Les mélodies du cœur Alicia Ouellet, Frédérique Pellerin et Sédrine Simard, mai 2016 Résumé : La musique a-t-elle des effets sur le système cardiovasculaire ? Ouellet, A. Pellerin, F. & Simard, S. 2016. Rapport interne. Sciences, Cégep St-Félicien. L’influence sur la fréquence cardiaque et la pression artérielle d’une musique calme et d’une musique intense a été évaluée auprès de trois participants. En général, toute musique accélère le métabolisme, mais à différents niveaux selon son rythme et sa puissance sonore. Abstract : Does music affect the cardiovascular system? By Ouellet, A. Pellerin, F. & Simard, S. 2016. Internal report. Sciences, Cégep St-Félicien. The influence on heart rate and blood pressure of a soft music and an intense one has been evaluated on three participants. Generally, any music speeds up the metabolism, but on different levels according to its rhythm and its sound power. Mots clés : mélodie, musique, son, cœur, système cardiovasculaire, pression artérielle, fréquence cardiaque, rythme, système nerveux autonome, système nerveux parasympathique, système nerveux sympathique Au fil du temps, chaque civilisation a développé un système musical correspondant à ses goûts et à ses besoins. Cet art des plus anciens est un langage auditif faisant partie intégrante de la religion, mais c’est aussi une forme d'expression sentimentale qui a réussi à réunir plusieurs peuples. Aujourd'hui, de nombreux scientifiques vont au-delà du plaisir que celle-ci nous procure en étudiant ses effets physiologiques sur le corps humain, dont ses effets sur le système cardiovasculaire. Les hypothèses de départ furent les suivantes : Une musique douce ralentira notre métabolisme en diminuant notre fréquence cardiaque et notre pression artérielle. Une musique intense accélérera notre métabolisme en augmentant notre fréquence cardiaque et notre pression artérielle. Au cours de l’expérimentation, une sous-hypothèse a été ajoutée : La fréquence cardiaque moyenne pendant l’écoute d’une musique intense sera plus élevée que pendant l’écoute d’une musique calme. Notre but : vérifier ces hypothèses et ainsi évaluer l’influence des ondes sonores sur le rythme cardiaque et la pression artérielle des individus participant à notre expérimentation. Les mélodies du cœur 1 Théorie En plus d’avoir des effets sur la partie du cerveau responsable de l’audition, la musique aurait des effets sur le système nerveux autonome, c’est-à-dire le système nerveux responsable de toutes les fonctions automatiques de notre organisme telles que la digestion ou la respiration. Selon le rythme de la musique, le système nerveux autonome voit l’une de ses deux divisions plus particulièrement stimulée : le système nerveux parasympathique ou le système nerveux sympathique. Si le rythme de la musique est lent, c’est le système nerveux parasympathique qui est activé. Un neurotransmetteur, l’acétylcholine, est libéré. Par conséquent, l’activité des muscles respiratoires et des muscles cardiaques est alors ralentie, ce qui diminue la pression artérielle. Au contraire, un rythme rapide a pour effet une stimulation du système nerveux sympathique. Comme ce dernier a pour principale fonction d’accélérer le métabolisme, la vitesse à laquelle l’individu respire augmente, sa fréquence cardiaque est plus rapide et il voit le diamètre de ses vaisseaux sanguins diminuer. Or, cela a des répercussions négatives sur la pression artérielle. Une sensation de stress peut aussi être ressentie lorsque le système nerveux sympathique est stimulé. La fréquence cardiaque est le nombre de battements que fait le cœur en une minute. Au repos, un homme adulte et en santé a généralement une fréquence cardiaque d’environ 70 10 battements par minute. La pression artérielle, quant à elle, correspond à la pression qu’exerce le sang dans les artères systémiques, donc les artères qui partent du cœur pour se rendre dans les tissus. Elle comporte deux valeurs. La premier est la pression systolique, c’est-à-dire la pression maximale lorsque le cœur est contracté. La seconde est la pression diastolique prise au moment où le cœur subit un relâchement complet. Elles sont habituellement mesurées en millimètres de mercure (mm de Hg). Une pression artérielle au repos est considérée comme étant normale lorsqu’elle se situe en bas de 140/90 mm de Hg. Matériel Un tensiomètre Une montre cardiaque relié à un bandeau cardiaque Un chronomètre Un casque d'écoute Un Ipod Méthodologie Pour évaluer les effets de la musique sur la pression artérielle et sur le rythme cardiaque, nous avons choisi d'effectuer les manipulations sur les trois membres de l'équipe, soit trois filles de 18 ans. Nous avons expérimenté sur nous-mêmes étant donné qu'il ne devait pas y avoir d'écart significatif entre les âges pour que ce facteur ne soit pas une cause d'erreur. De plus, cela nous permettait d'avoir un certain contrôle sur nos résultats. Autrement dit, si une erreur était commise pendant l'expérimentation, le test en question pouvait être annulé en conséquence. Les mélodies du cœur 2 En continuant, afin d'obtenir des résultats très précis, les participantes devaient s'installer dans un endroit où il n'y avait aucun bruit et aucune distraction. En effet, nous souhaitions uniquement tester les effets sonores de la musique sur le corps humain. Finalement, nous devions nous installer confortablement, de manière à pouvoir rester parfaitement immobile et nous portions un casque d’écoute pendant toute la durée du test. Les musiques utilisées consistaient en une compilation de piano calme de l'artiste sudcoréen Yiruma et en une compilation de Iron Maiden d'une durée de 15 minutes. De même, chaque test avec les deux styles de musique était effectué avec la montre et avec le tensiomètre pour un total de 46 tests avec musique. Première partie : influence de la musique sur la pression artérielle Pour évaluer les effets des musiques calme et intense sur la pression artérielle, nous avons utilisé un tensiomètre. En commençant le test, le sujet installait le brassard du tensiomètre sur son bras de façon a ce qu'il ne bloque pas la circulation sanguine pour qu'un membre de l'équipe soit en mesure d'installer le tensiomètre sans trop faire bouger cette même personne. Le participant débutait alors l'expérience en faisant 10 minutes de silence. Une première prise de mesure était ensuite effectuée. Puis, le sujet écoutait 15 minutes de musique, pour enfin prendre une deuxième prise de mesure. L'expérience durait alors 25 minutes au total. Nous n'avions pas besoin de refaire un temps de silence après l'écoute de musique puisque prendre plusieurs prises de mesure avec un tensiomètre dans un court laps de temps risquait fortement de fausser les résultats de pression artérielle. Deuxième partie : influence de la musique sur le rythme cardiaque Pour évaluer les effets de la musique douce et intense sur le rythme cardiaque, nous avons utilisé une montre cardiaque reliée à un bandeau cardiaque. D'abord le sujet devait s'installer le bandeau cardiaque, puis il commençait par faire 10 minutes de silence. Ensuite, elle écoutait 15 minutes de musique, pour enfin refaire 10 minutes de silence. Le sujet était alors en expérimentation pendant 35 minutes. Les temps de silence au début de chaque test étaient effectués dans le but que le rythme cardiaque et la pression artérielle soient environ la même lors de la première prise de mesure. Troisième partie : influence du silence sur la pression artérielle et sur le rythme cardiaque. Finalement, afin de bien comparer nos valeurs, 2 tests de 35 minutes ont été réalisés sans musique avec la montre cardiaque et le tensiomètre par chaque participant. Les mélodies du cœur 3 Résultats D’abord, il est important de mentionner que tous les graphiques des essais individuels ainsi que les neuf tests de différence de moyennes seront mis en annexe. Cependant, ci-dessous se trouvent nos résultats principaux. En ce qui concerne la pression artérielle moyenne des trois sujets pendant l’écoute d’une musique douce (fig. 1), il est possible de constater que seules la pression diastolique du premier sujet et la pression systolique du troisième sujet ont connu une diminution. De plus, 50 % des essais indépendants utilisés pour le calcul de ces moyennes ont aussi subi une variation négative comme nous l’avion envisagé. Par ailleurs, les tests de différence de moyennes, des traitements statistiques permettant de comparer des données en tenant compte de leur moyenne, mais aussi de leur étendue et de leur nombre, ont permis de constater qu’uniquement un sujet avec une fréquence cardiaque significativement plus basse pendant l’écoute d’une musique classique que pendant les moments de silence. Fig. 1 : Variation moyenne de la pression artérielle pour chaque sujet pendant l'écoute d'une musique classique Pression artérielle (en mm Hg) 140.0 120.0 100.0 80.0 60.0 40.0 20.0 0.0 108.7 111.0 108.7 116.0 111.3 62.3 60.0 59.7 106.7 67.0 61.7 61.3 Sujets 1 2 Pression systolique avant Pression systolique après Pression diastolique avant Pression diastolique après 3 En ce qui a trait à la pression moyenne de chaque participant pendant l’écoute d’une musique plus intense (fig. 2) nous avons pu observer une augmentation de pression dans 60 % des essais, que ce soit la pression systolique ou la pression diastolique. Aussi, 15 % des tests sont restés constants tandis que 25 % d’entre eux ont diminué. Quant à la fréquence cardiaque moyenne, des tests de différence de moyennes ont aussi été effectués. Ils ont notamment démontré que deux des trois sujets avaient un rythme cardiaque moyen significativement plus élevé pendant l’écoute de heavy metal que pendant les repos. Ces mêmes traitements ont aussi été effectués afin de comparer la fréquence cardiaque moyenne pendant l’écoute de musique douce et pendant l’écoute de musique plus rythmée. Il s’est avéré que chez deux des trois participants elle était significativement plus élevée pendant l’écoute de la musique rapide, comme nous l’avions prévu. Les mélodies du cœur 4 Fig. 2 : Variation moyenne de la pression artérielle pour chaque sujet pendant l'écoute de musique heavy metal Pression artérielle (en mm Hg) 140.0 120.0 100.0 80.0 60.0 40.0 20.0 0.0 111.3 115.7 106 60.7 113.7 108.5 113 65.3 65.3 64.3 61.7 63.7 Sujets 1 2 Pression systolique avant Pression systolique après Pression diastolique avant Pression diastolique après 3 Discussion Interprétation Suite à l’analyse de nos résultats, il nous est impossible de confirmer notre première hypothèse, soit qu’une musique douce ralentirait notre métabolisme en diminuant notre fréquence cardiaque et notre pression artérielle. En effet, pour les deux signes vitaux, nous n’avons pas réussi à recueillir assez de données concluantes. Non seulement deux des participants ont vu leur rythme cardiaque significativement augmenter pendant l’écoute d’une musique calme, mais pas plus de la moitié des tests de pression ont subi une diminution. Cependant, il nous est possible d’affirmer notre deuxième hypothèse de départ stipulant qu’une musique intense allait faire augmenter autant notre pression artérielle que notre fréquence cardiaque puisque la pression, dans 60 % des essais, ainsi que la fréquence cardiaque, chez deux des trois sujets, ont augmenté de façon significative. La musique intense a donc des effets négatifs sur notre cœur. Il était alors intéressant de comparer la musique classique et le heavy metal pour savoir lequel accélérait le plus le métabolisme humain. Dans ce cas-ci, c’est le second stimule le plus notre organisme. Ainsi, même si la musique calme a certains effets sur le système cardiovasculaire, son influence est moindre que celle de la musique rythmée. Or, nous croyions que l’écoute d’une musique peu rythmée allait aider à la détente, mais, au contraire, il s’avère préférable de relaxer sans musique si on souhaite se départir de nos tensions. Notre hypothèse pour expliquer ce phénomène serait qu’en général, toute mélodie, qu’elle soit de nature intense ou non, stimule notre organisme, mais à différents niveaux selon le rythme de la musique écoutée. Les mélodies du cœur 5 Critique Nos résultats ne peuvent pas être considérés comme étant totalement fiables. En premier lieu, il nous était impossible d’avoir accès à une pièce insonorisée afin de n’évaluer que les effets sonores de la musique écoutée. Cependant, des efforts supplémentaires ont été faits afin de minimiser les impacts de cette cause d’erreur. D’abord, les tests étaient toujours effectués dans une maison calme où aucune autre personne n’était présente. Ensuite, des casques d’écoute et non des haut-parleurs ont été utilisés afin de réduire le plus possible l’influence des bruits ambiants. En second lieu, cette expérience demandait beaucoup de concentration de la part des participants. Non seulement ils devaient rester attentifs à la musique, mais ils devaient rester immobile pendant toute la durée des tests. Le cœur étant très sensible face aux perturbations extérieures et le bandeau cardiaque faisant preuve d’une précision remarquable, toutes les variations du rythme cardiaque sont visibles sur les graphiques. Il est fort probable que toutes ces distractions hors de notre contrôle aient pu influencer les tests de différence de moyennes. Par contre, notre projet comporte certains points forts. Par exemple, tous les essais étaient effectués les mercredis matin et les participants s’assuraient de toujours consommer la même nourriture avant les tests et d’avoir une bonne nuit de sommeil afin de ne pas influencer la pression artérielle. En plus de cela, les trois sujets n’avaient aucune préférence en ce qui concerne la musique et n’étaient pas malades au moment d’expérimenter. Aussi, aucune activité physique n’était pratiquée afin que le système nerveux sympathique ne soit pas déjà stimulé lors de la première prise de mesure. Suggestion Afin d’améliorer notre projet, il serait intéressant d’étudier les effets sonores de la musique sur plus de trois participants. Un plus grand échantillon de donné permettrait de corroborer encore plus nos résultats. En effet, il nous a été impossible de le faire par manque de temps ainsi qu’en raison du fait que ne pouvions expérimenter que le mercredi matin. De plus, il pourrait aussi être intéressant de comparer certains groupes d’âge, par exemple, ou encore de comparer l’influence qu’ont les ondes sonores sur un groupe mélomane et sur un autre qui ne l’est pas. Tant de facteurs qui pourraient varier nos résultats et nous mener à une autre conclusion. Conclusion À la lumière de ce qui précède, il s’avère que la musique a bel et bien une influence sur le système cardiovasculaire, c’est-à-dire qu’elle modifie la fréquence cardiaque ainsi que la pression artérielle des individus qui sont à son écoute. Cependant, aucune des deux musiques testées n’a été en mesure de nous amener dans un état de relaxation plus grand que celui du silence, contrairement à nos attentes. Toutefois, une musique intense stimule beaucoup plus notre cœur qu’une musique calme comme le veut la croyance populaire. Les mélodies du cœur 6 Médiagraphie BEKALEY, Paul. « Les effets du son sur l'être humain » dans E-monsite, [http://leseffets-du-son.e-monsite.com], (24 janvier 2016). BENCIVELLI, Silvia. « Pourquoi aime-t-on la musique ? », 22 juin 2015, [http://www.futura-sciences.com/magazines/sante/infos/dossiers/d/medecine-aime-t-onmusique-929/page/7/], (25 janvier 2016). 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Iconographie Les mélodies du cœur 7 #Figure section titre : https://pixabay.com/fr/amour-coeur-la-musique-clef-1077816/ #Figures 1 à 2 : Graphiques personnels. Alicia Ouellet, Frédérique Pellerin et Sédrine Simard. 2016. Cégep de Saint-Félicien. Reproduction interdite. Les mélodies du cœur 8