1. À partir de vos connaissances et du document 1, caractérisez l’entrepreneur et son rôle dans le système capitaliste
selon Schumpeter. (8 points)
Rappel de méthode : pourquoi Schumpeter se pose cette question ; définition principale des termes ; puis explication à partir du cours
et de l’utilisation de citations.
Tout au long de son existence, Joseph Aloïs Schumpeter (1883-1950) a un contact constant avec le monde des affaires
et en connaîtra tous les hauts et les bas : expansion économique avant la Première Guerre Mondiale, difficultés de la
reconstruction germanique et inflation forte de 1921 à 1923, croissance des années 1924 à 1929, crise économique de 1929 qui
laisse des traces jusqu’au déclenchement de la Seconde Guerre Mondiale. Fort de cette expérience, il essaiera notamment dans
Capitalisme, socialisme et démocratie (1942) de comprendre le caractère cyclique de l’économie et le rôle de l’entrepreneur
dans cette dynamique.
Pour Schumpeter, l’entrepreneur est un acteur économique à part. A la manière de Max Weber, il en décrit un idéal-
type. La principale caractéristique de l’entrepreneur est d’être un innovateur, c'est-à-dire celui qui transforme une invention en
une application économique. Comme par exemple Denis Papin qui imagina la cocotte-minute à partir du principe scientifique
de la pression occasionnée par la vapeur d’eau dans un récipient clos. A ce titre, il est capable de « révolutionner la routine de
production ». La mise en place d’une innovation risque en effet de changer les habitudes de production. Ce fut par exemple
l’apport de Taylor à l’économie dont l’innovation, le taylorisme, a modifié en profondeur les manières de produire en Occident.
Il joue donc un rôle capital dans l’économie puisque il apporte les innovations qui sont au cœur des cycles économiques de la
production et de l’extension progressive du développement.
Pour tenir ce rôle, l’entrepreneur est un individu qui dispose de qualités particulières. Il n’est pas nécessairement
rationnel mais a bien plus une capacité à se projeter dans l’avenir. C’est ce qui lui permet « d’agir avec confiance au delà de la
zone délimitée par les balises familières », c'est-à-dire qu’il arrive à gérer une situation inconnue engendrée par l’innovation.
De plus, il dispose d’une opiniâtreté et d’un charisme qui lui permettent de « surmonter les résistances » économiques et
sociales qu’il pourrait rencontrer en mettant en place son innovation. C’est par exemple grâce à sa capacité à convaincre les
milieux des affaires américains qu’Edison a réussi à généraliser l’utilisation de l’électricité comme source d’énergie à la fin du
XIXème siècle.
2. Expliquez la phrase soulignée. (document 1) (6 points)
Rappel de méthode : reformulation en une affirmation qui montre le mécanisme économique à détailler ; explication puis illustration
à partir du cours et du document.
En innovant, l’entrepreneur tient un rôle central dans l’économie capitaliste selon Schumpi. Son intervention explique
le caractère cyclique de l’économie, notamment pour les cycles longs (environ 50 ans) qu’on appelle cycles de Kondratieff.
Le premier effet de l’innovation est tout d’abord d’inciter d’autres entrepreneurs à innover, par imitation, par mise en
confiance ou simplement par opportunité étant donnés les nouveaux besoins qui ont émergé suite à la première innovation.
L’innovation que fut le moteur à explosion a eu pour effet de développer les innovations que furent l’automobile, les pompes à
essence, les routes goudronnées, les lieux de tourisme, etc. Cette grappe d’innovations a pour effet global de rendre disponible
de nouveaux produits sur le marché et dans le même temps de réduire les coûts de production. En réduisant les coûts unitaires
de production, il est désormais possible de produire plus avec des dépenses identiques, ce qui a pour effet d’augmenter la
production et donc de causer une phrase de « prospérité ». On peut par exemple attribuer la forte croissance des Trente
Glorieuses aux innovations découlant de l’introduction du moteur électrique et du plastique.
Cependant, dès qu’une grappe d’innovations apparaît, il s’opère une révolution de « l’organisme économique ». Les
anciennes entreprises n’innovant pas ne peuvent pas réduire leurs coûts de production et leurs prix, pas plus qu’elles ne peuvent
proposer des nouveaux produits. Elles sont amenées à perdre progressivement des parts de marché jusqu’à finalement faire
faillite. Ce processus de mutation sectorielle est appelé par Schumpeter la destruction créatrice. On en voit un exemple avec la
disparition progressive des maréchaux-ferrants au début du XXème siècle quand se généralisent la voiture et le métier de
garagiste et de mécanicien. Au bout d’un moment, les fermetures d’entreprises non innovantes sont plus visibles que la
croissance des entreprises innovantes. La production totale de l’économie progressera alors à un rythme moins soutenu
qu’auparavant. C’est une période de récession qui commence alors, constituant la deuxième phase du cycle Kondratieff.
3. La description de l’entrepreneur par Schumpeter correspond-elle aux motivations des entrepreneurs en ce début de
XXIème siècle ? (document 2) (6 points)
Rappel de méthode : rappel de la thèse des questions 1 et 2 puis explication du rapport entre le document 3 et la thèse sans oublier
d’utiliser des citations.
Selon Schumpeter, les entrepreneurs ont pour rôle d’amener des innovations dans l’économie. Leurs qualités
exceptionnelles leur permettent de remplir ce rôle : leur capacité à anticiper, leur volontarisme et leur charisme permettent de
dépasser les obstacles liées au cours normal des affaires.
L’analyse des motivations des entrepreneurs à créer leur entreprise permet de confirmer mais aussi de nuancer cette
théorie. On constate tout d’abord que la capacité à anticiper et le volontarisme caractérisent en partie les entrepreneurs,
conformément à la théorie de Schumpeter. Ainsi, selon l’INSEE et l’enquête SINE de 2006, environ 38% des entrepreneurs
interrogés (hommes et femmes confondus) déclarent avoir créé leur entreprise par « goût d’entreprendre et par désir d’affronter
de nouveaux défis » (signe de volontarisme) et 11% d’entre eux déclarent qu’ils ont eu « une idée nouvelle de produit, de
service, ou de marché » (signe de capacité à anticiper).
Mais on constate dans le même temps que les caractéristiques mises en avant par Schumpeter ne sont pas les plus
importantes pour comprendre les motivations des entrepreneurs. En effet, la principale raison évoquée par les entrepreneurs
pour créer une entreprise est le fait « d’être indépendant », c’est-à-dire refuser l’imposition d’une hiérarchie. 59% d’entre eux
citent cette raison dans l’enquête SINE de 2006. L’idéal-type que dresse Schumpeter ne permet donc pas de comprendre la
motivation première des entrepreneurs français en ce début de XXIème siècle.