La théorie X-Barre La théorie X-Barre s'est développée sous l'impulsion de Chomsky. Une des observations essentielles de la grammaire est que certaines unités sélectionnent d'autres unités avec lesquelles elles fonctionnent (des mots sélectionnent tel ou tel complément). Ex1 : Mes amis comptent sur Luc. *Mes amis comptent Luc. Le verbe compter se construit avec un complément prépositionnel introduit par la préposition "sur". Ex2 : Jean précipite Jacques au fond du ravin. *Jean précipite au fond du ravin. Le verbe précipiter demande un COD et un complément de lieu. Pour expliquer la différence entre compter quelque chose et compter sur quelqu'un, on peut dire qu'il y a deux emplois de compter qui s'utilisent dans des constructions différentes. En syntaxe, on dira que les unités lexicales sélectionnent leur complément. La sous-catégorisation est une catégorisation en terme de catégorie grammaticale. Cette définition ne suffit probablement pas car il y a des notions sémantiques qui vont être liées aux questions de sous-catégorisation. Grammaire générative : interaction entre sémantique et syntaxe. SV V SN compter quelque chose V compter SV V SP SP P SN V compter compter sur quelque chose Le verbe compter peut avoir plusieurs constructions. Par exemple : SV V SN SP (précipiter quelqu'un quelque part) Le problème qui se pose est qu'il y a un grand nombre de règles pour le SV. Pour essayer d'y remédier on va utiliser la sous-catégorisation et le théta-rôle (ou rôle). On parle généralement de valence verbale. Lorsqu'on a par exemple le verbe "mettre" dans la phrase "Jean met le livre sur la table" : - en logique : mettre (Jean, le livre, la table) 3 arguments. Mettre propose une relation qui se passe entre trois termes. 1 - en linguistique : mettre (Agent, Thème, But). Mettre a une valence de trois. Agent, thème et but constituent la grille thématique. L'idée qui est apparue est d'essayer de faire le lien entre la grille thématique, le verbe et les problèmes de sous-catégorisation/de réécriture. À partir des années 1970, sous l'impulsion de Fillmore, un certain nombre de rôles thématiques ont été proposés. Quelques définitions : Agent : c’est l’entité qui fait délibérément une action ou provoque un changement d’état. Patient : c’est l’entité qui subit un changement d’état, qui est affectée par l’action décrite par le verbe. Expérienceur : c’est l’entité qui vit une expérience psychologique décrite par le verbe. Instrument : c’est l’entité utilisée pour effectuer une activité ou provoquer un changement d’état. Bénéficiaire/Destinataire : c’est l’entité qui tire un bénéfice de l’action/de l’événement décrit(e) par le verbe. Lieu : position de l’entité dont on parle. But : lieu final/point d’arrivée d’une entité se déplaçant. Source : lieu initial/point de départ d’une entité se déplaçant. Thème : c’est l’entité qui est déplacée par l’action décrite par le verbe, et toute entité située par rapport à un lieu de façon générale. Rien ne nous dit que ces neuf rôles thématiques existent ou soient utiles dans toutes les langues. Cependant, même si c’est imparfait, c’est important à deux points de vue : - pour la grammaire générative - lien entre le sens et la sous-catégorisation Ce n’est pas parfait mais on va essayer de fonctionner avec ça pour voir où ça nous mène. L’idée est de relier la grille thématique et la grille de souscatégorisation. mettre (Agent, Thème, But) [ ___ SN SP] On ne note pas le sujet dans la grille de sous-catégorisation. On laisse une place vide pour le verbe car les compléments ne sont pas forcément toujours à droite du verbe dans toutes les langues. 2 On imagine que dans notre lexique, on aura plusieurs niveaux : - niveau phonologique : /mεtR/ - grille thématique - grille de sous-catégorisation Pourrait-on avoir des principes d’assignation d’un rôle thématique à une catégorie syntaxique ? L’idée a été de généraliser cette notation pour les différentes catégories. Ex : - Jean est fidèle. - Jean est fidèle à ses convictions fidèle [ __ SPà] - indépendamment [ __ SPde] - proximité [ __ SPde] - de [ __ SN] (Jean rêve de ses vacances) - de [__ Vinf] (Jean rêve de partir) Est-ce que les éléments sont bien sélectionnés par le verbe ? Est-ce qu’ils doivent figurer dans la liste de sous-catégorisation ? On a un certain nombre d’éléments qui ont chacun leur importance. Notion de tête lexicale : les syntagmes ne se formant pas n’importe comment, il y a un lien entre un niveau logique, la grille thématique et la sous-catégorisation. Suivant qu’on a affaire à telle ou telle tête lexicale, on aura un syntagme différent. Un syntagme est un mot ou groupe de mots formé d’un item lexical appelé tête et de tous les satellites éventuels de cette tête. On prend des mots qu’on identifie comme têtes et on regarde ce que ces têtes projettent sur la phrase. Une phrase n’est grammaticale que si les règles énoncées dans le lexique sont respectées. L’idée est de construire une grammaire à partir des têtes. On imagine qu’il y a une opération qui assemble les éléments pour former un groupe. Comment s’assemblent les mots les uns avec les autres pour former un groupe/une structure ? Au lieu de partir du haut pour aller vers le bas, on part du bas pour projeter des structures. La forme des syntagmes Comment sont formés les syntagmes ? Ex : très content [de lui] 3 1. SA SAdv A SP SAdv content de lui très très 2. SA A’ A SP de lui structure plate structure hiérarchique 3. SA SAdv A’ SP A de lui très content Trois possibilités distinctes : quelle est la bonne ? Est-ce qu’on a des arguments linguistiques qui nous permettent de dire qu’une des solutions est meilleure que les autres ? Les syntacticiens ont proposé trois critères : - la structure choisie doit refléter le sens de la phrase l’organisation syntaxique doit être similaire à l’organisation sémantique. - le comportement : un groupe de mots forme un constituant s’il se comporte comme un unité face à certains phénomènes syntaxique (déplacement, pronominalisation, phrase clivées, etc.) - les compléments forment une unité syntaxique minimale avec la tête qui les sous-catégorise lorsqu’une tête sous-catégorise quelque chose, elle forme avec l’élément qu’elle sélectionne un constituant. content [ __ SPde] Jean est très content de lui mais François est peu content de lui. Jean est [très content de lui] mais François l’est [peu__] il y a un groupe qui fonctionne comme un constituant : [content de lui] C’est la structure 2. qui est conforme aux exigences de cette théorie. On peut proposer autant de règles de réécriture qu’on veut. Quel est le type de grammaire adéquat pour décrire les langues ? 4 Est-il possible que pour le français on ait plusieurs règles de construction pour les syntagmes ? Il y a des principes généraux pour construire les syntagmes, sinon il y aurait une multiplication incontrôlée des règles. Cadre proposé pour contraindre la forme des syntagmes théorie X-Barre : cadre général pour l’analyse des syntagmes. SA SV A V’ A’ SP V content de lui SN mange une pomme ressemblance entre SA et SV. Et-ce que c’est généralisable ? SN Det N’ la N SP proximité de… Tous les syntagmes sont construits autour d’un tête, d’un niveau barre auquel est accroché le complément. Si cette hypothèse est vraie ça explique qu’il n’y a pas besoin d’apprendre un type de construction pour chaque syntagme. Ça permettrait de réduire le nombre des choses à apprendre. Question de la théorie X-Barre : qu’est-ce qui se développe autour des têtes ? On aboutit à des modifications sur la façon de traiter les syntagmes, l’analyse des phrases, qui sont assez intéressantes. Si X est une tête donnée, alors on va prédire qu’il y a un niveau qui va regrouper cette tête et son complément (peu importe si le complément s’attache à gauche ou à droite). 5 SX = X’’ = X spec. X’ = X spec. compl. cadre générale de la construction des syntagmes de la théorie X-Barre compl. On part de la grille de sous-catégorisation pour projeter le syntagme. C’est l’hypothèse générale X-Barre. Potentiellement, pour tous les syntagmes et pour toutes les langues on aura ce modèle. En français, le moule pour les syntagmes est : SX schéma X-Barre pour le français spec. X’ X compl. Ex : japonais kobe ni iku /aller/ à/ kobe 6