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Manifestations ophtalmologiques lors de la sclérose en
plaque
Auteurs : N.Riah, N.Khaddi, L.El Maaloum, B.Allali, A.Elkettani, A.Amraoui,
K.Zaghloul - Service d’Ophtalmologie Pédiatrique, Hôpital 20 Aout, CHU Ibn
Rochd- Casablanca
Résumé :
La sclérose en plaques (SEP) est la maladie neurologique la plus fréquente survenant
chez des patients jeunes entraînant un handicap parfois sévère. Des manifestations
neuro-ophtalmologiques égrènent souvent le cours de la maladie, la névrite optique
rétro-bulbaire étant la plus fréquente et la plus connue. Cependant, des troubles de la
motilité peuvent également survenir, mais en raison de leur caractère peu
symptomatique, surtout dans les manifestations chroniques, ils restent largement sousévalués. Il est important de les reconnaître car ils constituent un facteur de dissémination
spatiale et peuvent contribuer à la mise en route d’un traitement systémique de la SEP.
Abstract :
Ocular motor disorders in multiple sclerosis
Multiple sclerosis is the most common disabling neurological disease in young people.
Many neuro-ophthalmological manifestations can occur during the course of the illness,
and optic neuritis is both the most frequent and the best known. However, some ocular
motility disorders can also occur, but since there may be no symptoms, they often
remain underdiagnosed. We must recognize them to indicate the need for systemic
treatment of multiple sclerosis.
Mots clés : sclérose en plaque, neuropathie optique, ophtalmoplégie internucléaire
INTRODUCTION :
La sclérose en plaques est une maladie auto-immune entraînant la formation de foyers de
démyélinisation au sein du système nerveux central. Elle entraine des lésions qui provoquent
des perturbations motrices, sensitives et cognitives. A plus ou moins long terme, ces troubles
peuvent progresser vers un handicap irréversible.
La plupart des patients ayant une sclérose en plaques définie ou suspectée ont eu ou
peuvent avoir des problèmes de vision à un moment ou à un autre de leur vie.
Les symptômes de la SEP sont divers et ne se présentent pas tous à la fois lors d’une
poussée; d’où l’intérêt d’évoquer la maladie lors de certaines manifestations visuelles et
oculomotrices.
La neuropathie optique - encore dénommée névrite optique ou névrite optique
rétrobulbaire (NORB) - est une neuropathie optique inflammatoire démyélinisante ; elle est
une des manifestations les plus fréquentes de la SEP, dont elle peut être inaugurale.
GENERALITES :
La neuropathie optique atteint des adultes jeunes, le plus souvent entre 20 et 40 ans, avec
une nette prédominance pour le sexe féminin (environ 75%).
Elle est le premier signe de la maladie dans 1/3 des cas. Les autres atteintes
oculaires sont plus rares ; il s’agit principalement de paralysies oculomotrices.
SIGNES OCULAIRES :
A – La neuropathie optique :
Elle se manifeste typiquement par une baisse d’acuité visuelle rapidement progressive, sur
quelques heures à quelques jours, importante, unilatérale. Elle est précédée de douleurs
orbitaires rétro-oculaires provoquées lors de la mobilisation du globe. Ces douleurs cèdent
lorsque s’installe la baisse visuelle, de l’ordre de 1/10 en général. Ces douleurs sont un signe
important d’orientation car elles évoquent le caractère inflammatoire de la neuropathie.
Elles sont présentes dans 80% des cas.
• A l’examen clinique :
-
l’acuité visuelle est le plus souvent abaissée de façon importante, pouvant être
inférieure à 1/10ème (généralement un seul œil est atteint).
- l’éclairement de l’œil atteint, le réflexe protomoteur direct est diminué, de même
que le réflexe consensuel de l’œil sain ; à l’éclairement de l’œil sain, RPM direct et RPM
consensuel (RPM de l’œil atteint) sont conservés («pupille de Marcus Gunn»).
- l’examen du fond d’œil est normal ; on est alors en présence d’une NORB ou Névrite
Optique Retro Bulbaire; la lésion est alors située le long des voies optiques derrière le globe
oculaire. On peut également voir un œdème de la papille optique lorsque la lésion siège tout
près du globe, ou une pâleur papillaire après une certaine évolution de la maladie.
• Examens complémentaires :
- l’examen du champ visuel montre un scotome central ou cæco-central.
- l’examen de la vision des couleurs montre classiquement une dyschromatopsie d’axe
rouge/vert. Cette perturbation persiste longtemps et constitue un marqueur d’une poussée
antérieure.
- les potentiels évoqués visuels (PEV) qui confirment la souffrance du nerf optique : ils sont
très altérés au stade aigu ; ils peuvent montrer sur l’œil controlatéral sain un allongement
des temps de latence traduisant un ralentissement de la conduction évoquant des lésions de
démyélinisation.
• Évolution :
- sous traitement, l’évolution se fait vers la régression avec le plus souvent une bonne
récupération visuelle, en environ trois mois. Quatre-vingt pour cent des patients récupèrent
une acuité visuelle normale.
- après récupération peut s’observer un phénomène de Uhthoff qui traduit la thermolabilité
des axones démyélinisés : elle se traduit lors de l’élévation de la température corporelle (ex.
effort physique, prise d’un bain chaud) par une baisse transitoire, réversible, de l’acuité
- une récidive homo- ou controlatérale survient chez 30% des patients.
• Pronostic :
- le pronostic fonctionnel de la neuropathie optique est le plus souvent favorable ; une
récupération incomplète avec baisse d’acuité visuelle définitive est cependant possible,
notamment dans les formes sévères avec baisse d’acuité visuelle initiale profonde. L’acuité
visuelle initiale est en effet le meilleur facteur prédictif de l’acuité visuelle finale.
- le risque de développer une SEP à distance d’un épisode isolé de neuropathie optique est
de 30% en moyenne à 5 ans. Les principaux facteurs de risque sont :
◊ la présence de lésions à l’IRM lors du premier examen,
◊ la synthèse intra-thécale d’immunoglobulines.
• Diagnostic différentiel :
C’est celui des autres neuropathies optiques, qui doivent être éliminées devant un tableau
atypique.
B - Autres atteintes ophtalmologiques :
1. atteintes oculo-motrices
• Paralysies du VI, avec :
- diplopie +++,
- convergence de l’œil atteint,
- déficit de l’abduction,
- position compensatrice de la tête, tournée du côté de la paralysie oculo-motrice.
• Paralysies internucléaires:
L’ophtalmoplégie internucléaire est très évocatrice de SEP; elle est due à une atteinte de la
bandelette longitudinale postérieure reliant noyau du III et noyau du VI:
-
le parallélisme des deux yeux est conservé en position primaire,
- dans le regard latéral (du côté opposé à la lésion) :
◊ l’oeil atteint présente un déficit de l’adduction
◊ alors que l’adduction des deux yeux est conservée dans la convergence.
Déficience ou paralysie de l’œil en adduction dans le regard latéral. Nystagmus de l’œil en
abduction. Ces paralysies sont dites internucléaires par atteinte de la bandelette latérale
postérieure (BLP).
Par contre dans le regard en convergence (comme lors de la lecture) il n’y a pas de déficit
musculaire. Les deux yeux arrivent à l’angle interne des deux fentes palpébrales.
– Abduction limitée plus rare.
– Paralysie de la latéralité du regard (dit syndrome de Foville) ou de la verticalité du regard
(dit syndrome de Parinaud). Ces paralysies font partie des paralysies supranucléaires.
2. nystagmus :
Il est présent chez plus d’1/3 des patients présentant une SEP évoluant depuis plus de cinq
ans.
3. périphlébites rétiniennes :
Engainements blanchâtres des veines rétiniennes périphériques, présentes chez 5% des
patients.
4. autres atteintes :
- atteinte de la Vè paire crânienne
- atteinte chiasmatique ou rétrochiasmatique : l’atteinte du champ visuel est paracentrale
et caractéristique.
TRAITEMENT :
- l’ONTT (Optic Neuritis Treatment Trial) a montré l’efficacité de la corticothérapie à
fortes doses, qui accélère la récupération visuelle et retarde la survenue d’un 2ème
épisode, sans toutefois modifier le pronostic final.
- le traitement recommandé comporte une corticothérapie de 14 jours :
◊ Un bolus par perfusion de 1 gramme par jour pendant 3 jours,
◊ suivi de 11 jours de prednisone à raison de 1mg/kg/jour.

NB : surveillance du bilan sanguin: NFS et surveillance urinaire par ECBU. Tension
artérielle et Glycémie au doigt.
- Le traitement de fond de la NORB est également celui de la SEP son but est de
limiter la fréquence et/ou la gravité des poussées. De nombreux traitements sont à
présent disponibles, mais leurs indications sont limitées par leurs effets secondaires
et leur coût. Les traitements les plus fréquents sont Traitements de première ligne :
Interféron béta (AVONEX®, REBIF®, BETAFERON®) ou Acétate de Glatiramère
(COPAXONE®).
CONCLUSION :
Les troubles visuels de la SEP ont donc plusieurs origines ; ils peuvent exister seuls ou
associés. Il faut évaluer aussi les caractères de la vision préexistante à la maladie : myopie,
astigmatisme par exemple. Insistons sur la nécessité d’une consultation auprès d’un
ophtalmologiste. Une fois les troubles identifiés. Il est indispensable d’adapter le traitement
médical.
BIBLIOGRAPHIE :
1- Les troubles oculomoteurs lors de la sclérose en plaque : B.Rougier, C.Tilikete ;
Journal français d’ophtalmologie 2008.
2- Œil et sclérose en plaques : UMVF - Université Médicale Virtuelle Francophone
3- Les conséquences sur la vision lors de la sclérose en plaque et la maladie de
Parkinson : Christophe Orssaud, Nolwenn Berbey ; RFO 09/2011
4- Sclérose en plaque : A.Tobrah ; EMC [5-1100]
- Doi : 10.1016/S1634-6939(10)52319-6
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