b) Le transfert du risque (de défaut de paiement) possible grâce à la titrisation
La relation entre la banque et ses emprunteurs est traditionnellement une relation de long terme. Pour éviter le défaut
de paiement des emprunteurs, la banque doit alors évaluer correctement le risque de crédit, c’est-à-dire la capacité des
emprunteurs à la rembourser sur longue période.
Dans le contexte de très bas taux d'intérêt entretenu par la Federal Reserve Bank des États-Unis pendant les années
précédant la crise, l'incitation à prêter et à emprunter était grande.
Nombre de banques ont prêté avec moins d'attention concernant la qualité des crédits qu'elles consentaient. Un des cas
les plus caricaturaux de cette dégradation de la gestion du risque est celui du subprime aux États-Unis. Ces prêts
hypothécaires étaient accordés à des particuliers trop modestes et leurs revenus leur permettaient difficilement
d'honorer les remboursements. Pourquoi les banques prêtaient-elles malgré tout ? Les établissements de crédit
spéculaient sur le fait que la hausse des prix de l'immobilier continuerait indéfiniment et que cette dernière sécuriserait
ces types de prêts (grâce à l'accroissement de valeur des immeubles pris en gage).
1. Qu’est-ce qu’une hypothèque ? Comment fonctionne un prêt hypothécaire ?
Les institutions de crédit ont eu par ailleurs recours à la titrisation : la banque initiait mais vendait ensuite les crédits
qu’elle avait accordés sous forme d’obligations (les CDO : collateralised debt ogligations) sur le marché financier.
Des centaines de crédits se retrouvaient donc agrégés en paquets et transformés en titres financiers. C’est ce qu’on
appelle la titrisation. Ce n’était donc plus les banques mais les acheteurs de titres subprimes qui se retrouvaient
désormais à assumer le risque d’un possible défaut de paiement des emprunteurs.
2. Le fait de pouvoir transférer le risque et de revendre les crédits incitait-il les banques à limiter ou à continuer de
fournir des crédits immobiliers aux ménages ?
3. Pourquoi peut-on parler d’alea moral à propos de cette situation ?
II – La séquence du choc systémique le plus récent d’origine financière
A – La contagion de l’économie réelle par la crise financière :
Le principal canal de transmission de la crise des subprimes à l'économie réelle est la contraction de l’offre de crédit
appelé « credit crunch ». Les banques ont en effet acheté massivement des subprimes. Mais avec l’effondrement du
marché immobilier américain et les défauts de paiement des ménages emprunteurs, ces titres perdent toute valeur au
point de les appeler des « actifs toxiques ». Sur le marché interbancaire, c’est la paralysie : les banques éprouvent les
plus grandes difficultés à trouver des liquidités car elles proposent en échange des titres jugés douteux ou pourris (junk
bounds). De même, leur santé financière étant altérée, elle ne peuvent pas faire appel à de nouveaux fonds propres :
personne n’a envie de devenir actionnaire d’une banque qui peut potentiellement faire faillite. Elles sont donc moins
en mesure d'octroyer des prêts aux entreprises et aux ménages. Le taux d'intérêt des prêts est relevé, car l'ensemble des
banques exige des primes de risque plus élevées en raison de la crise de confiance qui s'est installée. L'assèchement du
crédit réduit la consommation et l'investissement des ménages et des entreprises. Les petites et moyennes entreprises
notamment sont très dépendantes du crédit pour leur création et pour leur croissance (pour financer leurs
investissements suivants). Les entreprises sont également mises en difficulté par des problèmes de trésorerie car elles
ont de plus en plus de difficultés à emprunter de l'argent à court terme. Sans la possibilité de recourir à des emprunts,
une grande partie des ménages ne parvient pas à acheter un logement ou une voiture.
Nicolas Couderc, Olivia Montel-Dumont, Des subprimes a la récession, comprendre la crise, La Documentation française, 2009.
1. Représentez par un schéma l'enchaînement de la crise.
2. On parle de risque « systémique » ou d'« effet-domino » à propos crises financières. Montrez en quoi le reste de
l'économie (consommation, investissement, croissance, emploi, ...) est frappé à son tour par la crise financière.
3. Les ménages directement détenteurs de fonds placés dans des subprimes peuvent-il subir les conséquences de la
crise financière ? Quelle sera leur réaction en termes de propension à consommer ?
B - Il fallait sauver le soldat bancaire : « too big to fail » !
La banque américaine Lehman Brothers fait faillite en 2008. Comme on ne pouvait laisser le système s'effondrer au
risque de provoquer une dépression générale, les États et les Banques centrales ont massivement soutenu les banques
en difficulté.
L’Etat français par exemple a fait voté aux députés en octobre 2008 un plan de sauvetage des banques françaises : 40
milliards d’euros ont été versés aux différentes banques pour les recapitaliser (leur donner de nouveaux fonds propres)
et 320 milliards leur ont été prêtés dans le même but. L’ensemble des banques les avait remboursé en 2011. Par
comparaison, les deux plans de prêt à l’Etat grec représentaient 240 milliards.