D'après une étude menée en Allemagne, les jeunes chirurgiens-dentistes se sentent rarement
à l'aise lorsqu'ils soignent des patients plus âgés, car ils ne disposent pas de l'expérience clinique nécessaire
pour évaluer les risques associés et le type de soins à fournir. Il faut enseigner la gérodontologie aux jeunes
Un brossage régulier et efficace
des dents chez des personnes
institutionnalisées prévient 1 décès
sur 10 consécutifs à la pneumonie.
Professeure Frauke Müller