1 - African Development Bank

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INTEGRATION FINANCIERE
DANS L’ESPACE CEDEAO :
VERS
LA
CREATION
D’UN
FINANCIER REGIONAL
CENTRE
SOMMAIRE
Liste des abréviations, sigles & acronymes....................................................................................... 3
INTRODUCTION GENERALE .......................................................................................................... 4
I.
ETAT ACTUEL DU SYSTEME FINANCIER REGIONAL ..................................................... 6
I.1. Circonstances propices au lancement d’institutions financières régionales ......................... 7
I.2. Une intégration financière incomplète ........................................................................................ 8
I.3. Les Banques Régionales de Développement (BRD) : vecteurs d’intégration financière ...... 9
I.4. Rôle de la BAD et des Banque Régionales de Développement (BIDC, BOAD) dans le
soutien et l’émergence du secteur bancaire régional et panafricain ?......................................... 11
II.
PANORAMA DES MARCHES FINANCIERS ....................................................................... 14
II.1. Présentation du marché financier régional ............................................................................. 14
II.2. Les marchés financiers ouest-africains, une alternative au financement bancaire? .......... 14
II.3. Vers la création d’un centre financier régional ....................................................................... 17
III.
INTEGRATION FINANICIERE DANS L’ESPACE CEDEAO : OBJECTIFS
STRATEGIQUES ET PERSPECTIVES ............................................................................................. 19
III.1. Objectifs stratégiques de l’intégration financière régionale : Principaux défis et
opportunités ........................................................................................................................................ 19
III.2. Perspectives ................................................................................................................................ 19
CONCLUSION GENERALE............................................................................................................. 22
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................... 24
ANNEXES :.......................................................................................................................................... 26

Caractéristiques des bourses ouest-africaines. ....................................................................... 26
Liste des abréviations, sigles & acronymes
ACP : Afrique, Caraïbes et Pacifique
BAD : Banque Africaine de Développement
BCEAO : Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest
BIDC : Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO
BizClim : Facilité Climat des Affaires ACP
BOAD : Banque Ouest-Africaine de Développement
BRD : Banque Régionale de Développement
CEA : Commission Economique pour l’Afrique/ Communauté économique africaine
CEDEAO : Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest
CER : Communautés économiques régionales
CFA : Communauté financière africaine
CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement
FAD : Fonds Africain de Développement
FMI : Fonds Monétaire International
IFI : Institution Financière Internationale
NEPAD : Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique
PIB : Produit intérieur brut
PNB : Produit national brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
PROPARCO : Programme de Participation et de Coopération, filiale de l’AFD
RTGS : Système de règlement brut en temps réel
UA : Union Africaine
UE : Union Européenne
UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine
WABA : Association bancaire d'Afrique occidentale
WAMA : West African Monetary Agency/Agence monétaire d’Afrique de l’Ouest
WAMI :West African Monetary Institute/Institut monétaire ouest-africain
ZMAO : Zone Monétaire de l’Afrique de l’Ouest
INTRODUCTION GENERALE
L’Afrique de l’Ouest dont les quinze (15) pays sont regroupés au sein de la
Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est une
région en pleine intégration, les marchés nationaux se décloisonnent peu à peu et
s’ouvrent à la concurrence à la faveur des progrès dans le maillage des économies, de
l’harmonisation du cadre des affaires. L’intégration financière est en bonne voie,
tandis que la coordination des politiques économiques à travers une batterie
d’indicateurs de convergence ouvre la voie à une monnaie unique pour l’ensemble
de la région. Néanmoins, de nombreux obstacles à la libre circulation des hommes,
des marchandises et des capitaux sont encore à surmonter pour déboucher sur un
marché unique.
Les derniers développements de l’intégration financière dans la région ouvrent des
perspectives et suscitent de nombreuses opportunités, qui permettront aux
investisseurs régionaux et internationaux d’avoir aussi une meilleure visibilité sur
l’environnement des affaires dans l’espace CEDEAO.
Le potentiel économique de l’Afrique de l’Ouest est grand : abondance des
ressources naturelles, notamment minières et pétrolières, sous-exploitées, un marché
d’environ 300 millions d’habitants, dont le niveau de vie croît avec l’émergence
d’une classe moyenne. C’est l’un des marchés d’Afrique en plus forte croissance du
fait de la croissance démographique, de la jeunesse des consommateurs, de
l’urbanisation et une croissance stable.
Le secteur bancaire et financier bénéficie déjà de la dynamique régionale, soit à la
faveur de la modernisation et de l’harmonisation du cadre des affaires, soit grâce à la
nouveauté et les caractéristiques propres qui annihilent les entraves habituelles
(infrastructures, télécommunications, haute technologie). La régionalisation du
secteur bancaire, ainsi que celle du marché des capitaux, permettra aux entreprises
de financer leurs activités et investissements dans la région.
Depuis quelques années, la CEDEAO est en pleine voie vers l’intégration financière.
Les plus grandes avancées ont été opérées au sein de l’Union Economique et
Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA), qui regroupe 8 pays au sein d’une union
monétaire et douanière, et qui les dote d’institutions, d’un cadre des affaires et d’un
programme économique communs. Grâce à ces avancées, les échanges intra-UEMOA
en pourcentage du commerce extérieur total des ces 8 pays, quoique faibles (14%),
n’en figurent pas moins parmi les plus élevés des communautés économiques
africaines. Au niveau de la CEDEAO elle-même, qui regroupent tous les pays de
l’Afrique de l’Ouest, les avancées sont beaucoup plus lentes, mais les modalités
envisagées sont semblables même si le calendrier diffère, et la feuille de route est
désormais élaborée par les deux institutions en étroite concertation.
Une énorme « énergie économique » serait libérée en l’absence des entraves, dont les
conséquences en termes de compétitivité, d’accumulation et d’allocation des
ressources, de spécialisation et de diversification des économies sont désastreuses.
Ces entraves sont occasionnées par un mauvais environnement des affaires et un
manque d’infrastructures et des services publics de base: énergie, transports,
télécom, eau, sécurité, formalités administratives, impôts. Les entraves aux échanges
empêchent une régionalisation des chaînes de valeur, c’est-à-dire la possibilité pour
les entreprises d’avoir clients et fournisseurs dans d’autres pays de la région. Partant,
elles empêchent de réaliser les gains en termes d’efficacité économique qui découlent
d’une spécialisation intra-régionale pour exploiter les avantages comparatifs et de
l’obtention, par les entreprises, de la taille critique permettant les économies d’échelle
et l’innovation.
A la lumière de tous ces éléments qui décrivent la réalité du processus d’intégration
dans la région, on est en droit de s’interroger sur la démarche optimale à suivre pour
l’instauration et le renfoncement de l’intégration financière au sein de l’espace
CEDEAO.
Pour répondre à cette problématique, cet article présente un état actuel du système
financier régional (chapitre 1), le panorama des marchés financiers régionaux et le
processus aboutissant à la création d’un centre financier régional (chapitre 2), ainsi
que les objectifs stratégiques qui sous-tendent l’intégration financière régionale avec
les perspectives et les mécanismes de mise en œuvre de l’intégration financière dans
l’espace CEDEAO (chapitre 3).
I.
ETAT ACTUEL DU SYSTEME FINANCIER REGIONAL
Le système financier doit accompagner les entreprises dans leur développement sur
le plan régional, y financer leurs activités d’exploitation et leurs investissements. Par
ailleurs, les entreprises doivent pouvoir lever directement des capitaux et doivent
également mobiliser des fonds propres à travers le réseau financier régional.
Dans l’espace CEDEAO, des réseaux bancaires régionaux se constituent, tandis que
les trois bourses des valeurs, portées par une reprise des cours ces derniers temps,
essaient de se rapprocher, tendant vers un centre financier régional. Institutions et
marchés sont-ils prêts à relever les défis? Comment faire en sorte que le secteur
financier et les marchés de capitaux des pays de la CEDEAO de la région gagnent en
« maturité » au même titre que celui des autres marchés émergents africains
(particulièrement le marché sud-africain) ?
Après la remise sur les rails des banques nigérianes, les établissements de la zone ont
repris leur politique de consolidation. En 2011, le total bilan des cinquante premières
banques d'Afrique de l'Ouest a progressé de 14,6 % par rapport à 2010. À cela, une
raison principale : l'amélioration de la santé des banques nigérianes, qui commençait
à se faire sentir en 2010 mais aura vraiment été confirmée fin 2011 et début 2012.
D'une part, les banques de ce pays, qui restent dominantes dans la zone, ont repris
leur agressivité commerciale, mais tout en se tenant à l'écart des investissements
risqués. Le total bilan des 50 premières banques d'Afrique de l'Ouest atteint 186,2
milliards de dollars. Poursuivant sa conquête africaine en visant les premières places
dans chaque pays, ECOBANK s'est offert The Trust Bank au Ghana et tente de
finaliser sa couverture territoriale dans toute l’Afrique sub-saharienne. D’ailleurs, il
est à remarquer que les établissements originaires d'Afrique de l'Ouest restent
moteurs dans la consolidation panafricaine. First Bank of Nigeria, qui s'est installée
en RD Congo en reprenant la Banque internationale de crédit (BIC), ne cache plus ses
intentions de se développer partout dans la sous-région. Son compatriote Guaranty
Trust Bank, de son côté, a débuté ses activités en Côte d'Ivoire. ORAGROUP
continue également son expansion avec de nouvelles acquisitions. Enfin, tout en
prenant le nom de son actionnaire ivoirien NSIA (assurances), BIAO est de son côté à
l'affût de toutes les opportunités bancaires (Guinée).
I.1. Circonstances propices au lancement d’institutions financières
régionales
Ce n’est que progressivement, alors que la demande en services financiers et
bancaires régionaux était en lente croissance, que certaines banques ont senti un
marché prometteur et ont cherché à bénéficier d’une position de leader sur ce
nouveau créneau. Il s’en est suivi une accélération rapide de l’activité des banques
privées dans la région.
Depuis le milieu des années 1990 et surtout depuis le début des années 2000, le
secteur bancaire s’est développé fortement dans la région, principalement sur la base
de stratégies régionales expansionnistes de la part de banques privées africaines.
Le secteur bancaire est dominé par les banques nigérianes (19 des 20 plus grandes
banques et 20 des 30 plus grandes banques de la région sont nigérianes), un
phénomène encore renforcé par un processus de consolidation sous l’impulsion des
autorités nationales et régionales. Les banques nigérianes opèrent encore peu hors de
leur pays, mais leur taille et, pour certaines, leur santé financière les rend aptes à
accompagner le mouvement de régionalisation qui se dessine.
Malgré la domination nigériane, ECOBANK, la banque créée par le secteur privé
ouest-africain sous l’impulsion des institutions financières régionales (BIDC, BOAD)
et dont le réseau couvre presque toute l’Afrique subsaharienne aujourd’hui, est
parvenue à se maintenir au 4ème rang du classement régional.
En dépit de ces évolutions, le secteur bancaire reste sous-développé et fragile du fait
de :
- la structure des économies (secteur privé sous-développé et dépendance vis-àvis de quelques matières premières) est une source de fragilité pour le secteur
bancaire (forte concentration des risques et sensibilité aux termes de
l’échange) ;
- crises politiques et constitutionnelles passées et présentes dans certains pays
(Togo, Mali, Guinée,…) ;
- beaucoup de banques, notamment petites et moyennes n’ont pas atteint une
solidité financière suffisante et ne respectent pas tous les ratios prudentiels;
- le coût et l’incertitude liés à toute action juridique grève les banques d’un
recours et accroît le risque de prêt.
I.2. Une intégration financière incomplète
Le processus d’intégration financière passe par l’intégration des structures bancaires
et celle des marchés financiers. L’intégration régionale des banques et des institutions
financières au sein de la CEDEAO est encore incomplète, bien que dans tous les pays
de la région, il n’ya pas de discrimination ou de barrières pour les banques à capitaux
étrangers par rapport aux banques à capitaux nationaux.
Au sein de la CEDEAO, les banques représentent le plus vaste segment du secteur
financier. Leur importance, en termes de proportion des actifs financiers contrôlés,
varie d’environ 60 %. Au Nigéria, les banques à capitaux nationaux dominent le
secteur bancaire, alors que dans les autres pays, il s’agit généralement de banques
contrôlées par des capitaux étrangers.
Globalement, le secteur financier au sein de la CEDEAO n’est pas très développé.
L’accès au secteur financier est limité. Ainsi, le taux de bancarisation reste faible.
En ce qui concerne l’intégration des marchés financiers ouest-africains, la croissance
rapide des marchés boursiers nigérian et ghanéen envoie le signal puissant d’une
forte demande en marchés des capitaux actifs dans la région. L’ouverture de ces deux
marchés avec celui de l’UEMOA encouragerait certainement une progression de
l’intégration des capitaux. Dans ce contexte, les initiatives sont déjà prises pour relier
ces marchés boursiers afin d’élargir le développement des marchés des capitaux au
sein de la CEDEAO.
Par comparaison avec de nombreux autres pays, les marchés des valeurs mobilières
de l’Afrique de l’Ouest sont de petite taille. Par exemple, la Bourse de Johannesburg,
qui est la plus grande de l’Afrique, a plus de capitaux que les trois autres Bourses de
la CEDEAO.
L’intégration financière régionale au sein de la CEDEAO, comme dans d’autres pays
africains, peut générer des avantages par le biais de trois canaux. Tout d’abord, elle
représente une mesure d’incitation puissante pour mettre en place des réformes
financières au niveau national. Ensuite, elle accroît l’efficience et la rentabilité des
institutions financières en augmentant l’échelle de leurs opérations. Enfin, en
accroissant leur compétitivité face à la concurrence internationale, elle garantit la
survie des institutions financières nationales et leur transformation en des acteurs de
stature régionale et internationale1.
Ces dernières années, les pays ont accompli des progrès remarquables dans la mise
en œuvre de réformes dans le secteur financier. Bien qu’à des degrés divers, tous ont
amélioré leur cadre juridique et réglementaire, recapitalisé les banques et renforcé la
solidité et l’efficience du secteur financier. En profitant de ces réformes, les
gouvernements des pays ont pris des mesures au cours de ces dernières années pour
redynamiser l’intégration financière de la CEDEAO. En effet, un certain nombre
1
BAD, 2010
d’idées, d’études et de programmes sont en attente d’exécution, dans le cadre de la
CEDEAO vision 2020. Par exemple, des projets d’infrastructure majeurs, consistant à
relier les différents pays entre eux par un réseau routier ou ferroviaire, sont en train
d’être examinés. Si ces projets se matérialisent, ils permettront de relancer le
commerce et l’intégration financière.
Le plan d’action régional doit être très ambitieux et prendre en compte pratiquement
toutes les mesures nécessaires à la progression de l’intégration financière, avec à la
clé, la création d’une Autorité de Supervision unique.
I.3. Les Banques Régionales de Développement (BRD) : vecteurs
d’intégration financière
Dans le cadre de son programme d’intégration et de développement, la CEDEAO a
mis en place un certain nombre d’institutions pour favoriser la coopération financière
régionale. Afin d’encourager la création d’institutions financières régionales, la
CEDEAO a entrepris de déréglementer l’environnement financier et a créé des
Banques Régionales de Développement pour soutenir l’investissement et favoriser la
coopération financière dans la région. Les principales institutions financières
régionales sont: la BIDC et la BOAD créée par l’UEMOA.

La Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC)
En 1975, la CEDEAO a institué le Fonds pour la Coopération, la Compensation et le
Développement (FCCD) pour compenser les pertes de recettes consécutives à la
libéralisation du commerce régional, assurer un développement économique régional
équilibré, et aider les pays membres les moins développés de la Communauté. Le
FCCD a été par la suite transformé en Banque d’Investissement et de Développement
de la CEDEAO (BIDC). La Banque est devenue opérationnelle le 1er janvier 2004. La
vision de la BIDC est de devenir la première banque régionale de financement de
l’investissement et du développement en Afrique de l’Ouest, une puissante
institution financière de promotion et de financement du secteur privé et un véritable
instrument de lutte contre la pauvreté, de création de richesse et de promotion de
l’emploi en vue du bien-être des populations de la région.
Sa mission est de contribuer à la création des conditions permettant l’éclosion d’une
Afrique de l’Ouest économiquement forte, industrialisée, prospère et parfaitement
intégrée tant au plan interne que par rapport au système économique mondial, afin
de profiter des opportunités offertes par la mondialisation. La BIDC s’attèle
actuellement à poursuivre la mission qui lui a été assignée par la CEDEAO, en
contribuant à l’essor économique et social de l’Afrique de l’Ouest à travers le
financement des projets et programmes de la CEDEAO et des Etats membres. En
outre, la Banque continue à soutenir le secteur privé et le commerce intra-régional.
40% de ses interventions sont destinés à ces activités. La BIDC a soutenu activement
la promotion de projets régionaux spécifiques, notamment la création d’une
compagnie aérienne régionale ASKYE Airlines, le lancement d’un Fonds
d’investissement pour les énergies renouvelables, d’un Fonds d’investissement des
télécoms et des TIC, d’un Fonds de garantie des industries culturelles etc.

La Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD)
La Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD) est l’institution commune de
financement du développement des Etats de l’Union Monétaire Ouest-Africaine
(UMOA). Elle a été créée par Accord signé le 14 novembre 1973. La BOAD est
devenue opérationnelle en 1976. La BOAD a pour objet, de promouvoir le
développement équilibré des Etats membres et de réaliser l’intégration économique
de l’Afrique de l’Ouest en finançant des projets prioritaires de développement.
En vue de soutenir davantage les orientations et priorités de développement définies
par les Etats dans ce nouveau contexte économique, la Banque a également mis en
place, avec la collaboration de ses partenaires, des instruments de financement qui
complètent son action. Il s’agit des structures ci-après :
-
-
-
CAURIS Investissement SA, a pour objectif d’apporter le complément de
fonds propres nécessaires aux entreprises pour le financement d’activités
viables.
Le Fonds de Garantie des Investissements Privés en Afrique de l’Ouest «Fonds
GARI» vise, pour l’ensemble des pays membres de la CEDEAO, à aider de
manière significative les entreprises en offrant aux banques et établissements
financiers les garanties dont celles-ci pourraient avoir besoin pour l’octroi aux
entreprises des financements à moyen et long termes nécessaires à la
réalisation des investissements productifs.
Le Projet de Développement du Marché Financier de l’UEMOA : ce projet
s’inscrit dans une stratégie globale de l’Union visant à créer un environnement
économique intégré, propre à assurer une croissance économique durable.
Projet à caractère multidimensionnel, fédérateur et innovateur, il rassemble
l’ensemble des institutions et des acteurs clés du marché financier régional
(BCEAO, Commission de l’UEMOA, BOAD, Conseil Régional de l’Epargne
Publique et des Marchés Financiers, Bourse Régionale des Valeurs Mobilières
et Sociétés de Gestion et d’Intermédiation) et est financé par un groupe
d’institutions internationales de financement du développement (Groupe de
la Banque Mondiale, Agence Française de Développement et Agence
Canadienne de Développement International). Il vise la réalisation des
principaux objectifs suivants :




contribuer au développement du marché financier régional;
renforcer la capacité institutionnelle des acteurs clés du marché financier
régional et des institutions de l’UEMOA ;
mobiliser les financements publics et privés pour le développement des
infrastructures dans la zone ;
attirer vers la sous-région plus d’investissements étrangers.
Comme on le voit, les BRD (BIDC, BOAD) contribuent à l’émergence d’un secteur
financier régional, mais jusqu’ici, l’essentiel de leur soutien a consisté en des
financements relativement classiques pour apporter des ressources longues aux
institutions bancaires privées de la région. D’autres formes de soutien, plus
innovantes, peuvent aujourd’hui être envisagées. Il pourrait être pertinent d’aider les
banques à accéder aux marchés de capitaux internationaux où elles sont trop peu
connues, en garantissant par exemple leurs premières émissions obligataires. De
même, les BRD pourraient contribuer à organiser le marché de la syndication et
encourager les banques régionales à travailler ensemble pour dépasser les contraintes
imposées par leur petite taille.
I.4. Rôle de la BAD et des Banque Régionales de Développement
(BIDC, BOAD) dans le soutien et l’émergence du secteur bancaire
régional et panafricain ?
Les transformations récentes du paysage bancaire doivent conduire la BAD et les
BRD à repenser leur stratégie, que ce soit vis-à-vis des groupes bancaires régionaux,
amenés à jouer un rôle de plus en plus important, ou des autres acteurs bancaires
internationaux. La BAD et les Banques Régionales de Développement doivent faire
du soutien aux institutions bancaires et financières un axe majeur de leur
intervention.
Dans un environnement changeant, la BAD et les BRD doivent adapter leur stratégie
pour contribuer à développer un secteur financier pérenne et performant. Dans ce
contexte, la BAD et les Banques Régionales de Développement (BRD) doivent faire
du renforcement des systèmes financiers africains en général une priorité.
Aujourd’hui, l’espace CEDEAO compte quelques banques à vocation panafricaine
ECOBANK, Bank of Africa Group (BOA), United Bank for Africa (UBA), présentes
dans plusieurs pays africains, et en forte croissance. Ces nouveaux acteurs, avec de
plus grandes ambitions que les banques traditionnelles étrangères, ont contribué
depuis dix ans à accroître le niveau de concurrence et à augmenter l’activité bancaire
observée en Afrique de manière générale. Alors que le crédit au secteur privé oscillait
autour de 10 % du PIB tout au long des années 1990, il dépasse aujourd’hui 20 %2.
Le secteur bancaire régional, avec sa bonne connaissance de l’environnement
régional, joue un rôle moteur dans le développement de certains segments de
marché : PME, clientèle rurale, clientèle à bas revenu, etc., moins courtisés par les
banques étrangères. Les banques régionales doivent, pour se développer, pénétrer
ces marchés plus risqués qui constituent leurs principaux relais de croissance quand
les banques internationales, elles, dominent des segments plus faciles d’accès
(grandes entreprises, etc.).
En outre, les banques régionales doivent se projeter davantage sur le long terme dans
les marchés nationaux que les banques étrangères, ce qui les poussera naturellement
à davantage s’impliquer dans le développement et la structuration de ces marchés. À
la différence des banques étrangères, elles n’ont pas d’autres alternatives que de
croître sur les marchés nationaux, voire régionaux, n’ayant pas la taille suffisante
pour pénétrer d’autres marchés hors du continent. Le développement d’un secteur
bancaire à capitaux africains généralement apparaît comme plus pérenne et
certainement plus favorable à la pénétration de nouveaux marchés qu’un
développement s’appuyant sur les groupes étrangers. Il doit donc être fortement
encouragé par la BAD et les BRD.
Néanmoins, un développement totalement endogène n’est pas non plus souhaitable.
En effet, le secteur a besoin de ressources extérieures pour croître rapidement et
rattraper son retard. Or, les banques étrangères ont généralement plus de moyens
que les banques régionales. Adossées la plupart du temps à de grands Groupes, elles
disposent d’une expertise que celles-ci n’ont pas. Elles ont aussi plus facilement accès
aux ressources humaines les plus expérimentées, possèdent des capacités de
formation et d’innovation plus importantes et jouent ainsi un rôle structurant sur les
marchés locaux en diffusant leur savoir-faire. Elles disposent en outre de capacités
d’intervention plus grandes, puisqu’elles peuvent syndiquer des financements
auprès de leur Groupe, et des conditions de refinancement compétitives. Ensuite, les
marchés africains seront logiquement de plus en plus intégrés dans l’économie
mondiale, impliquant une augmentation des transactions financières entre l’Afrique
et le reste du monde. Cela ne peut se faire que s’il existe des liens entre le secteur
financier africain et l’extérieur. Or, les banques internationales sont mieux
positionnées pour connecter les économies africaines au reste du monde. Ainsi, si le
développement du secteur bancaire africain sera logiquement tiré par des acteurs
2
Proparco, Bureau Régional de l’Afrique de l’Ouest
régionaux, il est important que le continent reste ouvert au secteur financier
extérieur.
Il s’agira de développer un secteur bancaire régional performant impliquant de
favoriser l’émergence de champions, qui pourront atteindre une taille suffisante pour
générer des rendements d’échelle. Cela peut se faire par la mobilisation d’une large
gamme d’outils financiers, qu’il s’agisse notamment de prises de participation, de
lignes de bilan bancaires et de garanties. Au-delà des Groupes déjà bien constitués
(ECOBANK, BOA, UBA), qui ont été accompagnés par les institutions financières
régionales, deux types d’acteurs peuvent s’avérer encore de bons candidats : Les
Groupes régionaux ayant déjà atteint une taille critique et les grandes banques des
principaux centres financiers comme le Nigéria, par exemple.
Dans la première catégorie figurent des banques telles qu’ORAGROUP. Ces banques
ont une bonne connaissance des marchés dans lesquels elles évoluent mais sont
limitées par leurs moyens. Elles peuvent ainsi être utilement appuyées par des
apports de capital de la BAD et des BRD.
Les banques des centres financiers sont restées longtemps à l’intérieur de leurs
frontières et n’ont commencé que récemment leur expansion régionale et
panafricaine : les banques nigérianes ont préféré la création d’un réseau ex nihilo
(UBA, GT Bank, Zenith Bank, Access Bank). Cette expansion sur des marchés mal
connus et difficiles d’accès demeure néanmoins timide. Dans ce contexte, la BAD et
les BRD ont un rôle à jouer pour encourager et accompagner ces banques hors de
leurs frontières.
La plupart des banques Ghanéennes par exemple n’ont aucune banque
correspondante en zone UEMOA, malgré le positionnement du Ghana au cœur de
cette zone, ce qui limite le champ des opérations qu’elles peuvent effectuer avec leurs
clients actifs dans cette région.
Ainsi, de manière générale, si les banques régionales ont confiance dans les marchés
africains et souhaitent s’y développer, elles manquent de ressources et ont à cet égard
besoin du soutien de la BAD et des BRD.
La situation est exactement inverse pour les banques étrangères, pour lesquelles les
niveaux de risques que présente l’Afrique sont largement mieux connus que les
niveaux de rentabilité que l’on observe sur le continent. Le secteur bancaire africain
est le plus rentable du monde; pourtant, les investisseurs étrangers ont jusqu’ici
montré peu d’intérêt pour ce marché. Hormis les banques européennes
traditionnelles (SG, BNP PARIBAS, Barclays, Standard Chartered …), dont les parts
de marché s’effritent, et quelques très rares banques de pays émergents, les seuls
acteurs du développement du secteur bancaire ouest-africains sont africains. Le
niveau de rentabilité des fonds propres (ROE) en Afrique était de 19 % en moyenne
sur 2007-2010, contre seulement 11 % en Europe alors que les niveaux de
capitalisation des banques africaines sont au-dessus de la moyenne mondiale3.
La capacité de rebond des secteurs financiers ouest-africains montre que les
économies font preuve d’une forte résilience à des situations de crise : les résultats
sont volatiles, mais les effets de rattrapage permettent de compenser les mauvais
exercices.
II.
PANORAMA DES MARCHES FINANCIERS
II.1. Présentation du marché financier régional
L’Afrique de l’Ouest compte trois bourses des valeurs : une bourse régionale à
Abidjan, couvrant la zone UEMOA, deux bourses nationales à Accra et Lagos.
Leur taille, la valeur des transactions et partant leur liquidité sont encore limitées.
Les trois bourses ont connu récemment une reprise marquée, y compris la bourse
ivoirienne jusqu’ici très déprimée du fait de la crise politique qu’a traversé le pays.
Le nombre d’entreprises cotées reste faible (respectivement : environ 260 à Lagos, 35
à Abidjan et 39 à Accra), mais est en croissance rapide depuis quelques années.
La mise des trois bourses en réseau permettra la cotation simultanée des entreprises
sur les trois bourses. Mais, cela nécessitera au préalable d’harmoniser la
réglementation (notamment conditions de cotation et règles de transparence des
marchés).
II.2. Les marchés financiers ouest-africains, une alternative au
financement bancaire?
Les marchés financiers ouest-africains peuvent être en mesure de gagner en
efficience et de constituer une véritable alternative au financement bancaire classique
pour les émetteurs qui souhaitent y avoir recours. Or en dehors du marché boursier
nigérian, les marchés ouest-africains peinent à prendre leur envol malgré les progrès
constatés.
Une régulation et des réformes appropriées peuvent contribuer au développement
de ces marchés en agissant sur un certain nombre de causes qui empêchent à ce jour
3
PROPARCO, Bureau Régional de l’Afrique de l’Ouest
leur éclosion. Ces causes sont multiples, mais celles reprises brièvement ci-dessous
peuvent être considérées comme parmi les plus significatives. Elles doivent être
appréhendées de manière globale.
a. La taille des acteurs
Pour qu’il fonctionne, un marché boursier a besoin d’acteurs de taille, qu’il s’agisse
d’émetteurs ou d’investisseurs. En effet, la taille des intervenants est un élément
d’arbitrage entre le crédit bancaire classique et le marché boursier. Les émetteurs de
petite ou moyenne taille n’ont pas réellement besoin de faire appel au marché. Ils
peuvent se contenter de s’adresser aux banques qui regorgent aujourd’hui de
liquidités. Il faut, en outre, que le nombre de sociétés cotées soit important. Or, on
observe que très peu de sociétés font admettre leurs titres à la négociation sur les
marchés boursiers ouest-africains et certaines, prises individuellement, représentent
parfois jusqu’au tiers de la capitalisation boursière du marché concerné. Pour
remédier à cette difficulté, il est souhaitable de développer un segment pour les
petites et moyennes entreprises.
Côté investisseurs, il faut une présence active d’institutionnels, telles les banques et
les compagnies d’assurance qui sont soumises à des règles strictes en matière de
placement. En pratique, on constate que les titres admis à la négociation sur la
plupart des Bourses ouest-africaines sont détenus par des investisseurs
institutionnels nationaux ou régionaux (banques, compagnies d’assurance…), mais
leur nombre reste limité. Soutenus par un environnement économique favorable, ces
marchés attirent également de plus en plus d’investisseurs étrangers. Néanmoins, ces
investisseurs se sont essentiellement tournés vers des titres d’État.
Les autorités de la CEDEAO devraient donc prendre des mesures visant à
développer la base d’investisseurs (qu’il s’agisse de petits porteurs ou d’investisseurs
institutionnels) afin de les inciter à être plus actifs sur leurs marchés boursiers. Ceci
implique que soit encouragée la création de fonds d’investissement (ouverts au
public ou réservés à des institutionnels), caisses de retraite et autres fonds de
pension, qui sont de grands détenteurs de portefeuilles d’actifs financiers.
b. La taille des marchés
La question de la taille d’un marché est liée à la précédente lorsqu’on apprécie sa
liquidité. Posséder une bourse, même de taille insignifiante, peut être considéré par
certains pays comme un moyen d’affirmer leur souveraineté nationale, mais cela ne
contribue pas au développement économique et financier.
Pour donner plus d’ampleur à ces marchés, la solution serait de les intégrer. En effet,
l’intégration permettrait notamment d’accroître leurs liquidités et de diminuer le
coût des opérations qui s’y traitent.
Si on s’en tient à la zone CEDEAO, il existe trois marchés différents : la bourse
régionale de l’UMEOA (la BRVM), celle du Ghana (Accra Stock Exchange) et celle du
Nigéria (Lagos Stock Exchange). En termes d’intégration, l’UMEOA a de l’avance sur
la ZMAO en ceci qu’elle ne forme qu’un seul marché pour huit pays réunis sous la
bannière de la BRVM, soumis à un régulateur unique, le Conseil régional de
l’épargne publique et des marchés financiers. L’idéal serait, à terme, d’intégrer
l’ensemble des marchés de la zone CEDEAO, voire au-delà, pour bénéficier des
avantages de l’intégration. Toutefois, un marché financier ouest-africain intégré
suppose au préalable une meilleure harmonisation des dispositions législatives et
réglementaires applicables dans les différents pays concernés, ainsi que des systèmes
et moyens techniques communs.
c. Des instruments financiers inadaptés
D’autres éléments expliquent l’atonie des marchés financiers africains et, en
particulier, ceux de la CEDEAO.
En ce qui concerne le marché obligataire, il est encore très embryonnaire. S’il est vrai
que l’on a pu constater récemment le succès des émissions obligataires de certains
pays ouest-africains, ces titres d’État sont émis pour des échéances très courtes et
sont essentiellement traités sur le marché primaire, compte tenu de la faiblesse du
marché secondaire.
Autre frein : il n’existe pratiquement pas de marchés de produits dérivés sur les
marchés ouest-africains, autrement dit, pas de véritable marché de couverture pour
les émetteurs et les investisseurs, même si ceux-ci peuvent faire appel à des
intermédiaires financiers pour structurer pour leur compte des opérations de gré à
gré sur devises ou sur taux d’intérêt.
Des initiatives récentes pourraient sans doute contribuer à une plus grande
animation des marchés, permettant également l’émission de titres de capital et de
dette plus complexes, donnant plus de choix aux acteurs du marché pour leurs
financements et leurs placements.
II.3. Vers la création d’un centre financier régional
Le principal obstacle à la poursuite de l’intégration financière régionale réside
toutefois dans la faiblesse des systèmes financiers locaux des pays de la CEDEAO.
Dans ce contexte, le financement par le biais d’une « plaque tournante » financière
située dans la région est susceptible de modifier la situation des pays d’Afrique de
l’Ouest qui doivent engager des réformes pour se doter d’un environnement
financier efficace. La consolidation des systèmes financiers locaux dans les pays de la
CEDEAO est dès lors indispensable si ces derniers souhaitent réellement tirer les
bénéfices d’une intégration régionale plus poussée et de coûts du capital moins
élevés que dans les autres régions africaines ou du Monde.
Sur fond de crise financière qui a accru l’intensité des besoins en financements, l’on
observe un accroissement de l’intérêt des institutions financières et des banques
internationales en général. Il serait donc primordial de trouver un centre financier
pour la région qui serait le « moteur » financier régional qui viendrait lui donner une
taille critique.
Les facteurs déterminants du potentiel ouest-africain s’articulent autour d’une
quadruple dynamique: disponibilité des matières premières, accroissement rapide de
la population active, urbanisation rapide et besoins en infrastructures qui frisent des
dizaines de milliards de dollars de potentiel d’investissement à court terme.
De l’autre côté, les freins au développement de la finance ouest-africaine en général
sont issus de la palette « classique » du sous-développement, combinée avec
l’absence d’un centre financier régional majeur.
Trop petits, trop spécialisés, parfois enclavés, les bourses nationaux et les centres
financiers locaux souffrent de leur éparpillement et de leur localisation, ce qui altère
leur visibilité et leur attractivité.
En dehors de Johannesburg et Maurice, qui couvrent à eux deux l’extrême-sud du
continent, l’Afrique reste donc une terre financière largement sous-exploitée. Ceci est
plus particulièrement vrai dans le cas de l’Afrique de l’ouest.
Ainsi, à travers l’analyse de cet espace régional, l’on peut raisonnablement affirmer
que ce n’est qu’en atteignant une « taille critique » et en organisant sa convergence
que ce marché financier ouest-africain pourra passer du stade de rêve à celui de
réalisation, devenant à terme un point de rendez-vous financier incontournable en
Afrique et dans le monde.
Il doit être conçu comme une place financière intégrée construite dans un
environnement qui permettra aux firmes internationales d’avoir un meilleur accès
aux pays, et offrira également les avantages plus traditionnels des places financières
internationales tels qu’un environnement fiscal attractif ou une législation adaptée.
Cette place financière sera donc créer dans les conditions d’une convergence
financière régionale en poursuivant un double objectif : permettre l’accès à un espace
économiquement viable et améliorer de manière substantielle la qualité de
l’information disponible sur les acteurs qui en font partie.
En aval, la création d’un tel centre financier au sein de la CEDEAO devrait permettre
à l’ensemble des métiers de la chaîne financière de s’ancrer dans la région qui a
engagé des réformes de fond pour l’amélioration de sa gouvernance et du climat des
affaires. Pour ce qui est des principaux centres financiers ouest-africains, trois pôles
peuvent jouer le rôle de locomotives régionales : le Nigeria, le Ghana et la Côte
d’Ivoire.
Reste à créer les conditions de cette convergence financière en convainquant les
acteurs régionaux de la pertinence de cette approche, qui permettrait de rapprocher
de manière concrète les pays de la CEDEAO et les autres pays du Continent et du
Monde.
Le centre financier régional de la CEDEAO offrira aux émetteurs potentiels des pays
de la CEDEAO des primes de juridiction et de liquidité inférieures à celles exigées
pour l’émission de titres dans leurs marchés financiers domestiques respectifs. Les
marchés financiers ouest-africains doivent bénéficier en effet d’un environnement
juridique et politique relativement fiable, stable, et favorable aux affaires pour qu’un
tel projet puisse voir le jour.
A l’aune des standards africains, ce Centre régional disposera en outre de marchés
financiers liquides et sophistiqués dans la région, ainsi que d’infrastructures
technologiques comparables à celles des marchés financiers émergents les plus
développés. Ainsi, les pays de la CEDEAO auront accès libre à un vaste marché des
capitaux, et ils pourraient tirer avantage d’un accès à des financements de long terme
dans le cadre d’une zone financière unifiée.
On pourrait par conséquent penser que le centre financier ouest-africain deviendra
progressivement une « plaque tournante » financière, non seulement pour les pays
de la CEDEAO, mais aussi pour l’Afrique dans son ensemble.
Il faudrait prendre des mesures maintenant pour doter la CEDEAO d’un « centre
financier régional capable de mieux répondre aux besoins de la région et du
continent africain de manière générale».
III.
INTEGRATION FINANICIERE DANS L’ESPACE CEDEAO :
OBJECTIFS STRATEGIQUES ET PERSPECTIVES
III.1. Objectifs stratégiques de l’intégration financière régionale :
Principaux défis et opportunités
Dans le cadre de l’approfondissement du processus d’intégration par la promotion
de l’identité et de la communauté ouest-africaine au sein des populations, la
CEDEAO a élaboré un programme stratégique, dénommée CEDEAO, Vision 2020.
La Vision stipule la « création d´une région sans frontières, où les populations vivent,
dans la paix, la cohésion et la prospérité grâce à une bonne gouvernance, et où elles
ont la possibilité d’accéder aux énormes ressources qui s’y trouvent et d’en tirer
profit grâce à la création d’opportunités de développement durable et de
préservation de l’environnement4».
La Commission de la CEDEAO procède actuellement à l’élaboration d’un Plan
d’action et d’un Programme Communautaire de Développement (PCD), qui
apporteront un appui accru à la mise en œuvre de la Vision et du Plan stratégique
régional.
Les deux principaux obstacles à la réalisation de la Vision et du Plan stratégique sont
l’insuffisance des infrastructures modernes et la faiblesse des capacités
institutionnelles et humaines des organes de la CEDEAO. Le manque
d’infrastructures régionales de transport adaptées et de systèmes énergétiques, de
TIC et d’approvisionnement en eau et assainissement constituent des freins majeurs
à l’intégration régionale et à la croissance économique. Il est admis que la faible
performance des mécanismes de mise en œuvre des politiques, qui découlent de
l’insuffisance des capacités, est également l’un des facteurs qui ralentissent
l’intégration financière régionale5.
III.2. Perspectives
Comme on peut le remarquer, une intégration financière efficace ne peut pas se
produire indépendamment d’une stabilité macroéconomique nationale et de
réformes dans l’ensemble des secteurs économiques. Les efforts d’intégration doivent
se poursuivre sous diverses formes et en plusieurs étapes dans l’ensemble du secteur
financier, y compris l’établissement de politiques financières (financement du secteur
public, du commerce et politiques d’investissement), d’une infrastructure financière
(réglementation, supervision et normes d’information financière), et d’institutions
4
Site internet de la Commission de la CEDEAO : www.ecowas.int
5
BAD
financières (banques et d’autres institutions financières non bancaires, telles que les
fonds de retraite, les compagnies d’assurances, les marchés du crédit et des capitaux).
L’intégration financière renforcera alors plus les avantages de l’intégration
économique réelle.
De nos jours, il existe un fort potentiel et un intérêt croissant pour l’intégration dans
l’espace CEDEAO, mais un certain nombre d’obstacles doivent être levés dans de
nombreux domaines, qu’il s’agisse des contrôles relatifs à la circulation des biens et
des capitaux ou bien la faiblesse des capacités institutionnelles. Étant donné la
diversité et la complémentarité des richesses en ressources naturelles entre pays, et
de sa position géographique et des relations historiques entre les peuples de la
région, une CEDEAO intégrée pourrait attirer d’importants afflux de capitaux en
provenance des autres régions d’Afrique et du Monde et devenir ainsi un espace
économique émergent.
Actuellement, le défi pour l’Afrique de l’Ouest est de taille. Il y a urgence à reformer
les systèmes financiers nationaux et à les rendre plus compétitifs à travers
l’application d’un programme, transparent et crédible pour faire face à l’ouverture
des frontières et à la montée des autres blocs régionaux, qui ont accentué la
concurrence au niveau mondial. De plus, les mesures adoptées pour renforcer
l’intégration sont maintenant expérimentées et leurs avantages prouvés. Par
conséquent, le processus d’intégration pourrait être moins lent qu’en UE par
exemple, si une volonté politique sereine et forte est présente.
Dans l’ensemble, le marché financier de l’Afrique de l’Ouest est étroit et peu profond,
avec de très faibles interactions entre les sous-marchés tant de l´UEMOA que du
Nigéria et du Ghana. Alors que les pays de l’UEMOA ont progressé de façon
satisfaisante, un des défis clés est d´avancer l’intégration des marchés financiers au
sein de la CEDEAO. Des efforts seront nécessaires dans plusieurs domaines,
notamment l’intégration des infrastructures juridiques, réglementaires et des
paiements. L’intégration avec le seul marché financier nigérian, étant donné sa taille,
constituera un pas énorme en direction de l’intégration financière de l’Afrique de
l’Ouest. Conscientes de la situation, les autorités nigérianes ont fait de l’intégration
financière l’un des piliers de leur Stratégie 2020 pour le secteur financier. Des actions
sont actuellement en cours pour intégrer la Bourse nigériane des valeurs et la Bourse
régionale de valeurs mobilières (BRVM) d’Abidjan, avec la Bourse du Ghana. Le
potentiel d’investissements dans des portefeuilles transnationaux par les institutions
de la CEDEAO et les particuliers est élevé, en cas d’intégration des trois principales
bourses, mais le chemin vers une intégration totale est encore long.
Pour le développement des marchés financiers ouest-africains plus efficients, les
principales mesures devraient consister à :
- Agir sur l’offre et la demande d’instruments financiers, en favorisant le
développement d’émetteurs et d’investisseurs de grandes taille permettant une
meilleure liquidité du marché ;
- Favoriser l’intégration et une meilleure organisation des marchés, ce qui implique,
sinon un alignement, une harmonisation des législations applicables dans les
différents pays concernés et la mise en place de systèmes et moyens techniques
communs ;
- Diversifier les instruments financiers afin de permettre un meilleur arbitrage de la
part des émetteurs et des investisseurs. Toutefois, cet effort resterait vain si les
législations des pays membres de la CEDEAO n’accompagnaient pas ce mouvement
par des mesures incitatives, notamment fiscales ;
- Plus généralement, améliorer la gouvernance dans la région et la perception des
risques. Cela prendra du temps, mais ce mouvement est plutôt dans la bonne voie et
doit être soutenu.
CONCLUSION GENERALE
En définitive, à la lumière de nos analyses, nous pouvons retenir qu’en dépit des
difficultés et réalités régionales, il existe un certain nombre d’opportunités
d’amélioration du processus d’intégration financière régionale.
L’Afrique de l’Ouest est une région riche en ressources, qui peuvent être exploitées
pour améliorer l’intégration régionale et la croissance. On y trouve également
plusieurs champions économiques régionaux émergents, notamment dans les
secteurs des services financiers. Par exemple, ECOBANK, a une vocation
panafricaine et a mis en place des filiales dans tous les pays d’Afrique subsaharienne. Les principales banques nigérianes ont elles aussi établi des filiales dans
plusieurs pays africains.
L’intégration financière progresse, mais à un rythme cependant très lent et irrégulier
suivant les blocs (UEMOA et ZMAO). Le sous-groupe UEMOA possède une banque
centrale unique, la BCEAO, qui dirige la politique monétaire pour l’ensemble du
sous-groupe. Il dispose également d’un unique régulateur bancaire, d’un système de
paiement unifié et d’une bourse régionale, la BRVM. Cependant, des difficultés
demeurent, notamment la lenteur du financement du secteur privé.
La création d’une monnaie unique, par exemple, a été repoussée à diverses reprises,
avant l’adoption en 2009 de la Feuille de route pour le programme 2009-2020 de la
monnaie unique de la CEDEAO. Janvier 2015 est maintenant la nouvelle date fixée
pour la réalisation effective de la deuxième union monétaire, la ZMAO. En dépit de
l’engagement des parties prenantes régionales à cette initiative ainsi qu’aux
calendriers y afférents, la mise en œuvre de la feuille de route semble connaître des
difficultés liées à la coordination et à l’insuffisance des capacités de certaines
institutions chargées des activités qui en découlent.
Ainsi, le véritable enjeu serait la mise en place d’un Centre financier régional. Il serait
donc plus aisé et moins coûteux pour les entités déjà localisées dans les pays de la
CEDEAO de se financer à travers ce Centre. Au fil du temps, ce Centre pourrait
éventuellement devenir une « plaque tournante » financière pour la région, pourquoi
pas pour le continent faisant bénéficier à toute l’Afrique un accès à des ressources
bon marché. Des mesures politiques décisives doivent être adoptées par les autorités
régionales si elles souhaitent concrétiser ce projet ambitieux.
Jusqu’à présent, aucun pays n’a davantage joué le rôle « d’aimant » financier de la
région, ni de celui de « plaque tournante ». La mauvaise qualité des institutions et de
la réglementation financières ainsi que la rareté des opportunités dans les pays de la
CEDEAO expliquent en partie ce phénomène.
En l’absence de consolidation de leurs secteurs financiers et de l’émergence d’une
demande locale dynamique de capitaux, la poursuite de l’intégration financière dans
la région et la promotion d’un Centre financier régional au rang de plaque tournante
financière régionale ne seraient donc pas des tâches aisées.
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Contribution to Financial Sector Growth and Development in Sub-Saharan Africa Session IV: Beyond Banking: Regional Financial Integration, African Finance
for the 21st Century Séminaire de haut niveau organisé par le FMI en
collaboration avec l’Institut multilatéral d’Afrique, Tunis (Tunisie), du 4 au 5
mars 2008.
Webographie:
Site de la Commission de la CEDEAO : www.ecowas.int
Site de la Commission de l’UEMOA : www.uemoa.int
Site de la BAD : www.afdb.org
Site de la BIDC : www.bidc-ebid.org
Site de la BOAD : www.boad.org
Site de PROPARCO : www.proparco.fr
Données de Bankscope de la Banque Mondiale : http://data.worldbank.org
Site internet du journal JeuneAfrique: www.jeuneafrique.com
ANNEXES :

Caractéristiques des bourses ouest-africaines.
Nombre
de
sociétés cotées
Capitalisation
boursière (% du PIB)
Valeur des transactions
(% du PIB)
Liquidité
Côte d’ivoire
39
14%
0,30%
2,2%
Ghana
35
31%
0,80%
2,6%
Nigéria
260
20%
2,30%
Afrique de l’Ouest
334
20%
1,9%
9,5%
Afrique subsaharienne à
l’exclusion de
l’Afrique du Sud
(moyenne)
39,2
23%
1,80%
8,0%
Ensemble des pays
émergents
55%
Source: commission CEDEAO, NEPAD Business Group WEST AFRICA.
11,4%
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