Psychiatrie de l'adolescent V. BERTHOU
Peut-on penser l'adolescence en termes cliniques ?
Dans l'adolescence, on assiste à de profond remaniements (familiaux, sociaux, individuels...).
Ce n'est pas une question d'âge ; l'idée de crise renvoie à celle de processus, et à l'importance
de la temporalité (un ado de 12-13 ans est différent d'un ado de 16-17, de même qu'on trouve
des différences cliniques entre sexes. Ainsi, alors que les comportements à risques touchent
plus les garçons, l'anorexie est plus particulièrement féminine.
I. Anorexie mentale de l'adolescent
A. Sémiologie
Elle survient entre 12 et 25 ans, et touche 10 filles pour 1 garçon.
Le diagnostic se fonde sur une triade symptomatique :
Anorexie : restriction active (passive → dépression), parfois vomissement provoqués.
Le terme plus correct serait en fait dysorexie, trouble de la relation à la nourriture,
pouvant s'associer à la boulimie.
Amaigrissement consécutif, progressif : de 15 à 25 %, et jusqu'à 50 du poids initial ;
corps efflanqué, visage émacié.
Aménorrhées : constante, primaire (les menstrues n'ont jamais eu lieu) ou secondaire
Elan vital, bonne forme, voire excès, hyperactivité, en même temps que maigreur.
L'association est caractéristique, par rapport, par ex. à une dépression, à un cancer...
1. Etat psychologique
Négation de la maladie (différent du déni, que certains disent, un peu à tort,
caractéristique de la psychose),
méconnaissance de la maigreur (trouble de l'image du corps), peur de grossir,
négation des besoins du corps,
hyperactivité motrice et psychique : fait des pompes, des abdos... après le repas, pour
brûler des graisses qui autrement risqueraient de s'accumuler un peu "magiquement" (
→ recherche de "pureté"),
attitude particulière vis à vis de la nourriture : tris des aliments (ça tout de suite, ça pus
tard...), essuyage des graisses avec du sopalin, faire manger les autres...
Dépendance et peur de la séparation (il serait prématuré, voire faux de parler
d'angoisse de séparation ; on ne peut en parler qu'après un travail), question de la
maîtrise, du fait d'être aimé(e), de la mort... Il y a de la pulsion anale (puissance,
jouissance) dans le rapport à l'alimentation, contrôlée, dans le rapport au monde (à la
famille, au temps, à l'avenir...)
rejet du corps sexué : elle considère le corps comme une enveloppe, un habit mal
taillé, voire un persécuteur : clivage.
absence d'autre symptôme psychiatrique (ex. paranoïa)
L'hystérie se situe entre névrose, psychose, perversion...