Etude 50/41
Le docteur Jean-Claude PEREZ
Adhérent du Cercle Algérianiste de Nice et des Alpes Maritimes
Auteur des livres :
« Le sang d’Algérie »
« Debout dans ma Mémoire »
« Vérités tentaculaires sur l’OAS et la guerre d’Algérie »
« L’Islamisme dans la guerre d’Algérie »
« Attaques et contre-attaques »
aux Editions Dualpha - BP 58, 77522 COULOMMIERS CEDEX
Tel. : 01.64.65.50.23
Primatice Diffusion distribution 10 Rue Primatice 75013 Paris
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ETUDE REDIGEE A LA DEMANDE DE DANIELE LOPEZ
DES « PETITS ECHOS DE L’ECHO D’ORAN »
ET POUR LE BENEFICE ENVENTUEL
DE TOUS MES CORRESPONDANTS
LA PAROUSIE DU NAUFRAGEUR
DE LA FRANCE SUD-MEDITERRANEENNE
Ou
retour sur l’étude de la conjuration satanique
du 13 mai 1958
Définition de la Parousie : « retour glorieux du Christ à la
fin des temps, en vue du jugement dernier » (Larousse 2010)
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Récusant, à titre préventif, l’accusation de blasphème, nous prétendons
assimiler à une pseudo-parousie le retour au pouvoir du général De Gaulle, en
1958. Retour mis en œuvre dans le but prioritaire de tuer la France en
Algérie.
Pseudo-parousie d’un pseudo-sauveur qui prétendait sauver la patrie française
d’un chaos qui la menaçait.
C’est donc à une nouvelle approche de la genèse « du 13 mai 1958 », que je
vous invite en ce mois de janvier 2011. Avec une arrière-pensée que je tiens,
paradoxalement, à situer au premier plan dès le début de cette étude : ne pas
oublier d’évoquer la « seconde parousie » gaulliste. Celle qui fut ratée, après
qu’il eût abandonné le pouvoir en 1969.
Il abandonna l’Elysée, cette année-là, sous la pression, ou plutôt sous l’action
politique de ceux-là mêmes qui l’y avaient installé. Qui avaient fait le constat
qu’il ne leur était plus nécessaire de l’y conserver pour le bon déroulement de
leur stratégie, née des exigences du capitalisme financier moderne.
Il est établi que De Gaulle, mal résigné à cette éviction, était disposé à reprendre
le pouvoir par le moyen d’une nouvelle « parousie ». Il attendait, il espérait que
le peuple le réclamât comme le « sauveur unique et perpétuel de la France ».
Mais rien ne vint.
Les pompidoliens régicides avaient décidé de se passer de lui.
Dans cette étude 50/41, nous allons rappeler :
- La conjuration gaulliste mise en site opérationnel, dès 1956, à partir des
locaux de l’ancien RPF, rue Solferino à Paris dans le 7ème arrondissement.
- Le rôle de Bourguiba dans la genèse opérationnelle et tactique du 13 mai
1958, à partir du drame de Sakiet-Sidi -Youcef.
- Le comportement d’une armée et d’un peuple qui vont se mettre « à plat
ventre » devant le « gourou », organisateur de la mort de la France sud-
méditerranéenne.
Evoquer l’hystérie collective du 13 mai 1958, la « bouffonnerie » des
Comités de Salut Public, le délire des foules algériennes, ne peut se aliser en
dehors d’un cadre historique, dont il faut préciser aussi bien les contours que le
contenu.
Dans cet esprit, un retour vers le passé s’avère nécessaire.
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En 1942, quelques jours avant le débarquement anglo-américain en
Afrique du Nord française, l’amiral Darlan se trouvait à Alger. Il était venu
rendre visite à son fils, malade, soigné à l’hôpital militaire Maillot. Cet hôpital
se situait dans le quartier de Bab El Oued, à quelques dizaines de mètres de
l’endroit j’exercerai la médecine générale, treize ans plus tard en octobre
1955.
Informé de l’imminence d’un débarquement allié sur le territoire de l’AFN,
l’amiral fit une déclaration qui fut publiée dans la presse locale. Je me souviens
très bien d’avoir lu dans un quotidien algérois les propos suivants :
« L’Empire sans la France ce n’est rien.
La France sans lEmpire, ce n’est rien ».
Dans cette déclaration de l’Amiral, nous trouvons exprimées deux
inquiétudes.
Tout d’abord, une prévision, une prédiction historique : « l’Empire sans la
France, ce n’est rien ». Effectivement, il est facile de constater que dans
sa grande majorité, ce qui fut l’Empire français représente aujourd’hui
encore un ensemble de terres sans perspective. Selon une terminologie
traditionnelle.
Mais dans cette affirmation de l’amiral, s’exprime surtout une terrible
angoisse :
« la France sans l’Empire ce n’est rien ». Cette angoisse de l’amiral va
trouver un écho, quinze ans plus tard, dans les propos d’un homme
politique français. D’un homme d’Etat, puisqu’il s’agit de Chaban-
Delmas.
En 1957, celui-ci occupait le poste de ministre des armées, dans le
gouvernement de Félix Gaillard. C’est l’époque au cours de laquelle ce ministre
installa à Alger, une antenne célèbre. Celle-ci jouera un rôle fondamental dans le
déroulement algérois du 13 mai 1958 : l’antenne de la défense nationale, avec
des hommes comme Guy Ribaud, le commandant Pouget, Delbecque, Nouvion,
Lhostis et Jacques Laquière. Celui-ci mit son cabinet d’avocat à la disposition de
cette antenne.
Dans l’exercice de ses fonctions ministérielles, Chaban-Delmas a rendu visite au
général Salan, commandant en chef en Algérie. Il s’est placé à Philippeville,
pour inaugurer une nouvelle école militaire de contre-guérilla. Cette école était
installée au casino « Beau Rivage » tout près de cette belle ville constantinoise,
au pied du djebel Filfila. Il était accompagné du général Gilles, commandant le
corps d’armée de Constantine. S’adressant aux 90 capitaines stagiaires qui
suivaient le cursus de cette école, le ministre des armées leur tint en substance
ces propos :
« Sachez bien qu’il n’y aura plus d’armée française, parce qu’il n’y aura plus
de France, si par malheur nous manquons notre coup ici, en Algérie ».
Avec le recul du temps, nous pouvons affirmer que pour des hommes politiques
de très haute responsabilité, d’origine et de convictions différentes, parfois
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même opposées, il était banal et logique d’affirmer que le sort de notre Patrie, de
la Nation française, était intimement lié au destin que l’on s’apprêtait à élaborer
pour ce qui était encore l’Algérie française.
Or, et nous ne le savons que trop, cela n’a pas empêché le général De
Gaulle, maître à penser, s’il en fut, de Chaban-Delmas, de prononcer trois ans
plus tard, le célébrissime discours du 4 novembre 1960. Discours dans lequel le
président de la Vème République annonce la naissance prochaine d’une
République algérienne.
Nous savons depuis longtemps que ces termes de « république algérienne »
n’avaient pas été prévus dans le texte initial de ce discours. Celui qui avait été
préparé par les rédacteurs officiels. C’est De Gaulle lui-même qui prit l’initiative
d’ajouter ces mots de République algérienne, d’importance décisive et
irrévocable, lors de l’enregistrement de cette allocution. Au grand dam de tous
ses collaborateurs.
Ce 4 novembre est un vendredi. C’est le week-end qui précède l’ouverture
du Procès des Barricades d’Alger. J’ai donc l’honneur d’écouter ce discours de
l’intérieur de la prison de la Santé, avec mes autres camarades détenus.
La surprise fut très forte, même et surtout dans les sphères gouvernementales. A
un point tel, que Paul Delouvrier, délégué général du gouvernement en Algérie,
décide de convoquer d’urgence ses quatre principaux collaborateurs pour le
lendemain. C’est-à-dire pour le samedi 5 novembre à Alger.
Quels sont les collaborateurs convoqués ce jour-là par Paul Delouvrier ?
Tout d’abord Coup de Fréjac, directeur de l’information. Ancien
combattant glorieux de la libération de la France, il regroupait en lui toutes les
qualités requises pour s’illustrer comme un ardent défenseur de la terre française
d’Algérie. Mais Coup de Fréjac était avant tout un inconditionnel du général De
Gaulle.
Quelles sont ses fonctions auprès de Delouvrier ?
Museler l’information en Algérie, organiser la censure. Interdire aux Français
d’Algérie de s’exprimer. Les priver d’informations en provenance de l’extérieur.
La deuxième personnalité convoquée ce 5 novembre par Delouvrier est
Jean Vaujour. C’est le chef de cabinet de Delouvrier. Il avait exercé, peu de
temps auparavant, les fonctions de directeur de la police en Algérie, en 1954
tout particulièrement. Il avait reçu, cette année-là, des offres de services de la
part d’un rebelle anti-français. Celui-ci, contre la somme de 1 million de francs
de l’époque s’était proposé de lui livrer toute l’implantation du CRUA dans les
Aurès. Vaujour rendit compte de cette proposition à François Mitterand,
ministre de l’intérieur. Sous la forme d’un rapport : le rapport Vaujour du 23
octobre 1954. Mitterand ne tint aucun compte de cette information. On aurait pu
tuer la guerre d’Algérie dans l’œuf. On a décidé de ne pas le faire.
La troisième personnalité convoquée ce samedi 5 novembre est
François Coulet. Avant la guerre de 1939, il exerçait des fonctions
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d’ambassadeur de France. Il fit une guerre brillante, et évolua vers un statut
d’officier de réserve réactivé. Pendant la guerre d’Algérie, il commanda une
célèbre unité : celle des commandos de l’air, unité qui avait été créée auparavant
par le général de Maricourt. Ses convictions, sa formation, auraient faire de
lui un défenseur ardent, efficace, acharné même de l’Algérie française. Il le fut
effectivement jusqu’en 1958. A cette date, revient à l’avant-scène de la politique
son Maître à penser : le général De Gaulle. Ce dieu dont il a décidé d’être le
prêtre. Ses convictions « Algérie française » vont se convertir en une obéissance
inconditionnelle, aveugle, exclusive à l’égard de l’homme de Colombey.
Coulet, auprès de Delouvrier, tient le poste de directeur des affaires politiques.
Termes assez imprécis, qui permettent de supposer que son rôle s’identifiait à
celui d’un commissaire politique chargé de contrôler le fonctionnement du
cabinet de Paul Delouvrier.
Le quatrième personnage convoqué ce 5 novembre 1960 s’appelle
André Jacomet, conseiller d’Etat, secrétaire général de l’administration. C’est-
à-dire qu’il est le patron de tous les fonctionnaires d’Algérie. André Jacomet ne
s’était pas affirmé comme un défenseur convaincu de l’Algérie française. La
tiédeur, le scepticisme, la neutrali administrative, voilà tout ce qui a
commandé chez lui à une attitude de détachement. Un détachement agressif
néanmoins, puisqu’il fut de ces personnalités qui ont reproché au général Challe
et à Delouvrier, de ne pas avoir réduit par la force les Barricades d’Alger, lors de
la journée du 24 janvier 1960. Mais ce jour-là, ce samedi 5 novembre 1960,
Jacomet est frappé par la grâce. Il n’accepte pas le discours du 4 novembre. Il
che une bombe. Il ose affirmer qu’il lui est impossible de lier le sort de sa
Patrie, de la France, au sort d’un homme, fût-il le général De Gaulle :
« Pour moi la France ce n’est pas De Gaulle et De Gaulle ce n’est pas la
France », a-t-il le cran d’affirmer en langage dépourvu d’ambigüité.
A l’Elysée, fureur noire ! De Gaulle exige du Conseil d’Etat qu’il se réunisse au
plus tôt en commission pour statuer comme il se doit sur la carrière de Jacomet.
Le Conseil d’Etat se réunit en commission le 12 novembre 1960 sous la
présidence de Monsieur Parodi, Monsieur Gazier, un notable socialiste,
assumant les fonctions de secrétaire général de la commission. Stupeur ! Le
Conseil d’Etat refuse de révoquer André Jacomet comme il lui avait été enjoint
de le faire.
Fait exceptionnel dans les annales des Républiques françaises, un président de la
République va révoquer purement et simplement un conseiller d’Etat.
Le lendemain, dimanche 13 novembre à Alger, Delouvrier communique à
Jacomet la décision présidentielle. Il lui fait le commentaire suivant :
« Vous avez obéi à votre conscience au lieu d’obéir à votre devoir ! C’est
abominable ! »
Ainsi, obéir à sa conscience, c’est abominable ! Par un comportement régalien
outrancier on exige d’hommes et de femmes politiques quelque chose de
dégradant. On va leur imposer d’étouffer leur conscience et de renier leurs
convictions. On va leur imposer de satisfaire à un seul devoir : l’obéissance
inconditionnelle à De Gaulle. Un comportement régalien qui va plonger ces
femmes et ces hommes politiques dans un état de déréliction idéologique. Je
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