UQÀM Faculté des sciences de l’éducation Maîtrise en enseignement, profil FGA Pratique supervisée II : didactique en formation générale des adultes, MAE 7864 Travail 3 Résumé écrit de l’introduction, accompagné d’un commentaire réflexif sur le chapitre 5 de l’ouvrage collectif dirigé par Rachel Bélisle (2012) Présenté à : Jean-Pierre Mercier Par : Mouhamadou CISSÉ Le samedi 28 novembre 2015 1 1. Résumé des pages 1 à 10 de l’introduction « L ’ écrit pour garder trace et retracer l ’ apprentissage extrascolaire des adultes » Béliste (2012) Dans l’introduction de l’ouvrage Écrire, lire et apprendre à l’âge adulte (2012) qu’elle a dirigé, Béliste a d’abord rappelé que les visées de celui-ci consistent à examiner les influences des contextes socioculturels sur l’apprentissage et l’usage de l’écrit par des adultes ; elle a précisé également les fondements théoriques d’une telle perception qui est inspirée du courant des New literacy studies (NLS). Ensuite, sous forme de réflexion analytique structurée en trois aspects, l’auteure aborde la proximité entre l’écrit et l’apprentissage en les inscrivant dans la situation de l’adulte en situation d’apprentissage informel, laquelle s’effectue tout au long de la vie. Le premier aspect analyse la notion de « l’apprentissage tout au long de la vie » comme un besoin social, humain et professionnel capable de faire face aux problèmes reliés au monde de l’emploi et aux difficultés de la vie. En effet, l’apprentissage tout au long de la vie trouve sa raison d’être, entre autres, dans l’instabilité de l’emploi, les relations interculturelles, les avancées technologiques, le renouvellement des connaissances et la place importante du savoir dans la société. Ainsi, l’auteure fait la synthèse des actions menées par les organisations internationales pour l’adoption de l’apprentissage tout au long de la vie dans « les politiques publiques » de maints pays du monde. C’est d’abord le rapport de la Commission internationale de l’éducation pour le XXIe siècle qui avait dégagé les voies de l’éducation orientée vers la perspective de l’apprenant adulte dont on valorise les besoins et l’expérience. Puis, la 5e Conférence internationale sur l’éducation des adultes (CONFINTEA 5) a élaboré les modalités pour concrétiser cet apprentissage tout au long de la vie autour des problèmes qui touchent les adultes, à savoir les maladies, l’analphabétisme, les détentions, les exils, la condition féminine, etc. C’est pourquoi, selon Béliste, l’UNESCO et ses partenaires, entrevoient l’apprentissage des adultes dans des réseaux autres que scolaires. Ensuite, l’OCDE a mis de l’avant le concept de lifelong learning (apprentissage à vie) appelé à jouer un rôle dans le développement économique des pays industrialisés. C’est l’exemple que l’auteure donne sur les politiques d’éducation des adultes au Québec où la formation et l’apprentissage ont pour unique but l’insertion professionnelle ; c’està-dire un apprentissage qui vise la qualification et qui est axé sur le développement des compétences indispensables au secteur professionnel. À ce propos, la lecture et l’écriture constituent des étapes indispensables, parce qu’elles assurent la poursuite ou la continuité de la 2 formation de base chez des adultes présentant une faible littératie. Cependant, les buts poursuivis dans cet ouvrage se démarquent selon Béliste de cette conception parcellaire de l’apprentissage tout au long de la vie. À l’opposé, l’auteure propose une dimension de l’apprentissage tout au long de la vie qui intègre des endroits, des moments et des situations variés dans lesquels l’adulte peut apprendre. Ces espaces étanches où l’apprentissage de l’adulte s’exerce, ont l’avantage de contribuer à la « reconnaissance » ou à la « validation » officielle des expériences antérieures par l’État ou ses mandataires. Néanmoins, ce processus de sanction des acquis pose problème selon Béliste, car les adultes qui n’ont pas suivi une formation scolaire disposent d’une expérience de vie et d’une éducation basée sur l’action, les interactions sociales qui ne se retrouvent pas dans le curriculum scolaire. Ce dernier valorise l’écrit que ce soit dans les documents officiels ou dans les étapes de validation des apprentissages. Il s’agit donc d’un obstacle majeur que l’ouvrage, à l’aide de la théorie, tente d’éviter en analysant la place de l’écrit dans la vie de tous les jours dans un contexte d’apprentissage informel. Dans le deuxième aspect, l’auteure adopte une approche définitionnelle des termes « informel, non formel et formel », en convoquant les instructions de l’UNESCO et de l’OCDE, mais aussi en précisant leur sens polysémique dans la théorie et la façon dont les auteurs qui ont contribué à l’ouvrage les utilisent dans leur analyse. En effet, selon Béliste, ces termes sont employés pour caractériser l’apprentissage extrascolaire et ses contextes de développement tels que « les modes, les cadres, les activités, le processus d’apprentissage », etc. Les références théoriques qu’elle fournit montrent l’étendue de cette triade. Mais, on est en mesure de savoir que l’éducation dite formelle mène à l’obtention d’un diplôme, alors que celle qui est non formelle n’aboutit pas à une diplomation. L’apprentissage formel peut renvoyer à un contexte scolaire ou de travail. En revanche, la triade est maintenue dans les textes de l’ouvrage et pour Béliste, les « avantages et les inconvénients » des trois adjectifs peuvent être clarifiés par les textes de l’ouvrage selon l’approche de chaque auteur. Mais, à ce niveau de l’analyse on sait déjà que l’apprentissage informel renvoie à des contextes de travail ou de vie. Le troisième aspect, qui analyse l’écrit à la fois comme objet à apprendre et moyen d’apprendre, définit d’abord la littératie (literacy), aborde ensuite l’écrit dans son usage scolaire ou dans la vie de tous les jours, développe enfin les trois familles de situations dans lesquelles s’exerce la pratique de l’écrit. En effet, selon Béliste la littératie, terme rempli d’ailleurs de sens différents, 3 peut signifier l’apprentissage de l’écriture et de la lecture, la compétence reliée à l’usage de celles-ci, mais aussi l’exercice de l’écrit dans des domaines sociaux de la vie. La dimension « capacité » ou « aptitude » fait de la littératie un objet d’apprentissage qui ne peut se limiter uniquement au cadre scolaire, mais qui s’étend dans des contextes socioculturels. Il faut préciser que les objectifs de l’ouvrage orientés vers des usages sociaux amènent les auteurs à privilégier les termes « écrit, lecture et écriture. » Et, s’agissant de l’écrit, il faut mentionner qu’il se retrouve autant dans les activités scolaires que dans les apprentissages informels au travail, à la maison et dans la vie courante. Cette absence d’homogénéité dans l’usage de l’écrit explique les trois familles de situations suivantes : la première porte sur l’acquisition des aspects formels, linguistiques et les usages sociaux de l’écrit ; la deuxième qui suppose la maîtrise de l’écriture, est le recours à l’écrit pour atteindre des objectifs d’apprentissage d’une connaissance, d’une façon de faire au travail ou d’être dans la vie sociale ; la troisième qui évacue l’apprentissage, porte sur les différentes situations sociales dans lesquelles l’écrit est utilisé. En d’autres mots, cette troisième famille de situations inscrit l’écrit dans la vie de tous les jours de l’adulte. Enfin, il faut noter que les auteurs de l’ouvrage ont retenu les deux dernières familles de situations en raison de leurs liens avec le travail et la vie, mais également par rapport aux buts poursuivis dans ce livre. 2. Commentaire réflexif du chapitre 5 : « Écrit et apprentissage dans la vie de jeunes adultes en situation de précarité », Virginie Thériault et Rachel Béliste Ce chapitre présente une étude qui s’inspire d’une recherche effectuée auprès de 45 jeunes adultes non diplômés en situation de précarité qui utilisent l’écriture et la lecture dans des moments cruciaux de leur vie. Les auteures de l’article s’appuient sur le modèle de l’apprentissage proposé par Knud Illeris (2007). En partant des statistiques du MELS sur l’inactivité des jeunes non diplômés, Thériault et Béliste évoquent la précarité et la pauvreté de ces individus qui sollicitent le soutien financier de l’État, bénéficient des services offerts dans les carrefours jeunesse-emploi (CFJ). Les participants étaient âgés de 18 à 24, la plupart vivait dans la précarité et avait effectué une demande d’aide sociale. La méthodologie utilisée pour collecter des informations était basée sur les « moments importants » et les « réseaux sociaux » des participants et l’entretien pour s’informer de leurs activités de lecture et d’écriture pendant des 4 moments importants. Pour analyser l’étude, les auteures ont utilisé une stratégie (Thériault) comportant cinq étapes : « préparation du corpus en vue de la thématisation complémentaire, thématisation complémentaire, justesse de l’analyse, amorce de mises en relation et interprétation ». Les résultats des entretiens de la première vague de décembre 2006 à avril 2007 sont présentés en trois catégories : (1) « les moments importants », (2) « les activités de lecture et d’écriture » et (3) « l’incitation et la motivation à lire et à écrire ». Parmi les 469 moments importants, les plus récurrents chez les participants sont les rencontres et ruptures, la mort d’une personne proche, les déménagements, les problèmes de santé et le marché du travail. Le pourcentage des activités de lecture pendant ces moments est significatif et est de 91%. Parmi les 23 activités, les plus pratiquées sont « la lecture de livre », l’écriture et la relecture « d’écrits intimes », « la recherche dans l’Internet ». En effet, de nombreux jeunes ont lu un livre portant sur des thèmes familiers ou vécus lors d’un moment important. Concernant l’Internet, plusieurs participants disent y avoir recouru pour chercher une information sur un sujet qui les intéresse. Parmi les formes d’incitation ou de motivation, les auteures ont retenu : « autorégulation et apaisement » et « apprentissage intentionnel ou autodirigé ». Des participants ont vaincu la violence par l’écrit, d’autres ont appris à contrôler leur émotion par l’écriture, et d’autres encore ont tiré des leçons en relisant leur journal intime. Dans les trois cas, il s’agit bien d’un apprentissage informel, même si les buts des jeunes n’étaient pas nécessairement d’apprendre. L’apprentissage intentionnel découle des situations du moment comme la lecture de dépliants. En sommes, l’un des intérêts de cette étude est de faire comprendre que les activités de lecture et d’écriture participent à des processus d’apprentissage informel qui se déroulent dans des moments importants de la vie. Le modèle d’apprentissage d’Illeris (2007) s’appuie sur des théories éducatives qui valorisent les interactions sociales et l’acquisition des connaissances. L’«interaction » que favorise le milieu social et la communauté, et l’« acquisition » forment le modèle « triangulaire » de Illeris, l’acquisition étant scindée en deux dimensions que sont l’incitation ou l’effort cognitif et le contenu équivalent à ce qui est appris, que ce soit une connaissance ou une façon de faire. Illeris (2007) fournit six situations dans sa perception de l’interaction, la participation étant la plus complète. Thériault et Béliste synthétisent les deux aspects du modèle d’Illeris (2007) que sont le social ou l’environnement d’apprentissage et le sociétal qui renvoie aux modes de fonctionnement de la société. Elles notent aussi les cinq espaces d’apprentissage proposés par 5 Illeris, à savoir (1) « l’apprentissage quotidien », (2) « l’apprentissage scolaire et l’apprentissage éducatif », (3) « l’apprentissage dans la vie au travail », (4) « l’apprentissage dans l’internet » et (5) « l’apprentissage à travers les loisirs et l’activité locale ». 2.1. Retombées des résultats de l’étude de Thériault et Béliste sur ma pratique : Afin de mieux saisir les retombées de l’étude sur ma pratique en tant qu’enseignant en francisation, faisons une brève description des caractéristiques de la clientèle. Il s’agit d’adultes immigrants allophones âgés entre 18 et 65 ans ou plus et qui sont résidents permanents ou réfugiés vivant au Québec depuis moins de cinq ans. Bien que ces adultes soient différents de ceux décrits dans l’étude de Thériault et Béliste (2012), il faut reconnaître que la clientèle en francisation vit des moments importants de leur vie : certains ont qui leur pays pour des problèmes liés à la pauvreté, à la guerre, aux conflits politiques, d’autres sont des immigrants parrainés par un membre de la famille, et d’autres encore sont issus de l’immigration professionnelle. Une fois installés aux Québec, cette clientèle fait face à de nombreux défis : recherche de logement et de travail, formation, services de garde pour les enfants, cours de francisation, intégration socioculturelle, contact avec le pays d’origine, démarches administratives, les assurances, le stress, etc. Ces moments importants et immédiats de leur vie les amènent à trouver des solutions par différents moyens : participation à des séances d’intégration où ils doivent lire et écouter des informations, recherche dans l’Internet (logement, travail), correspondances écrites (propriétaire, employeur, membres de la famille). Pour les étudiants débutants ces moments importants favorisent la lecture et l’écriture dans une langue autre que le français, mais pour les étudiants de niveau intermédiaire ou avancé, l’écrit (lecture et écriture) en français participe de la résolution des situations de vie. À ce propos, ils apprennent des choses en utilisant l’écrit dans la vie de tous les jours même en dehors du cours de francisation, qui relève par ailleurs de l’apprentissage formel. On peut affirmer donc que les activités de lecture et d’écriture favorisent l’apprentissage informel des apprenants adultes en francisation lors des moments importants de leur vie. 2.2. Retombées des concepts du modèle d’apprentissage d’Illeris (2007) sur ma pratique Le programme de francisation du Ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion (MIDI) privilégie des approches d’enseignement-apprentissage basées sur des interactions entre les apprenants adultes, des jeux de rôles, des activités en dyade ou en sous-groupe afin de favoriser le développement des compétences langagières en production orale, en compréhension 6 orale, en production écrite et en compréhension écrite. Les discussions en grand groupe et les débats permettent d’acquérir des connaissances et de développer des capacités à communiquer en français. À ce propos, le modèle triangulaire d’Illeris (2007) peut s’appliquer aux activités d’enseignement-apprentissage en francisation, dans la mesure où ce modèle propose trois dimensions que sont l’incitation, le contenu et l’interaction. En effet, les interactions sont les échanges sociaux sur des intentions et des situations de communication portant sur des thèmes reliés aux besoins et à la vie des adultes apprenants en francisation. Un adulte en situation d’apprentissage d’une langue seconde est nécessairement en déséquilibre mental et vit un conflit cognitif, l’incitation est donc cruciale pour retrouver l’équilibre mental. La dimension du contenu qui correspond aux objets à apprendre concerne les règles et les normes permettant de développer des compétences en communication orale et écrite. Ces trois dimensions sont permanentes dans toutes les phases ou étape d’apprentissage, de la mise en situation au transfert des connaissances. Références bibliographiques Bélisle, R. (dir.) (2012). Écrire, lire et apprendre à l’âge adulte. Québec : Presses de l’Université Laval. Thériault et Béliste (2012). « Écrit et apprentissage dans la vie de jeunes adultes en situation de précarité ». In R. Béliste (dir.). Écrire, lire et apprendre à l’âge adulte. Québec : Presses de l’Université Laval. 7