Témoignage de Bruno-Marie Duffé
Aumônier au centre Léon Bérard depuis 6 ans, pour les personnes en fin de vie à cause d’un
cancer y compris pour enfants et jeunes adultes (leucémie, tumeurs…).
La question est de savoir ce qu’il convient de faire lors d’une avancée de la maladie pour
bien faire. Les soins palliatifs se sont développés aussi en pédiatrie.
Comment faire pour bien faire : une question que l’on se pose tous les jours.
La connaissance sur les pathologies progresse mais aussi les thérapeutiques. Si on intervient
à temps, on peut enrayer la maladie (acte chirurgicale, radiothérapie, chimiothérapie…). Mais
parfois à cause de la résistance de notre organisme à certains traitement, le cancer peut se
développer très rapidement. A ce moment là se pose la question de savoir : jusqu’où aller
dans le traitement ? avec le danger d’épuisement de la personne. Quel type de choix ?
Comment on prend la décision ?
- est-ce que tout faire, c’est bien faire ?
- que chacun puisse exprimer où il en est et voir avec la famille. A un moment on dit :
« Voilà les moyens que nous disposons, qu’est-ce que vous en pensez ? » Mais il y a
des dilemmes : un malade peut dire « on va arrêter » et la famille « qu’est-ce que
vous allez faire ? il faut continuer. »
- Respecter la personne tout en respectant ses proches, et rester dans une attitude
combative jusqu’au bout pour que la personne soignée n’ait pas l’impression qu’on
l’abandonne, c’est un chemin de crêtes ; C’est un cheminement.
- On a besoin de parler avec la personne, ses liens, ses convictions, qu’est-ce qui est
préférable pour cette personne, pour la famille ? Comment aider l’aidant ?
La question éthique c’est la question du respect de la personne à la différence de
l’acharnement thérapeutique.
La question est de savoir comment échapper à l’acharnement thérapeutique.
Dans la proposition de soins palliatifs, on prend en compte la personne dans toutes ses
dimensions : corporelle, relationnelle, spirituelle, affective…Pour permettre à la personne de
vivre cette fin de vie en étant respecter et en la vivant jusqu’au bout avec la personne qu’elle
aime.
Question : « Qu’est-ce que tu voudrais qu’on fasse ensemble pendant ce temps ? »
Entendre que les gens ont envie de mourir. Il n’y a pas de honte à dire « j’ai envie de
mourir » et même entendre parfois « donnez-moi la mort ».
L’idée de mourir est passé dans l’opinion :
- pour ne plus être à charge de la société,
- pour ne pas montrer un corps dégradé à ceux que j’aime,
- pour ne pas faire l’expérience terrible de la souffrance.
Il faut entendre la demande du malade car derrière cette demande, c’est la demande d’un
vivant, de quelqu’un qui a une certaine représentation de la vie. Cette demande est légitime,
respectable. Prendre le temps qu’il faut pour entendre leurs demandes.
Refuser l’acharnement thérapeutique, soigner la douleur, abandonner les traitements
déraisonnables, prendre en compte l’affect, la religion…, parler de sa mort avec celui qui le
souhaite au moment où il veut… des bouts de chemin à faire avec quelqu’un qui nous a
demandé.
La question éthique est une question d’humanité et de solidarité. C’est une
expérience de communion. C’est parce qu’on vit cette communion en humanité,
qu’on fait un bout de chemin que cela donne beaucoup de sens. C’est un
engagement très fort.
« J’ai le sentiment qu’il me manque du temps
alors que j’ai donné tout le temps que j’avais. »