Le 16 Avril 2009 NOTRE EXISTENCE A-T

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Le 16 Avril 2009
NOTRE EXISTENCE A-T-ELLE UN SENS ?
D’après la conférence de JEAN STAUNE, diplômé en mathématiques, informatique, paléontologie,
sciences politiques, économie et gestion.
La modernité s’est trouvée associée au désenchantement du monde issu d’une vision trop
matérialiste et réductionniste qui empêche une vision globale.
Freud a parlé de la triple humiliation de l’homme :
- avec Copernic l’homme n’est plus au centre du monde
- puis selon Darwin l’homme n’est plus au centre de la nature
- et pour Freud l’homme n’est plus au centre de lui-même.
La vision classique du monde selon Darwin explique que l’univers n’a ni commencement ni fin, il
n’évolue pas. Il est parfaitement déterministe. La matière n’est composée que de particules.
L’apparition de la vie et son évolution s’expliquent parfaitement par les mutations dues au hasard et à
la sélection naturelle. La conscience et l’imagination résulteraient de processus chimiques.
La diffusion de cette vision du monde a eu un énorme impact artistique, intellectuel, philosophique,
mathématique au cours du 20è siècle. Tous ces domaines connaissent une énorme progression du
« non-sens ».(Sartre, Camus…). François Crick découvreur de l’ADN, prix Nobel de médecine, émettait
même l’hypothèse stupéfiante que le sens de notre identité et de notre libre arbitre n’est rien de plus
que le fonctionnement d’un vaste assemblage de cellules nerveuses . Cette hypothèse laisse entrevoir
que nous allons modifier le génome humain pour faire des hommes améliorés (transhumanisme). Ainsi
l’homme sera remplacé par la machine et deviendra « le garçon de courses des robots du futur ». Au
terme de ce processus ne se trouve que le désespoir absolu.
Cette vision classique du monde, pourtant basée sur les sciences et sur la rationalité, est-elle la vision
la plus adaptée aujourd’hui ? Les connaissances les plus récentes de la science nous livrent-elles une
nouvelle vision ? Jean Staune veut nous expliquer comment le 20è siècle a vu émerger un nouveau
paradigme (un paradigme est une conception du monde qui synthétise des éléments venus de divers
domaines).
Des disciplines comme la relativité générale et la mécanique quantique ont contribué à créer ce
nouveau paradigme.
Notre existence a-t-elle un sens ? Jean Staune.
1
1- Relativité et théorie du Big-Bang - Implications philosophiques
En 1905, Einstein produit la théorie de la relativité (E=MC², cette fameuse équation permet d’expliquer
que les quantités de mouvements de deux particules élémentaires qui entrent en collision vont
contribuer à créer une nouvelle particule).
Le temps et l’espace n’étant donc plus des absolus, ils peuvent avoir une origine. C’est ainsi qu’en
suivant la théorie d’Einstein, Friedmann et Lemaitre vont poser les bases de la théorie du « BigBang ». Un commencement du temps et de l’espace peuvent se déduire logiquement de la relativité.
Comme le dit Hubert Reeves : « l’univers a une histoire ». Il est en changement, il a un début et une
fin, il évolue. Il y a 15 milliards d’années, l’univers était beaucoup plus chaud, plus lumineux, plus
dense, c’est ce que l’on nomme le Big-Bang. L’univers des premiers temps était chaotique, mais les
particules élémentaires avaient le potentiel pour s’associer. Elles ont fabriqué des systèmes structurés
de plus en plus complexes selon les lois de la physique, du déterminisme, du hasard... Aujourd’hui
l’univers est admirablement structuré à toutes les échelles (atomes, molécules, cellules vivantes,
planètes, étoiles, galaxies…).
2- Physique quantique - Implications philosophiques
En 1926, les découvertes de la mécanique quantique conduisent Heisenberg à énoncer le principe
d’incertitude qui stipule que l’on ne peut connaître à la fois la position et la vitesse d’une particule.
En 1935, Einstein remet en cause ce principe, en raison du caractère fini de la lumière.
En 1982, sous la direction du français Bernard d’Espagnat, l’expérience d’Alain Aspect prouve pour la
première fois la non séparabilité : il existe un lien qui relie deux particules. Ce lien va six millions de
fois plus vite que la vitesse de la lumière et ne dépend ni du temps ni de l’énergie ni de l’espace.
Cette découverte oblige à postuler que notre monde ne s’explique pas entièrement par lui-même,
qu’il n’est pas autosuffisant et qu’il y a une limite absolue à la connaissance que nous pouvons avoir du
monde.
Un principe créateur devient nécessaire pour expliquer l’univers, d’Espagnat parle de « sentiment
d’une grandeur qui nous dépasse », « une partie du réel ne sera jamais accessible parce qu’il n’est
pas dans le temps, pas dans l’espace, pas dans la matière ».
3-
Emergence
d’une
nouvelle
vision
du
monde
-
Implications
philosophiques
L’homme non (uniquement) neuronal
Jean-Pierre Changeux, ancien élève de Jacques Monod, dit : « l’homme est un homme neuronal qui
n’a plus rien à faire de l’esprit ». Serons-nous tous alors un jour remplacés par des machines ?
Jean-François Lambert (psychophysiologiste) pose la question : « sommes-nous assimilables à un
ensemble de processus formalisables, reproductibles dans une machine » ?
Dans une expérience, Benjamin Libet enregistre ce qui se passe au niveau du cerveau d’une
personne qui appuie sur un bouton. Il en conclut qu’une grande partie de nos gestes se font
inconsciemment mais qu’à tout moment nous pouvons arrêter un mouvement non encore effectué mais
déjà initié. C’est la première expérience scientifique qui permet de dire qu’il existe une différence entre
le moi et le cerveau. Contrairement à ce que pensent les scientifiques classiques, l’homme est
responsable de ses actes, il est son libre arbitre. (Modèle de l’arbitre dans un match de football).
Jean-François Lambert
a obtenu les mêmes conclusions
en interprétant
des
électroencéphalogrammes effectués sur des moines tibétains en pleine méditation et recevant un flash
dans les yeux. Ces expériences apportent aussi la preuve particulièrement nette d’une déconnexion
entre le neuronal et le mental. La connaissance de l’état neuronal de ces sujets ne peut permettre
d’en déduire leur état mental à l’instant où l’expérience est effectuée.
Tout cela nous montre que ce qui nous constitue fondamentalement échappe partiellement à la
description. Si l’homme ne peut se passer des neurones pour être conscient, notre conscience est un
phénomène plus vaste qui ne peut s’interpréter uniquement au plan neuronal.
Notre existence a-t-elle un sens ? Jean Staune.
2
Reproductibilité de l’évolution
Contrairement à l’idée de l’évolution classique Darwinienne pour qui la vie est une succession
d’évènements imprédictibles, l’idée majeure dans les sciences de l’évolution est sa
reproductibilité.
L’expérience (billes sur les montagnes) montre que des contraintes s’exercent, que les lois de la
nature sont canalisées. Elles font dire que l’évolution est en partie prédictible. Conway Morris parle
de convergence évolutionniste qui limite strictement le nombre d’alternatives. L’existence de ces
convergences amène à des résultats identiques par des voies différentes (la structure des yeux
observée chez le calamar ou l’escargot ou l’araignée, identique à celle de l’homme, confirme cette
convergence. Or nos ancêtres communs étaient des bactéries qui n’avaient pas d’yeux).
Morris conclut que l’évolution Darwinienne resterait un concept central mais où les formes
fonctionnelles classiques sont prédéterminées (cristaux de neige à six branches).
Cette nouvelle idée de l’évolution, fondamentalement différente de l’évolution due au hasard et à la
sélection naturelle, fait dire à Christian de Duve (prix Nobel de médecine) : « Les lois de la biochimie
produisent des contraintes si strictes que le hasard est canalisé et que l’apparition de la vie et même de
la pensée consciente deviennent une obligation dans l’univers et cela en de nombreuses occasions. »
Les formes des structures complexes seraient produites par les lois de la nature et non par la
sélection naturelle (Denton).
Précisons que la naissance de cette nouvelle idée de l’évolution n’a strictement rien à voir avec le
« créationnisme ».
Les Mathématiques
Gödel a démontré par les mathématiques les limites des mathématiques.
Son expérience de classement des livres qui se citent ou ne se citent pas eux-mêmes, l’amène à
énoncer le théorème d’incomplétude suivant : « tout ensemble fini d’axiomes contient au moins
une proposition indécidable ». (Où classe-t-on le catalogue des livres qui ne se citent pas euxmêmes ?)
Il en conclut que tout système humain contient une faille logique de cette nature et propose le
corollaire suivant
- tout système logique humain cohérent est incomplet
- tout système logique humain complet est incohérent.
Penrose considère que l’homme est supérieur à la machine, il est supérieur à la perception de la vérité
en mathématiques car il y a des vérités perceptibles mais indémontrables. Les intuitions de Platon
qui disait : « il y a un contact entre l’esprit humain et un autre niveau de réalité », se trouvent ainsi
confirmées.
CONCLUSION
Appliquer l’incomplétude à la philosophie conduit à trois positions possibles sur la vérité :
 la vérité existe et nous pouvons la posséder en totalité (du moins en théorie) et l’enseigner.
C’est cette position qui peut conduire au scientisme et au fondamentalisme.
 il n’y a pas de vérité absolue, c’est la philosophie relativiste.
 il y a une vérité absolue, elle existe mais nous ne pourrons jamais la posséder en totalité (c’est
ce que disent Platon, Gödel, d’Espagnat…).
L’évolution actuelle des sciences constitue un changement de paradigme sans précédent depuis le
passage du Moyen-âge à la Modernité.
Toutes les religions disent depuis des siècles qu’il y a un autre niveau de réalité au-delà de l’espace du
temps et de la matière et que l’esprit de l’homme est relié à cet autre niveau.
La modernité avait rendu absurde une telle conception. Pour elle il n’existe rien d’autre que le monde
matériel.
Le nouveau paradigme scientifique redonne de façon inattendue une crédibilité à cette conception.
Notre existence a-t-elle un sens ? Jean Staune.
3
Nous avons vu que cette évolution répond positivement aux questions suivantes :
 Oui, nous dit l’astrophysique, oui nous dit la mécanique quantique, il existe un autre
niveau de réalité au-delà de l’espace et du temps.
 Oui, nous disent les mathématiques, l’esprit de l’homme peut être en contact avec un
autre niveau de réalité.
 Oui, nous disent les neurosciences, le libre arbitre existe.
 Oui, nous dit l’astrophysique, un principe créateur est crédible au plan rationnel.
Ainsi une nouvelle synthèse entre Sciences et Spiritualité est possible : elle conduit à
un « REENCHANTEMENT DU MONDE ».
L’essentiel est invisible pour les yeux parce que l’on ne voit bien qu’avec le cœur .
Antoine de St-Exupéry
Le tableau du peintre ESCHER ci-dessous symbolise parfaitement notre propos. Le tableau est
localement cohérent sauf au centre où l’eau du port toucherait le plafond si Escher n’avait laissé un
trou.
L’artiste a signé au centre pour montrer que l’essentiel est dans ce trou. C‘est à dire dans ce qui nous
échappe. Si ce trou n’existait pas, son œuvre perdrait tout son sens, sa signification. Ce tableau
symbolise pour le peintre le théorème d’incomplétude de Gödel. Il symbolise aussi tout ce qu’il y a
derrière la conscience et que l’on ne verra pas avec l’expérience du libre arbitre, tout ce qu’il y a
derrière les particules et que l’on ne verra pas avec la non séparabilité quantique, tout ce qu’il y a
derrière l’univers et que l’on ne verra pas. Ce tableau pourrait être le logo de notre représentation du
monde !
Bibliographie : Notre existence a-t-elle un sens ? JEAN STAUNE. Ed. Presses de la Renaissance, 2007
La science l’homme et le monde. JEAN STAUNE. Ed. Presses de la Renaissance, 2008
Notre existence a-t-elle un sens ? Jean Staune.
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