PARTITION

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PARTITION
La presse nous dit que l’un des candidats à l’élection présidentielle, lors d’un meeting, a joué sa
traditionnelle partition d’ouverture : « Il y a de la gauche, de la droite et du centre en moi. » Nous ne
commenterons pas le contenu, mais on peut s’arrêter un instant sur la présentation du journal : le
candidat a joué sa traditionnelle partition d’ouverture ! Quelle image musicale ! A quoi sert-elle ?
D’abord à souligner la volonté de plaire et de séduire. Comme si le candidat n’avait pas parlé, mais
chanté, ou tout au moins fait de la musique. Comme si l’air comptait autant que les paroles.
L’expression « jouer une partition » n’est pas si fréquente mais elle évoque un langage dicté plus par
l’effet qu’il produira que par le contenu qu’il transmet. Cela fait penser à un ton, à une façon de
s’exprimer, on pourrait presque dire une couleur.
A l’origine, « jouer une partition » signifie simplement jouer la musique qui est écrite. En effet le mot
« partition » désigne un texte musical : des portées, cinq lignes parallèles en fait, avec des notes dont
la place indique la hauteur, (du plus bas, le plus grave, au plus haut, le plus aigu), et dont la forme
indique la durée.
Alors pourquoi le mot « partition » ? Etymologiquement il ne se justifie pas du tout : le premier sens du
mot « partir » est « séparer ». Une partition est donc une séparation ou une chose séparée. On peut
simplement se souvenir que dans un morceau musical, le compositeur écrit souvent pour plusieurs
instruments ou pour plusieurs voix, ou même les deux. Et chacun de ces éléments s’appelle une
partie… une partie du tout ! Un chanteur doit chanter sa partie. Même si l’expression est un peu
vieillotte, elle peut encore s’entendre, se lire, se comprendre.
C’est peut-être par rapport à cela qu’on a nommé « partition » la feuille sur laquelle la musique était
écrite. Mais on a aussi en musique le mot « partita » qui désigne en général une pièce pour clavier,
piano, clavecin, orgue etc. Il est donc compréhensible que sa racine réapparaisse avec un autre
emploi. Et le mot « partition », aujourd’hui, s’emploie aussi bien pour désigner la matérialité de ces
cahiers ou de ces feuilles (« j’ai oublié la partition », « j’ai recopié la partition », « il est interdit de
photocopier les partitions »…) que pour désigner la composition elle-même : « une partition difficile,
virtuose, abordable … »
Et pourtant ce mot de « partition », on le trouve dans des emplois tout différents, là où il est bien plus
proche de son origine, et où l’image est justifiée.
« Partir » signifiait donc en ancien français « séparer », « couper ». On parle de « partition d’un pays »
quand il est coupé en deux entités différentes et en général opposées, non seulement par les intérêts
mais par le type de régime politique. On a eu cela pour l’Allemagne, le Yémen par exemple, et on l’a
encore pour la Corée du Sud et la Corée du Nord.
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