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ELECTROMAGNÉTISME ET RELATIVITÉ
I RAPPELS DE MÉCANIQUE CLASSIQUE
- Aristote, au quatrième siècle avant J-C, pensait que tout objet en mouvement abandonné
à lui-même devait s'arréter. C'est aussi ce que l'on observe dans la vie quotidienne, mais à
cause des frottements, et c'est une erreur fréquente des physiciens en herbe que de penser
qu'à force nulle correspond vitesse nulle.
- Galilée, à la fin du seizième siècle, observa que plus la surface sur laquelle se déplacent
les objets est lisse, polie, plus l'objet en mouvement va loin. De plus, si le support lui-
même se déplace par rapport à l'observateur, l'objet en mouvement va s'arréter par rapport
à son support mais pas par rapport à l'observateur. La première conclusion est que l'objet
s'arrête à cause des forces non contrôlées par l'expérimentateur que sont les frottements, la
seconde est que l'on doit toujours parler de repos ou de mouvement par rapport à un repère
de référence.
- Newton, un siècle plus tard, a établi les lois de la mécanique classique (par opposition à
mécanique relativiste ou quantique). En particulier, il a énoncé qu'un objet en mouvement
abandonné à lui-même, sans aucune force extérieure, garde une vitesse constante dans un
repére fixe. De plus cette vitesse reste constante, bien que prenant une valeur différente,
dans tout repère animé par rapport au premier d'une vitesse constante
v0 . Un repère non
accéléré, dans lequel les objets libres se déplacent à vitesse constante est un repère
d'inertie ou, non pas Newtonien comme on pourrait l'attendre, mais Galiléen. Le principe
galiléen de la relativité s'énonce ainsi :
les lois de la mécanique classique ont la même forme dans tous
les repères galiléens.
Un principe ne se démontre pas, il est énoncé à partir d'observations, il reste valable aussi
longtemps que d'autres mesures ne le mettent pas en défaut. Les mesures dans un repère
d'inertie ne disent rien sur la vitesse constante de ce repère : c'est seulement si le repère est
accéléré par rapport à un autre que l'on pourra mesurer la vitesse de repère galiléen.
Cas de l'électromagnétisme.
Dans plusieurs équations de l'électromagnétisme, la vitesse des charges apparaît
explicitement (force de Lorentz, loi de Biot et Savart) ou par le courant associé à ce
mouvement. En particulier, l'existence ou non d'un champ magnétique est liée à l'état de
mouvement ou de repos des charges. Or la mécanique de Newton impose de préciser le
référentiel de mesure des vitesses et donc d'écriture des lois : l'électromagnétisme
classique présuppose donc l'existence d'un référentiel unique par rapport auquel on mesure
la vitesse des charges qui doit entrer dans les équations.
Considérons l'expérience élémentaire suivante : un expérimentateur sur un chariot mobile
tient dans ses mains une spire conductrice dont l'axe est perpendiculaire à la vitesse de
déplacement vers un aimant fixe dans le laboratoire.
Lorsqu'il entre dans une zone règne le
champ magnétique
B perpendiculaire à
la vitesse
v , les électrons libres du
métal sentent la force de Lorentz q
v
B qui a pour effet de les faire se
déplacer le long de la spire et de créer, au
moins localement si la partie arrière de la
spire est assez éloignée, un courant. Il s'agit d'une force magnétique due au fait que les
électrons ont une vitesse en présence d'un champ magnétique : c'est la loi de Faraday.
Dans la même situation expérimentale, si l'expérimentateur applique la même loi mais
v
nB
.
2
dans son référentiel, il trouve que la force magnétique est nulle, faute de vitesse aux
électrons. Pourtant, pour l'expérimentateur dans son référentiel, le déplacement de charges
existe : il existe une force qui ne peut pas être magnétique comme déjà dit mais c'est la
variation du flux du champ magnétique qui va induire une force donc un champ que l'on
qualifie de champ électrique (c'est le nom que l'on a donné à ce champ qui agit sur les
charges au repos du conducteur, mais cela ne peut pas être un champ électrostatique qui
lui est nul puisque le conducteur est globalement neutre) et donc une force sur les charges.
La force électromotrice à l'origine de ce déplacement de charges a dans les deux cas la
même forme :
e  d
dt Spire
B
.ds
d
dt
C'est parce que la loi de Faraday et la règle de variation du flux conduisent à la même
force électromotrice que l'on trouve la même valeur de courant, mais l'expérimentateur qui
tient la spire ne mesurera aucune force magnétique. Cela est en général caché dans les
cours on applique la relativité, en parlant de vitesse relative, sans insister sur le fait
expérimental.
Avant Einstein, on pensait que cette identité de résultats avec des causes différentes n'était
qu'un accident heureux. Les champs électrique et magnétique étaient considérés comme
des tensions sur une sorte de milieux gélatineux appelé éther qui remplissait tout l'espace,
et les vitesses devaient être mesurée par rapport à l'éther. Il faut alors trouver le repère
dans lequel l'éther est au repos, c'est-à-dire pour les mesures sur terre, trouver la vitesse du
vent d'éther sur notre planète. Par ailleurs, parmi les résultats de l'électromagnétisme
classique figuraient le fait que les ondes électromagnétiques se déplacent toutes à la même
vitesse par rapport à l'éther, dans le vide. Scalairement :
v01
0
0
. On peut alors,
suivant le principe de relativité de la mécanique, calculer la vitesse du vent d'éther à partir
de la vitesse de la lumière.
Dans le repère l'éther est au repos la vitesse de propagation des ondes
électromagnétiques est la même dans toutes les directions. Dans tout autre repère, cette
vitesse est corrigée de la vitesse d'entraînement
ve de l'éther. Il fallait donc mesurer la
vitesse de propagation des ondes dans deux directions différentes pour en déduire la
vitesse du vent d'éther. Cependant, l'expérience de Michelson et Morley a montré que la
lumière se propage de façon isotrope dans le vide. En conclusion soit le modèle de l'éther
n'est pas correct, soit la terre entraîne avec l'éther qui paraît donc localement immobile.
Einstein n'a pas accepté cette équivalence des phénomènes comme une coïncidence et en
a déduit que les phénomènes électromagnétiques devaient, comme ceux de la mécanique,
suivre un principe de relativité. Il a alors proposé les deux célèbres postulats :
- le principe de relativité : toutes les lois de la physique (et pas
seulement celles de la mécanique), ont la même forme dans tous les
repères galiléens. Ainsi, les vitesses des charges comme des masses
doivent être mesurées dans le référentiel d'inertie que l'on choisit pour
3
écrire les lois.
- la vitesse de la lumière dans le vide est la même pour tous les
observateurs dans un repère galiléen, quelque soit la vitesse de la
source ou de l'observateur mesurées dans ce même repère.
Cette universalité de la vitesse de la lumière n'a pas été admise facilement, car la vitesse
de toutes les autres ondes (sonores, liquides, ressort ...) dépendent du repère.
II RAPPELS DE MECANIQUE RELATIVISTE
Dans la suite, les notations permettant de repérer un point M de l'espace-temps seront les
suivantes :
x1=x x2=y x3=z x0=ct dans un repère S
x'1=x' x'2=y' x'3=z' x'0=ct' dans un repère S' animé d'une vitesse uniforme par
rapport à S.
Si est la matrice de changement de référentiel :
(x
)'  
0
3
x
Par convention :
- les indices grecs et vont de 0 à 3, avec la valeur zéro pour le temps,
- les indices latins (i,m,n...) vont de 1 à 3 et sont associés aux composantes du vecteur
position
r supposé indépendant du temps,
- les indices supérieurs sont des indices de ligne, les indices inférieurs des indices de
colonne. Un vecteur est représenté habituellement par la colonne de ses composantes,
donc par ses composantes contravariantes, constituée de trois lignes :
r =
x
y
z








=
x1
x2
x3








- l'utilisation des indices inférieurs et supérieurs permet d'employer le calcul tensoriel,
compte tenu de l'algèbre des vecteurs de l'espace-temps, avec :
xpour les composantes contravariantes
xpour les composantes covariantes
qui se différencient par la façon dont elles se transforment au cours des rotations du repère
: les composantes contravariantes (composantes habituelles des vecteurs) se transforment à
l'aide de la matrice inverse de celle des vecteurs de base, les composantes covariantes se
transforment avec la même matrice,
- si le même indice apparaît une fois en position covariante et une fois en position
contravariante, cela implique une sommation sur cet indice et on n'écrit pas le signe
somme :
(x
)'  
0
3
x
 
x
C'est la convention d'Einstein, nommée ainsi par lui-même.
Si le référentiel R' est en mouvement de translation uniforme à la vitesse
v dont la
direction est le sens définissent l'axe
Ox , la matrice de transformation de Lorentz est :
 
0
1
2
3
0 0
 
0 0
0 0 1 0
0 0 0 1










4
avec :
v
cet
1
1
2
L'ensemble des 4 composantes (x1,x2,x3,x0) représentent le quadrivecteur espace-temps.
Plus généralement, on appelle quadri-vecteur tout ensemble de composantes qui se
transforment comme (x1,x2,x3,x0) au cours des changements de référentiel.
Le produit scalaire de deux quadri-vecteurs est un scalaire, donc sans indices, et doit être
invariant au cours des transformations de Lorentz, au même titre que le produit scalaire de
deux vecteurs est invariant par rotation du repère. On le note :
S = a b = a' b'
et c'est le produit d'une matrice ligne par une matrice colonne.
Si les composantes contravariantes du quadri-vecteur a sont (a0,a1,a2,a3), alors ses
composantes covariantes sont (-a0,a1,a2,a3), de telle sorte que lorsque le quadri-vecteur est
celui de l'espace-temps on trouve que la norme dans l'espace-temps est :
L2 = -c2t2 + x2 + y2 + z2
La seule composante covariante du 4-vecteur espace-temps qui ne soit pas identique à sa
contre-partie contravariante est celle relative au temps : c'est la raison pour laquelle
habituellement on ne fait pas de différence dans l'espace ordinaire classique à trois
dimensions.
Enfin, le calcul tensoriel se limite ici à des tenseurs d'ordre 1 (vecteurs) ou 2, c'est donc un
simple espace matriciel.
Energie et quantité de mouvement relativistes
Un objet de masse au repos m, animé d'une vitesse
u dans un référentiel S possède dans
ce référentiel une quantité de mouvement
p et une énergie E :
p
mu
1u2
c2
Emc2
1u2
c2
ce qui définit le quadri-vecteur énergie-impulsion par ses composantes :
p0E
cpimui
1u2
c2
,i1,2,3
Ces relations s'obtiennent en considérant que l'objet est au repos dans un référentiel
galiléen se déplaçant à la vitesse -
u par rapport à S.
Le 4-vecteur énergie-impulsion se transforme comme tout autre quadri-vecteur à l'aide de
la matrice de Lorentz suivant :
(p
)'  
p
On construit un invariant en faisant le produit scalaire du quadri-vecteur énergie-impulsion
par lui-même :
p
p
 (p0)2(p
)2 m2c2
que l'on écrit :
E2p2c2m2c4
C'est l'énergie totale d'une particule relativiste dont la masse au repos, la masse en
mouvement à vitesse
u et l'impulsion sont respectivement :
5
m,mum
1u2
c2
um,p
muu
III ELECTROMAGNETISME RELATIVISTE
Contrairement à la mécanique newtonienne, l'électromagnétisme classique est déjà
cohérent avec la relativité restreinte : les équations de Maxwell et la force de Lorentz
s'écrivent de la même façon dans tous les repères d'inertie. On ne va donc pas changer
l'expression des lois de l'électromagnétisme, comme on a le faire pour passer de la
mécanique classique à la mécanique relativiste, mais au contraire on va les présenter de
façon à faire apparaître leur caractère relativiste. Ainsi, ces lois qui comportent un certain
arbitraire puisqu'on a copié et adapté les lois de l'électrostatique, vont se présenter comme
cohérentes du point de vue relativiste.
a) le magnétisme est un phénomène relativiste.
On va montrer que le magnétisme est une conséquence de l'électrostatique associée à la
relativité et calculer la force d'interaction entre un fil parcouru par un courant et une charge
en déplacement, sans jamais invoquer les lois du magnétisme. On se place pour cela dans
un cas élémentaire.
Considérons une chaîne de charges positives au repos dans un repère S0, sur une ligne
conductrice. Si on regarde d'assez loin par rapport au diamètre de la ligne, les charges
paraissent distribuées uniformément en ligne. Si on trouve la quantité de charges q sur
une longueur l0 de conducteur, alors la densité linéaire de charges au repos 0 est, à la
limite où l est assez petit :
0 = q
l0
On suppose maintenant que les charges se déplacent à la vitesse
v mesurée dans S0.
Alors, la distance qui était l0 devient, du fait de la contraction des longueurs en
mouvement dans S0 par rapport à leur valeur au repos dans ce même repère :
l = (1-v2
c2 )1/2 l0 = 1
l0
Il s'ensuit que la densité de charges mesurée dans S0 devient :
= q
l = (1-v2
c2 )-1/2 0 = v 0
et crée un courant I+ = v.
Si on superpose à la précédente une
distribution identique mais de charges
négatives ayant la vitesse opposée -
v : la
contraction de Lorentz est la même pour les
charges négatives que pour les charges
positives puisque seul le sens de leur vitesse
est différent, et donc les densités de charges
sont les mêmes au signe près. Le courant
total, mesuré dans S0 est :
I = I+ + I- = 2 v
Si maintenant une charge q passe à proximité
avec une vitesse
u (mesurée dans S0) parallèle à
v , même si cette vitesse est nulle, la
+ + + + +
- - - - -
+
-
v
-v
E
-E u
+
+
q
S°
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