d’ambassadeur de France. Il fit une guerre brillante, et évolua vers un statut
d’officier de réserve réactivé. Pendant la guerre d’Algérie, il commanda une
célèbre unité : celle des commandos de l’air, unité qui avait été créée auparavant
par le général de Maricourt. Ses convictions, sa formation, auraient dû faire de
lui un défenseur ardent, efficace, acharné même de l’Algérie française. Il le fut
effectivement jusqu’en 1958. A cette date, revient à l’avant-scène de la politique
son Maître à penser : le général De Gaulle. Ce dieu dont il a décidé d’être le
prêtre. Ses convictions « Algérie française » vont se convertir en une obéissance
inconditionnelle, aveugle, exclusive à l’égard de l’homme de Colombey.
Coulet, auprès de Delouvrier, tient le poste de directeur des affaires politiques.
Termes assez imprécis, qui permettent de supposer que son rôle s’identifiait à
celui d’un commissaire politique chargé de contrôler le fonctionnement du
cabinet de Paul Delouvrier.
Le quatrième personnage convoqué ce 5 novembre 1960 s’appelle
André Jacomet, conseiller d’Etat, secrétaire général de l’administration. C’est-
à-dire qu’il est le patron de tous les fonctionnaires d’Algérie. André Jacomet ne
s’était pas affirmé comme un défenseur convaincu de l’Algérie française. La
tiédeur, le scepticisme, la neutralité administrative, voilà tout ce qui a
commandé chez lui à une attitude de détachement. Un détachement agressif
néanmoins, puisqu’il fut de ces personnalités qui ont reproché au général Challe
et à Delouvrier, de ne pas avoir réduit par la force les Barricades d’Alger, lors de
la journée du 24 janvier 1960. Mais ce jour-là, ce samedi 5 novembre 1960,
Jacomet est frappé par la grâce. Il n’accepte pas le discours du 4 novembre. Il
lâche une bombe. Il ose affirmer qu’il lui est impossible de lier le sort de sa
Patrie, de la France, au sort d’un homme, fût-il le général De Gaulle :
« Pour moi la France ce n’est pas De Gaulle et De Gaulle ce n’est pas la
France », a-t-il le cran d’affirmer en langage dépourvu d’ambigüité.
A l’Elysée, fureur noire ! De Gaulle exige du Conseil d’Etat qu’il se réunisse au
plus tôt en commission pour statuer comme il se doit sur la carrière de Jacomet.
Le Conseil d’Etat se réunit en commission le 12 novembre 1960 sous la
présidence de Monsieur Parodi, Monsieur Gazier, un notable socialiste,
assumant les fonctions de secrétaire général de la commission. Stupeur ! Le
Conseil d’Etat refuse de révoquer André Jacomet comme il lui avait été enjoint
de le faire.
Fait exceptionnel dans les annales des Républiques françaises, un président de la
République va révoquer purement et simplement un conseiller d’Etat.
Le lendemain, dimanche 13 novembre à Alger, Delouvrier communique à
Jacomet la décision présidentielle. Il lui fait le commentaire suivant :
« Vous avez obéi à votre conscience au lieu d’obéir à votre devoir ! C’est
abominable ! »
Ainsi, obéir à sa conscience, c’est abominable ! Par un comportement régalien
outrancier on exige d’hommes et de femmes politiques quelque chose de
dégradant. On va leur imposer d’étouffer leur conscience et de renier leurs
convictions. On va leur imposer de satisfaire à un seul devoir : l’obéissance
inconditionnelle à De Gaulle. Un comportement régalien qui va plonger ces
femmes et ces hommes politiques dans un état de déréliction idéologique. Je