Les thèmes prédominants et les points névralgiques de l'histoire trouveront un
développement et une conclusion insolite, en contraste partiel avec la tradition des contes
classiques mais en plein accord avec les tendances de la littérature contemporaine :
La conclusion de l'histoire, en fait, restera en partie ouverte alors que, quelques ombres,
légères mais obscures, se poseront sur des noeuds bien précis de l'intrigue comme sur l'issue
des trois épreuves affrontées par l'Ogrelet.
Le dénouement légèrement opaque de quelques épisodes de l’histoire est en réalité un
stratagème littéraire mis en acte par l'auteure pour laisser au public enfantin la possibilité
de découvrir ou d'inventer certains "comment" ou certains "pourquoi" de l'aventure ; pour
ne pas fournir des solutions faciles et "prédigérées" mais laisser aux enfants une porte
ouverte sur l'imaginaire. De cette façon la jouissance du spectacle de la part des jeunes
spectateurs au lieu d'être unilatérale et passive se transforme en une contribution véritable
et active à la création de l'oeuvre.
TECHNIQUES ET LANGAGE THEATRAL UTILISES
"L'Ogrelet" est un conte au tempo tendre et sombre, conçu de manière totalement
originale, écrit par l'auteur canadienne Suzanne Lebeau.
Mais l'histoire puisent à pleines mains dans la tradition, en n'en proposant les topoi
caractéristiques de la structure du conte classique comme :
- La différence du protagoniste : l’Ogrelet ressemble à tous les autres enfants mais il
n'est pas comme eux : même s'il est un enfant de six ans, il est aussi grand et fort qu'un
homme adulte.
- La famille éclatée : le protagoniste de l'aventure n'a jamais connu son père et ce
manque, avec son intensité dramatique, sera un des vecteurs les plus forts qui le guidera
dans son parcours d'évolution et de transformation.
- La maison dans le bois : le lieu retiré, loin de la communauté des villageois, où la vie
semble suspendue, où se déroulent et se sont déroulés des faits magiques, étranges,
incompréhensibles, voire inquiétants, où tout a commencé et où, naturellement, tout devra
finir.
- Le bois lui-même : lieu de mystère, de parcours initiatique, de fuite, de refuge, le bois
est aussi le lieu dans lequel se matérialise le moment du contact profond entre l'homme et
la nature dans ses aspects les plus sombres, mais aussi ceux plus joyeux et lumineux : dans
ce lieu tous les éléments de la nature ( les arbres, les buissons, les animaux, les loups, les
papillons mais aussi les phénomènes atmosphériques comme le vent et la neige) prennent
part aux émotions des personnages, entrent dans la narration de l'aventure et participent
activement au dénouement final.
- Le sang : la goutte, la tache de sang, l'idée du sang sont dans de nombreux contes
classiques (“La Belle au Bois Dormant", "Barbe Bleue", "Cendrillon", "Blanche Neige" et
tant d'autres) le signal clair de la révélation d'un mystère, la clé de voûte d'une énigme, le
point de départ d'un parcours initiatique.
- Les trois épreuves : comme dans tout conte classique qui se prétend comme tel, là aussi
"L'Ogrelet" devra affronter trois épreuves difficiles pour atteindre enfin, l'heureux
dénouement de l'intrigue. Mais contrairement au conte classique, les épreuves que
L'Ogrelet devra affronter sont bien sûr contre quelque chose de monstrueux et de
dangereux mais, cette fois, l'antagoniste à combattre ne vient pas de l'extérieur mais de
l'intérieur, des profondeurs de l'âme du protagoniste.