L’importance de l’aérodynamique sur une moto de compétition La position du pilote sur la moto représente un facteur fondamental sur la vitesse de pointe de la machine. Sur des circuits extrêmenent rapide comme le Tourist Trophy, ce paramètre peut avoir un rôle déterminant sur la performance globale d’un pilote. Mais qu’en est-il pour les épreuves du championnat de France de la montagne. Lors de ces courses relativement courtes et lente (les vitesses de pointes dépassent rarement les 200 km/h), l’aérodynamique tient-elle un rôle clé ou n’est-elle finalement qu’une lubie d’aérodynamicien ? Pour répondre à cette question, nous nous penchons sur le cas concrêt de la course de cote de Boécourt en Suisse. Lors de cette épreuve, les motos atteingnent les vitesses les plus élevées de tout le championnat. C’est donc un manche relativement propice à l’étude de l’aéro. Dans un premier temps, analysons le tracé helvète : départ chicane n°1 chicane n°2 chicane n Une très longue ligne droite d’environ 1800m est scindée en 4 petites lignes droites au moyen de chicanes. Ainsi, la première partie de la course est composée de 3 accélération longues suivies de freinages très appuyés. L’objectif de ces artifices est de limiter la vitesse de pointe de machine afin de minimiser les risques d’accident à haute vitesse. La pente moyenne de la route sur cette partie est d’environ 10%. Dans le cadre de notre étude aérodynamique, nous nous intéressons à une machine de course conventionnelle : un honda 600 CBR RR 2004. Sans trop entrer dans les détails, la trainée aérodynamique est la force exercée par l’air sur la moto qui se déplace à la vitesse v. Elle vaut : 1 Faéro S Cx v 2 et est exprimée en Newton (N) 2 est la masse volumique de l’air en kg/m3 S est la surface frontale du couple moto+pilote (la position du pilote à donc une influence directe sur cette valeur) exprimée en m² Cx est le coefficient de trainée aérodynamique mesuré en soufflerie. Ce paramètre sans unité est influencé par la forme du couple moto+pilote (la position du pilote à donc une influence sur cette valeur aussi) v est la vitesse relative de la moto, exprimée en m/s (le vent à une influence sur cette valeur) Dans le cas de la machine étudiée, si le pilote est couché sur la moto en position de recherche de vitesse, la surface frontale vaut 0.55m², et le Cx de 0.65. Ainsi, le coefficient de trainé global S.Cx vaut environ 0.358m². Cette moto est équipé d’un système embarqué d’acquisition de données, nous disposons ainsi de la vitesse instantanée de la machine en tout point du parcours. Sur le graphe ci dessus, la couleur indique la vitesse locale de la moto ; le rouge foncé indique une vitesse proche de 200 km/h. Nous nous intéressons à la portion de la piste située entre la première et la deuxième chicane, zone présentant la vitesse la plus élevée de tout le parcours. 200 175 150 vitesse (km/h) 125 100 75 50 1ière chicane 25 2e chicane 3e chicane 0 0 250 500 750 1000 1250 1500 1750 2000 distance (m) Les données enregistrées mettent en évidence une vitesse de pointe de 197km/h, juste avant le freinage d’entrée dans la seconde chicane. Initialement, à la sortie de la première chicane, la vitesse de la moto était de seulement 58km/h. A partir de la connaissance des données aérodynamiques de la moto, du tracé (pente), et de la puissance du moteur, nous pouvons construire un modèle numérique nous permettant de simuler l’accélération de la moto. Ce modèle peut ensuite être confronté aux données mesurées afin de juger de sa représentativité. 2250 2500 250 d m vitesse (km/h) 200 150 100 50 0 0 500 1000 1500 2000 distance (m) Comme on peut le constater, le modèle numérique fait preuve d’un bon niveau de corrélation puisque les vitesses instantanées calculées et mesurées sont quasiment identiques. Ainsi, nous pouvons modifier les paramètres du modèle numérique afin de quantifier l’influence de la position du pilote sur la vitesse maxi de la machine et le temps de parcours. Dans le cas de référence (enregistrement), il faut 11.41s pour parcourir les 500m qui séparent la sortie de la première chicane du point de freinage de la seconde chicane. La vitesse maxi atteinte est alors de 198 km/h. Imaginons maintenant que le pilote n’est pas la tête parfaitement derrière la bulle. La surface frontale se voit augmentée de 0.08 m² (+12%) et le Cx passe de 0.65 à 0.71 (+9%). Cette fois, il faut 11.64s à la moto pour parcourir la même distance, et la vitesse de pointe n’est plus que de 190 km/h. En procédent de même sur les deux autres portions droites du tracé, il ressort que la différence globale de temps de parcours est d’environ 0.5s entre les deux positions de pilote sur la machine… 250 A travers cette petite étude, nous montrons que l’aérodynamique peut jouer un rôle dans le dénouement d’une course de cote. Sur un tracé comme celui de Boécourt, une bonne position peut permettre de gagner près de 0.5s de quoi gagner une place ou deux…