Cours du 4 octobre 2007 – Aborder La Bible – Notions préliminaires – Histoire d’Israël/1 – Page n°5
en a autant que de livres bibliques. Donc lorsqu’on essaie de comprendre un peu ce Dieu, ce
dieu des juifs, il faut se dire : « attention, dans ce livre écrit à telle époque, dans tel contexte, à
l’époque où les juifs ont tel problème, quand ils sont amenés à relire ce qui vient de leur arriver,
ils découvrent telle facette de Dieu. » Mais le Dieu de la Genèse n’est pas le Dieu de Jésus ; le
Dieu des prophètes n’est pas le Dieu des évangélistes ; bien sûr, c’est toujours le même Dieu
mais il a une multitude de facettes. Ça, c’est très intéressant parce que cela veut dire qu’on ne
met pas la main sur Dieu ; Dieu, de toutes façons, il est toujours au-delà de la révélation qu’il fait
à son peuple, non pas parce qu’il lui fait des cachoteries mais tout simplement parce que l’esprit
humain ne peut pas contenir la transcendance en totalité, et donc l’homme chemine avec Dieu
mais rien n’est jamais figé. Et si un jour, vous tombez sur un livre de quelqu'un qui dit : « Dieu, il
est comme ça ; j’en ai fait le tour, il est comme ça et pas autrement », de grâce, fuyez, vous êtes
là dans une espèce de lecture fondamentaliste, voire fanatique, de Dieu. On ne met pas la main
sur Dieu, ça, c’est le grand apport de La Bible. Si bien que, lorsque vous allez refermer La Bible
et que vous êtes au dernier verset de l’Apocalypse, je ne dis pas que vous ne savez toujours pas
qui est Dieu mais c’est un peu ça quand même : vous avez tellement vu de visages de Dieu que
vous rendez compte que, bien sûr, sur un plan spirituel, La Bible vous a apporté plein de choses
mais, au bout du compte, qui est Dieu ? On ne sait pas. Et l’affirmation, y compris dans le
Nouveau Testament, reste valable. Lorsque Jésus demande à ses disciples : « Et pour vous, qui
suis-je ? », il n’y a pas de réponse ; après, on est dans une liberté de la foi mais Dieu, il apparaît
dans le livre, et il apparaît différent à chaque fois, il est multiforme.
Ce terme de révélation m’amène à vous présenter la notion suivante : est-ce que La Bible est un
livre inspiré ? On voit effectivement le problème : on a un peuple, des êtres humains, des Juifs,
puis on a Dieu, Dieu qui est la transcendance, qui est l’autre ; comment Dieu va-t-il se faire
comprendre des hommes parce qu’il y a une différence de nature : les hommes sont des
hommes, Dieu est Dieu ? Comment les hommes vont pouvoir avoir l’intuition de la révélation, et
comment vont-ils pouvoir dire ça avec des mots ? Comment vont-ils pouvoir d'abord constituer
des récits et mettre ensuite ces récits par écrit ? On dit alors que La Bible est un livre inspiré. Ce
qui veut dire que, entre Dieu et l’homme, il y aurait un intermédiaire qui traduirait le message
divin en termes humains ; cet intermédiaire, c’est l’Esprit de Dieu lui-même. Cet Esprit de Dieu,
on le trouve dès le début dans La Bible ; dès le récit de la création, dès le deuxième verset, on
nous dit : « Et l’Esprit de Dieu planait sur les eaux. » Cet esprit qui accompagne, c’est un esprit
divin mais qui peut atteindre les hommes, et donc les rédacteurs de La Bible se disent qu’il suffit
d’être attentif à l’esprit pour savoir quoi dire et savoir quoi écrire ; c’est quelque chose qui
fonctionne ainsi : on se met sous le don de l’Esprit et on écrit. On écrit comme ça vient. Mais,
naturellement, comme on est dans l’histoire, l’Esprit de Dieu ne dit pas une fois pour toutes ce
qu’il faut écrire et ce à quoi il faut croire ; l’Esprit marche avec les hommes, c'est-à-dire il inspire
les hommes petit à petit ; donc l’histoire de Moïse, elle est inspirée mais pas comme celle
d’Abraham ; l’histoire d’Isaïe, de Jérémie, est inspirée encore un peu autrement ; puis l’histoire de
Jésus ou de Saint Paul est inspirée un peu encore autrement ; c'est-à-dire que l’Esprit se donne
dans l’histoire de l’homme, c’est donc une révélation qui est là aussi progressive. On voit assez
bien ce qu’est cette inspiration biblique quand on l’oppose à la révélation coranique, on dit :
« dans Le Coran, Dieu se révèle à Mahomet », c'est-à-dire que, dans un seul livre, en une seule
fois, il lui donne la totalité de quelque chose qui est parfait. Très bien, c’est une démarche tout à
fait légitime. Dans La Bible, on n’a pas ça, c’est légitime aussi. C’est un livre qui est simplement
inspiré ; ce n’est pas Dieu qui parle, c’est Dieu en fonction de l’homme ; c’est l’Esprit de Dieu en
fonction de l’histoire de l’homme ; c’est une approche plus historique, plus humaine.
Alors - me direz-vous - quand on n’a pas la foi juive ou chrétienne, quand on est athée ou quand
on est musulman ou bouddhiste, est-ce qu’il peut être intéressant de lire La Bible puisque, bien
sûr, parler d’un livre inspiré, ça suppose de croire en Dieu et à cet Esprit de Dieu ? Je vous
rassure, d’autres approches sont possibles, on peut très bien dire : La Bible, c’est l’expression du
génie d’un peuple ; de même que les Grecs ont inventé la philosophie et la science, que d’autres
civilisations ont inventé plein de choses dans le domaine de l’art, de la médecine, de la science,
on peut dire que le génie du peuple juif, ça a été de nous proposer une aventure spirituelle sans
précédent mais, derrière ce peuple, on peut mettre Dieu bien sûr mais on peut très bien mettre
l’Homme - avec un grand H - tout simplement. Cela a eu du mal à s’installer mais, aujourd'hui,
considérer effectivement La Bible comme un trésor humain, c’est assez courant et on peut tout à