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Intervention sur « la crise »
1. Genèse de la crise : une crise systémique
La crise actuelle apparaît comme la crise d’un mode de fonctionnement du système capitaliste dont les dysfonctionnements
sont liés à :
- L’évolution du partage de la VA depuis les années 60 qui se traduit par la volonté de diminuer la part des salaires
dans la VA en réduisant les effectifs (gains de productivité, délocalisations), en réduisant les coûts salariaux (non
augmentation voire diminution des salaires réels, développement des emplois précaires, délocalisations).
Document 1 : Evolution du partage de la VA en France
- La réduction de la part des salaires qui, associée à un mode de croissance reposant sur une consommation sans limite
oblige les ménages à l’endettement. Celui ci est facilité par la dérégulation de la finance.
Document 2 : Les inégalités de revenus aux EU
Part des revenus des 10% les plus riches dans le total des revenus aux Etats-Unis de 1917 à 2006
Source : Emmanuel Saez, économiste à Barkeley, mars 2008
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Endettement :
Les ménages américains ne disposant pas de capacité de financement suffisante (en raison de la faiblesse du taux
d’épargne) pour faire face à leurs dépenses de consommation, ils sont poussés à s’endetter massivement c’est- dire
à contracter un ensemble de dettes à plus ou moins long terme.
Document 3 : L’évolution de l’endettement des ménages américains
Régulation de la finance : ce terme désigne un ensemble de règles formelles et informelles et d’institutions qui
assurent un certain mode de fonctionnement du système financier.
Dérégulation de la finance :
Les années 1970 sont marquées par la libéralisation de l’économie.
En 1971, l’abandon du système de Bretton Woods (système de changes fixes impliquant un contrôle des changes et
donc pas de libre circulation des capitaux) signifie le retour au flottement des monnaies et la fin des contrôles de
capitaux.
La conséquence en est la volatilité d’un certain nombre de grandeurs (ex : cours des devises, taux d’intérêt…) et donc
l’émergence d’un marché du risque financier visant à gérer ces risques (ex : risque de change) et la création de
produits dérivés (options, swaps, …) permettant de les couvrir voire de spéculer sur les variations futures de ces
données.
Parallèlement, les autorités des marchés financiers ont encouragé ce processus par le biais de la déréglementation des
marchés financiers dans les années 1980 et 1990.
- L’endettement qui va progressivement amener au surendettement des ménages américains avec la hausse des taux
d’intérêt et le fait que bon nombre de taux d’intérêt sont à taux variables (en particulier aux EU).
Surendettement : c’est l’incapacité durable d’un agent économique à payer ses dettes c’est-dire que le montant de
ses mensualités dépasse sa capacité de remboursement.
Taux d’intérêt : c’est le loyer ou prix de la monnaie.
Taux d’intérêt variables : ils se distinguent des taux fixes et varient au cours de la durée du prêt soit en fonction de
l’inflation soit en fonction d’un taux de référence du marcmonétaire ce qui a pour effet d’augmenter le montant des
mensualités à rembourser et/ou la durée de remboursement
- Un besoin de financement de l’économie américaine qui est satisfait par une épargne internationale (et non par
l’épargne intérieure faible aux EU), en particulier d’origine chinoise car le dollar demeure la principale monnaie de
réserve et la Chine, elle, n’utilise pas ses ressources pour des dépenses intérieures (Ex : santé, éducation). En 2008 la
Chine était le premier pays détenteur de bons du trésor américain avec 653 milliards de dollars.
Besoin de financement : il s’agit ici du besoin de financement d’une nation ; dans ce cas, la nation doit faire appel à
l’épargne du reste du monde pour le combler.
Monnaie de réserve :
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Une monnaie, sur le plan économique, joue 3 rôles : instrument des échanges (elle permet d’éteindre des dettes et de
régler des transactions), unité de compte (elle permet d’exprimer la valeur monétaire des biens et des services et de
comparer ainsi les prix) et réserve de valeur (elle peut être épargnée).
Au niveau mondial, le dollar joue ce le de monnaie de réserve et est ainsi détenu par les institutions internationales,
les banques centrales (Selon le FMI, le dollar américain représentaient 64% des réserves mondiales des banques
centrales en septembre 2007)...Le dollar sert d’unité de compte et est également la principale devise du commerce
mondial c’est-à-dire constitue la monnaie essentielle de règlement des échanges internationaux.
Document 4 : La répartition de l’épargne internationale
2. Déclencheurs de la crise : une crise immobilière une crise financière
Attention : Crise immobilière et crise financière sont des déclencheurs de la crise mais ne sont pas l’origine de la crise
comme cela vient d’être montré auparavant.
Rappelons tout d’abord le contexte dans lequel a pu se développer la crise immobilière aux Etats Unis :
La politique monétaire très souple (par exemple après le 11 septembre 2001 les taux d’intérêt ont été abaissés à 1%)
menée par Alan Greenspan (président de la Réserve Fédérale américaine de 1987 à 2006 ) a permis de financer la
consommation des ménages américains , leurs investissements immobiliers ainsi que les investissements des entreprises.
Par ailleurs les marchés sont alimentés par un excédent de liquidités : pétrodollars, excédants commerciaux de la Chine et
de l’Inde.
L’argent abondant et bon marché a ainsi contrib à réduire « le coût du risque ». Les entreprises en ont profité pour
bénéficier d’un effet de levier ( elles ont emprunté des capitaux en espérant qu’au final leur coût serait moindre que les
bénéfices qu’elles allaient en tirer). Ceci a permis de verser des dividendes de plus en plus élevés et de tirer le cours des
actions vers le haut.
De plus pour doper les rendements, les financiers ont multiplié les innovations financières dont les prêts subprime.
Les subprimes sont des crédits immobiliers gagés sur la valeur des biens acquis, accordés à des ménages modestes ; c’est à
dire que selon les critères habituels, ces ménages n’avaient pas les revenus suffisants pour pouvoir y prétendre.
Ces prêts, dont le montant total atteint 1 200 milliards de dollars, ont été distribués à partir du début des années 2000, par
des courtiers en prêts immobiliers qui n’étaient pas des banques, et donc n’étaient pas soumis à une supervision comme le
sont les banques.
La spéculation immobilière (l’offre de biens immobiliers augmentant moins vite que la demande en raison des crédits
subprimes) a entraîné une crise financière et bancaire . C’est là qu’intervient le processus de titrisation.
La titrisation est le processus qui consiste à transformer une créance détenue par une société, par exemple un prêt
immobilier, en un titre financier pouvant être vendu sur les marchés financiers.
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Les crédits subprime ont été découpés puis insérés dans des produits financiers complexes qui ont été revendus à des
banques et à des investisseurs du monde entier. Avec la titrisation le risque du crédit initial est donc transféré à
d’autres investisseurs qui n’en ont pas nécessairement connaissance (asymétrie d’information) ou ne cherchent pas à
vérifier la qualité des actifs qu’ils ont acheté.
Lorsque le marché immobilier américain s’est mis à chuter , ces crédits n’ont plus été remboursés, provoquant des pertes
abyssales pour les acheteurs de produits subprimes. De plus par effet de contagion, toutes les banques sont touchées
puisqu’elles ont toutes des titres de ce type , dénommés actifs toxiques, dans leur bilan.
Par ailleurs, par le biais de la titrisation, les banques se sont affranchies de certaines contraintes prudentielles. En effet
traditionnellement (et cela depuis la crise de 1929) la quantité de risque qu’une banque peut prendre est limitée par le
montant de crédit qu’elle peut accorder proportionnellement à ses fonds propres. Par le biais de la titrisation les banques
ont échappé à cette obligation puisque le risque pris n’est plus évalué en fonction du montant global du crédit , mais
seulement en fonction de la probabilité de défaut du titre en question. Ainsi il n’y a plus de limite à la capacité de crédit
des banques .
Enfin ajoutons que lors de son développement, le mécanisme de la titrisation s’est doublé d’une euphorie spéculative qui
a conduit à sous estimer les risques. C’est ainsi l’ensemble du système financier qui est pris au piège.
Le monde de la finance prend véritablement conscience de la dangerosité des subprimes lorsque le 18 juillet 2007, la
banque d’affaires Bear Stearns annonce la faillite de deux de ses fonds d’investissement.
3. Passage d’une crise financière à une crise de l’économie réelle
Les faillites boursières et bancaires partent des EU et se propagent au reste du monde par le biais de la titrisation et en
raison des faillances de la régulation financière (défaut de surveillance des autorités de contrôle) d’où la perte de
confiance des différents acteurs au sein du système bancaire et financier.
Quelques étapes du déroulement de la crise financière et bancaire et de l’action des autorités publiques de juillet
2007 à décembre 2008 :
Juillet 2007
Bear Stearns annonce la faillite de deux hedge funds spécialisés dans les dérivés de
crédit
juillet 2007/août 2008
La banque publique allemande KfW apporte son soutien financier à IKB pour 8.1
mds d’€ et annonce par le Ministre des finances d’un plan de sauvetage de 3.5 mds
d’€ pour sauver IKB de la faillite
Septembre 2007
La Banque d’Angleterre annonce l’octroi d’un prêt d’urgence garanti par l’Etat à
Northern Rock (5ème banque anglaise) ce qui déclenche une panique sur les dépôts
bancaires de cette banque.
Octobre 2007
UBS banque suisse annonce une dépréciation de ses actifs de 2.4 mds d’€
Merill Lynch annonce une dépréciation de ses actifs pour 8.4 mds d’€
Janvier 2008
City Group publie des pertes record et des dépréciations d’actifs pour 18.1 mds de
dollars.
La Société Générale dévoile la fraude commise par un de ses traders (pertes de 4.9
mds d’euros)
Février 2008
Nationalisation de Northern Rock en GB
Mars 2008
Bear Sterns est repris par JP Morgan sous l’égide de la FED (prêt de 30 mds de
dollars au repreneur)
Avril 2008
UBS annonce une dépréciation de ses actifs de 37.4 mds de dollars
Septembre 2008
Dépôt de bilan de Lehman Brothers aux EU
Bank of America annonce le rachat de Merill Lynch
Nationalisation de AIG assureur américain
Lloyds TSB rachète HBOS menacée de faillite au RU
JP Morgan reprend les dépôts de Washington Mutual aux EU
Effondrement du cours boursier de Fortis en Belgique et prise de contrôle par BNP
Paribas en Belgique et au Luxembourg
Nationalisation de Bradford et Bingley au RU et de Glitnir en Islande
Sauvetage de Dexia par les Etats français, belge et luxembourgeois
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Octobre 2008
Nouveau plan de sauvetage pour Hypo Real Estate en Allemagne
Plan de sauvetage annoncé pour UBS en Suisse
Souscription de titres subordonnés émis par les 6 principaux groupes bancaires
français par le gouvernement français (10.5 mds d’euros)
Novembre 2008
Garantie par le gouvernement américain des dettes de City Group (306 mds de
dollars) et injection de 20 mds de dollars dans son capital
Décembre 2008
Annonce d’une fraude estimée à 50 mds de dollars au sein du fonds d’investissement
de B. Madoff
Tableau élaboré à partir de données Banque de France de février 2009.
Hedge funds : fonds spéculatifs
Dépréciation d’actifs : perte de valeur des actifs détenus par les banques, compagnies d’assurances…
Document 5:
Ces faillites ont les conséquences suivantes :
- les banques ne se prêtent plus d’argent entre elles d’où une crise de liquidité
- les banques réduisent fortement les crédits :
à destination des entreprises ce qui a un impact sur l’offre
à destination des ménages ce qui a un impact sur la demande
4. Mesures prises par les Etats et les organisations internationales
Un déséquilibre apparaît au niveau mondial entre l’offre et la demande, l’offre mondiale étant supérieure à la
demande mondiale. La question clé est donc de trouver une solution pour restaurer l’équilibre : diminution de l’offre ou
augmentation de la demande ?
C’est par une politique de relance que les pays cherchent à lever cette contradiction afin d’éviter un ajustement par la
baisse de l’offre qui enfoncerait davantage les économies dans la crise. A cela s’ajoutent les décisions du G20 réuni à
Londres le 02 avril 2009 qui portent en particulier sur un rôle accru du FMI et de la Banque mondiale.
4.1 Mesures prises dans l’urgence c’est à dire à court terme :
Dans un premier temps chaque pays a réagi de façon non coordonnée pour faire face au plus pressé.
Les principales mesures sont les suivantes (l’objectif n’est pas de les détailler par pays, chacun ayant ses spécificités) :
- aides aux banques et nationalisations : celles ci sont intervenues très rapidement pour éviter les faillites en cascade
(cf § précédent) et parce que l’accès au crédit est indispensable au fonctionnement des économies.
Quelques exemples de banques concernées par les aides :
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