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Pèlerinage de Chartres 29 et 30 mars 2008
LA MISERICORDE DIVINE
A l’invitation de nos évêques, tous les jeunes d’Ile-de-France de la « génération étudiante » sont
invités à se mettre en marche les 29 et 30 mars 2008, vers Chartres. Nous serons alors à la fin de la
semaine de Pâques. Ces huit jours sont considérés commun une unique journée : du jour de Pâques
au dimanche suivant, l’Eglise célèbre la Résurrection de Jésus qui ouvre à tout homme les portes
du salut. Contrairement aux autres années, nous ne pèlerinerons pas vers Pâques, mais dans la
pleine lumière de son accomplissement ! Le 30 avril 2000, le pape Jean-Paul II déclara que
dorénavant, le « deuxième dimanche de Pâques prendra le nom de Dimanche de la Miséricorde
Divine ».
Il faut cependant l’avouer, le terme même de « miséricorde » déroute au premier abord : qu’est-ce
que cela signifie ? L’aspect pénitentiel ou vieillot du mot semble paradoxal en ce jour de joie et de
fête. Pourquoi associer les deux ?
C’est pour aider ceux qui nous rejoindrons au pèlerinage des étudiants, à s’y préparer au mieux et
à entrer davantage dans une juste compréhension de la Miséricorde de Dieu pour l’homme, que j’ai
demandé à la Sœur Marie-Christophe Maillard, Servite de Marie, professeur à l’Ecole cathédrale à
Paris, de rédiger ce texte court, clair et dense. J’espère qu’il vous sera utile, seul ou en groupe, pour
commencer dès aujourd’hui à goûter et à mieux accueillir le don qui vous est fait.
Avec toutes les équipes qui préparent activement ce rendez-vous majeur, je vous donne rendez-vous
les 29 et 30 mars prochains !
Fraternellement,
Père Benoist de Sinety
Délégué des évêques d’Ile-de-France pour la Mission Etudiante
01 55 42 81 28
[email protected]
« Miséricorde, que dis-tu de toi-même ? Es-tu cette condescendance humiliante pour autrui, ou cette
revalorisation de chacun dans sa dignité ? Es-tu réservée à des êtres d’exception, ou appelée à tisser les
rapports harmonieux que les hommes et les divers groupes humains souhaitent établir entre eux ?
Depuis deux mille ans retentit la promesse : « Heureux les miséricordieux. » Comment douter
qu’ils ne le soient pas ! Mais qui sont-ils ?
Les miséricordieux sont toujours prompts au pardon. Rien ne les arrête. Ils reconnaissent
chaque être humain comme un frère ou une sœur en humanité, quoi qu’il ait fait. Ils jugent chacun
comme un être infiniment digne d’être aimé. Ils savent que toute histoire humaine est sacrée et que nul
n’a le droit de la bafouer. C’est pourquoi les miséricordieux vivent dans la douceur. Ils accueillent
avec respect tout être en son histoire et sa liberté. Ils portent chaque personne rencontrée dans leur
espérance car aucune destinée n’est absurde. Ils n’ont pas d’idées préconçues dans lesquelles ils
l’enfermeraient. Ils voient chacune comme une créature aimée de Dieu et appelée à la liberté. Ils
aiment et ils en sont heureux.
Pour les miséricordieux, la dignité humaine s’appelle beauté. Ils ne la mesurent pas à je ne sais
quel canon du beau, celui des corps ou de l’avoir, celui de l’opinion médiatique ou du succès élitiste.
La beauté qu’ils voient vient d’ailleurs. Les miséricordieux peuvent être violents, mais de la violence
des prophètes. La beauté qu’ils ont vue les rend allergiques à toute laideur. Pourtant, leur allergie ne se
transforme pas en une violence revendicatrice. Ils ne sont pas là pour faire valoir leur idée de la beauté
humaine. Leur regard les rend miséricordieux car ils voient cette beauté tapie au fond des cœurs, en
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particulier chez les plus pauvres. Ils la devinent en espérance, même chez ceux qui l’enlaidissent en
eux-mêmes ou dans les autres. Leur regard les pousse à l’action. Il est un appel » (Mgr P. d’Ornellas,
La miséricorde divine. - 2005 – Cahiers de l’Ecole Cathédrale)
Que nous apprend la Bible de ce chemin pour entrer dans cette voie de la beauté qu’est la
Miséricorde ?
Dans sa Lettre encyclique « La Miséricorde divine » (1980), Jean-Paul II évoque une
« Révélation centrale ». Après l’ Alliance conclue entre Dieu et son peuple, le peuple de l’Alliance
connaît cette misère du péché lorsqu’il érige le veau d’or (Livre de l’Exode). De cet acte de rupture
d’Alliance, le Seigneur lui-même triomphe en se déclarant solennellement à Moïse : « Dieu
miséricordieux et bienveillant, lent à la colère, plein de fidélité et de loyauté » (Ex 34,6).
La miséricorde apparaît dès le début comme, en quelque sorte, le Nom propre de Dieu, ce qui
décline son identité, ce qu’Il est dans son Être et dans son Agir.
Car non seulement le mot « miséricorde » souligne la disposition objective à venir soulager,
libérer autrui, mais il prend en considération le lieu, la source et la profondeur des sentiments qui
incline à l’acte libérateur.
Ainsi pour définir la miséricorde, les Livres de l’Ancien Testament emploient essentiellement
deux expressions. En tout premier lieu, il y a le terme « hesed » qui indique une profonde attitude de
« bonté » (amitié). Bonté qui se traduit par une fidélité : Dieu est fidèle à lui-même et fidèle à son
Alliance. La « hesed » va se manifester comme un amour qui se donne, un amour plus puissant que la
trahison, une grâce plus forte que le péché.
Le second mot qui sert à définir la miséricorde est « rahamim » : celui-ci dénote l’amour de la
mère (rehem : le sein maternel). L’Ancien Testament attribue au Seigneur ce caractère ; en effet, nous
lisons dans Isaïe : « Une femme oublie-t-elle son petit enfant, est-elle sans pitié pour le fils de ses
entrailles ? Même si les femmes oubliaient, moi, je ne t’oublierai pas » (Is 49,15)
Nous héritons ainsi de l’Ancien Testament, à travers ce concept de miséricorde de cette image
émouvante de son amour, qui, au contact du mal et en particulier du péché de l’homme et du peuple,
se manifeste comme miséricorde. (cf La Miséricorde divine, note 52)
Poursuivant sa réflexion biblique, Jean-Paul II montre comment ce Mystère de la miséricorde
divine atteint son achèvement, son accomplissement dans le Mystère pascal : « Révélation de la
miséricorde en sa plénitude » « Ultime témoignage de l’admirable alliance de Dieu avec l’humanité. »
(La Miséricorde divine n°7)
Jean-Paul II poursuit : « Croire en un tel amour plus puissant que tous les maux…. signifie
croire dans la miséricorde. Celle-ci, en effet, est la dimension indispensable de l’amour : elle est
comme son deuxième nom. »
Cette miséricorde divine révélée définitivement en Jésus le Christ dépasse le simple concept
puisqu’elle s’incarne véritablement.
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Jean-Paul II écrit avec un grand réalisme : « La croix est comme un toucher de l’amour éternel
sur les blessures les plus douloureuses de l’existence terrestre de l’homme…. » (La Miséricorde divine
. n°7)
La miséricorde s’incarne et se laisse crucifier. Mais se trouve révélée par le Fils de Dieu dans
sa Résurrection, l’expérience radicale de la miséricorde, c’est-à-dire de l’amour du Père plus fort que
la mort.
Enfin, Dieu révèle aussi particulièrement sa miséricorde lorsqu’il « appelle l’homme à exercer
sa « miséricorde » envers son propre Fils, envers le Crucifié ». (La Miséricorde divine . n°7).
Dans ce parcours biblique sur la Miséricorde divine, comme lieu d’ouverture du Cœur de Dieu
à notre humanité, Marie apparaît comme le sommet de la révélation. « Marie est aussi celle qui, d’une
manière particulière et exceptionnelle – plus qu’aucune autre – a expérimenté la miséricorde, et, en
même temps, - toujours d’une manière exceptionnelle- a rendu possible par le sacrifice du cœur sa
propre participation à la révélation de la miséricorde divine. Personne n’a expérimenté autant que la
Mère du Crucifié le mystère de la croix, la rencontre bouleversante de la justice divine transcendante
avec l’amour…. Marie est donc celle qui connaît le plus à fond le mystère de la miséricorde divine….
Elle est « Mère de miséricorde ». (La Miséricorde divine n°9).
C’est ce que Bernadette a contemplé sur le visage de Notre-Dame : le reflet de la Miséricorde de Dieu.
Il n’y a pas de révélation divine sans miséricorde.
A notre humble mesure, nous sommes appelés à laisser l’Esprit transfigurer notre humanité : ainsi
s’accomplit notre être.
L’Alliance avec Dieu qui a pour nom Histoire de Salut est faite de l’appel premier et gratuit de
Dieu – même après la rupture. La Genèse nous montre la miséricorde de Dieu à la recherche de
l’homme et de la femme égarés : « Où es-tu ? » (Gen 3,9). Il y a bien appel à une réintégration dans
l’Histoire du Salut, intégration miséricordieuse de Dieu. Appel donc à la liberté humaine qui se
découvre à la fois objet de la Miséricorde divine et en même temps sujet de son histoire personnelle.
Car ce mystère de la Miséricorde divine, œuvre gratuite de l’initiative de Dieu appelle une réponse : le
DON suscite, est en attente d’une REPONSE.
La réponse de l’être humain ne peut que s’inscrire dans une triple dynamique, une triple
démarche :
La réconciliation, comme option de la liberté humaine ‘(« Oui, je me lèverai et j’irai vers mon
Père », Luc 18,19)
La prière : comme lieu de la relation renouée entre Dieu et l’être humain (« Tu nous as faits
pour Toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en Toi » St Augustin)
La sainteté : comme finalité ultime du pèlerinage humain. (« Soyez saints, car Moi, Yahweh, je
suis saint » (Lév. 19,2).
La réconciliation : qui suppose cette prise de conscience que le mal est en nous, prise de conscience
qui arrache à St Paul ce cri : « Je ne fais pas le bien que je veux et je commets le mal que je ne veux
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pas ! » (Rom 7,19). Pourtant, cet aveu s’accompagne immédiatement de cette espérance : « Qui me
délivrera de ce corps qui me voue à la mort ? Grâces soient à Dieu par Jésus Christ NotreSeigneur ! » (Rom 7,24-25). Il y a à se reconnaître pécheur, mais pécheur pardonné.
Car une des formes de la Miséricorde est le pardon. Le pardon est bien une puissance qui fait irruption
pour nous transformer, puissance de Résurrection. Le pardon prend la vie qui est la nôtre, avec ses
échecs, ses laideurs, tout ce que nous voudrions surtout oublier et il lui fait porter du fruit.
Cette expérience du pardon va se vérifier dans la pratique selon 4 moments :
La reconnaissance d’un aveu possible ;
Le rappel d’une Miséricorde première qui peut rendre ce qui était perdu – conversion –
changement de direction ;
La démarche effective pour demander le pardon et se mettre à la « merci » (miséricorde) de
Celui qui pardonne.
Enfin à l’abrupt de l’expérience, la paix est donnée. Le pardon nous advient comme un don
nouveau qui rend la joie entière. La parole de la Miséricorde se fait en nous chant de délivrance.
Décentré de lui-même, arraché au poids de la faute, l’être humain retrouve son être profond en
se recentrant sur la plénitude de Dieu, et ce mouvement s’appelle la « prière ».
La prière : « Si tu savais le don de Dieu ! » (Jn 4,10). La merveille de la prière se révèle justement là,
au bord des puits où nous venons chercher notre eau : là, le Christ vient à la rencontre de tout être
humain, Il est le premier à nous chercher et c’est Lui qui demande à boire. Jésus a soif, sa demande
vient des profondeurs de Dieu qui nous désire. La prière, que nous le sachions ou non, est la
rencontre de la soif de Dieu et de la nôtre. Dieu a soif que nous ayons soif de Lui. » (Catéchisme de
l’Eglise catholique, n°2560).
Cette « merveille de la prière » se donne à voir à travers toute l’existence de grands témoins de
l’Ancien et du Nouveau Testament.
Et tout d’abord, Moïse. Moïse est le contemplatif, mais le contemplatif lancé dans l’action :
homme de l’adoration, de l’intercession et de la louange.
L’adoration (Ex 2,23) : l’approche de Dieu est toujours précédée par un dépaysement ; d’un cœur prêt
à écouter (« Me voici ») ; d’un désir manifesté de l’homme (demande du Nom Divin)
L’adoration : prier, c’est laisser le Nom divin ouvrir notre intelligence et notre cœur au vrai sens des
valeurs : la transcendance de Dieu.
Le dialogue : Toi et moi – tout au long de sa route, Moïse entre de plus en plus dans l’intimité avec
Dieu, désirant que cette Présence ne le quitte plus. Découverte d’un Dieu qui nous parle « comme un
homme parle à son ami »
La connaissance : Moïse sera perpétuellement à la recherche du Visage de Dieu (Ex 33,12-17). Par ce
désir, l’homme retrouve la ressemblance de Dieu (I Jn 3,2)
La découverte bouleversante : non seulement Dieu aime l’homme, mais l’homme est capable d’aimer
Dieu. L’amour est la conclusion de l’Alliance (Ex 34,6)
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Au seuil du Nouveau Testament, la figure de la Vierge Marie apparaît comme
l’accomplissement de toute la prière d’Israël : en elle, se donne à voir le modèle de la prière du
disciple, puisque la parole prend corps en elle(cf Ps 40, et He 10,5-7). « La prière de Marie nous est
révélée à l’aurore de la plénitude des temps…Celle que le Tout-Puissant a faite « pleine de grâce »
répond par l’offrande de tout son être…Fiat, c’est la prière chrétienne : être tout à Lui puisqu’Il est
tout à nous » (C.E.C. n°2617). A son tour, il est donné à Marie d’exaucer la prière de Dieu. Car « Il a
plu au Père des miséricordes que l’Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette
Mère prédestinée… » c’est pourquoi, Marie, fille d’Adam, «donne à la Parole de Dieu son
consentement…. Et épouse à plein cœur…. la volonté divine de salut » (Lumen Gentium N°56) :
« Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole » (Luc 1,38).
Epouser la Volonté de Dieu, exaucer le désir de Dieu, faire la joie de son Dieu, tout cela porte
un nom : sainteté.
La sainteté : Dans la Constitution dogmatique « Lumen Gentium »,
le chapitre sur « l’Appel
universel à la sainteté dans l’Eglise » fait immédiatement suite à celui sur « Les laïcs » : ce qui est dire
clairement que l’appel à la sainteté n’est pas réservé à quelques privilégiés, ni le fait de quelques âmes
pieuses… Elle est la voie royale de tout baptisé, puisque le Seigneur Jésus nous l’enseigne, lui qui en
est « l’initiateur et le consommateur » (L.G. n°40) : « Vous donc, soyez parfaits comme votre Père
céleste est parfait » (Mat 5,48).
L’Apôtre Paul nous invite à vivre « comme il convient à des saints » (Eph 5,3), de revêtir « comme des
élus de Dieu saints et bien-aimés, des sentiments de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de
longanimité » (Col 3,12).
Parmi les géants de la sainteté, une figure peut servir de « modèle » à la portée de tous : Ste Thérèse de
l’Enfant-Jésus, elle qui, précisément, a conjoint dans sa vie miséricorde et sainteté. Ecoutons-la nous
révéler : « A moi, Dieu a donné sa Miséricorde infinie » « Je ne sais faire qu’une seule chose :
commencer à chanter ce que je dois dire éternellement « Les Miséricordes du Seigneur » (Manuscrit
A) La « plus grande sainte des temps modernes » n’a jamais rien fait, pensait-on, qui mérite d’être
conté. Pour Thérèse, sainteté et vérité se conjuguent : « la sainteté la plus vraie…. C’est celle dans
laquelle ne se rencontre aucune illusion » (Manuscrit A).
Avec Thérèse, le chrétien apprend qu’entrer dans l’âge adulte, c’est entrer dans la plénitude de la
gloire de Dieu. La sainteté ne vient pas nous retirer de la vie du monde : elle vient insuffler dans notre
unique existence un principe de croissance, de progrès. Elle vient nous préparer, de l’intérieur, à la
plénitude de notre unique identité. Devant Dieu, nous sommes en pleine jeunesse, en pleine croissance
vers notre plénitude, la sainteté.
Nous pourrions conclure en disant que la miséricorde est le lieu où s’enracine la liberté humaine pour
accéder à elle-même ; la réconciliation est reconnaissance du Fils comme de Celui qui restaure le
visage de notre humanité blessée ; la prière est le lieu d’expression de la patience et de la passion de
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Dieu pour l’homme et de l’homme pour Dieu ; la sainteté est ce mouvement de retour de l’enfant à la
Maison du Père.
Sœur Marie-Christophe Maillard, Servite de Marie
Enseignante à l’Ecole Cathédrale.
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