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Marques et Musiques : compte-rendu de la
conférence du 24 avril
Nous étions plus de 150 à nous retrouver, le 24 avril dernier, à l’occasion de la
troisième réunion du club Brand Content. Le thème était le lien entre les
marques et les musiques, lien ténu qui, avec l’ouverture et la créativité que
propose le brand content, est de plus en plus exploité. C’est à travers des
exemples nombreux et variés que s’est construite la discussion. Les échanges
ont dû se terminer à 21h alors que l’envie de continuer était là.
Thomas Jamet, responsable des activités « Entertainment & Brand Content »
du groupe Vivaki a d’abord effectué une présentation afin d’introduire le sujet.
La question qu’il nous pose est la suivante : pourquoi les marques ont-elles de
plus en plus besoin des artistes ? Pourquoi les artistes ont-ils de plus en plus
besoin des marques ? Une question à mettre en relation avec la fin du modèle
publicitaire classique vers un modèle de création de contenu. Cette logique de
storytelling est de plus en plus utilisée par les annonceurs afin de générer de
la préférence pour leurs marques. Dans un paysage de plus en plus
encombré, tout est question de valeur apportée au consommateur, avec un
enjeu d’identifier les transferts de valeurs efficaces entre les deux univers
marques / artistes. Du côté des artistes, l’enjeu est la fin du disque comme
modèle unique, le développement du live et les plateformes vidéo gratuites…
Ces évolutions montrent que les artistes doivent suivre une logique de
fidélisation de leurs fanbases... En bref, les artistes sont devenus des marques
et les marques deviennent des diffuseurs de programmes à la recherche de
contenus. Les uns ont donc besoin des autres.
Sophie-Gaëlle Guétin, directrice commerciale de U-Think Universal Music, a
d’abord développé l’idée d’endorsement. Elle a pris l’exemple de Martin
Solweig et de la Ford Fiesta, cas dans lequel on a fait descendre l’univers
graphique de l’artiste sur la voiture. L’artiste a porté l’ensemble du dispositif de
communication mis en place pour lancement de ce véhicule. Une autre
opération en cours est la bouteille Club Coke de Coca-Cola qui a été désignée
par Mika. L’artiste a en effet un univers graphique très fort et a accepté de
collaborer avec Coca-Cola, une marque qu’il apprécie. Il a fait le choix de
reverser l’ensemble de ses fees à une œuvre caritative.
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Gilles Masson président de l’agence indépendante MCSaatchi.GAD nous a
parlé de son expérience du festival de musique Solidays, qu’il a présidé (en
tant que président de Solidarité Sida) depuis sa création, il y a 11 ans. Dans
ce festival, qui a uni plus d'un million et demi de spectateurs depuis sa
création autour du thème de musique et solidarité, les marques ont été
intégrées dans le live, afin de bénéficier en image et en notoriété de
l'événement. En retour, les marques mettent en place des événements
originaux sur place qui sont en adéquation avec leurs valeurs : la Banque
Postale organise par exemple un concours de slam autour de thèmes
solidaires, et Durex un baptême de saut à l'élastique ("le plaisir sans risque").
Isabelle Gamsohn, directrice générale de Live Nation France Holding nous a
présenté le Green Session Tour de Heineken, un projet qui porte des artistes
émergents et qui permet à la marque de mettre en place, par le biais de la
musique, une véritable interactivité avec ses clients potentiels. Le moment du
spectacle est un moment important et intéressant à utiliser pour les marques,
car il touche l’affectif et également, une cible précise à travers un vaste public.
Le travail avec la marque est également un point très important, car il y a
beaucoup d’échanges, de conseils, un espèce de brainstorming pour réfléchir
à des choses nouvelles et originales, à des idées neuves.
Xavier Hesse, Directeur Trading Media de Cadbury plc, nous apporte lui le
point de vue de la marque. Dans la recherche de la préférence, une marque
peut avoir deux approches : soit elle communique directement sur la marque,
soit elle communique sur ses produits. Le ‘Brand content’ ne peut
généralement intervenir que dans le premier cas, la communication de
Marque. Ce préalable posé, pour les annonceurs, continuer à émerger dans
un environnement de contenus de plus en plus encombré n’est pas chose
facile; donc pour continuer à ‘émerger’, un annonceur a deux
solutions possibles : soit il devient producteur de contenus qui ont la capacité
à émerger par eux-mêmes, à condition d’avoir de grands producteurs car cela
est difficile à répéter, soit il associe sa marque à des contenus forts et
émergeants.
A titre d’exemple, une opération réalisée en septembre 2008 par Hollywood,
pour le lancement de Hollywood Smile blancheur, nous est racontée. Il s’agit
d’une opération de WebTV qui a, pour contenu, les vacances d’été du couple
Guetta à Ibiza. Le but était de mettre en avant la blancheur dans sa dimension
émotionnelle, soi la confiance en soi, le fait de se sentir bien. La campagne a
en même temps été soutenue par d’autres médias plus traditionnels (TV avec
TF1). Le buzz internet a été immédiat, les retombées presse importantes et
les vidéos visionnées des centaines de milliers de fois. Cette opération a donc
très largement contribuée au succès du lancement.
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Gilles Masson enchaîne avec l’exemple de Havana Club qui a mis en place le
site Havana-Cultura, qui propose 50 films (portraits d'artistes) de 5 minutes sur
la culture alternative cubaine. La marque souhaite devenir la marque
emblématique, l’icône de la Havane. Le site a battu des records de
fréquentation (140 000 visiteurs uniques), il y a eu énormément de retombées
presse, et une grande chaine de télévision est intéressée pour diffuser
certains films dans le cadre d'un documentaire sur la Havane. Le simple fait
de mettre en ligne ces mini-films a permis de créer un contenu inédit avec de
fortes reprises sur le web, et une fréquentation régulière. La communication
même de la marque est en pleine évolution vers du total brand content ! Mais
attention, dans tous les cas, l’adéquation entre l’artiste et la marque doit être
pointue pour pouvoir fonctionner, car on voit également sur d'autres secteurs
beaucoup de "déchets".
Henri Jamet, fondateur et directeur marketing du label Cinq7, gère donc un
réseau d’artistes (dont The Do et The Naive New Beaters). Il nous apporte le
point de vue des artistes sur cette relation avec les marques, qui s’est
beaucoup développé depuis 5-6 ans. Pour beaucoup d’artistes en
développement, s’allier avec les marques à l’occasion d’une campagne de
publicité par exemple, est une excellente opportunité. En effet, la marque
contribue ainsi au financement du développement du groupe. De plus, cela
offre aussi au groupe une bonne opportunité de se faire connaître à grande
échelle (il cite par exemple la publicité pour les cahiers Oxford avec The Do). Il
faut évidemment, du côté des artistes, parvenir à valoriser ce rapport avec les
marques.
Jérôme Wagner, directeur de Maje Medias (une régie spécialisée dans
l’Entertainment), revient sur la place des marques dans la découverte de
nouveaux talents. La marque peut apporter un réel soutien financier et média
à un artiste pas forcément connu, ce qui lui offre une exposition qu’il n’aurait
pas eu seul. Il cite les Audi Talents Awards, ou encore les KAwards avec Ford.
Il cite également la Caisse d’Epargne ou Petit Bateau. Il y a quelques mois
personne ne connaissait Izia, chanteuse de la publicité Petit Bateau. Elle a
connu en quelques mois une explosion médiatique (avec notamment deux
trophées aux dernières victoires de la musique), ce qui fait que la marque
surfe maintenant sur l’explosion de l’artiste. La relation se fait donc dans les
deux sens. Pour compléter l’exemple de la Caisse d’Epargne, Thomas Levet,
directeur de la communication, intervient. Il insiste sur le fait que le mécénat
culturel que fait la caisse d’Epargne n’a pas pur but direct le retour d’image ou
l’argent, c’est une mission dont se sent investie la banque, un devoir. Avec
l’artiste Johanne, la banque soutient un projet original et risqué mais un beau
projet. 5 000 disques seront bientôt distribués aux sociétaires.
Emmanuel Mougin-Pivert, directeur général de Warner 360, insiste sur les
notions de risque et de choix. C’est un choix subjectif et objectif de parier sur
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de jeunes artistes. Parfois cela ne fonctionne pas (comme avec Philips),
parfois ça marche très bien (comme Petit Bateau). Il faut savoir anticiper les
succès. Par exemple il y a eu de longues négociations pou Slimy, 4 mois
avant la sortie de l’album.
Une question vient ensuite, concernant la place de la musique dans le
domaine culturel en général, pour l’expérience de marque. Isabelle Gamsohn
insiste sur le côté intime et affectif de la musique. Gilles Masson apporte
deux réponses : d’une part, dans un monde audiovisuel, la musique par
définition et pratique compte pour 50% dans l’impact d’un film ou d’une
publicité (il cite Weezer qui devient la musique de marque de La Banque
Postale et qui, du coup, a un impact réel pour la communication de marque) ;
c’est d’autre part, une question de volume de fréquentation (il y a sûrement
plus de personnes qui écoutent de la musique en ce moment sur YouTube
que de gens qui franchissent la porte d’une salle de cinéma dans l’année).
C’est la question du placement produit qui a ensuite été abordée. Sophie-
Gaëlle Guétin rappelle que mettre au cœur du clip un produit ou une marque
en situation est quelque chose de très fréquent aux Etats-Unis (l’exemple
emblématique est le clip de Lady Gaga), même si cela a longtemps été interdit
en France, de plus en plus de marques s’intéressent dorénavant à ce sujet.
Depuis le 5 mars dernier, le placement produit dans les clips en France est
possible, sous couvert a priori d’un petit pictogramme qui signalera la
présence de placement(s) produit(s) dans le clip. Emmanuel Mougin-
Pivert affirme que c’est un moyen, non de gagner de l’argent, mais de baisser
les dépenses. Sophie-Gaëlle Guétin insiste sur la notion de démarcage pour
la marque et d’impact en termes de puissance média. Certains clip bénéficient
d’un airplay colossal (plus de 180 millions de views sur le dernier Lady Gaga,
la marque peut également choisir d’être en exclusivité de placement produit
(voir Rihanna), Il s’agit véritablement d’un travail approfondi sur le lien entre
l’univers de l’artiste/du clip, et celui de la marque. Emmanuel Mougin-Pivert
cite un cas intéressant, celui d’un placement produit Puma dans le clip de
Paoli Nutini. Après ce clip, le client a demandé l’inversion du placement, Puma
a demandé à l’artiste de jouer dans son spot publicitaire.
Le directeur général de BETC, Fabrice Brovelli a lancé le débat sur la
question du respect de l’artiste. Il pense que la notion d’échange est
primordiale et qu’elle ne l’a pas vraiment été mise en avant. Henri Jamet
souligne qu’il y a dans la même idée, une tendance de fond qui fait que les
artistes cherchent à garder leurs droits au maximum. L’exemple de Olivia Ruiz
est intéressant sur ce sujet, comme l’a dévelopJérôme Wagner. En effet,
l’artiste s’était associée à Coca-Cola Light, mais ce partenariat américanisait
son image et la renvoyât à l’image Nouvelle Star dont elle voulait se détacher.
Il y a donc eut un arrêt de la collaboration. Sophie-Gaëlle Guétin revient là-
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dessus en disant que justement, U-Think a été monté à ce moment là, afin
d’éviter de mauvaises alliances, et de préserver l’image de ses artistes. Le
le de U-Think est aussi un rôle de conseil, afin d’orienter les marques et les
agences avec des briefs adaptés, pour faire cohabiter des univers qui vont
ensemble. Si on se pose trop de questions sur la collaboration, si on se
demande si l’on va abîmer l’artiste, c’est qu’il ne faut pas le faire.
Une dernière question lance le débat sur les publicités pour les disques, qui,
selon le patron des Editions EMI, sont restées au stade de réclame.
Emmanuel Mougin-Pivert explique que c’est une question de moyens et de
contexte difficile. Gilles Masson est d’accord avec cette remarque sur la
faiblesse des publicités pour les disques et son problème de financement.
Mais il préconise un changement de business model car détruire l’actif de
l’actif (les artistes qui créent des liens entre leur public et les marques), c’est
tuer la future poule aux œufs d’or.
Coralie Renard
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