Le contrôle a posteriori de la gestion financière I) Le contrôle des corps d’inspection. Si la plupart des ministères disposent de corps d’inspection interne, il existe deux corps à compétence universelle : - l’inspection générale des affaires sociales, IGAS, qui, en plus du ministère des Affaires sociales contrôle les organismes de sécurité sociale. - l’inspection générale des finances, IGF (création en 1831 ; 70 inspecteurs), qui en plus du MINEFI peut contrôler l’ensemble des comptables publics et la plupart des ordonnateurs des services et démembrements, et même à l’égard de personnes privées bénéficiant de fonds publics. Les visites de l’IGF se font sur place, en brigades. Les pouvoirs des inspecteurs sont importants (jusqu’à la suspension immédiate d’un comptable public). En pratique, les inspections sont trop rares et une grande part de l’activité de l’IGF relève de missions d’étude, de réflexion stratégique et de conseil, plus que de contrôle stricto sensu. Les corps d’inspection ne sont pas indépendants : leurs contrôles sont effectués à la demande et sous l’autorité des ministres (même si il y a une tradition d’indépendance). Suite à la remise du rapport de l’IGF, le ministre décide des suites à donner. Les plus grandes entreprises publiques et collectivités locales ont des services d’inspection internes. II) Le contrôle externe : les juridictions financières. Le champ de compétences des juridictions est large : l’ensemble des administrations publiques et des organismes subventionnés. Leur travail est double : répression et évaluation. 1) La Cour des comptes Compétence : - l’Etat et ses démembrements (Etablissements publics nationaux, sociétés contrôlées…) - la sécurité sociale - aide au parlement (demandes de la commission des finances) et au gouvernement dans l’exécution des LF et des LFSS. A METTRE A JOUR AVEC LOLF Le programme de contrôle est arrêté par le Premier président de la Cour des comptes en toute indépendance. De nombreux contrôles sont cependant rendus obligatoires par la loi : - contrôle annuel de l’exécution des lois de finances et des LFSS - jugement des comptes des comptables publics de l’Etat et des établissements publics nationaux - à partir de 2006 : certification des comptes de l’Etat, examen des résultats financiers ou non financiers (au regard des « projets annuels de performance » par exemple) Procédure des contrôles : - Les contrôles, confiés à une équipe de magistrats, se déroulent sur place, dans les organismes contrôlés, et sur pièces. Ils se terminent par la présentation d’un « rapport d’instruction » devant la chambre compétente de la Cour. - Une procédure contradictoire est ensuite engagée. Un rapport provisoire ou « relevé de constations provisoires » est transmis par la chambre compétente de la Cour à l’organisme contrôlé et à sa tutelle, afin de recueillir des réponses. Les différentes suites possibles d’un contrôle : - La communication des observations et recommandations de la Cour aux autorités concernées (ministre, commission des finances du Parlement, directeurs d’administration centrale…). - La publication des observations de la Cour dans un des rapports publics : le rapport public annuel de janvier, le rapport sur l’exécution des lois de finances en juin ou le rapport sur la sécurité sociale en septembre ; ou un des rapports publics annuels (entre 3 et 5 par an) consacré à un thème précis. - Les suites juridictionnelles : la Cour peut prendre un arrêté sur le compte de gestion de l’organisme contrôlé en mettant sa responsabilité en jeu ; la Cour peut ouvrir une procédure de gestion de fait ; la Cour peut transmettre des informations sur les faits délictueux au Procureur de la République en vue du déclenchement de poursuites pénales ou encore saisir la Cour de discipline budgétaire et financière. Les rapports de la Cour ont une influence certaine : ils ont ainsi poussé à le refonte du secteur de la sécurité sociale (en 1999, le Cour note que 2/3 de ses propositions sont mises en œuvre au bout de deux ans) et à la réforme des régimes indemnitaires dans les ministères (2000 2001) La procédure à la Cour des comptes est écrite et contradictoire. La procédure secrète à la Cour des comptes est-elle contraire à l’art 6.1 de la CEDH ? 2) Les chambres régionales des comptes et le contrôle a posteriori Compétence : - les collectivités territoriales - les démembrements (EP locaux, EPCI, SEM, organismes subventionnés par les collectivités). Les contrôles : - Le programme est déterminé par le président de la chambre régionale des comptes - Les contrôles se déroulent sur place et sur pièces et se concluent par un rapport d’instruction qui fait l’objet d’une délibération de la Chambre. - Ensuite, un « rapport d’observations provisoires » est transmis à l’organisme contrôlé pour obtenir ses réactions - A l’issue de la phase contradictoire, la Chambre arrête un « rapport d’observations définitives » (environ 800 par an), communiqué à l’organisme et systématiquement publié. Le rapport doit faire l’objet d’un débat devant l’assemblée délibérante de la collectivité. - Des suites juridictionnelles sont possibles : arrêts rendus sur les comptes des comptables publics, procédure de gestion de fait, saisine du Parquet judiciaire ou de la Cour de discipline budgétaire et financière. 3) Note sur l’organisation des juridictions financières Les magistrats financiers sont inamovibles. La Cour des comptes - Création en 1807 - Fonction à la fois juridictionnelle (contrôle des comptes des comptables publics) et de contrôle de la gestion publique. - Nouvelles compétences à venir en 2006 : la certification des comptes de l’Etat et le contrôle de la performance - La Cour compte près de 200 magistrats, 50 rapporteurs et 350 assistants et conseillers administratifs. Le Premier président, le procureur général et les présidents des 7 chambres sont nommés par le gouvernement. Les Chambres régionales des comptes - Création en 1983 pour renforcer le contrôle a posteriori des collectivités - Il y a 26 chambres régionales et territoriales (prise en compte des DOM TOM). Elles comprennent 350 magistrats et 800 assistants. Les Chambres sont des structures de petites tailles. Les présidents des chambres régionales sont membres de la Cour des comptes. Liens Cour des comptes / Chambres régionales - La Cour est le juge d’appel des Chambres en matière juridictionnelle (jugement des comptes des comptables) - Cour et Chambres peuvent mener des enquêtes communes sur certaines thématiques communes (fonction publique). - Le Premier président de la Cour gère les effectifs et moyens de l’ensemble des juridictions financières. III) Objectifs et limites du contrôle de la gestion financière. D’une façon générale, l’efficacité des contrôles a posteriori est réduite, du fait de la faible fréquence des contrôles. Face à un champ de compétences immense, les juridictions financières sont obligées de se concentrer sur les contrôles obligatoires ou à fort enjeu financier. Les collectivités territoriales les plus importantes ne sont contrôlées que tous les quatre ans en moyenne par les Chambres. Quant aux corps de contrôle internes, ils n’effectuent que des contrôles ciblés. 1) Le contrôle de régularité - - Il s’agit de vérifier si la comptabilité est tenue conformément à la réglementation en vigueur, si l’autorisation budgétaire a été respectée, si le Code de marchés publics a été correctement appliqué… Ce contrôle reste un contrôle essentiel. 2) Le contrôle de la qualité de gestion - Ce contrôle répond à des critères d’économie (appréciation moyens/coûts) et d’efficience (appréciation activité/moyens). - Ce contrôle prend une importance croissante. - Ex : contrôle des chambres sur les délégations de service public ; rapport de la Cour sur la sécurité sociale - Les juridictions formulent de plus en plus de recommandations, alors que les corps d’inspection mènent aujourd’hui une réelle activité de conseil. 3) Vers une véritable « évaluation des politiques publiques » ? - C’est ce que préconise la LOLF, qui met en place la définition systématique d’objectifs et d’indicateurs de résultat. - Le débat porte aussi sur le niveau de publicité du contrôle des juridictions financières locales (les observations des Chambres sont utilisées par l’opposition). - Le Conseil national de l’évaluation, créé en 1998 et rattaché au commissariat général du Plan, n’a que peu d’impact. IV) Une évolution récente : le renforcement du contrôle parlementaire. A) Le contrôle en cours d’exécution : le rôle des commissions des finances des assemblées - elles peuvent décider d’auditionner les ministres et les responsables d’administration (toutefois pas de sanction en cas de non présentation). elles sont destinataires des observations de la Cour des comptes, à laquelle elles peuvent demander des enquêtes elles reçoivent les rapports des contrôleurs financiers de chaque ministère. les rapporteurs des commissions des finances ont des pouvoirs d’investigation dans les services de l’Etat et les entreprises publiques, qui sont comparables à ceux des magistrats de la Cour des comptes. Ces pouvoirs sont renforcés par la LOLF (contrôles sur pièce et sur place.). Les rapporteurs peuvent interroger toute personne, qui sera déliée de l’obligation de secret professionnel. L’évolution du contrôle parlementaire - Jusqu’aux années 1990, le contrôle parlementaire est demeuré restreint. - 1998 : création, au sein de la commission des finances de l’Assemblée nationale, de la « mission d’évaluation et de contrôle » MEC, bipartisane. La MEC travaille chaque année sur des questions spécifiques. Elle procède à de nombreuses auditions et contrôles et rend chaque année quelques rapports, qui peuvent être utilisés lors du débat budgétaire. B) Le contrôle a posteriori : la loi de règlement LR. La LR clôt le cycle budgétaire par un acte juridique, accompagné de nombreuses annexes (rapport sur la LR, déclaration générale de conformité, établis par la Cour des comptes). La LR est votée en juin, avant l’examen du PLF N+2. Les innovations de la LOLF pour revaloriser la LR : - obligation du vote en juin à N+2. Ainsi, la LR devient un véritable élément du débat de la prochaine LFI. - la LR inclura, en plus des recettes et dépenses, les ressources et charges de trésorerie, présentées dans un tableau de trésorerie. La LR est établi sur une logique d’exercice, et non d’encaissement La LR régularise les situations (elle ratifie les modifications apportées par décret d’avance). La LR est accompagnée du compte général de l’Etat : balance générale des comptes, compte de résultat, bilan et annexes, évaluation des engagements hors bilan. La LR est accompagnée de « rapports annuels de performances » pour chaque programme (remplaçant les comptes rendus de gestion) Le contrôle des assemblées délibérantes des collectivités Au niveau local, les membres des assemblées délibérantes n’ont aucun pouvoir de contrôle direct sur les services des collectivités. L’examen des rapports des chambres régionales revêt donc un aspect décisif. La loi reconnaît seulement aux élus un droit d’information préalable sur les affaires qui font l’objet d’une délibération.