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Chapitre 7 – Comment la sociologie est-elle possible ?
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C’est pour ce clair obscur de la vie de chaque jour, dans
le dédale des interdits, des croyances, des appétits, des
angoisses, que l’individu, comme toujours et en tout lieu,
cherche difficilement son chemin vers l’expression
Jean Duvignaud
Comment la sociologie légitime-t-elle son existence à ceux qui en sont l’objet, les êtres humains ?
Chaque discours scientifique propose de la « réalité » dont il prétend rendre compte une
représentation à laquelle il n’est jamais interdit de demander des comptes
Enoncé scientifique et actions humaines qui s’en inspirent sont inséparables
Les savants ne doivent pas se retrancher derrière la seule éthique de la conviction, abandonnant à
d’autres, moins savants mais plus engagés, l’éthique de la responsabilité
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Depuis qu’elle existe, la sociologie a produit quelques théories autour desquelles de mémorables
querelles ont fait rage (cf. débats autour du structuralisme ou du matérialisme historique)
Aujourd’hui, les médias font abondamment recours aux sociologues
Peut-on élaborer un discours qui réponde à « comment faisons-nous pour vivre ensemble ? »
Les êtres humains font des choses entre eux ; peut-on en rendre compte autrement qu’en décrivant
ces choses une par une ?
Peut-on rapporter ces choses que font entre eux les autres humains à des invariants, noyaux durs de
toute manière d’aborder la « science » ?
VEYNE : « Qu’est-ce qu’une science, sinon la détermination d’invariants qui permettent de
retrouver la diversité des phénomènes ? »
Il s’agit d’une construction intellectuelle, de nature abstraite, de l’ordre du concept
Déterminer un invariant ne commande pas de partir de relevés empiriques ; pourtant, l’empirie sert
de point de départ à toute construction intellectuelle (ambiguïté)
BACHELARD : « C’est à la croisée des chemins que doit se placer l’épistémologue, entre le réalisme
et le rationalisme. C’est là qu’il peut saisir le nouveau dynamisme de ces philosophies contraires, le
double mouvement par lequel la science simplifie le réel et complique la raison »
BACHELARD : « L’esprit scientifique part d’une conjonction du "rationalisme" et du "réalisme" »
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L’invariant retrouve sous une seule dénomination la diversité de phénomènes singuliers
Ainsi, en conceptualisant la famille, on y débusque une série de phénomènes très divers
La famille, en tant qu’invariant, est pensée autant qu’elle est résultat de pensée
L’invariant est un concept dynamique, qui relève du projet scientifique
BACHELARD : « Au-dessus du sujet, au-delà de l’objet immédiat, la science moderne se fonde sur
le projet. Dans la pensée scientifique, la méditation de l’objet par le sujet prend la forme du projet »
Paradoxalement, l’invariant n’est invariable qu’à un moment donné, et il serait déplacé de le
confondre avec un élément de classification
Posons que la sociologie consiste en l’étude scientifique des interactions entre individus
Les communautés de comportements servent inévitablement de déclencheurs à l’élaboration
d’invariants (qui ne se ramènent pas à la mise en évidence de « communs dénominateurs »)
SIMMEL : « L’abstraction scientifique sépare ces deux éléments liés dans la réalité : les formes de
l’action réciproque ou de la sociation ne peuvent être réunies et soumises à un point de vue scientifique
que si la pensée les détache des contenus, qui ne deviennent des contenus sociaux que par elles »
SIMMEL postule l’existence de formes, dont l’étude constituerait l’objet même de la sociologie
L’invariant de VEYNE peut-il être confondu avec la forme de SIMMEL ?
SIMMEL : « Le concept de société recouvre deux significations séparées. 1) Elle est l’ensemble
complexe d’individus socialisés, le matériau humain qui a pris une forme sociale. 2) La "société" est
aussi la somme de "ces formes relationnelles" grâce auxquelles les individus deviennent la société au
sens premier du terme. Quand on parle des sciences de la société selon ce premier sens, elles ont pour
objet tout ce qui se passe dans et avec la société ; la science de la société au deuxième sens du terme a
pour objet les relations et les formes par lesquelles les hommes se socialisent »
Les sciences de la société (cf. premier sens de SIMMEL) pourraient être l’histoire, l’économie, la
linguistique, voire l’ethnologie
La science de la société (deuxième sens de SIMMEL) est la sociologie proprement dite (ce que la
tradition universitaire appelle la sociologie générale)
VEYNE : « La sociologie générale n’existe pas. Il n’existe pas une sociologie, chacun se faisant la
sienne. La sociologie est une science dont le bilan scientifique est nul ; elle n’a rien révélé qu’on ne sût
déjà : aucune anatomie de la société, aucune relation causale que le bon sens ne connût »
Au mieux, la sociologie ne serait que de l’histoire (ou une paraphrase de l’histoire)
NB : les événements ont montré que les histoires possibles sont en nombre indéfini…
VEYNE : « La sociologie ne prend plus au sérieux que "le travail empirique", c’est-à-dire l’histoire
de la société contemporaine »
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Or de nombreux sociologues sont irrités par la « magie des chiffres » (cf. l’imposture permanente
des sondages) ; et ce qui se fait parfois passer pour sociologie n’est qu’un journalisme qui prend pour
objets les « phénomènes de société » (en ignorant la différence entre problèmes social et sociologique)
Ce parasitage complique la tâche de ceux qui croient possible de fonder une sociologie générale qui
ne serait pas un cadre conceptuel pour dissertations creuses ou spéculations hasardeuses
Le discours de la sociologie peut-il prétendre être autre chose qu’un récit se drapant dans diverses
précautions méthodologiques et reposant sur diverses preuves d’« objectivité » ?
Les « penseurs post-modernes », en prônant la déconstruction, ont rendu suspect le moindre énoncé,
même celui dont la nature paraît la plus évidente (ils ont encouragé un relativisme « absolu »)
Les énoncés sociologiques n’y ont pas échappé
Les promoteurs d’un « programme fort de la sociologie des sciences » présentent les sciences
comme des systèmes de croyances parmi d’autres et relatifs aux groupes sociaux qui y adhèrent
Si on suit certains d’entre eux jusqu’au bout de leurs développements, toute science ne serait qu’un
« récit » approprié à un contexte social donné, et les sciences du social ne seraient qu’une collection de
récits (on rejoint ici la position de VEYNE sur la sociologie générale)
Il existe tout de même quelques « réalités » (les effectivités de MEYER), sur l’existence desquelles
les hommes tombent d’accord (même s’ils divergent sur le sens à leur donner)
Les hommes vivent et meurent ; qui prétendra qu’il s’agit là de l’illusion d’un récit ?
MEYER : « Plus on se déplace du macrophysique vers le microphysique, plus la perturbation altère
les qualités, parfois du simple fait de l’observation et de la mesure. Tout cela pose la question de la
réalité ; c’est la question de l’ontologie minimale [spéculation sur l’être] ou du minimum d’ontologie
qu’il faut avoir, pour faire sens du sens commun et de la science, afin de dégager une unité du réel »
Sans ce minimum d’ontologie, toute allusion à la « réalité » devient caduque
Cette ontologie minimale s’enracine dans une expérience du monde (individuelle et collective)
Toute science devient possible à partir de cette conscience
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Au commencement est le problème : quelque chose ne va pas
La question « pourquoi ? » s’impose, avec celle du « comment ? »
Leurs réponses devraient constituer la solution au problème
La science consiste en une certaine manière de répondre au « pourquoi ? » et au « comment ? »
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Cette manière s’inscrit dans une tradition qui a sacralisé le recours à la Raison, à la fois sous les
espèces de la rationalité (cognitive) et de la raisonnabilité (normative)
NB : la dimension normative est présente dans le mot « discipline » (pas d’égarements permis)
Exemple : depuis quelques décennies, le statut des sportifs professionnels a tendance à s’élever
dans la hiérarchie des positions sociales, alors que celui des professeurs d’université tend à s’abaisser
La part des médias dans cette émergence des vedettes des sports est prépondérante
De leur côté, les professeurs d’université se trouvent confrontés à la perte de supra-fonctionnalité
de leur institution (notamment face à la massification de son recrutement)
Pour qu’une telle évolution ait pu avoir lieu, il a fallu qu’un certain nombre de personnes y
apportent leur concours (ou l’estiment assez légitime pour ne pas la réprouver)
NB : on ne peut imputer toute tendance idéologique à l’effet de conditionnement massif des médias
On dira sans doute que pour un individu courant, les activités auxquelles se livrent les sportifs sont
bien plus faciles à comprendre que celles des universitaires
Nous voici ramenés à la vieille opposition/rencontre entre le micro et le macro, l’individuel et le
collectif, bref à la théorie de la structuration
SIMMEL : « Nous touchons à une différence de niveau entre la masse et l’individu, dont l’origine
résident dans le fait suivant : chez l’individu, même les qualités et les modes de comportement, grâce
auxquels il forme une masse, se distinguent de ceux qui déterminent à la fois sa possession privée et lui
permettent de se séparer comme individu de la sphère qu’il partage avec tous »
Pour SIMMEL, ce qui relierait l’individu à la masse (et vice versa), c’est ce qui dans l’organisme
humain correspond aux stades les moins élaborés de son évolution, la « partie primaire de son être »
SIMMEL : « Dès que des contenus spirituels s’élèvent au stade d’un plus grand raffinement et
d’une plus grande différenciation, la probabilité de les retrouver en chacun diminue ; ils se réfugient
dans la sphère individuelle, que l’être particulier ne partage qu’occasionnellement avec les autres »
On ne tient ici pas compte du caractère unique de tout individu, capable de posséder un « jardin
intérieur » dont il se garde de communiquer le contenu à quiconque
De plus, la vie en société, basée sur l’échange (MAUSS), ne pourrait se maintenir sans une dose
plus ou moins élevée de mensonge ou d’hypocrisie
Nous sommes tous, à des degrés divers, des comédiens : ce que nous mettons en commun avec les
autres n’épuise jamais complètement les ressources dont nous disposons
Mais il est vrai que nous donnons tous notre part pour constituer la praxis humaine, dans son
inlassable production/ reproduction au fil des temps
Il s’agit de dépasser la simple production du social pour intégrer la capacité créatrice des hommes
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BAUMANN : « La praxis humaine consiste à changer le chaos en ordre, ou à substituer un ordre à
un autre – ordre étant synonyme d’intelligible et de significatif » (et ce de manière dynamique)
Comment une science peut-elle rendre compte d’une praxis tâtonnante, bricolage interminable ?
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Le problème posé au chercheur doit être résolu
Sa solution se trouve dans l’écriture – qui elle-même pose problème : transcrire un ensemble de
processus, et non une succession d’états (or, écrire, c’est figer dans le temps)
Il ne s’agit pas seulement de raconter une succession d’événements (rédiger un récit), mais aussi de
mettre en évidence des processus qui se donnent à voir dans le déroulement du récit
La mise en évidence de ces processus constitue le stade de l’explication et de la compréhension
Une tradition tenace en sociologie prétend opposer « explication », démarche intellectuelle propre
aux sciences exactes (« dures »), et « compréhension », propre aux sciences humaines (« molles »)
Quiconque fait de la science assume d’expliquer des phénomènes, c’est-à-dire de dégager le lien qui
unit divers phénomènes (ce lien n’étant pas nécessairement de type causal)
Le sociologue doit saisir le sens de ce que font ceux qu’il observe, et donc aller au-delà de la simple
compréhension documentaire
C’est ce sens qui éclaire l’action observée, et donc permet de l’expliquer, de la rendre explicite
TESTART : « Il serait naïf de croire que "expliquer" et "comprendre" sont synonymes »
Comprendre ne se confond pas avec « chercher les motivations » : chercher des significations va
au-delà des intentions que les acteurs peuvent fournir de leurs actions
Ces significations (ou sens) échappent toujours plus ou moins complètement aux acteurs
Le sociologue peut, mieux que les acteurs, connaître les sens que revêtent leurs comportements, du
moins au niveau « de la masse » (SIMMEL)
Le niveau de « l’individu seul » ne pourrait être exploré que par une relation intime avec l’acteur…
Là réside un nouveau paradoxe
Le sociologue ne pourra bien connaître les acteurs de son terrain que s’il les fréquente assidûment,
tout en veillant à ne pas influer sur le devenir de leurs actions par des interventions intempestives
Mais en même temps, il est tenu d’en savoir plus qu’eux, son but étant de reconstruire l’horizon
des significations auquel se rapportent les significations attribuables aux actions individuelles ou
collectives
Exemple : l’interprétation du port du foulard par des jeunes filles de l’immigration
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Avant de proposer une interprétation, le sociologue devra, tout en respectant les précautions qui
s’imposent, observer (regarder et écouter) avec toute l’attention nécessaire, ces sujets (de même
essence que la sienne) dont il fait momentanément des objets, ainsi que les milieux où ceux-ci évoluent
Le problème du regard éloigné se complique encore du fait que toute relation avec des objets
(fragments de la « commune humanité ») implique un degré suffisant d’empathie
Le sociologue n’est pas obligé d’éprouver des sentiments d’affection ou d’amitié à l’égard des
groupes qu’il étudie, mais il doit toujours être capable de se mettre à la place des acteurs
TESTART : « En sociologie, il y a plusieurs sujets. Un sujet physique ne diffère de moi qui
l’observe que par la place qu’il occupe dans l’espace. Mais pour tenter de connaître un espace social, il
me faut lire des récits, écouter des discours, ceux des acteurs ou ceux des observateurs »
Du sociologue peuvent être dites les mêmes choses que ce qui vaut pour tout être humain, quelle
que soit la place qu’il occupe dans son espace-temps social
GAME et METCALFE : « Nous ne nous contentons pas de raconter des histoires, nous les vivons ;
elles ne décrivent pas simplement la réalité, elles la constituent, non pas de l’extérieur, mais en tant que
fragments de la véritable matière de la réalité »
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Une sociologie générale (cadre conceptuel englobant une grande variété de sociologies partielles)
ne peut se concevoir que si sont remplies diverses conditions ayant trait à l’érudition, à la
méthodologie et aux techniques de travail
L’ÉRUDITION
Le sociologue ne devrait pas se contenter de maîtriser les textes canoniques, les ouvrages de
référence relatifs aux objets qui retiennent son attention, et les publications les plus récentes
La lecture des bons vieux classiques se révèle souvent plus fructueuse que celle de livres qui ne
font le plus souvent qu’illustrer la solide tradition universitaire
Certains auteurs, jugés périphériques, peuvent aussi apporter bien davantage que telle sommité qui
ne fait que répéter ses trucs et ficelles d’une publication à une autre
Mais il y a aussi tous les textes produits à l’extérieur du champ de la sociologie : ceux des
historiens, économistes (qui, en dépit d’une certaine arrogance, peuvent nous apprendre pas mal de
choses en ces temps de désordres financiers), psychologues, biologistes, juristes, géographes
Restent encore tous les autres documents : ce qu’on appelle la « littérature » constitue pour les
sociologues une source d’informations et d’inspirations toujours renouvelée
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LA MÉTHODE
Sens cartésien : démarche « pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences »
« Méthode » ne doit pas être confondu avec « techniques » : interroger brièvement de nombreuses
personnes constitue une méthode ; utiliser un questionnaire est une technique d’interrogation
Accorder une importance toute particulière à l’amont du schéma de recherche : trop souvent, on se
préoccupe plus de la mise en place des dispositifs techniques que de celle du questionnement originel :
Quel est le problème ? De qui est-il le problème ? En quels termes se pose-t-il a priori ? Etc.
Ces questions n’appellent pas nécessairement de réponses immédiates, mais devraient rester à
l’esprit des chercheurs pendant toutes les phases préparatoires à la mise en place de la recherche
L’objet d’une recherche ne se construit pas pendant la phase initiale de la recherche
Cette construction, toujours incomplète et provisoire, se produit à la fin du travail de recherche
C’est par un va-et-vient permanent entre l’élaboration conceptuelle et l’empirie que le modèle
initial s’affine progressivement
BRAUDEL : « Le modèle est, tour à tour, essai d’explication de la structure, instrument de contrôle,
de comparaison, vérification de la solidité et de la vie même d’une structure donnée »
Le tout premier pas que doit accomplir un chercheur est celui du « reniflage » : aborder le terrain
avec l’esprit le plus « vierge » possible, en se contentant de le parcourir de manière plutôt errante
Il s’agit de mettre en cause l’abord prénotionnel (DURKHEIM) des phénomènes concernés
Se met ainsi en place l’opération connue sous le nom de « coupure épistémologique »
BOURDIEU : « La rupture avec l’intuition première est l’aboutissement d’un long processus
dialectique dans lequel l’intuition, en se réalisant dans une opération empirique, s’analyse et se
contrôle, engendrant de nouvelles hypothèses, déjà plus informées, qui trouveront leur dépassement
grâce aux difficultés, aux manques, aux attentes qu’elles auront fait surgir »
GOETHE : « Toute factualité est déjà de la théorie » (raisonnement au départ d’une observation)
Qu’en est-il de la théorie au sens courant du terme ?
Certes, il se trouve toujours une théorie (ou une référence théorique) dans l’esprit du chercheur
Ces inspirations théoriques apporteront peut-être, en cours de travail de recherche, les concepts et
les raisonnements nécessaires, mais il se peut aussi qu’elles restent plus ou moins stériles
LES TECHNIQUES
Le véritable choix n’est pas entre questionnaires standardisés ou observation, participante ou non,
tests statistiques raffinés et « analyse de contenu »
Le premier écueil à éviter est celui de ne pas tenir compte des outils qu’utilisent les acteurs euxmêmes pour définir les situations qu’ils vivent tout au long de leur existence
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Le danger est de substituer aux outils de ses sujets-objets ses propres outils (universitaires)
Le chercheur devrait accorder un intérêt particulier à la manière dont ceux-ci nomment les choses, à
commencer par celle dont ils se nomment eux-mêmes : elle traduit toujours un rapport au monde dont
il serait déplacé de ne pas tenir compte
Le savoir immédiat des acteurs n’est illusion que par rapport à un idéal de vérité scientifique (qui
n’est jamais atteint et qui doit être repris pour cible à chaque nouveau travail de recherche)
Si on identifie ce savoir immédiat aux « compétences » des acteurs, il constitue la matière la plus
directement mise à la disposition des chercheurs
C’est dans cette perspective que se situe le problème du choix des instruments d’investigation, en
particulier celui de l’option pour une démarche « qualitative » ou une démarche « quantitative »
NB : il ne sert à rien de se livrer à des simulacres d’enquêtes ou sondages, si de rigoureuses
prescriptions statistiques ne sont pas respectées (il y a des limites au bricolage !)
Toute procédure d’observation est limitée par les effets qu’elle risque de causer sur les acteurs
observés (par exemple : les enfants)
NB : la collecte d’histoires (ou de récits de vie) ne doit pas être tenue pour une recette miracle
Le terrain sera toujours le lieu d’un double bricolage, celui des sujets-objets et celui des chercheurs
Ce que nous appelons « science » consiste avant tout à fondre ces deux bricolages en un seul
discours (temporairement satisfaisant pour toutes les parties)
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L’ordre du social est le produit d’un incessant travail d’essais et d’erreurs, mené par des acteurs
dont le stock de connaissances est incomplet, mal renseignés sur les vraies intentions de leurs
partenaires, même les plus intimes, et incapables de mesurer et de prédire la portée de leurs actes
Bricoler ne signifie nullement être indécis, ne pas savoir où aller, faire du surplace
Le changement est un phénomène aussi universel que la constance de la « nature » humaine
Le projet de la sociologie est de connaître toujours mieux les bricolages auxquels se livrent les
acteurs, afin d’en tirer des leçons pour les bricolages du futur
THE END
Boris DEMARIA
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