Pour ceux qui s`intéressent aux notions de Macht et de Herrschaft, et

CHAPITRE 1 :
Sociologie politique de la démocratie représentative.
Séances 6, 7, 8, 9.
INTRODUCTION
I La sociologie politique classique de la démocratie représentative : une
sociologie post tocquevillienne
Quel est son objet (A ) et comment l’actualiser (B) ?
A. Son objet
1 L’étude de la politique en démocratie comme compétition ouverte et pacifiée
2 Socio-histoire de l’invention de l’espace public moderne
3 La démocratie représentative, produit d’une révolution politique ?
B. Comment actualiser cette vision tocquevillienne ou étudier le lien de représentation du
point de vue de tous les représenté(e)s
1 La démocratie représentative repose sur la croyance des citoyens dans la représentation
2 L’impensé du modèle égalitaire tocquevillien : la question de l’esclavage devenu le problème
noir puis le problème des minorités aux Etats-Unis :
3 Comment étudier les impensés de la démocratie représentative et ses arrières -cours,
II Qu’est-ce qui fonde et fait durer ce pacte de la représentation ?
A La socialisation politique.
1 De la socialisation en général à la socialisation politique républicaine en particulier.
a. Les lieux, les modes et les temps de la socialisation politique et ses effets (transmission des
préférences idéologiques)
b. Le rôle de l'école dans la fabrication des citoyens et de la transmission de la culture civique
nationale
2 Mais aussi qu’est-ce qui fait la force des représentants comment on fait les chefs et s’établit la
domination politique démocratique
B Le triomphe des urnes sur la rue
1 Comment s’acquiert le savoir faire pratique du métier d’électeur?
2 La sacralisation de l’acte de vote
III Qu’est-ce qui la menace ?
A Les dangers traditionnels et anciens
1 La fracture politique : La haine du parlementarisme
2 Une fracture politique liée à la fracture sociale.
B les dangers d’effondrement ou d’implosion
1 Fin des Etats-nations.
a. Les Etats-nations eux-mêmes peuvent se déliter et perdent leurs « bijoux de famille ».
b. De plus, Renan dit que les états nations disparaitront. Dès lors la menace est l'Europe.
2 La fin de la démocratie ou ses limites... pour un plan science po presque classique
" La démocratie ce sera quand les cuisinières pourront être chefs d'Etat." LENINE
« Et les épouses de Lénine, Trosky, Staline ?
Elles sont d’anciennes militantes pré-révolutionnaires. Il n’est donc pas question de les envoyer à
la cuisine. Elles continuent à collaborer mais leur activité est politiquement subalterne. L’épouse de
Lénine Nadiejda Kroupskaïa s’occupe d’éducation… et de l’épuration des bibliothèques comme
Maxime Gorki nous l’apprendra. La femme de Trotski ou de Kamenev- je ne sais plus laquelle des
deux, car Kamenev a épousé la sœur de Trotski- travaille dans les musées. Celle de Staline,
Nadiajda Allilouïva, appartient au// secrétariat de Lénine. Mais il n’y a pas de femmes au Comité
Central. Vous vous rappelez le mot de Lénine : « Chaque cuisinière doit apprendre à gouverner
l’Etat ». Nous tournions cela en la plaisanterie suivante : « Combien y-a-t-il de cuisinières au
Comité central ? ». Réponse : « Aucune ». Boris Souvarine in Boris Souvarine, Mikhail Geller,
Régis Gayraud, Sur Lénine, Trotski et Staline - 1990 - Soviet Union - 59 pages, 23 et 25
INTRODUCTION
Dans ce chapitre il s’agit d’envisager la démocratie représentative du point de vue des sciences
sociales et plus particulièrement de la sociologie. Quels modèles d’analyse de la démocratie
représentative propose la sociologie politique ? En quoi diffèrent –ils de l’analyse juridique ou
économiste de la démocratie ou encore de l’approche des historiens, des philosophes ? On verra au
deuxième semestre dans un chapitre miroir de celui-ci à la façon dont la théorie politique pense la
démocratie représentative y voyant le régime politique révolutionnaire, irrésistible et providentiel
auquel Tocqueville le premier nous initie.
« Une grande révolution démocratique, s'opère parmi nous: tous la voient, mais tous ne la jugent
point de la même manière. Les uns la considèrent comme une chose nouvelle, et, la prenant pour un
accident, ils espèrent pouvoir encore l'arrêter; tandis que d'autres la jugent irrésistible, parce qu'elle
leur semble le fait le plus continu, le plus ancien et le plus permanent que l'on connaisse dans
l'histoire. Tocqueville, De la démocratie en Amérique, Livre 1 1832 §1 et 2
Tocqueville propose une description sociologique de la démocratie américaine et il en fait la théorie
en même temps. Mais quelle sociologie et quelle théorie ? Elles ont ceci de commun que pour être
heuristique, pour nous contemporaines et contemporains du XXIème siècle, qui vivons dans un
monde globalisé, il faut que nous les lisions en dé(ethno)centrant son regard de sociologue du
politique, pour voir ce qu’il ne voit pas vraiment ou ne veut pas voir (disregard voir plus loin) et
n’écrit qu’entre les lignes, car son regard d’homme du 19ème siècle qui part aux Amériques pour
étudier les prisons (c’est un prétexte, quoique…) et le conduit à brosser un tableau complet de la
démocratie représentative comme modèle social et politique est daté et situé soit ethnocentré et
phallocentré.
La démocratie de Tocqueville comme modèle de société et comme modèle culturel (au sens de
civilisationnel) § 5 et 6
Parmi les objets nouveaux qui, pendant mon séjour aux États-Unis, ont attiré mon attention, aucun
n'a plus vivement frappé mes regards que l'égalité des conditions. Je découvris sans peine
l'influence prodigieuse qu'exerce ce premier fait sur la marche de la société; il donne à l'esprit
public une certaine direction, un certain tour aux lois; aux gouvernants des maximes nouvelles, et
des habitudes particulières aux gouvernés.
Bientôt je reconnus que ce même fait étend son influence fort au-delà des mœurs politiques et des
lois, et qu'il n'obtient pas moins d'empire sur la société civile que sur le gouvernement: il crée des
opinions, fait naître des sentiments, suggère des usages et modifie tout ce qu'il ne produit pas.
Faire une sociologie de la démocratie représentative en 2008 c’est donc décentrer l’approche et
relire les classiques de la sociologie électorale (de Siegfried au CEVIPOF en passant par F. Goguel)
et de l’anthropologie électorale et ce qu’ils disent du lien de représentation en partant des
principaux/les intéressées les representé(e) s qu’ils participent à l’exercice attendu de désignation
des représentants ou non soit qu’ils s’abstiennent soit qu’ils en soient exclus et ce qu’ils pensent
alors de la démocratie représentative nous intéressent beaucoup dans une perspective de sociologie
politique qui va de Weber à Gayatri Spivack en passant par Bourdieu et Gaxie
I La sociologie politique classique de la démocratie représentative : une
sociologie post tocquevillienne
Quel est son objet (A ) et comment l’actualiser (B) ?
A. Son objet
1 L’étude de la politique en démocratie comme compétition ouverte et pacifiée
La sociologie politique des élections étudie la politique dans son sens féminin, au sens de la
politique-domaine d’Aron. Il s’agit de la politique comme domaine de conflit verbal où les
compétiteurs rivalisent par les mots: les adversaires s’affrontent à coups de discours et de traits
d’esprit qui peuvent être mortels dans la société de cour au sens propre comme au sens figuré (cf le
film Ridicules). Les discours ont comme caractéristiques d'être performatifs : ils sont des actions.
Quand on arrête de se servir de discours, on passe à la guerre. Clausewitz dit ainsi que la guerre est
le prolongement de la politique par d’autres moyens. Ainsi, il retient une définition que l’on peut
considérer comme obsolète. La définition de la politique qu'il utilise est celle de la définition
antique de la cité démocratique.
Clausewitz considère donc que la guerre est le prolongement de la politique et inversement. Cette
définition grecque est obsolète du point de vue de la sociologie du politique car elle suppose un
espace unique qui rassemble tous les citoyens et seulement eux : l'agora. Or l’agora est le
rassemblement d'une minorité.
Même l’idée que la démocratisation des régimes politiques (Arendt, Elias, Tocqueville, Habermas)
passe par la constitution d'un espace public, de forums multiples réels (discussions et débats
publics) ou virtuels qui se constituent, non pas comme l’agora en un lieu physique unique pour une
minorité d’hommes libres de la même classe, mais à l’intersection de plusieurs catégories sociales
différentes (noblesse d'épée, noblesse de robe, bourgeoisie, et « neveux de Rameau » (Diderot)
écrivains et savants va-nu-pieds, précepteurs tels Pangloss dans Candide, ou précepteurs de cour
Bossuet -précepteur de M. le Dauphin- Descartes - proté à la cour de Suède- Rousseau -au
gouvernement de Genève peint sous les traites de son vicaire Savoyard-) semble obsolète.
2 Socio-histoire de l’invention de l’espace public moderne
Certes le XVIIIème siècle européen invente des espaces publics, les cafés et salons, où, par
exemple on parle littérature, prétexte pour que des littérateurs parlent de l'actualité sociale, politique
avec la bourgeoisie commerçante ou des serviteurs de l’Etat... Notre démocratie viendrait de cette
construction d’un espace public, qui se veut égalitaire, en termes de paroles, dans une société
inégalitaire et donc qui permettrait de construire du débat, de la politique-conflit (ou domaine).
C’est un peu de cela dont parle Elias en évoquant la socialisation du monopole du monde étatique
pour définir la démocratisation de l’Etat absolutiste. C’est le moment le monarque absolu ne
peut pas faire autrement que de redistribuer une partie des bénéfices qu’il tire de la gestion du
monopole fiscal et de la contrainte physique légitime des retombées économiques des traités
internationaux qu’il a signés, contraint qu’il est après Louis XIV de faire la paix (même contre son
gré). Au moment on est dans le l'absolutisme royal connaît son apogée, on bascule de
l’absolutisme à la démocratisation. Pourquoi? Par exemple la guerre ou la paix deviennent intérêt
social et économique, Intérêt du royaume certes mais aussi celui des bourgeois d'affaire, c'est donc
aussi un intérêt privé socialisé et non seulement celui du roi. Ce passage vers la constitution
d'intérêts privés en intérêt économiques collectif (avant l’intérêt général) qui commençant à peser
dans la balance des décisions, pousse le roi à diriger en tenant compte de ces intérêts, constitue la
base de la future théorie de l'intérêt général.
Le premier théoricien de l’intérêt général est Rousseau. Il définit l’intérêt général comme naissant
du fait qu’on socialise, qu’on rend commun des intérêts qui sont des intérêts privés d’une partie de
la population : la bourgeoisie économique. Et ce faisant on les promeut en intérêt général.
Par quelle magie cela s'opère-t-il? D'une part on le voit à travers les théorisations du contrat social
de Rousseau, mais aussi Locke (et les doubles droits fondamentaux qui s'appuient l'un sur l'autre : la
propriété privée et l'Habeas Corpus). Mais on peut aussi citer : Vittoria, Las Cases, Spinoza,
Grotius, Pufendorf. Il faut produire sur la base de ces théories des croyances. Ce n’est pas tant les
théories du Contrat social, avec l’intérêt de chacun perçu au sens de l’intérêt de tous (sens
commun). Il faut des lois positives qui garantissent ce contrat, concrétisent sous forme politique ces
théories du Contrat social (Locke, Rousseau, Hobbes, etc. cf cours second semestre). Mais il faut
aussi, et c'est sans doute le plus important, une révolution. Mais laquelle? Une révolution
économique qui s’opère avec l’affirmation d’un nouveau modèle de production et ce faisant de
société : le mode de production capitaliste (Marx). Dans les termes de Sieyès) il s’agit d’une
révolution juridique cela veut dire abolir les privilèges et fonder d'un nouveau système qui promeut
l'égalité en droit pour tous et abolit les ordres sociaux) qui mène à la révolution sociale (donc après
le changement de la norme fondamentale). (La révolution politique selon les termes de Sieyès et
Montesquieu).
3. La démocratie représentative, produit d’une révolution politique ?
Une révolution des esprits et politique. Pourquoi la perçoit-on comme cela? Car nous avons
appris à l'école la vision de François Furet sur la Révolution française, qui relègue aux oubliettes la
thèse des Annales et de l’Ecole marxiste (Matthiez, Labrousse Porchnev, Soboul…) de causes
essentiellement économiques (crises frumentaires notamment) de la Révolution et du moment Sans
Culottes.
« Les historiens progressistes de la Révolution française, de Jean Jaurès à Albert Soboul, ont … pris
leur distance avec le qualificatif d’historien marxiste. Dans son dernier entretien, Albert Soboul
(1987) précise: « Je ne pense pas qu’il y ait une histoire marxiste et une histoire qui ne le soit pas ».
Il y a l’Histoire tout court ». Sans doute, l’Histoire tout court est marxiste à ses yeux lorsqu’il
précise : « Je proteste contre le discrédit auquel on a voué le marxisme à l’heure actuelle et qui, à
mon avis, ne s’adresse qu’à un marxisme fermé, dogmatique et sectaire ». Cependant il n’en reste
pas moins que les historiens progressistes de la Révolution française refusent d’opposer la méthode
marxiste à la méthode de l’historien. Ils considèrent le marxisme seulement comme une méthode
critique de recherche et de réflexion, positionnée en complément de la méthode de l’historien.
L'apport de l'historiographie
Un tel décalage entre la lecture marxiste de la Révolution française et l’attitude proprement
historienne explique le caractère souvent vague et général des références aux textes marxistes dans
l’historiographie de la Révolution française au nom du refus de ce qu’Albert Soboul appelle le
marxisme littéral, donc au titre du caractère ju fragmentaire des analyses de Marx relatives à la
Révolution française. L’œuvre de Marx, auteur qui n’est pas considéré par les historiens
professionnels comme un historien de la Révolution française, voire comme historien tout court,
n’est donc abordée que sous l’angle méthodologique. Paradoxalement, ce sont les coups de boutoir
de l’historiographie « révisionniste » (Furet, 1978), dans le contexte de l’effondrement du
communisme réel, donc du renoncement de la connexion entre jacobinisme et bolchevisme, qui ont
favorisé le retour aux textes de Marx sur la Révolution française (Furet, 1986).
(…)François Furet s’en tient principalement à la part la plus critique de l’analyse de la Révolution
française chez le jeune Marx, c’est-à-dire à tout ce qui concerne le jacobinisme comme « illusion du
politique ». Il souligne ainsi le caractère autoréférentiel et abstrait du discours jacobin, sa
déconnexion par rapport à la société civile dans sa tendance à l’hypertrophie du politique. (…) Dans
cette perspective critique, le jacobinisme est rapporté plus raisonnablement à un groupe social, la
bourgeoisie, véritable « idéaliste politique » (Marx), et à des notions (liberté, égalité, nation, etc.)
qui sont autant d’idéalités politiques, d’êtres imaginaires de discours pris dans la dramaturgie de
l’illusion de la démocratie antique. Mona Ozouf (1989) et Lucien Jaume (1989) définissent alors,
dans la voie ouverte par François Furet, le discours jacobin comme « un discours imaginaire de la
Révolution sur elle-même », sans lui dénier pour autant son caractère démocratique. Selon Lucien
Jaume, l’art politique jacobin retravaille en permanence les catégories héritées de 1789,
principalement celles d’individu, de citoyen, de souveraineté et de représentation, associant des
« éléments archaïques » hérités de la monarchie et des « traits novateurs » à valeur émancipatrice.
Furet, François (1975), Penser la Révolution française, Paris: Gallimard.
Furet, François (1986), avec la collaboration de Lucien Calvié, Marx et la Révolution française,
Paris: Flammarion.
Guilhaumou, Jacques, (2002), Sieyès et l’ordre de la langue. L’invention de la langue politique
moderne, Paris : Kimé.
Guilhaumou Jacques, (1999), ‘Marx, Sieyès et le moment constituant (1789)’, Actuel Marx, 26:
173-188.
Jaume Lucien, (1989), Le discours jacobin et la démocratie, Paris, Fayard.
Ozouf, Mona (1989), L’homme régénéré. Essais sur la Révolution française, Paris: Gallimard.
Pasquino, Pascale (1998), Sieyès et l’invention de la Constitution, Paris: Odile Jacob.
Jacobinisme et marxisme. Le libéralisme politique en débat. Notions par Jacques Guilhaumou,
CNRS/UMR Triangle, ENS-LSH Lyon, http://revolution-francaise.net/2006/10/01/68-jacobinisme-
et-marxisme-le-liberalisme-politique-en-debat.
La Révolution française est une révolution de grands esprits sans côté pragmatique, une révolution
d’intellectuels, des théoriciens déconnectés de la réalité. Selon Furet emboîtant le pas à Tocqueville
les intellectuels français ont ainsi animé la révolution avec des idéaux utopiques irréalisables. La
révolution est avant tout une révolution des esprits, mais pas forcément une révolution politique
efficace pour atteindre la démocratie souhaitée à la différence de la Révolution américaine
pragmatique dans ses fins comme dans sa réalisation ou dans ses concepteurs.
« Ce qui arrive dans le monde intellectuel n'est pas moins déplorable.
Gênée dans sa marche ou abandonnée sans appui à ses passions désordonnées, la démocratie de
France a renversé tout ce qui se rencontrait sur son passage, ébranlant ce qu'elle ne détruisait pas.
On ne l'a point vue s'emparer peu à peu de la société, afin d'y établir paisiblement son empire; elle
n'a cessé, de marcher au milieu des désordres et de l'agitation d'un combat. Animé par la chaleur de
la lutte, poussé au-delà des limites naturelles de son opinion par les opinions et les excès de ses
adversaires, chacun perd de vue l'objet même de ses poursuites et tient un langage qui répond mal à
ses vrais sentiments et à ses instincts secrets ». Tocqueville Introduction démocratie en Amérique L
1
Puisque de la monarchie absolue on est passé à la démocratie représentative fondée sur un nouvel
espace public fragmenté, il faut donc produire de « l'opium des peuples », de la croyance, ce qui
fait exister sociologiquement la communauté de citoyens animés par le fantasme de la démocratie
1 / 20 100%

Pour ceux qui s`intéressent aux notions de Macht et de Herrschaft, et

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !