Cette vision d’une société régie par la gouvernance globale, fournit un
soubassement théorique à l’idéologie néo-libérale, qui considère que l’Etat, est
un obstacle aux libertés des acteurs économiques. Mais lorsque la société
civile, (que ce soit les ONG ou les entreprises) se substitue complètement à
l’Etat dans ses fonctions d’orientation, de sanction et d’opération, alors cela
constitue une atteinte à la souveraineté populaire et cela conduit à la disparition
des régulations par les pouvoirs publics.
Régulation conjointe internationale contre gouvernance globale
Les choix politiques des mouvements citoyens s’opposent à l’orientation de
la régulation mis en oeuvre dans le cadre de la gouvernance globale. Ils
cherchent au contraire à promouvoir un régime de régulation politique, qui
permettent à la fois la participation de la société civile aux régulations dé
l’économie (démocratie), sans évincer les pouvoirs publics garant de l’intérêt
général (politique social étatique).
La théorie de la régulation conjointe développée par Jean Daniel Reynaud
(1979, 1988), permet d’analyser plus précisément ce choix politique.
La régulation conjointe, résulte d’un compromis entre la régulation autonome
et la régulation de contrôle. Cette dernière est issue des acteurs disposant du
pouvoir de décider de la création de règles et d’en sanctionner leur violation, en
“s’efforçant de maîtriser la situation” (Reynaud J.D., 1991 : 123).
Dans le cadre de régulation autonome, les acteurs tentent de réguler par
eux-mêmes leurs univers. Dans le cas qui nous concerne, cela correspond aux
régulations des acteurs économiques par les acteurs sociaux (ONG,
Syndicats...). Les régulateurs de contrôle, lorsqu’ils observent des dérives par
rapport à leurs propres systèmes de normes, vont tenter de réorienter les
acteurs agissant dans le champ de la régulation autonome. Dans le cadre de la
mondialisation, les organisations internationales publiques (OIT, OMC, FMI,
Banque Mondiale, Union Européenne...), sont susceptibles d'exercer une
régulation de contrôle sur la régulation autonome des acteurs privés ONG,
syndicat, lobbies, acteurs économiques...).
C’est cette double régulation, que J.D. Reynaud nomme régulation conjointe.
Lorsqu’elle s’exerce au plan international, elle peut-être dénommée régulation
conjointe internationale. A ce niveau elle permet un arbitrage par les pouvoirs
publics. Sans elle, la régulation par la seule société civile risque de ne posséder
ni la légitimité démocratique, ni la capacité à préserver l’intérêt général, si les
lobbies industriels exercent leur domination.
La voie nationale, une alternative à la voie européenne ?
Dans la mesure ou le levier de l’Union Européen est inopérant actuellement,
certaines organisations citoyennes se tournent à nouveau vers leurs Etats.
Certains d’entre eux telle l’Allemagne et la France possèdent à la fois la
puissance économique et politique et disposent d’une tradition sociale étatique
forte. Mais peuvent-elles être utilisées comme des leviers pour réorienter la
politique de l’UE dans le monde ?