LE WISC-III POUR DIAGNOSTIQUER LES TROUBLES D’APPRENTISSAGE ? par Anne-Marie Sanfaçon-Bolduc, Ph.D. Commission scolaire du Val-des-Cerfs En tant que psychologues scolaires, avez-vous déjà posé le diagnostic de troubles d’apprentissage à partir des résultats obtenus au WISC-III, du profil ACID (Arithmetic, Coding, Information, Digit Span) ou du profil SCAD (Symbol Search, Coding, Arithmetic, Digit Span)? Vous dites-vous: «bien sûr…les écarts entre les sous-tests ou entre les échelles verbale et non verbale sont des indices probants pour diagnostiquer la présence de difficultés d’apprentissage»? Vous avez toutes les raisons de penser ainsi. Le manuel même du WISC-III fournit des tables de références appelées «l’écart entre sous-tests» et y fait des parallèles avec les difficultés les plus rencontrées. Pourtant, serez-vous surpris d’apprendre que les recherches ont plutôt démontré qu’on ne peut se servir de la variabilité entre sous-tests pour des fins diagnostiques! Le présent article ne vise pas à vous culpabiliser, mais plutôt à vous sensibiliser à l’utilité réelle du WISC-III dans le diagnostic des troubles d’apprentissage. Les psychologues qui utilisent les résultats obtenus au WISC-III se servent souvent de la différence entre le résultat le plus élevé et le moins élevé de deux sous-tests d’une même échelle. En ce sens, cette étude de Marley W. Watkins compare les résultats obtenus aux dix principaux sous-tests du WISC-III de 684 élèves du primaire ayant des troubles d’apprentissage à ceux obtenus de 2200 ayant servis à la standardisation du WISC-III. Résultats de l’étude Les résultats recueillis par le biais d’analyses statistiques ne permettent pas de distinguer les élèves en trouble d’apprentissage de ceux composant l’échantillon de standardisation. Ces résultats vous surprennent peut-être, mais ils vont pourtant dans le même sens que plusieurs autre études effectuées sur le WISC-R. Spécifiquement, Watkins souligne : que la variabilité entre les sous-tests est l’indice le moins utile pour diagnostiquer les élèves en trouble d’apprentissage; que les profils ACID et SCAD sont très peu fiables pour identifier les élèves en trouble d’apprentissage. Conclusion Enfin, Watkins, comme bien d’autres auteurs, soutient que l’interprétation de la variabilité des sous-tests au WISC-III n’a pas sa place dans la pratique scientifique de la psychologie en milieu scolaire. Elle indique que l’utilisation des différences entre les sous-tests pour prédire ou diagnostiquer les troubles d’apprentissage constitue une action professionnelle allant contre les principes scientifiques. Maintenant que l’on sait qu’il est à proscrire de diagnostiquer un trouble d’apprentissage à partir des résultats obtenus au WISC-III, à quoi peuvent donc nous servir les tests d’intelligence ? Ils peuvent nous aider à identifier différents aspects inhérents au fonctionnement cognitif. En ce sens, il est possible de dégager les forces et les limites d’un élève, d’analyser les stratégies de travail et d’organisation qu’il utilise et de développer des pistes d’intervention relatives à ses forces, limites et aux stratégies d’apprentissage à lui enseigner. Enfin, les tests d’intelligence permettent aussi d’exclure l’hypothèse que les difficultés scolaires de l’élève sont liées à une déficience intellectuelle. Pour un rappel… En terminant, il est important de vous remémorer certains articles issus du code de déontologie des psychologues. Chapitre 1 : Devoirs et obligations envers le public Article 1. Le psychologue inscrit au tableau de la Corporation professionnelle des psychologues du Québec doit, dans l’exercice de sa profession, tenir compte des principes scientifiques généralement reconnus en psychologie. Chapitre III : Devoirs et obligations envers la profession Article 72. En tout ce qui concerne l’administration, l’interprétation et l’utilisation des tests psychologiques (…), le psychologue doit s’en tenir aux principes scientifiques généralement reconnus en psychologie (…). Titre : Diagnostic Utility of WISC-III Subtest Variability Among Students with Learning Disabilities Auteur : Watkins, Marley W. Année : 1999 Source : Canadian Journal of School Psychology, Vol.15, No.1, p.11-20