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PROBLEMES DE PHILOSOPHIE
Bases : A/ Bibliographie : La laïcité, Editions Que sais-je 2 derniers chapitres
Les fantômes de la liberté, Editions Labor, Bruxelles
Les démocraties survivront-elles au terrorisme ? , Editions Labor,
B/ Cours oral
Définitions
étudie les problèmes de la philosophie, pas l’histoire
Problèmes au pluriel : tiennent une place importante dans la philosophie morale
Philosophie : - étymologie grecque. Concept créé en Grèce (de même que la démo(peuple)cratie(pouvoir), idéal
politique contemporain qui s’oppose à la dictature)
- signifie : recherche, amour de la sagesse
- attitude modeste du philosophe (Socrate) : « je suis un amoureux, je la cherche, donc je ne la
possède pas » (par opposition aux sages qui l’ont et qu’il faut donc imiter)
Sagesse : - Une vie sage est une vie harmonieuse, accomplie et heureuse (comparée à celle de quelqu’un qui vit dans
les mêmes conditions)
- Prendre une décision sage, c’est être capable de choisir la meilleure solution possible dans cette
situation
L’exemple est donné par ceux qui font face aux catastrophes avec humour, ceux qui s’accomplissent
même dans les circonstances difficiles.
Objet de la philosophie : C’est la recherche de la vie réussie. C’est le plus important, même si on y pense peu.
Dans l’histoire de l’humanité, les premiers prétendants à la vie réussie sont les représentants des mouvements religieux. Il
n’y a que dans l’occident contemporain qu’on trouve des gens sans religion.
La sagesse obtenue par voie religieuse est très différente de celle obtenue par voie philosophique.
On parle de religion dès qu’il y a distinction entre profane (monde de tous) et sacré / religieux (mystère). La vérité est
difficile à atteindre. Le prêtre, le sorcier est l’interprète entre l’homme et l’esprit. Dans les religions monothéistes, les
intermédiaires ont la prétention de dire ce qu’est la sagesse. Dans la religion, pour être sage, il faut s’élever, dépasser ses
imperfections pour atteindre et comprendre le sacré.
Les religions sont plus vieilles quez la philosophie. On trouve des traces ( ?) de pratiques religieuses dans les peintures
rupestres de la préhistoire ( 20 à 30000 ans), la religion a un grand pouvoir chez les Egyptiens, en Mésopotamie (-3000, -
2000 av JC)… La philosophie fait son apparition à l’apogée de la civilisation grecque, càd vers 700 à 600 av JC.
La philosophie se pose en concurrente de la religion. Parfois, les deux peuvent s’arranger. La philo recherche la sagesse
mais avec ses propres moyens profanes, ses propres lumières. Elle avance par critiques, questionnements, expérimentations,
discussions,…
Si le but est le même (la recherche de la sagesse), les instruments sont très différents ! La philo utilise la raison, la religion
fait un acte de foi, elle fait acte de croyance au sacré. Toutes deux ont la prétention de l’outil. Aristote : « la philo est la
recherche de la vie bonne »
Philosophie Religion Sciences modernes sont en étroite corrélation.
Les sciences modernes sont la branche la plus récente. Elles deviennent beaucoup plus précises (ex : physique, biologie),
elles sont très efficaces grâce aux techniques (ponts, avions, ordinateurs…). Elles partagent avec la philo l’utilisation de la
raison, l’expérimentation, les calculs… ce que ne fait pas la religion. Elles se différencient de la philo parce qu’elles ne
visent pas la découverte de la sagesse.
Philosophie
raison
sagesse
Découverte
de la sagesse
Foi
Sciences
Religion
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Sciences et philo sont très présents dans le monde contemporain. Mais la religion a beaucoup d’importance pour beaucoup
de gens dans le monde.
La science est omniprésente tandis que la philo est peu représentée, peu interactive. Or, l’activité philosophique concerne
tout le monde. On ne peut vivre sans s’orienter dans la vie. Il faut faire des choix en fonction de ce qui est important pour
chacun.
Dans les sociétés de liberté, le choix est total, il n’y a aucune direction donnée. Dans les religions intégristes, tout est
imposé : l’habillement, la nourriture, l’occupation, …En philo, on propose une voie face à laquelle il faut prendre des
distances et réfléchir.
C’est un travail difficile à faire sur soi-même, surtout si on est seul, car on a tendance à l’auto complaisance.
La science divertit. Réfléchir sur soi-même n’est pas indispensable mais pourtant, choisir une voie est obligatoire. Dès
lors, deux outils sont à notre disposition : la religion ou la philosophie.
Les enjeux de la philosophie
A) Le modèle le plus connu : Socrate
Il n’y a pas d’écrit de ce philosophe. Il a vécu entre 440 et 399 av JC. (Son procès et sa condamnation à mort ont eu lieu
en –399). Athènes avait alors une configuration qui était à l’image de son pouvoir. Au plus bas, l’Agora, le marché tout
le monde circulait, faisait son marché, vivait. Les gens libres comme les esclaves. Un peu plus haut sur une colline, la Pnyx,
se tenait l’assemblée des citoyens, composée, en démocratie directe, des mêmes gens que ceux qui vivent dans la cité…
(seuls pouvaient y aller les hommes pas les femmes- libres pas les esclaves- originaires de la ville pas les marchands
et autres immigrés). Socrate était en droit d’y siéger. La ville était dominée par l’acropole, lieu du culte.
Socrate restait au niveau de l’agora. Il n’allait jamais à l’assemblée. Il n’utilisait donc pas son droit de vote. Il ne souhaitait
pas assister aux débats car la vie politique était manipulée par des démagogues qui trompaient les gens. Toute vérité n’est
pas bonne à dire. Quand on lui demandait pourquoi il ne s’investissait pas dans la vie politique, Socrate répondait qu’il se
fiait à son démon qui lui interdisait de monter à la Pnyx. (Son démon lui disait ce qu’il ne devait pas faire = philosophe. S’il
avait dû lui dire ce qu’il faut faire = illuminé !)
Socrate utilise l’ironie comme moyen de retarder les attaques. Plusieurs degrés à son discours : pour ses détracteurs, il prend
son discours au premier degré et est inattaquable. Il est conscient que cela ne durera qu’un temps et que l’agressivité se
manifestera malgré l’utilisation de l’ironie mais il veut gagner du temps pour pouvoir faire passer son message. Or il pense
que pour « vivre bien », il faut réfléchirA l’époque, il est traité d’impie dans un monde où la religion est très importante.
Socrate veut apprendre aux gens à raisonner. Pour cela, il les attend au pied de la Pnyx et discute avec eux.. Les gens croient
qu’ils sont capables de raisonner, ils n’écoutent pas les arguments des autres. S’ils les ont laissés intervenir, de toute façon,
ils reprennent la conversation ils l’ont interrompue. Socrate les questionne. Il leur dit : « A Delphes, la pythie m’a dit :
« Tu es le plus sage parmi les hommes de notre temps ». Or je ne sais pas ce qu’est la sagesse. Vous qui avez pu décider,
vous devez savoir comment orienter bien la vie. Pourquoi et pour quoi avez-vous voté ? » Après quelques temps, les
discours s’effondrent. Les gens se rendent compte que leur prétendu savoir est un faux savoir. Même si cette expérience leur
rend service, ils sont vexés. De plus, Socrate s’attaque à de gros intérêts. Et il se fait petit à petit de nombreux ennemis.
L’ironie de Socrate, c’est de se présenter comme un ignorant qui interroge. Sa supériorité c’est de connaître ses limites, de
reconnaître son ignorance. Les autres ont perdu beaucoup de temps à créer l’illusion d’une connaissance.
La lucidité est le commencement de la sagesse.
Quand on essaie de dire aux gens de pratiquer la philo, de réfléchir correctement aux directions à prendre dans leur vie, le
message passe difficilement car les réactions sont ambiguës. D’une part, ils se plaignent d’être mal à l’aise dans leur vie,
d’autre part, ils ne veulent pas en changer. Pour pouvoir faire de la philo, il faut avoir la capacité de l’autocritique.
B) Les orientations de la philosophie
On en distingue deux.
La philosophie individuelle : nous concerne, nous, notre propre vie et les voies que nous devons choisir.
La philosophie collective : s’occupe de la vie du groupe. Elle sous-entend qu’une partie de nos libertés est transférée à une
instance.
Les anarchistes prônent la liberté individuelle radicale. Dans cette situation, le plus fort écrase le plus faible. L’Etat se doit
d’être garant de la justice, sinon on procède à des vengeances arbitrales subjectives expéditives.
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Or la justice doit être rendue avec sérénité. Elle doit donc être exercée par l ‘Etat et non par des individus.
Comment faire pour que les décisions soient prises dans l’intérêt général ?
Les décisions collectives dépendent des régimes et des pouvoirs (religieux, despote, …) Il y a peu ou pas de démocratie si le
pouvoir a un grand pouvoir décisionnel. Les gouvernements les pires sont ceux qui durent le plus longtemps ! Dans certains
pays, la collectivité décide de tout. Si le pouvoir est religieux, les dirigeants imposent la volonté de Dieu. Il n’y a pas de
liberté individuelle.
En démocratie, le pouvoir de la collectivité est strictement réglementé. Il y a des domaines privés qui n’ont rien à voir avec
l’Etat : les problèmes personnels de conscience, les orientations philosophiques, religieuses, etc.… Le rôle de la sphère
individuelle est plus large. (Liberté d’aller et venir sans passeport ou contrôle strict, liber d’expression, …). Tous ces
acquis reposent sur des bases qui peuvent être fragiles !
La réflexion philosophique doit tenir compte de cette double orientation, la part du politique et la part de l’individuel. Les
deux sont très liés.
1. La philosophie politique
Polis : c’est le groupe, l’entité collective.
Le rôle de l’organisation politique est de garantir une liberté équitable à chacun. Il y a des collectivités dans lesquelles un
pouvoir de contrainte est laissé à ceux qui le représentent. (les Etats, les institutions nationales et internationales imposent
en condamnant). Le but est de limiter les prises de libertés pour éviter les abus préjudiciables.
En démocratie, c’est le peuple qui choisit. Concrètement, un peuple mécontent désavoue son gouvernement aux élections et
change de représentants. En non-démocraties, les leaders se perpétuent ou les élections sont arrangées.
N.B. : la mocratie est bien plus que la loi de la majorité, mais la majorité reflète l’avis le plus nombreux dans une
population informée.
La partie prépondérante de la philosophie est la philo politique car si le politique prend toutes les décisions, s’il impose tout,
il n’y a plus de place pour la liberté individuelle. Dès que les choix personnels s’écartent un peu de ceux du politique, il y a
persécution, destruction. A l’opposé,
C’est très important de réfléchir aux limites où se cantonnera le politique, sinon il se rapproche et la répression s’installe. Le
but de la philosophie politique est de se demander comment prendre de bonnes orientations en commun. placer les
distances, les limitations ?
Un état totalitaire est semblable à un petit espace limité par des murs. La liberté politique éloigne les murs sans garantir que
les gens vont exploiter l’espace créé. « Les murs, le blocage peuvent être dans la tête. » De toute manière, même dans les
sociétés ouvertes, les murs existent, pour protéger les minorités et les faibles de la loi de la jungle.
Faire ces choix est difficile car les débats autour des grands problèmes politiques sont animés. Trop souvent, les gens ne
retiennent que les arguments qui les arrangent et réfutent ceux qui remettraient leurs à priori en question. Trop souvent, les
gens se satisfont de pensées simplistes qui leur font rater l’étape de la réflexion critique, le libre examen. Mais cette réaction
évite les blessures narcissiques.
2. La philosophie existentielle
Lorsque l’espace des libertés est fini, si on a trouvé des solutions aux problèmes politiques, si des lois ont été
promulguées contre les distinctions arbitraires, la philosophie individuelle doit aussi trouver sa place. C’est elle qui définit
les voies que l’on choisira, c’est elle qui traduit le degré de liberté individuelle. (Ex : LE MARIAGE. Avant, il y a 100 ans,
les mariages étaient arrangés, il n’existait aucune liberté. Maintenant, on n’est même plus obligé de se marier pour vivre
ensemble et on a voté le mariage des homosexuels) Mais la liberté individuelle n’est pas toujours bien ressentie, elle est
angoissante.
Qu’est-ce qui inquiète dans la liber ? On n’aime pas forcément décider soi-même car on est responsable du résultat des
décisions que l’on a prises. Ne pas prendre de décision bloque les situations mais assure de ne pas faire de mauvais choix.
Les gens sont donc naturellement tentés de laisser d’autres décider à leur place.
Le rôle de la philosophie existentielle est d’apprendre aux gens combien la liberté est angoissante mais combien elle vaut la
peine, combien il faut rejeter toutes ces fuites de l’angoisse de la liberté que sont les drogues, le conformisme, l’habitude…
3. Les philosophes de la liberté
Les philosophes de la liberté ont un ton angoissé. Ils dénoncent le fait que, bien qu’il semble mieux que le régime politique
accorde un maximum de liberté, les gens préfèrent des régimes autoritaires qui imposent une voie qu’il ne faut donc plus
chercher.
Sartre : est un philosophe de la liberté, du XX° siècle. en 1905 à Paris, mort en 1980. Il s’est engagé politiquement, a
écrit différents essais « Carnets de la drôle de guerre ».
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Il écrit un roman « La Nausée » en 1938, dont le héros, un homme d’une trentaine d’année lui ressemble énormément et qui
décrit l’accession à la liberté. En 1968, il publie « Les mots », une autobiographie qui raconte son enfance, sans avoir connu
son père, élevé par son grand-père à la personnalité écrasante. Il y développe sa recherche d’identité, notamment dans
l’anecdote d’une réception, lors de sa pré-adolescence (moment il souffre particulièrement de son physique disgracieux)
son grand-père a invité le gratin du village. Sartre déambule dans les pièces. Sa présence est bienveillamment acceptée,
sans être reconnue, pour autant. Lorsqu’il entend que toute l’assistance attend un certain Simoneau (éminent professeur de
son état) qui est en retard. Ce monsieur qui paraît si nécessaire au groupe représente l’idéal de l’enfant, le statut auquel il
aspire. Il est encore trop jeune pour savoir qu’il doit payer pour atteindre son idéal : il doit reconnaître et adopter les valeurs
du groupe puis répondre aux attentes des gens dont il veut être reconnu.
Le problème des non-choix
Notion de nécessité opposée à la contingence : Simoneau est nécessaire, indispensable au groupe qui s’écroule s’il est
absent (comme un auditoire se déplace sans raison, si le professeur ne vient pas). Sartre lui est présent, mais son absence ne
change rien.
Céline a traduit cette notion dans une pièce « L’église » : « C’est un garçon sans importance collective, c’est tout juste un
individu ». Sartre pense justement qu’il n’a pas de signification dans l’existence. Il va rechercher ce qui donne tant de
« puissance » à cet inconnu et va vouloir s’y identifier. (Il devient lui aussi professeur connu, demandé. A 33 ans, il a
émergé de son groupe social pour atteindre une reconnaissance quasi mondiale.)
A 33 ans, Sartre commence à se demander pourquoi il a bâti sa vie sur ce non-choix. Le malaise s’est installé mais il est
difficile à identifier car il sous-entend des choix difficiles, un recommencement à zéro, or il est bloqué dans l’immobilisme.
Ces deux romans sont l’expression de son cheminement : « Quel usage vais-je faire de ma liberté ? »
En essayant de s’approprier les attributs d’un autre, Sartre n’exerce pas son droit au choix libre, il abandonne sa liberté. De
l’extérieur, il paraît avoir réussi mais il n’est pas heureux. Il existe tout un espace de liberté qui n’a pas été exploité. Sartre
pense que les ennemis ne sont pas les autres mais nous même. Il n’y a pas moyen de changer les autres mais on peut un peu
changer soi-même.
L’effet « vitrine »
Sartre souhaite occuper la place de Simoneau. Cette place lui est interdite. Il éprouve de la fascination pour ce qui est
interdit. C’est « l’effet vitrine », un obstacle entre soi et l’objet convoité. La perversité, c’est qu’inaccessible, l’objet est
convoité mais si on enlève la vitre, il ne présente plus aucun attrait. On ne désire que ce qu’on ne peut avoir. Pourquoi
sommes-nous attirés par les choses et les gens qui nous sont interdits ?
Groucho Marx (cinéaste des années 30/40) parle de la « soupe aux canards », phrase reprise par Woody Allen qui met en
scène un petit juif new-yorkais torturé qui rêve de rentrer dans un club de grands blonds baraqués alors qu’un club de
personnes lui ressemblant ne l’attire pas du tout. Lorsqu’il arrive à être admis dans cette élite, ce club ne lui plait plus, il se
rend compte que les gens qui en font parties n’en valent pas la peine, au fond. Après quoi, il se remet à fantasmer sur un
autre club ! C’est linterdit qui suscite le désir.
Le piège
Dans l’idée de s’intégrer à un groupe, il y a un « pré-requis ». Préalablement à cette envie, il faut que ce groupe ait de
l’importance, de la valeur pour l’individu, avant que cet individu ne souhaite en devenir le moteur. Cela se joue à tous les
niveaux, familial, scolaire, communal, national, mondial. Le piège, c’est qu’on doit faire de nombreux sacrifices pour
obtenir toute reconnaissance. Si on n’est pas à sa place, le malaise s’installe. Mais il est difficile à identifier et à accepter
puisqu’il implique qu’on balaie tous les efforts consentis par le passé.
N.B. : la névrose, c’est se présenter aux autres différent de ce que l’on est, chercher à occuper une position qui est interdite,
or l’interdit est valorisant.
La redécouverte de l’espace de liberté
Comme Roquentin ne peut accepter qu’il se soit piégé, la vérité va s’imposer à lui de façon détournée. Cette découverte
commence par le questionnement : qu’est-ce qui l’a poussé à vouloir s’identifier à quelqu’un qu’il ne connaît pas ? Il doit
reprendre sa liberté, renoncer à sa profession, sa place dans la société, il a peur. Il commence à écrire dans un journal « sa
nausée », les symptômes, les signes de son malaise (le caillou, la main de l’autodidacte, les bretelles, les racines du
marronnier) contre sa satisfaction. Et ce qui le comble de ravissement (le morceau de Jazz : « One of this days you’ll miss
me, honey »).
En psychanalyse (cherche les symptômes d’une désorganisation difficile à mettre en évidence car refoulée dans
l’inconscient en faisant parler l’analysant tellement qu’il perd la maîtrise de cet inconscient qui afflue dans son discours.
L’analyse fait réapparaître les refoulements par la parole), Roquentin aurait parlé jusqu’à se saouler et aurait fini par
nommer plusieurs fois Simoneau. Après quelques essais mal reçus, l’analyste aurait décrypté l’importance de ce personnage
pour Roquentin et lui aurait fait comprendre que ces réactions au caillou, aux bretelles … étaient des symptômes de rejet du
monde choisi, des formations de compromis entre les désirs conscients et inconscients. Le compromis satisfait la tendance
inconsciente tout en ménageant le conscient. Sans compromis, la situation explose.
L’agressivité est la réaction quotidienne à des conflits plus ou moins inconscients. On ne peut pas exprimer les vraies
raisons de mécontentement de peur des conséquences. Roquentin attaque des éléments secondaires à son milieu car sa
tendance consciente veut continuer à exister dans ce monde-là.
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A la fin de la nausée, Roquentin conclut : « Je suis de trop, de trop pour l’éternité », alors que l’enfant des « Mots » disait
« je suis de trop dans mon milieu mais ce n’est que temporaire, jusqu’à ce que je devienne un Simoneau. »
Assumer sa liberté, c’est assumer qu’on n’est indispensable nulle part. La dernière phrase des « Mots » : « Que reste-t-il ?
Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui. »
La puissance de l’interdit et l’ennui
Stendhal (Souvenirs d’égotisme) écrit « Le rouge et le noir ». Julien Sorel, ambitieux précepteur sans reconnaissance sociale
n’accepte pas la hiérarchie de la Restauration (Napoléon). Il est l’amant de madame de Rhénal dont il s’occupe des enfants
jusqu’à ce que le mari de celle-ci le chasse. Monté à Paris, il est engagé par le Marquis de La Mole. La fille de celui-ci est
très belle et est habituée à recevoir beaucoup de marques d’admiration. Elle ne fait pas attention à l’insignifiant Sorel qui
pour conquérir cette personne intouchable joue les indifférents. La vanité de la jeune fille est piqe au vif et elle lui cède,
pour obtenir ce qui est hors de portée.
C’est l’illustration de la puissance de l’interdit.
Aussitôt son désir assouvit, Mathilde de La Mole se détourne de Julien pour retourner à ses mondanités. Julien décide de
jouer la carte de la jalousie pour la ramener à lui.
Parfois l’objet du désir est réellement voulu, il faut alors tenter de l’obtenir rationnellement.
Schopenhauer disait : « Dans la vie, au fond, il y a le désir et l’ennui. » Le désir est douloureux car il est l’expression d’un
manque prolongé. L’ennui arrive lorsque le désir a été assouvi une fois. L’ennui aussi est douloureux. Après l’ennui, naît un
nouveau désir…
Proust, « À la recherche temps perdu », cette œuvre est très autobiographique. Dans « un amour de Swan », le héros, juif
fortuné du 1siècle, bien reçu dans l’aristocratie catholique, est fasciné par la peinture de la Renaissance mais n’aime pas
celle de son temps. Sa vie est très stratifiée. Il fréquente les salons du quartier Saint Germain, ceux obligés duchesse de
Guermantes ceux plus amusants madame Verdurin. Mais il ne peut dire dans le premier qu’il se rend dans le second ! Il
a rencontré Odette de Crécy qu’il qualifie de belle mais « pas son genre ». Elle est toujours pour l’écouter, Swan s’y est
habitué jusqu’au jour où elle disparaît. Il fouille tout Paris pour la retrouver. Tout à coup, elle lui est interdite et il
commence à souffrir pour cette femme qui ne l’attirait pas, avant. Il se souvient l’avoir aperçue dans « une attitude lui
rappelant un tableau de Boticelli ». Odette « devient » un personnage de la Renaissance. Quand il la retrouve, il
l’accompagne partout. Tout est beau, la musique est belle. Il est toujours à côté d’elle, la surveille. Elle se refuse à lui, il fait
des folies pour elle. Tout cela pour un désir suscité par des choses artificielles. La puissance de l’interdit.
Dans « La prisonnière », Proust raconte que, jaloux, complètement malheureux, il enferme Albertine. C’est un exemple
pathologique, comme le jeune Sartre qui veut devenir Simoneau. Roquentin, dans « la nausée », est malheureux et négocie
des compromis médiocres pour éviter que ces désirs contradictoires ne le mènent à une plus grande violence. (Lire ces
exemples dans « les fantômes de la liberté »). Quelqu’un de vertueux fait des compromis pour éviter la violence. Chez
quelqu’un dominé par les défauts, les compromis gèlent la situation, empêchent les changements. « Les compromis à la
Belge », caractéristiques de notre pays, alliés à la complexité de notre constitution, ont permis en Belgique de vivre sans
crise de violence mais en dépensant beaucoup d’énergie à des bêtises, comme la gestion de la situation des francophones en
communes à facilités, par exemple (obtenir les documents en français).
Le conflit en Yougoslavie a pris sa source à la fin de l’empire Austro-hongrois. Par un régime répressif, Tito a contenu les
poussées centrifuges de la Croatie, la Serbie et la Macédoine. Le groupe était multiculturel, mais il y avait des échanges, des
mariages interethniques. Fin 80, début 90, les Serbes, majoritaires en Yougoslavie, ont jola carte nationaliste. Croatie et
Bosnie Herzégovine ont réclamé leur indépendance. S’en est suivi une période de repli sur soi. Une forte minorité de Serbes
(orthodoxes) coexistaient avec des Croates (catholiques) et des musulmans. Milosevic a mis au point un plan d’épuration
ethnique et les Serbes ont assiégé Sarajevo. Dans un premier temps, la communauté internationale n’a pas bougé. La
diplomatie ayant échoué, il a fallu envoyer un soutien armé pour stopper Milosevic et ses troupes et arrêter la violence.
Maintenant, ces pays sont en «paix ». Ils doivent redécouvrir la richesse de leurs cultures grâce à des compromis. Mais ils
resteront étrangers les uns aux autres, sans vrai réconciliation possible tant qu’on ne prendra pas le problème à la base, dans
l’enseignement. C’est à l’école que le message de tolérance et d’ouverture à la différence doit passer. C’est à l’école que
l’on permet ou que l’on interdit la possibilité de synthèse. Pour l’instant, les mentalités n’ont pas changé mais le contexte a
changé : des soldats empêchent les gens de se tuer.
Bien que profondément pacifistes, nous reconnaissons l’existence de la guerre et sa nécessité pour défendre les plus faibles.
« Saddam Hussein est une calamité, un dictateur qui sévit sur un pays riche, avec une bande de gangsters. »
La synthèse, alternative aux compromis
On rencontre des problèmes à tous les niveaux, en international, en communautaire, en individuel. Les compromis ne sont
des solutions que dans la mesure ils évitent pire, l’explosion, une solution à moindre mal. Faire comprendre aux Serbes
et aux autres que leur opposition est néfaste, que rien n’est pire que se battre pour des raisons ethniques, c’est les ouvrir au
fait que leurs forces ne sont pas antagonistes et leur permettre de travailler ensemble à former quelque chose de plus solide.
La synthèse est une sorte d’unité supérieure. Après tout, les intérêts en jeu ne sont pas contradictoires. Les différences sont
enrichissantes. Des personnes qui ont vécus des expériences différentes ont quelque chose de plus à apporter au groupe, au
sein d’un débat critique et respectueux. La synthèse, c’est l’ouverture à l’autrement, et par même le contournement des
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