LA PRISE EN CHARGE RESPIRATOIRE DU PATIENT ATTEINT DE MALADIE NEURO MUSCULAIRE (MNM) La prise en charge respiratoire revêt la même importance que la prise en charge orthopédique lorsqu’on assure la kinésithérapie d’un patient atteint de MNM. Le caractère chronique de la MNM entraîne une prise en charge au long cours : attention à la routine ! Elle doit être adaptée à l’âge du patient, à l’évolution au long cours de sa MNM mais aussi aux épisodes respiratoires aigus intercurrents. Le traitement peut être préventif ou curatif, en tout cas, fonction du bilan établi régulièrement. L’écoute et l’observation du patient - essentielles à chaque séance – permettent de noter fatigue, douleur accrue, trouble de déglutition naissant ou évolution de l’insuffisance respiratoire. 1- BILAN Il est fonction de la physiopathologie et à l’évolution propre à la MNM, des possibilités fonctionnelles, des évènements pathologiques intercurrents (type infection respiratoire, intervention chirurgicale …). Le bilan tient compte des muscles déficitaires, des anomalies de croissance pulmonaire, des déformations du rachis et du thorax, des troubles de déglutition. Afin d’affiner son bilan, le kinésithérapeute peut avoir à sa disposition certains examens complémentaires réalisés au moins 1 fois par an voire plus : exploration fonctionnelle respiratoire (EFR), polysomnographie, oxymétrie nocturne, gazométrie diurne ou de fin de nuit. a. EXAMEN CLINIQUE STANDARD Il est réalisé sans corset, assis et/ou couché. Il convient de noter : - le poids et la taille : paramètres importants - fréquences respiratoires et cardiaques au repos, à l’effort et capacité de récupération - saturation en oxygène au repos, à l’effort - les déformations thoraciques et rachidiennes : l’hyper lordose diminue la synergie abdominaux/diaphragme. - les anomalies des mouvements respiratoires - les asynergies musculaires - toux ou puissance du cri ou des pleurs chez le bébé ou le jeune enfant - les signes de dyspnée : à la marche si sujet encore marchant, à la parole … Auscultation trachéale, pulmonaire à volume courant normal et à haut volume Recherche de signes d’encombrement, d’asymétrie du murmure vésiculaire Emmanuelle PACI – Janvier 2005 Module de Neurologie – 2ème Année 1 Recherche des signes d’aggravation de l’insuffisance respiratoire = hypoventilation alvéolaire chronique : - sommeil non récupérateur, somnolence diurne - ronflements et apnées du sommeil (en particulier chez le sujet atteint de myopathie de Steinert) - changements de position plus fréquents - sudation importante - céphalées au réveil b. EXAMENS COMPLEMENTAIRES Si le sujet présente une infection respiratoire ou si l’atteinte neuromusculaire est importante, rechercher les signes de décompensation respiratoire tels que : - polypnée ou bradypnée - tachycardie - signes de lutte : battements des ailes du nez, tirages, sueurs … - angoisse majorée - voire troubles de la conscience 2- MOYENS THERAPEUTIQUES ET MODALITES a. PASSIF : CHEZ LE PETIT ENFANT La technique de choix chez le petit enfant est l’augmentation de flux expiratoire (AFE) suivie de la toux provoquée avec aide à la toux. Ces manœuvres seront suivies en cas de sécrétions abondantes par une aspiration naso-pharyngée. b. ACTIF Lorsque le sujet présente des capacités musculaires suffisantes, il est nécessaire d’entretenir les muscles respiratoires par un travail actif. - ventilation dirigée à grand volume courant et fréquence basse - apprentissage du contrôle de l’expiration - apprentissage de l’aide manuelle à la toux Si le sujet est un enfant, le travail par modelage thoracique est nécessaire jusqu’à la fin de la croissance. Il permet la mobilisation et l’expansion de la cage thoracique et limite voire évite la rétraction des muscles intercostaux. c. INSTRUMENTAL DE TYPE RELAXATEUR DE PRESSION Quand les possibilités musculaires sont insuffisantes, il est préférable de réaliser un travail respiratoire instrumental. - Action préventive Chez l’enfant atteint de myopathie congénitale ou d’amyotrophie spinale infantile, ce travail est débuté le plus tôt possible afin d’obtenir une croissance thoracopulmonaire la plus harmonieuse possible. Chez l’enfant atteint de myopathie de Duchenne de Boulogne, le travail instrumental est débuté peu après la perte de la marche. L’enfant présente alors une perte importante de capacité vitale. Emmanuelle PACI – Janvier 2005 Module de Neurologie – 2ème Année 2 - Action curative En cas d’infections respiratoires aiguës, les séances de travail instrumental seront courtes, répétées et destinées au désencombrement : l’augmentation du volume inspiré améliore l’efficacité de l’AFE réalisée de façon concomitante et facilite l’expectoration. Modalités de travail : - interface fonction de l’âge et de l’atteinte : embout buccal ou masque nasobuccal - sangle abdominale complémentaire dans certains cas (amyotrophie spinale infantile) - séance de 15 à 20 minutes 1 à 2 fois par jour - expansion thoracique et hyper insufflation pulmonaire : volume courant multiplié par 1,5 à 2,5. Ouverture de territoires pulmonaires peu ou mal ventilés Dans certains cas, par exemple intervention chirurgicale, la kinésithérapie instrumentale peut être proposée temporairement (préparation préopératoire, phase post opératoire immédiate) d. AUTRES - vibrations manuelles ou mécaniques Elles fluidifient les sécrétions, elles sont à effectuer sur le temps expiratoire et nécessitent des manœuvres d’expulsion. - percussions intra pulmonaires En pression positive. Exemple : le Percussionnaire ® - exsufflateurs Ils permettent une aide à l’expectoration sans aspiration. Exemple : le Cough Assist ® - ventilation non invasive : VNI Elle est mise en place pour les sujets présentant une insuffisance respiratoire chronique. Elle est peut être aussi utilisée en période aiguë (décompensation respiratoire, encombrement majeur avec hypoxie/hypercapnie, phase postopératoire d’arthrodèse rachidienne pour cure de scoliose …) Il s’agit d’une ventilation à volume courant normal pour le sujet, d’usage nocturne (au moins 8 à 10 heures). 3- CONCLUSION Le kinésithérapeute doit tenir compte tout de long de sa prise en charge du caractère chronique de la MNM et de l’évolution vers l’aggravation de la fonction respiratoire (notamment pour les maladies diagnostiquées chez l’enfant). Références : Modalités, indications, limites de la rééducation dans les pathologies neuromusculaires non acquises (Conférence de consensus - 26 et 27 septembre 2001) – www.anaes.fr Emmanuelle PACI – Janvier 2005 Module de Neurologie – 2ème Année 3