5èmes Rencontres Philosophiques d`Uriage (octobre 2014

5èmes Rencontres Philosophiques d’Uriage (octobre 2014)
« Besoin d’éthique ? »
La demande d’éthique, aujourd’hui, paraît concerner des secteurs aussi vastes que
variés. Certains domaines de l’action humaine se trouvent bouleversés par le renouvellement
de la réflexion sur les règles, comme on le voit depuis quelques années avec l’éthique
biomédicale ou l’éthique environnementale. D’autres domaines nouveaux sont apparus ces
derniers temps et se sont vite affirmés comme importants, tant par l’ampleur des réflexions
qu’ils suscitent que par les changements qu’ils sont susceptibles d’induire dans nos modes de
vie, tels l’éthique animale ou l’éthique computationnelle. D’autres vont sans doute émerger et
prendre une importance considérable dans les prochaines années, ainsi l’éthique de la
robotique qui énonce les règles de vie commune entre les êtres humains et les intelligences
non biologiques. La technologie rend aujourd’hui possible des développements qui engagent
des responsabilités nouvelles, par exemple concernant les bio- et les nanotechnologies ; les
cadres adoptés pour aider les choix collectifs et la décision publique (principe de précaution,
paradigme de la catastrophe) engagent eux-mêmes un questionnement éthique.
Dans le même temps, dans des sociétés dominées par une forte capacité au
changement permanent, il n’est pas un métier traditionnel qui ne connaisse la tentation de
préciser ou de reformuler sa déontologie. En situation de crise prolongée, les mondes de
l’entreprise et de l’industrie paraissent également requérir le soutien d’une approche éthique,
avec les thèmes de la responsabilité sociale de l’entreprise, du développement durable dans
l’industrie, et des règles qui devraient s’imposer aux désordres récents de la finance mondiale.
Notre intention, avec ces 5èmes Rencontres Philosophiques d’Uriage, est de
questionner la signification de cette demande, et d’en évaluer la profondeur. Le besoin
d’éthique, quel est-il exactement ? Comment s’exprime-t-il ? Que révèle-t-il ? Et quelles sont
ses conséquences ? Cache-t-il le retrait de l’Etat, le retour de la morale, un certain
désenchantement, ou d’autres choses encore ? Doit-on l’aborder sous l’angle de l’idéologie,
c’est-à-dire comme un discours qui masque des pouvoirs ?
La situation apparaît donc contrastée : si de nouveaux problèmes émergent qui
demandent qu’on prenne position sur les compétences et les responsabilités, il semble
nécessaire de se méfier d’un discours qui présente l’éthique comme une solution universelle.
La situation actuelle prend-elle son sens en regard de la perte de points de repère
traditionnels, ou bien s’y ajoute-t-il une recherche de sens proprement philosophique ? Dans
ces conditions, le besoin d’éthique, de quoi est-il besoin ? De réorganiser la vie commune en
visant davantage de justice ou de justesse ? Jusqu’où, par la demande qu’il adresse à l’éthique,
chacun et chaque secteur d’activité est-il capable d’aller en ce sens ? Enfin, il semble que
l’éthique, aujourd’hui, engage un certain rapport à autrui, entre reconnaissance et sollicitude ;
quel nouveau monde de rapports humains et sociaux cela ouvre-t-il ?
Pour clarifier ces problèmes et apporter des réponses à ces questions, il importe de
redéfinir l’éthique afin de savoir ce qu’elle peut réellement : réflexion sur les fondements ou
principes de la morale, elle désigne également la ligne de conduite adoptée par un groupe ou
par un individu dans la recherche d’un bien ou dans le but de bien faire ; ainsi se trouve-t-elle
en relation avec le travail de la conscience, notamment en ce qui concerne la visée ou la
construction des valeurs et la relation à autrui.
Il est possible d’envisager ces problèmes sous l’angle de la responsabilité, notion de
qui est amenée à se redéfinir. Pour ce faire, il importe de rappeler les relations très anciennes
entre éthique et philosophie, et de confronter éthique, morale et religion, dans l’histoire
comme de nos jours. Il apparaît également intéressant de s’interroger sur l’apparition
progressive dans notre vocabulaire du terme d’éthique, en procédant à sa généalogie. Ainsi il
est possible de requalifier le jugement éthique sans le considérer comme une solution à tous
les problèmes rencontrés par l’humain ; savoir ce qui relève de l’éthique et ce qui n’en relève
pas peut même constituer un objectif important de notre réflexion collective.
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