United Nations Department of Economic and Social Affairs

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United Nations Department of Economic and Social Affairs - UNDESA
INNOVATION IN PUBLIC ADMINISTRATION
IN THE EURO-MEDITERRANEAN REGION
MRABET Noureddine
Expert en Management Public
Tunis-Juillet 2004
DOMAINES PRIORITAIRES POUR L’INSTAURATION DE
LA GOUVERNANCE DANS LES ORGANISATIONS
PUBLIQUES DE L’ETAT EN TUNISIE
La dernière décennie du deuxième millénaire de notre époque a connu deux
évènements majeurs :
- Une explosion des télécommunications et une montée irrésistible des
performances des technologies de l’information. « L’accouplement » de ces
deux technologies a enfanté à partir des années 1990 un support géant
d’information et de communication à l’échelle planétaire appelé « réseau des
réseaux » ou « Internet » annonçant ainsi l’entrée de l’humanité dans la
société mondiale de l’information.
- La chute du mur de Berlin dans les années 1990 a sonné le glas à la mission
providentielle de l’Etat. A l’Etat providence s’est substitué l’Etat arbitre.
L’instauration du nouvel ordre économique mondial avec ses deux corollaires la
mondialisation et l’ouverture économique ont accéléré le processus de remise en
cause des procédés de gestion des affaires publiques.
Les concepts du management public de connotation anglo-saxonne ont fait leur
apparition même dans les pays de culture francophone habitués aux règles du
formalisme juridique et de l’organisation hiérarchisée.
Ce brassage des cultures managériales et des systèmes de gestion a « sécrété »
un nouveau mode de gestion des affaires de l’Etat appelé la gouvernance.
Depuis son accession à l’indépendance en 1956, la Tunisie a mené avec succès
une politique ferme et continue de promotion économique et sociale où l’Etat a
joué un rôle clé, tirant le pays de la pauvreté et du sous développement
économique et social en dotant le pays d’institutions modernes et efficaces.
L’Administration a été au cœur de cette œuvre et a également joué un rôle de
garant de la pérennité des institutions de l’Etat lors des plus graves crises qu’a
traversé le pays à savoir la collectivisation de l’économie aux années 60 et lors
la vacance du pouvoir pendant la maladie du président Bourguiba.
Le changement politique intervenu en 1987 a accéléré le rythme de
développement économique et social du pays hissant la Tunisie au rang des
Etats économiquement émergeants avec comme palmarès selon les indicateurs
fournis par les institutions spécialisées des Nations Unies, l’éradication de la
pauvreté avec un niveau de développement humain (éducation et santé) très
appréciable et l’atteinte d’un stade de développement économique respectable.
La Tunisie se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins pour sauter le « gap »
qui la placera parmi les pays développés.
A cet égard, l’Etat Tunisien se trouve aujourd’hui confronté à trois types de
défis :
- alors que l’Etat est invité à parachever l’œuvre du développement entamée
depuis un demi-siècle par l’élimination irréversible des derniers goulots
d’étranglement et handicaps qui gênent encore les efforts de rattrapage
des pays développés, il est appelé, aujourd’hui à se dégager en faveur de
l’initiative privée encore à l’état de maturation et de recherche. Le
relèvement de ce défi dépendra de la nature du compromis entre les deux
impératifs de l’interventionnisme et du désengagement.
- Le deuxième défi découle de la taille de l’espace géographique et
démographique de la Tunisie caractérisé par une exiguïté du marché ne
favorisant pas la constitution d’opérateurs économiques privés dotés
d’une taille d’économie d’échelle leur permettant d’affronter avec succès
la forte concurrence des opérateurs étrangers tant sur le marché local que
sur les marchés extérieurs notamment européens, rendue de plus en plus
rude avec l’élargissement de l’Union Européenne aux pays de l’Europe de
l’Est et avec l’agressivité commerciale dont font preuve les pays du SudEst Asiatique. Le textile et le tourisme Tunisiens sont directement
menacés. Le relèvement de ce défi dépendra inéluctablement du
positionnement des entreprises tunisiennes sur les créneaux d’activités
porteurs et de leur capacité à s’étendre au-delà des frontières nationales.
- Le troisième défi réside dans la maîtrise des technologies modernes et
dans l’innovation sans lesquelles les performances attendues de
l’économie seraient évanouies dans les méandres de la bureaucratie et des
cloisonnements du formalisme administratif.
Pour répondre valablement à l’ensemble de ces défis, l’Etat Tunisien a
développé des stratégies et des politiques de management public tendant
progressivement à rapprocher les organisations publiques des modes de gestion
privée concourant ainsi à la fixation des contours d’un système spécifique de
gouvernance des affaires publiques.
Il n’est pas superflu à ce stade d’apporter quelques lumières sur la
délimitation des contours de la notion de gouvernance qui pourrait être formulée
comme étant l’ensemble des règles et des bonnes pratiques et des
comportements judicieux observés par les différents intervenants dans la mise en
œuvre des politiques publiques en vue de la réalisation des objectifs d’efficacité
et d’efficience des programmes gouvernementaux. Malgré le caractère vague de
cette définition, la science administrative appuyée par les outils à base de
technologies de l’information est parvenue à élaborer des indicateurs
d’appréciation de la qualité de la gouvernance et d’évaluation de ses
performances.
Les contours d’un tel système se préciseront encore mieux par la réalisation
d’une série d’actions de rénovation profonde à la fois audacieuses et soutenues
qui peuvent être focalisées autour des domaines prioritaires suivants :
Première Domaine de priorités pour l’instauration de la
gouvernance : La transformation des cadres juridiques
et institutionnels
Il est incontestable qu’une matière abondante a été élaborée dans ce sens durant
cette dernière décennie, De textes juridiques ont été publiés et un nombre
important d’institutions et de structures ont été assises.
Comme principales dispositions juridiques nous citons principalement:
- au niveau de la facilitation des rapports administrations et usagers, les
décrets n° 89 –377 du 15 mai 1989 et le décret n° 93-981 du 3 mai 1993.
- en matière de modernisation et de rationalisation de l’action
administrative, le décret n° 96-49 du 16 janvier 1996 relatif au plan de
mise à niveau de l’administration publique ainsi que les textes portant
simplification des circuits, allégement des formalités administratives et les
textes relatifs à la création des unités de gestion par objectifs ;
- en ce qui concerne le renforcement de la décentralisation, la loi organique
n° 89 –11 du 4 février 1989 et la loi n° 93-119 du 27 décembre 1993
relatives aux conseils régionaux et la loi organique n° 73-33 du 14 mai
1975 relative aux communes telle que modifiée par la loi n° 95-68 du 24
juillet 1995.
- dans le domaine de la promotion de l’usage des TIC et spécifiquement
des applications e-gov, le gouvernement Tunisien a pris l’initiative
d’élaborer une série de textes législatifs et réglementaires destinés à
favoriser l’usage des TIC et couvrant notamment les aspects suivants :
- la valeur juridique du document électronique ;
- la preuve des échanges électroniques ;
- la valeur juridique de la signature électronique ;
- la certification ;
- la protection des données personnelles ;
- l’archivage des documents électroniques administratifs ;
Parmi les textes juridiques élaborés dans ce cadre, on peut citer :
- La loi numéro 1-2001 du 15 janvier 2001 relative au nouveau code des
télécommunications ;
- La loi cadre numéro 2000-83 du 9 août 2000 relative aux échanges et au
commerce électronique qui a traité de l’échange électronique des
documents, de la certification électronique, des conditions de conservation
et de restitution des documents électroniques, de la signature
électronique et des moyens de paiement électronique ;
- La loi n° 2001-50 du 3 mai 2001 relative à la création des parcs
technologiques suivie des décrets portant création et fixant les modalités
de fonctionnement des pôles technologiques
- Le décret numéro 98-268 du 2 février 1998,fixant les conditions et les
modalités d’octroi et de retrait des agréments pour
l’exercice
d’activités dans les domaines d’étude et d’entreprise de
télécommunication ;
- Décret n° 98-202 du 26 janvier, fixant les conditions et les modalités
d’exploitation des centres publics des télécommunications et des centres
publics des postes.
- Décret n° 1233-99 du 31 mai 1999 relatif aux modalités de contrôle
technique à l’importation et à l’exportation des produits informatiques.
Un nombre élevé d’organismes et de structures ont été crées à cet effet dans
différents domaines d’activités : les réformes administratives, les ressources
humaines de l’Etat, la formation et le recyclage des cadres, la décentralisation
administrative et économique, les relations avec le citoyen, la médiation et la
justice administrative, les technologies des télécommunications et de l’Internet,
la certification électronique, la sécurité informatique etc.…
La richesse des dispositifs juridiques et institutionnels établis dans ce cadre n’est
pas contrebalancée par des réalisations cohérentes et efficientes ayant un impact
significatif sur le terrain à la mesure des attentes des acteurs économiques et du
citoyen.
Le bilan au niveau de l’application de ces dispositifs juridiques et institutionnels
est largement mitigée car d’une part ces dispositifs juridiques orientés vers la
gouvernance et la modernité ne présentent pas une allure structurée, cohérente et
exhaustive et ne renferment pas en leur sein leurs mécanismes d’exécution et
d’évaluation.
D’autre part, la multiplicité d’institutions et d’organismes chargés de la mise en
place de la gouvernance fonctionnent sans programmes d’activités préétablis,
rigoureusement définis et sans mécanismes d’évaluation et de coordination entre
eux. Des processus intimement liés comme les réformes administratives, la
décentralisation, l’informatique, l’Internet, le paiement électronique, la
certification ou la sécurité informatique sont traités pratiquement isolément par
des organismes relevant de tutelles différentes. Cet émiettement d’activités
constituant un tout car procédant d’un même processus transversal n’est pas de
nature à favoriser les meilleures conditions d’efficacité dans la réalisation des
objectifs souhaités dans ce domaine.
Certains pays ont réglé le problème de la coordination interdépartementale en
faisant superviser l’ensemble de ces structures et de ces fonctions par un
ministère chargé de la modernisation du service public.
La poursuite des projets de révision des cadres institutionnels et légaux dans le
sens de leur adaptation aux impératifs majeurs du développement et de
modernisation de l’économie et aux exigences de la nouvelle mission de l’Etat
en tant qu’arbitre entre les opérateurs économiques, régulateur des mécanismes
de l’économie du marché et garant de la pérennité des institutions devrait
s’inscrire dans le cadre de la cohérence et de l’efficacité compte tenu de
l’ampleur des mutations envisagées dans la structure de la société et dans la
mission de l’Etat dont le rôle se limiterait à ses fonctions classiques liées à la
souveraineté, la sécurité et à la représentation ainsi qu’à celles de l’investisseur
des grands projets d’infrastructure économique et sociale.
A cet égard, le recours aux services d’un observatoire juridique veillant
à la prospection des innovations juridiques et légales, à leur formulation à leur
mise en cohérence et à leur évaluation serait fortement recommandable.
Deuxième domaine: l’optimisation des ressources humaines
Il est évident d’affirmer que la réussite de toute mutation d’importance reste
tributaire de la qualité des hommes qui la mettent en œuvre.
La bonne qualification professionnelle des ressources humaines de l’Etat
constitue une condition indispensable pour la mise en place des systèmes de
gouvernance. Cette qualification est appréciée d’abord à l’entrée dans la
fonction publique mais surtout le long de l’activité.
Elle est conditionnée à la fois au niveau de la formation de base par la
production de profils adaptés découlant d’une formation d’origine adéquate et
ensuite d’une formation continue pertinente et ciblée mais également induite des
comportements individuels.
La Tunisie dispose d’un nombre important d’écoles de formation pour les
services publics tels que l’ENA mais les programmes de formation et les profils
formés par ces écoles doivent s’adapter de plus en plus au rythme de la vitesse
des mutations économiques, culturelles et technologiques que connaît le monde
évolué.
Par ailleurs, les programmes de formation continue demeurent limités et à faible
impact. Bien que les différents budgets publics prévoient systématiquement une
rubrique destinée à la formation, sa proportion demeure insignifiante et
négligeable et la capacité des donneurs d’ordre pour « consommer » les crédits y
afférents reste hypothétique.
La réussite de cette composante clé des systèmes de la bonne gouvernance
publique passe par la mise en œuvre des programmes de qualification
professionnelle et de formation continue de grande ampleur, systématique et
régulière.
Troisième domaine :Le renforcement de la décentralisation
administrative et économique de manière à la rendre plus effective au
niveau régional et local. Pour y parvenir, la Tunisie doit s’investir pour :
- doter les structures décentralisées des ressources humaines à la fois
qualifiées et dévouées.
- réaliser un bon compromis entre les besoins d’autonomie des entités
décentralisées induisant en leur faveur de larges marges de manœuvre et
les besoins de centralisation pour garantir la cohérence et l’harmonie dans
la formulation, l’exécution et l’évaluation des politiques nationales de
développement.
Les techniques de la remontée de l’information et des tableaux de bord
nationaux à base d’outils TIC favorisent la réalisation de tels compromis.
- favorisés le recours aux outils modernes de gestion à base de TIC tels que
les systèmes de gestion par objectif et les techniques d’évaluation.
Quatrième domaine : La transparence et l’observation de
l’éthique professionnelle par les cadres dirigeants en adoptant une charte
de bonne conduite et en imposant le respect des principes qui en découlent et
peuvent conduire les autres à suivre l’exemple.
La clarification des missions et la professionnalisation de la fonction publique
par la mise en œuvre des pratiques d’élaboration et d’évaluation des
programmes d’activités annuels pourrait contribuer à la réalisation de cet
objectif.
L’usage des systèmes de comptabilité analytique, des techniques d’évaluation, le
recours aux missions d’inspection à connotation évaluative et préventive
approfondirait de plus en plus les exigences de l’Etat de Droit et des institutions
ainsi que l’utilisation à grande échelle des systèmes d’information ouverts à base
d’outils TIC favoriserait une bonne transparence de l’action publique.
Cinquième domaine de priorités : La mise en œuvre
des
programmes e-gouvernement : ou e-administration en tant qu’outil de
modernisation des services publics et de l’économie et en tant que véhicule de la
participation du citoyen à la vie publique.
Une bonne mise en œuvre des programmes de e-gov est à même de fournir
notamment :
- une meilleure qualité des services rendus aux citoyens ;
- une bonne transparence des transactions administratives ;
- une mise en œuvre judicieuse de la décentralisation ;
- une réduction des coûts de fonctionnement de l’administration ;
- une bonne coordination des missions de l’Etat et un décloisonnement de
ses services ;
- un accroissement de l’efficacité et de l’efficience de l’action publique ;
- la réduction du fossé numérique entre les différentes classes à l’intérieur
de la société et vis à vis des pays étrangers.
La Tunisie a identifié dix (10) projets dans le domaine du e-gov ou eadministration à savoir :
. le e- paiement
. l’école virtuelle
. l’université virtuelle
. la constitution des entreprises en ligne
. l’état civil en ligne
. la télé déclaration fiscale
. le e-tourisme
. la liasse unique
. la sécurité sociale
. le paiement électronique
. la télé facturation
Pour le pilotage de ce programme, une commission technique de
l’administration communicante a été instituée au niveau du Premier Ministre
ainsi qu’une commission interministérielle présidée par le Premier Ministre.
Malgré quelques percées appréciables enregistrées par la Tunisie dans ce
domaine, les performances en matière de e-gov demeurent timides et en deçà des
ambitions et des attentes du citoyen. Il apparaît clairement que la Tunisie a
plusieurs longueurs à rattraper pour combler le retard enregistré dans ce
domaine par rapport à d’autres nations que la Tunisie paradoxalement dépasse
au niveau des indicateurs de développement économique et humain.
A notre avis, ce retard est imputable à une multitude de facteurs endogènes ou
exogènes dont principalement :
1- le recours aux TIC ne découle pas souvent d’une logique des besoins
des acteurs économiques et de ceux de la société civile. Une
problématique de motivation pour le recours aux outils TIC se pose.
2- l’effet « gadget » est perceptible quand il s’agit de la construction des
sites web de publication à caractère purement informationnel sans
véritable « back office » qui renferment les bases de données utiles à la
fourniture de services effectifs et performants au public.
3- le recours aux outils TIC ne découle pas souvent d’une vision du «
retour sur investissement » ou d’objectifs de performance. Il arrive
souvent que le recours aux TIC génère des surcoûts de fonctionnement
n’induisant que de faibles effets de facilitation, de simplification ou de
performance.
4- la faiblesse du secteur des sociétés de services et d’ingénierie du logiciel
et du « contenu » d’une façon plus générale due à son émiettement et à sa
déconcentration. Cette faiblesse pourrait être remédiée d’abord par
l’élaboration de dispositions légales relatives à l’éthique professionnelle
en matière des projets TIC à l’image des cadres juridiques existants
définissant les conditions de réalisation des projets de bâtiments civils et
d’infrastructure publique et notamment le partage des rôles entre le maître
d’ouvrage, le maître d’œuvre et les bureaux de contrôle et en deuxième
lieu par le renforcement du rôle des donneurs d’ordre publics dans le
domaine des TIC de manière à les amener à bien identifier leurs besoins, à
être capable de les formuer et à disposer d’une capacité de maîtrise et de
gestion des projets NTIC.
Le secteur des sociétés de service et d’ingénierie « informatique » (SSII)
doit pouvoir atteindre un niveau de maturité technique et
organisationnelle suffisant pour leur permettre de réaliser les grands
projets NTIC avec les niveaux de performance requis.
5- La timidité des refontes institutionnelles de type organisationnel,
managériale et comportemental accompagnant les projets NTIC.
6- La faiblesse des mécanismes de coordination,
d’interopérabilité et de normalisation des projets NTIC.
de
maîtrise,
Sixième domaine de priorités :
La conduite d’une refonte
profonde des règles de fonctionnement de l’administration et la reingénierie
des processus de travail dans les services administratifs qui doivent
accompagner la migration progressive de l’administration des systèmes
administratifs francophones formalistes et hiérarchisés vers les systèmes de
management public pragmatiques et ouverts inspirés des modèles anglo-saxons.
Des paradigmes et des concepts tels que la gestion participative par objectifs,
l’organisation mouvante, la gestion de la qualité et de la satisfaction, la
réactivité, la transversalité, le travail collaboratif en réseau, les
raccourcissements des lignes hiérarchiques, le partage et l’échange, la
communication, la gestion de l’image de marque et de la satisfaction,
l’efficience, l’intégration des processus, l’externalisation, la dématérialisation, la
gestion de la connaissance, la fiabilité et la pertinence des indicateurs, la
capitalisation, etc… doivent progressivement entrer dans les mœurs et enrichir
la culture managériale des dirigeants et des responsables.
Le recours à des techniques et outils comme la planification stratégique et
opérationnelle, le pilotage, l’aide à la décision et les tableaux de bord, la
comptabilité analytique, les centres d’appels, les services en ligne, les guichets
virtuels, les systèmes d’information intégrés, la délégation, les calculs d’impact,
le réingéniering des processus etc….doivent être courants.
Sans aller jusqu'à prôner la déréglementation chère aux dirigeants républicains
des Etats Unis d’Amérique, il n’en demeure pas moins utile d’alléger
substantiellement les dispositifs juridiques en vigueur pour en faire des cadres
de travail appropriés pour le développement de l’initiative et de la responsabilité
et éviter de faire dépendre la vitalité de l’administration du paradoxe de cette
administration traversée par un perpétuel conflit entre les règles juridiques
formelles qui fixent son statut et son mode de fonctionnement d’une part et leur
permanente transgression qui assure les conditions de son équilibre d’autre part.
Septième domaine de priorité : l’optimisation des performances
de l’infrastructure des télécommunications et de l’Internet
et la diffusion de la culture numérique
Malgré un effort indéniable dans la couverture territoriale par les réseaux de
télécommunications (un tunisien sur trois dispose du téléphone) et dans
l’extension de l’usage de l’Internet, certaines insuffisances notamment au niveau
du réseau Internet persistent :
- la vitesse de la bande passante au niveau de l’internationale est jugée trop
faible pour une économie qui se veut ouverte sur les marchés extérieurs
particulièrement européens et compétitive par rapport à la concurrence
des pays de l’Europe de l’Est et des pays Asiatiques.
- les handicaps à l’interopérabilité des systèmes et des réseaux.
La mise en réseau de l’information lui donne de la valeur ajoutée en la
rendant accessible à un groupe plus large d’individus, d’entreprises, de
marchés et de gouvernements tant au niveau local qu’international.
Ces réseaux impliquent que les mesures envers l’interopérabilité des
systèmes (télécommunications, paiement électronique, back office etc..)
deviennent de plus en plus effectives.
-La faiblesse du contenu véhiculé à travers ces réseaux :
La problématique ne réside pas seulement dans la nécessité de disposer de
réseaux de télécommunications performants mais surtout dans les capacités de
véhiculer des trafics de contenu proportionné. Rien ne sert à disposer
d’autoroutes rapides si l’on ne peut acheminer un trafic de transport de véhicules
conséquent.
La mise en réseau de système d’informations à contenu pertinent ayant un
impact sur les performances économiques et sur les facilitations fournies aux
citoyens constitue l’autre facette de la problématique.
L’industrie du logiciel et du contenu ne pourrait se développer sans qu’il y ait un
besoin exprimé à partir d’une culture numérique et un réflexe de recours aux
outils TIC manifesté chez les opérateurs économiques et la société civile.
Il est tout à fait admis que la pression en faveur de l’usage des TIC provient
soit :
- des opérateurs économiques locaux ou extérieurs soumis à de fortes
contraintes de compétitivité.
- des composantes de la société civile (associations et collectivités)
confrontées à des besoins quotidiens de facilitation et de transparence.
- de l’Etat représenté par l’Administration.
Cette pression pourrait venir à la fois des trois sources précitées.
Pour le cas de la Tunisie, le secteur économique autre que celui lié à l’Etat se
comporte très souvent d’une manière officieuse et souterraine et fait appel très
rarement à ce genre d’outils. Ceci est clairement perceptible dans le secteur du
commerce.
Une bonne frange de la population locale ignore l’existence même de ces outils.
Le rôle des composantes de la société civile dans ce domaine demeure encore
faible. Seul l’Etat peut suppléer cette lacune et continuer à promouvoir l’usage
de ces outils auprès des opérateurs économiques et du citoyen et favoriser
l’émergence d’une véritable culture des TIC à travers des programmes nationaux
pertinents et régulièrement évalués et ajustés.
La culture de la limitation des naissances et du planning familial dont est
imprégnée aujourd’hui la société tunisienne n’a été possible que grâce à
l’intervention massive et soutenue de l’Etat. Il en est de même aujourd’hui de
l’usage des TIC.
La récompense de l’utilisation efficace des technologies de l’information est la
croissance rapide aussi bien au niveau local qu’au niveau international et
notamment en ce qui concernent les échanges commerciaux.
Les cadres d’actions peuvent être similaires pour tous les pays mais l’application
est spécifique à chaque pays. Les leçons tirées des expériences des uns et des
autres et les bonnes pratiques relevées ici et là peuvent guider les planificateurs
et stratèges dans cette œuvre innovatrice.
Huitième domaine de priorités : la maîtrise
de nouvelles
technologies et la promotion de l’esprit d’innovation
La structure de l’économie nationale fait de l’Etat le principal donneur
d’ordres et le prépondérant investisseur dans le domaine des NTIC. Par
conséquent la promotion des nouvelles technologies passe d’abord par la
mise sur le marché de projets mobilisateurs et innovants et la réservation
d’enveloppes d’investissement conséquentes et ensuite par une bonne
structuration des missions chargées des TIC et des innovations domaines
intimement liés.
Nous citons à ce propos particulièrement l’émergence des fonctions de
maîtrise d’ouvrage pour la réussite des projets TIC et la fonction
d’infogérance qui assure une externalisation compacte d’une façon partielle
ou totale de l’activité informatique y compris dans l’exploitation des
systèmes. Cette orientation est particulièrement intéressante pour le contexte
tunisien constitué d’entreprises et d’organisations de petite et de moyenne
taille qui rend l’appropriation de ressources humaines propres coûteuse et
superflue.
L’enjeu que représente aujourd’hui les TIC pour l’Administration conduit à
repositionner l’informatique au cœur de l’organisation et amène à encourager
la participation des responsables informatiques à la définition de la stratégie
de l’entreprise.
Le passage des structures TIC du statut de centre de coût à celui de centre de
profit/investissement traduit un remplacement de la vision comptable par une
vision stratégique.
Ce changement se manifeste aussi par une réorganisation globale de la
fonction informatique. Après un mouvement de décentralisation de
l’informatique avec la diffusion des micro-ordinateurs et des réseaux locaux,
on constate aujourd’hui une tendance à la recentralisation de la fonction,
facilitée par la mise en place de standards et d’architecture de type réseau et
« client léger ».
Les organisations sont à la recherche d’un équilibre entre la centralisation,
la standardisation informatique et la souplesse à laisser aux unités
opérationnelles pour adapter les outils à leur contexte et besoins locaux.
Au-delà des fonctions traditionnelles de production et d’exploitation, la
fonction informatique doit intégrer aujourd’hui de nouvelles missions.
La première cible de cette mission pédagogique est l’encadrement. L ’équipe
informatique doit lui apporter l’information nécessaire pour le rendre capable
de comprendre et d’anticiper les changements en expliquant les évolutions en
cours, en montrant l’impact des changements technologiques, en proposant
un cadre de développement à moyen et long terme et en les incitant à
l’innovation et à la créativité.
Ceci suppose que soit menée une activité importante de veille et de diffusion
de l’information. Des exemples de mises en œuvre –initiatives de partenaires
ou d’expériences étrangères sont les bienvenues pour illustrer les possibilités
offertes par les TIC.
L’équipe informatique et innovation doit jouer en interne un rôle de
facilitateur en encourageant et facilitant les projets TIC innovants : Former
les utilisateurs à des démarches itératives d’expérimentation, évaluation,
correction-, encourager et organiser la coopération des différents centres de
décision autour des projets, mener des actions fortes de communication
autour des expériences menées (success story).
Ceci implique également une capacité et un effort tout particulier de l’équipe
informatique et innovation pour capitaliser les diverses expériences TIC
menées. Elle doit être capable de produire des recommandations aux
départements souhaitent se lancer dans un projet TIC, en s’appuyant sur les
retours d’expérience dans les organismes locaux et étrangers.
La fonction système d’information et innovation doit avoir un rôle actif dans
le management global de l’information dans l’organisme en lien étroit avec
les directions opérationnelles.
La fonction « architecture du système d’information » tient désormais une
place centrale au sein des structures TIC. Elle a pour mission d’établir et de
tenir à jour la cartographie fonctionnelle des applications et des données.
Coté études aussi, de fortes évolutions s’opèrent. Les projets TIC requièrent
la mise en œuvre, sous le contrôle et en liaison étroite avec la maîtrise
d’ouvrage, d’une méthodologie de conduite de projet non traditionnelle en ce
sens qu’ils obligent à :
- sortir des schémas hiérarchiques classiques par la mise en œuvre d’une
véritable démarche projet, par la constitution d’équipes plus réduites mais
transversales mobilisant des expertises diverses et complémentaires.
- produire vite et avec une bonne réactivité collective
- travailler par processus de conception et de développement itératif (le
produit final est ajusté progressivement pour tenir compte des réactions et
suggestions des utilisateurs.
- associer les utilisateurs. Cette contrainte est d’autant moins évidente à
prendre en compte qu’une nouvelle catégorie d’utilisateurs apparaît avec
l’ouverture des systèmes d’information sur le web : le grand public.
Une restructuration profonde dans ce sens des services chargés de
l’informatique et de l’innovation dans le secteur public est une revendication
d’intérêt majeur.
Conclusion :
Pour réussir le défi de la bonne gouvernance, la Tunisie dispose d’un nombre
appréciable d’atouts tels qu’un bon niveau de développement économique et
humain, une infrastructure de base moderne et des ressources humaines
qualifiées.
Toutefois pour gagner ce pari, la Tunisie doit mettre en œuvre la stratégie de
la gouvernance dans un cadre cohérent et avec une approche projet. A cet
égard, la démarche de management stratégique et du pilotage opérationnel du
projet d’instauration de la bonne gouvernance serait recommandable au
gouvernement tunisien. Cette approche purement technique devrait s’enrichir
par une bonne animation de la vie publique et s’accompagner par la diffusion
des bonnes pratiques auprès des cadres dirigeants et des responsables.
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