La loi, c`est Jésus - Centre Catholique des Médecins Français

CCMF, 5 avenue de l’Observatoire, F-75006 Paris Tél : 01 46 34 59 15
E-mail : [email protected] Site Internet : www.ccmf.fr
BULLETIN DU C.C.M.F.
JANVIER 2008 N°17
LETTRE DE L’ESPÉRANCE ……
« SOYEZ LE SEL DE LA TERRE ET LA LUMIÈRE DU MONDE »
Docteur Bertrand GALICHON
Président du CCMF
Nous sommes tous conscients que le CCMF traverse une crise profonde dont les difficultés de
recrutement n’en sont que l’expression. Nous ne sommes pas les seuls à traverser une telle
remise en cause de notre existence même. D’autres associations dites d’action catholique et non
des moindres sont elles aussi ébranlées par les mutations profondes de notre société et des
nouvelles modalités de vivre en Eglise.
Le CCMF ne pourra envisager sa pérennité comme mouvement d’Eglise que nourri par
l’écoute de la pluralité de ses membres. Le CCMF doit rester fidèle à sa tradition d’être
l’expression de l’ensemble des médecins français et non de telle ou telle sensibilité. L’unité des
Chrétiens commence par l’acceptation de nos différences. Nous devons donc redéfinir les
conditions de notre mission de rassemblement des médecins catholiques français. Le CCMF est
aujourd’hui à un tournant de son histoire ; ce n’est pas le premier. Rassurons nous ! Soyons
sûrs de la force et de la liberté de l’Esprit. Le monde change, le CCMF doit changer.
Depuis les heures de gloire du CCMF et de « Médecine de l’Homme », tout a considérablement
évolué. Nous ne voulons pas faire ici l’inventaire exhaustif de ces mutations, mais n’en citer
que quelques unes. La plus fondamentale qui nous concerne tous, notre individualisme, notre
volonté de nous construire de façon autonome. Nous ne sommes plus chrétiens parce
qu’appartenant à l’Eglise. Nous nous définissons d’abord comme chrétiens et nous adhérons
aux propositions de l’Eglise aux grés de notre propre évolution. La quête spirituelle prend le
pas sur l’engagement d’action catholique dans les jeunes générations. La réflexion éthique s’est
professionnalisée, institutionnalisée dans des lieux laïcisés qui font autorité. La
complexification de notre société, de la médecine, la montée du relativisme participent de la
baisse de l’autorité du discours de l’Eglise. Au sein même de notre Eglise le paysage a lui aussi
considérablement évolué : multiplicité des propositions de formation chrétienne et en ce qui
concerne directement le CCMF la mise en place progressive des Pastorales de Santé.
Je vous invite à méditer ce verset: « soyez le sel de la Terre et la Lumière du Monde ». Nous
nous devons de vivre toutes ces mutations du monde médical de l’intérieur, de façon totalement
solidaire pour pouvoir mieux les éclairer par l’Esprit et répondre ainsi avec liberté et créativité
aux aspirations de nos confrères. Nous devons être le « sel » dans la terre pour pouvoir espérer
en être la « lumière ». Voici qu’elle doit être notre mission.
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« SOYEZ LE SEL DE LA TERRE ET LA LUMIÈRE DU MONDE » (suite)
Le Samedi 15 Mars aura lieu un Conseil National important durant lequel le Père Robert
PHALIP transmettra ses responsabilités d’aumônier national au Père Jacques FAUCHER.
Enfin, à la suite de St Pierre, nous devons être en mesure de justifier notre Espérance. Je vous
propose que ce thème de l’Espérance soit au centre de nos réflexions de cette année.
En ce début Janvier, recevez tous mes vœux pour cette nouvelle année.
Bertrand GALICHON
UN NOUVEAU BUREAU
L’Assemblée Générale du 6 Octobre 2007 a procédé à l’élection du Président et à
l’installation d’un nouveau Bureau du CCMF :
Président : Dr Bertrand GALICHON (PARIS)
Vice-Président : Pr Christophe de CHAMPS (REIMS)
Secrétaire Général : Dr Stanislas FAIVRE d’ARCIER (PARIS)
Secrétaire Général : Dr Bernard GUILLOTIN (PARIS)
Trésorier : Dr Yves DEQUIDT (LILLE)
Trésorier Adjoint : Dr François GIRODON (DIJON)
Tous nos vœux de réussite pour cette nouvelle équipe !
CONGRÈS NATIONAL de PARIS les 1er et 2 Décembre 2007
Impression d’un participant :
Tout d’abord une immense déception concernant le nombre de participants : 63 présents sur
300 cotisants !!!
Pourtant ce n’est pas faute d’avoir prévu :
- Un thème porteur : LA CHARITÉ (qui est également le thème de réflexion de tout le
diocèse de PARIS).
- Des intervenants non pas de grande, mais d’exceptionnelle qualité.
- Nous vous invitons à lire l’intervention de Mgr GUYARD.
- Deux journées très instructives, parfaitement orchestrées grâce à une organisation sans
faille, dans un cadre hors norme à PARIS.
Mais tout cela semble insuffisant pour mobiliser les adhérents.
DITES NOUS POURQUOI ?
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Intervention de Mgr GUYARD au Congrès National du CCMF
LA CHARITE A-T-ELLE ENCORE SA PLACE ET UN SENS DANS LEXERCICE MEDICAL ET SI OUI
LESQUELS ?
Se poser la question dans ces termes, c’est présupposer une évolution, un changement dans les
pratiques médicales, comme si cette évolution remettait en cause, par une perte de sens ou une
dérive, la pratique de la charité que l’on considérait comme évidente et naturelle.
Il est vrai que les soins ou la guérison des corps ont toujours été pour les chrétiens associés à la
guérison de l’âme, et donc l’amour des frères consiste à vouloir leur bien non seulement pour
cette vie , mais aussi pour sa destinée éternelle. . Jésus a montré que la maladie physique était
le signe du péché, non comme punition personnelle du péché, mais comme signe que la
création est marquée par le péché. La véritable guérison est celle de l’âme. Et Jésus en
guérissant les corps anticipe la guérison définitive qui nous sera acquise comme participation à
sa résurrection. C’est la manifestation suprême de son amour.
En guérissant les corps par amour, il indique qu’il vient aussi par amour apporter une guérison
plus fondamentale, celle du mal et du péché.
Il n’empêche que les soins apportés aux malades pour restaurer leur santé physique manifestent
la charité fraternelle et apportent le signe visible que les chrétiens ont à mener contre la
souffrance et le mal. C’est aussi une manière de servir les pauvres et les petits et de mettre en
œuvre le commandement de l’amour. C’est pourquoi, traditionnellement, l’Eglise a toujours
lié le soin des corps et celui des âmes. Le Moyen-Age en a donné la plus belle expression dans
la construction concomitante des cathédrales et des hôtels-dieu, à la fois hospices et hôpitaux.
Les moyens thérapeutiques dont disposaient les soignants d’alors, permettaient plus de
soulager que de guérir, mais ils permettaient au moins, par la sollicitude qu’ils apportaient aux
souffrants, à les aider à cheminer vers une fin de vie pacifiée et entourée. On peut dire, parce
que l’on était dans une société chrétienne, qu’il y avait une sorte de connaturalité entre les
pratiques médicales et la charité.
C’est du moins l’image traditionnelle qui reste dans la mémoire collective. Et pendant des
siècles, cette image a perduré par la succession des congrégations religieuses, féminines en
particulier, qui , jusqu’à la fin du 19ème siècle et une partie du XXème, ont maintenu la tradition
hospitalière comme expression privilégiée de la charité chrétienne, et principalement envers les
plus pauvres, les plus démunis, les plus délaissés.
Aujourd’hui la situation a changé. D’abord parce que le relais a été pris par d’autres
institutions publiques ou privées non confessionnelles. L’Eglise, et c’est un bien, n’a plus le
monopole de la santé. D’autre part parce que les recherches et les progrès de la médecine ont
permis, non seulement d’apaiser la souffrance, mais de guérir et de prévenir les maladies.
Mais dans le domaine médical comme dans tous les autres, la maîtrise que l’homme acquiert
peu à peu sur la nature et sur lui-même remet en cause sa relation à Dieu. Il est loin le temps où
Laennec pouvait dire avec humilité : « je le panse, Dieu le guérit » Et la charité qui se vivait
sur le registre de la compassion fraternelle, à la manière du Bon Samaritain, du soignant envers
le malade qui n’avait d’autre recours que de se confier à la miséricorde de Dieu, ne peuvent
aujourd’hui se vivre de cette manière. Le malade attend des résultats des soins qui lui sont
prodigués et le soignant est tenu de lui fournir. Que devient la charité dans cette nouvelle
relation ?
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LA CHARITE A-T-ELLE ENCORE SA PLACE ET UN SENS DANS LEXERCICE MEDICAL
ET SI OUI LESQUELS ? (SUITE)
C’est pourquoi, il est légitime de s’interroger à frais nouveaux sur la place de la charité dans
les pratiques médicales d’aujourd’hui. En effet, il en a toujours été ainsi. Les chrétiens sont les
prophètes du Royaume de l’Amour. Encore faut-il que ce message puisse être entendu, compris
et mis en œuvre pour les hommes auxquels il s’adresse. Cela implique un réajustement
permanent des pratiques aux situations nouvelles.
En effet, si le Royaume est l’œuvre de Dieu, il nous a associé à sa construction et c’est notre
tâche d’y participer au long de l’histoire, en aimant Dieu et nos frères dans des relations
concrètes. La parabole du jugement dernier au chapitre 25 de l’évangile de s. Matthieu le dit
clairement : l’amour de Dieu et du prochain s’exprime dans le service de tout homme quelle
que soit sa situation. Et si Jésus mentionne explicitement la visite des malades comme service
de la charité, on peut sans crainte y ajouter les soins apportés aux malades
Ainsi on peut se demander comment le développement des pratiques médicales et l’affinement
des soins sont effectivement une manière de vivre la charité. Autrement dit, il importe de
s’assurer qu’il y a toujours une vraie correspondance entre les possibilités offertes par les
découvertes scientifiques et les performances des pratiques médicales avec le bien de ceux qui
attendent des soins ou en sont demandeurs.
Cette interrogation est la source de la réflexion éthique qui se développe depuis quelques
décennies. On ne peut y échapper. La maîtrise de la vie, dont on cherche sans cesse à déchiffrer
les secrets, ont conduit à s’interroger sur le sens même de la recherche. Depuis les origines,
l’homme est en quête de sa propre autonomie. C’est là le péché originel, il n’admet pas
facilement sa dépendance vis-à-vis de son Créateur. Il oublie que si Dieu lui a confié sa
création pour qu’il l’entretienne et la développe, il n’en reste que le gérant et non le
propriétaire, et que cette gérance est au service de tous.
La tentation de se vouloir l’égal de Dieu en le considérant comme un adversaire est de tous les
temps. Elle risque de s’accroître quand le déploiement de la science incite certains à penser que
cette égalité se rapproche. Le siècle des lumières en a inauguré l’espérance. Bien des esprits
aujourd’hui en sont imprégnés. Ce fond de tableau peut nous aider à comprendre le sens du
débat.
Le progrès scientifique appliqué au domaine médical va-t-il ou non dans le sens d’une
promotion de l’homme, d’un véritable service pour la qualité de sa vie et le respect de sa
dignité, ou au contraire, ne risquons-nous pas de nous laisser entraîner vers une dégradation de
la dignité humaine personnelle et collective par des pratiques non réfléchies ? La véritable
charité doit servir la qualide la vie et la dignité de l’homme. Tout ce qui est possible est-il
profitable ?
On le voit l’exercice de la charité en matière médicale est à chercher aujourd’hui dans cette
direction. C’est tout le problème de la bioéthique, tellement d’actualité. La flexion dans ce
domaine est proprement de l’ordre de la charité, car comment aimer et servir ses frères, si on
les considère comme des objets dont on décide ou non de l’existence, de leur utilité
thérapeutique ou du confort qu’ils peuvent apporter quand ils sont conformes à des critères
prédéfinis ? Comment parler de charité, quand à l’autre extrémité de la vie, on en vient à
décider arbitrairement du moment où elle doit s’achever ?
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LA CHARITE A-T-ELLE ENCORE SA PLACE ET UN SENS DANS LEXERCICE MEDICAL
ET SI OUI LESQUELS ? (SUITE)
Je sais qu’il est facile de condamner sans appel, et qu’il n’y a pas de progrès possible dans la
réflexion, si celui qui se sent accusé n’a pas les moyens de comprendre et d’être compris. Le
point de départ de la charité commence par le dialogue et non par l’anathème. C’est pourquoi
ce dialogue est indispensable. Un dialogue sérieux, sans faux-fuyant, qui débusque les pièges
du langage et les fausses bonnes intentions. Un dialogue qui doit tendre à éclairer la
conscience. Et l’Eglise y apporte une réelle contribution. Nous sommes dans une société
l’émotionnel l’emporte souvent sur la raison. La pression des médias et de certains lobbies
modèlent l’opinion publique et suscitent des polémiques qui ne font que renforcer les
antagonismes et occulter les repères. On le voit, il y a là un domaine fondamental de l’exercice
de la charité.
Mais il y a bien d’autres chantiers où peut s’exercer la réflexion sur la charité dans les
pratiques médicales. Ces chantiers concernent la vie de tous les jours. C’est par exemple la
relation humaine au patient. La technicité toujours plus grande et le recours à de multiples
intervenants qui conduisent les malades de services en services leur font perdre le référent à qui
ils pourraient se confier. C’est l’investissement psychologique pour trouver les mots qui
conviennent à chacun selon ce qu’il est, sa culture, sa religion, son environnement familial.
C’est le courage de continuer à visiter un malade dont on sait la fin imminente. Mission
difficile ? impossible ? dira-t-on. Et le temps qu’il faudrait ? et les conditions de travail ?
Parmi les témoignages de médecins chrétiens que je reçois, je puis affirmer au contraire, que
pour eux, la valorisation de la relation humaine qu’ils vivent avec leurs malades est un
enrichissement personnel qui les aide singulièrement à vivre les difficultés de leur métier. Oui,
la charité vis-à-vis des frères apporte aussi un bien-être à celui qui l’exerce.
Les médecins disent souvent qu’une de leurs difficultés réside dans leur solitude. Il est vrai
qu’ils vivent la solitude de leur cabinet et sont parfois perplexes devant les décisions qu’ils ont
à prendre ou des réponses à donner à leurs patients. Mais il me semble qu’il serait possible
dans certains cas de travailler davantage ensemble en particulier dans l’éducation du public.
- les exigences de certains patients vis-à-vis de soins non indispensables ou dangereux. Il est
difficile dans un tête-à-tête de résister à la pression, parce que la réputation du decin est
en jeu. Il risque de perdre sa clientèle devant un refus. C’est pourquoi il est indispensable
de donner des informations en amont. On sait le goût du public pour les questions de santé.
Les sites Internet multiples en témoignent. Des organismes comme le vôtre ont vocation, de
réagir contre l’illusion de la médecine miracle qui viendra bientôt à bout de tous les maux.
Il faut faire comprendre que tout ce qui est possible n’est pas bénéfique pour tous.
- la dérive du principe de précaution. Celui-ci, destiné à l’origine à définir les risques et en
mesurer les conséquences, est devenu la cause d’une certaine paralysie de l’action en raison
de la judiciarisation grandissante. Les médecins et les chirurgiens y sont exposés de plus en
plus fréquemment. Le grand public saisit mal que le risque 0 n’existe pas, et en médecine
moins qu’ailleurs. Et il faudrait éduquer ce public dont le comportement irréfléchi conduit
nécessairement à se retourner contre le bien commun. Les médecins ne progresseront plus
par précaution, et les tarifs prohibitifs des assurances décourageront les plus audacieux.
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