Appel à contributions
C i v i li s a t io n s
vol. 58 (2)
A paraître à l’automne 2009
Sexualités : apprentissage et performance
Numéro coordonné par David Berliner (ULB) et Cathy Herbrand (ULB)
Dans ce volume, il s’agira d’explorer comment, dans divers environnements sociaux et
culturels, fonctionnent apprentissages et performances sexuelles. Bien qu’elle ait su se faire
discrète, la sexualité fait partie de ces thèmes qui ont accompagnés l’histoire de
l’anthropologie, en particulier, et des sciences sociales, en général. Qu’il suffise de penser aux
textes fondateurs de Margaret Mead et de Bronislaw Malinowski qui ont tous deux ouvert une
brèche (certes vite refermée) en ce domaine. Alors qu’abondent aujourd’hui les textes sur ces
discours du sexe qui prolifèrent et se globalisent (privilégiant en cela une approche par trop
sémiotique), les approches pragmatiques de la sexualité, qui prendraient donc le sexe comme
une forme d’action inscrite dans des systèmes d’interlocutions et d’interactions normés et
médiatisés par des objets, demeurent exceptionnelles.
En 1934, dans ses « Techniques du corps », Marcel Mauss nous invitait déjà à décrire ce
que l’on appelait alors les « techniques de la reproduction », à savoir « toutes les techniques
des actes sexuels normaux et anormaux. Attouchements par sexe, mélange des souffles,
baisers, etc. », dispositifs de plaisir où, écrivait-il, « les techniques et la morale sexuelles sont
en étroits rapports » (Mauss 1934). Dans ce numéro, en privilégiant des approches
ethnographiques serrées, il s’agira de mettre en relief cette pragmatique du sexe et ce, à
travers deux concepts que les sciences sociales ont récemment re-découverts, ceux
d’apprentissage et de performance.
En particulier, on cherchera à comprendre comment fonctionnent l’apprentissage des
pratiques, l’incorporation des normes, la transmission des savoirs/scripts et l’invention des
imaginaires dans le domaine des sexualités. Quels en sont, dans divers environnements
sociaux et culturels, les lieux, les interactions, les acteurs, les institutions, les objets, les
gestes, les moments critiques, les temporalités ordinaires, les rituels, les codes et les médias ?
Par quels processus complexes de socialisation un comportement sexuel est-il valorisé ou
perçu comme marginal ou condamnable ? Qu’en est-il des innovations en matière de
savoirs/scripts et de pratiques sexuels ? Quels rôles le sida, la toile, la prostitution, les jouets
du sexe ou le sado-masochisme ont-ils joué dans la diffusion ou la transformation de
pratiques et de normes sexuelles ? De manière générale, comment approcher
anthropologiquement l’apprentissage et la performance de la sexualité ? Quelle est la part de
l’improvisation, de l’imitation, de l’invention et de la transmission dans la mise en pratique de
la sexualité (s’agit-il d’apprendre un savoir, un savoir-faire ou encore un « savoir-taire » pour
reprendre ici l’expression de Zempléni) ? Enfin, quels sont les enjeux et les outils
méthodologiques dont nous disposons pour réaliser ce genre de recherche ? Comment penser
la question de l’observation participante dans une telle anthropologie de l’intimité?