Présentation de l`ouvrage - Université Paris Nanterre

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Ếtude morpho-sémantique et diachronique
des formants du lexique populaire français
Examen d'un recueil argotique du XVIIe siècle :
Le Jargon de l'argot reformé d'Ollivier Chereau
Françoise Nore
Problématique de la thèse
Nous présentons aujourd'hui un recueil argotique du début du XVIIe siècle, Le Jargon de l'Argot reformé,
d'Ollivier Chereau. Nous avons choisi cet ouvrage car les termes qu'il renferme nous semblent représentatifs
des problèmes que l'on rencontre lorsqu'on vise à articuler études morphologiques et diachronie. En effet,
notre thèse de doctorat traite du morpho-sémantisme des formants1 du lexique populaire2 français à la lumière des faits historiques. Il s'agit d'établir s'il existe des règles de construction de mots spécifiques à ce
lexique et de voir si ce même lexique met en jeu des types de formants différents de ceux auquel recourt le
lexique standard pour sa propre formation. Analyse et comparaison président donc à cette étude.3
L'investigation est menée en s'appuyant sur différents corpus, notamment le TLFI, à partir duquel nous
avons effectué un relevé des entrées portant l'une ou l'autre des mentions "familier", "populaire" et "argotique". Ce relevé a été enrichi des mêmes types d'entrées du Dictionnaire de l'Argot de Jean-Paul Colin. La
réunion des deux corpus nous a ainsi permis de constituer un ensemble de termes populaires contemporains, mais, dans la mesure où notre étude est également diachronique, nous avons aussi recours à d'anciens glossaires argotiques, dont, en l'occurrence, l'ouvrage d'O. Chereau. Tout ce matériel assemblé nous
permet de mener une réflexion sur la morphologie du lexique non standard4 contemporain prenant en
compte les incidences historiques de l'évolution de la langue : évolutions morphologiques, phonologiques,
emprunts, etc.
En ce qui concerne l'ouvrage que nous présentons aujourd'hui, nous examinerons uniquement les mots
composés ou dérivés présentant des formants particuliers, à l'exclusion des métaphores et tropes en général que l'on rencontre déjà dans ce recueil ancien de quatre siècles, le but de notre travail étant une recherche morphologique, une réflexion sur la formation des mots, combinée nécessairement à des recherches étymologiques dans la mesure où il est indispensable, dès que l'on travaille sur du matériel ancien
– et a fortiori sur du lexique marginal –, de s'appuyer sur les bases philologiques les plus sûres possibles
afin de conduire un raisonnement morphologique non contestable. La diachronie, éclairant le mécanisme
historique de formation des mots, apparaît donc comme un outil d'aide à la réflexion sur les règles morphologiques contemporaines.
Présentation de l'ouvrage
Nous n'avons guère de renseignements sur Olivier Chereau ; on sait que l'auteur du glossaire intitulé Le
Jargon de l'argot reformé était drapier à Tours. L'ouvrage en lui-même est un opuscule d'une soixantaine de
pages comportant une brève préface, le glossaire proprement dit (avec des gloses de l'auteur), une description des activités délictueuses des locuteurs de cet argot, un dialogue entre deux argotiers et des documents
divers, dont des chansons argotiques.
Le texte sur lequel nous avons travaillé se trouve dans un ouvrage de Lazare Sainéan (Les sources de l'argot ancien, 1912), chercheur qui se consacra en grande partie à l'étude du parler populaire. Il s'agit de la
1
Nous avons choisi le terme formants utilisé par B. Fradin dans son dernier ouvrage (Fradin 2003a:72).
2
Nous choisissons le terme générique de populaire pour identifier les unités lexicales ne relevant pas du registre standard, qu'elles soient enregistrées dans la lexicographie sous les étiquettes de "familier", "populaire" ou "argotique".
3
4
Précisons que nous sommes en première année de doctorat.
À l'exclusion des langages que nous qualifierions de non spontanés comme le verlan, le largonji, le loucherbem, le javanais.
2
plus ancienne version conservée, que l'on date généralement de 1628 5. Nous disposions également d'une
édition de 1740 mais nous avons choisi de prendre en compte celle de 1628, en raison naturellement de sa
plus grande ancienneté, mais aussi par méfiance envers les versions ultérieures, qui ont été – en particulier
celles parues au cours du XIXe siècle – enrichies de termes dont l'origine argotique est douteuse. 6
Avant tout développement sur le contenu, le titre de l'ouvrage lui-même mérite quelques mots d'explication :
le sens que le terme argot avait il y a quatre cents ans doit être précisé. En effet, au XVIIe siècle, argot n'est
pas synonyme de jargon ; le mot désigne l'ensemble des "gueux". La mention d'argot reformé indique donc
qu'il y aurait eu, à cette époque, une sorte de constitution nouvelle de cette confrérie et de réaffectation des
diverses "tâches" de mendicité et de truanderie à des groupes de "gueux" nouvellement constitués, ce qui
est donc l'un des thèmes principaux de l'ouvrage de Chereau. Le Jargon de l'argot reformé apparaît donc
comme le parler propre à une nouvelle organisation du monde de la mendicité et de la truanderie.
L'intégralité de l'ouvrage a été prise en compte. Le glossaire est composé de 216 entrées glosées, ce qui ne
pourrait que difficilement être considéré comme un lexique exhaustif du parler argotique de l'époque (on
peut en effet supposer qu'il était plus fourni). Outre le fait que ce glossaire est succinct, d'autres raisons nous
ont conduite à ne pas exclure de notre étude les synapsies ou les mots composés, notamment le fait que
ceux-ci sont formés soit de termes inconnus aujourd'hui qu'il nous a semblé intéressant d'étudier, soit de
termes ayant survécu sous des formes différentes. Faire des coupures parmi un si faible nombre d'entrées
aurait certainement rendu l'ensemble trop peu étoffé pour être représentatif. En effet, nous considérons également que ce recueil doit être étudié dans son intégralité car il nous paraît représentatif, dans ses choix
lexicaux – Chereau a forcément dû en faire –, de ce que devait être le lexique argotique du début du XVII e
siècle : les thèmes principaux sont la truanderie, la nourriture, la représentation des autorités, civiles, religieuses et royales.
L'ordre des mots, tels que ceux-ci se présentent dans le tableau synoptique donné en annexe de cette
étude, est alphabétique. Cependant, à l'intérieur de chaque lettre initiale, on remarquera que ce même ordre
alphabétique n'est pas scrupuleusement respecté. Nous avons en effet reproduit l'ordre donné par Sainéan,
lequel est lui-même fidèle à celui imprimé dans l'ouvrage de référence, un ordre alphabétique non strict. Signalons que les gloses données par Chereau ont été fidèlement recopiées à l'identique, sans changer ni la
forme ou le sens, ni la syntaxe ou l'orthographe.
Sur un total général de 216 entrées dans le glossaire, nous avons retenu ici 82 entrées, unités lexicales ou
synapsies dont l'un des deux éléments, voire les deux, apparaît comme mot complexe construit. Ceci donne
un pourcentage de près de 38 % du nombre total des entrées. Nous avons également pris en considération
des mots présents dans les autres parties de l'ouvrage (dialogues, chansons et descriptions) ; ils sont au
nombre de 15 (également présents en annexe). Nous n'examinerons pas tous ces termes en détail ici ; nous
allons présenter ceux d'entre eux que nous estimons exemplaires des questions que la morphologie peut se
poser au sujet de ce genre de lexique.
Enfin, nous tenons à faire une dernière remarque avant de développer : le lexique populaire ou argotique
pose de très nombreux problèmes d'ordre étymologique. Aussi nous semble-t-il nécessaire, avant toute
étude morphologique de ce lexique, d'établir avec le plus de sûreté possible l'étymologie des termes étudiés.
C'est pour cette raison que la difficulté majeure fut d'opérer un tri parmi les termes de l'ouvrage. En effet,
comment savoir si, pour tel ou tel mot, nous sommes en présence d'un mot complexe, construit ou non, ou
d'un mot simple ? Cette question se pose continûment car le recueil présente un grand nombre de termes
d'étymologie incertaine, sinon inconnue. Toutes ces étymologies n'ont pas encore été éclaircies, et les
termes donnés en annexe comme mots complexes présentant un ou plusieurs affixes, standard ou populaires, le sont donc sous toutes réserves.
Le Jargon de l'Argot reformé est donc un bon terrain d'expérimentation pour la question de la composition
lexicale, puisque, en effet, la tâche la plus ardue consiste à identifier les formants entrant dans la composition des termes de l'ouvrage. L'investigation est compliquée par le fait que, si plusieurs termes sont bien
identifiés comme étant des emprunts à des langues étrangères ou à des variétés régionales de français ou à
des patois, ou encore des survivances de l'ancien français, il reste difficile de se prononcer avec assurance
5
"La première édition de cet opuscule est perdue ; celle dont nous venons de citer le titre, est sans date. Les bibliographes la placent généralement vers 1628." (Sainéan 1912:177, 1er vol.).
6
Nous avons ainsi tenu compte des mises en garde que L. Sainéan adresse au lecteur au fil des deux tomes de son ouvrage ; en effet, il a parfois été mis au jour la présence de mots (dans les rééditions du glossaire de Chereau aussi bien
que dans d'autres recueils) qui n'ont jamais existé ni n'ont été, a fortiori, utilisés dans la langue populaire.
3
sur l'étymologie de plusieurs termes, ceci entraînant le risque d'identifier un affixe ou un autre type de formant7 là où ce n'est pas le cas.
Nous commencerons tout d'abord par présenter une utilisation particulière d'un préfixe du français standard.
Ensuite, nous traiterons des affixes populaires, en classant les termes qui en sont affectés selon trois catégories : termes présentant sûrement des suffixes populaires anciens ; termes présentant peut-être des suffixes populaires anciens ; termes présentant des éléments problématiques.
Nous donnons en annexe l'ensemble du corpus étudié pour en informer le lecteur, mais aussi pour le mettre
à la disposition des chercheurs qui pourraient en avoir l'utilité.
Sauf mention contraire, les dates d'attestation des différents termes présentés ici sont extraites du TLFI.
Enfin, il convient de garder à l'esprit que l'examen de l'ouvrage d'Ollivier Chereau est et reste un support
pour notre réflexion de fond sur la morphologie lexicale.
Ếtude des formants
1.
Créations à partir de préfixes standard usuels
Exemple de demorfier "démanger"
D'un point de vue morphologique, le glossaire de Chereau est intéressant à étudier puisqu'on remarque à
date ancienne l'utilisation que fait le lexique argotique de préfixes existant en français commun, notamment
du préfixe a- ou de ses allomorphes qui affecte des verbes comme bloquer ("acheter" mot d'ancien français)
pour produire abloquer, de même sens, ou, sous la forme an- (parfois confondu avec en-), l'ancien français
troller pour produire antroller "emporter". La langue populaire utilise donc les outils de la langue générale
pour la formation de son lexique, notamment en ce qui concerne la préfixation.
Mais ce qui nous semble encore plus digne d'intérêt est le fait que ce même lexique utilise également ces
affixes standard pour créer des dérivés d'unités lexicales argotiques. On en trouve un exemple remarquable
dans l'extrait suivant, qui, si l'on en croit le texte de Chereau, présente une façon de punir les cagoux, catégorie de mendiants, qui auraient désobéi aux injonctions du Grand Coësre, chef supposé d'une sorte de
confédération des diverses corporations de ces mêmes mendiants :
"Premierement, on luy oste toutime son frusquin, puis on urine en une saliverne de sasbre avec
du pyvois aigre et une poignée de marron, et avec un torchon de fretille on frotte à seziere tant
son proye, qu'il ne luy demorfie d'un mois apres."8
(Premièrement, on lui ôte tous ses vêtements, puis on urine dans une coupe de bois avec du vin aigre et
une poignée de sel, et avec un torchon de paille on lui frotte tant le postérieur que celui-ci ne cessera de
lui démanger pendant le mois suivant) (notre traduction)
Demorfier signifie donc "démanger". Ce verbe est un dérivé de morfier "manger", terme ancien ayant le
même étymon que le contemporain morfale "glouton".9 Remarquons que demorfier "provoquer une sensation de démangeaison" n'est pas sémantiquement le contraire de "manger" (tout comme démanger, en langage commun, n'est pas l'opposé sémantique de manger), mais, en quelque sorte, un calque argotique du
verbe standard.
2.
Suffixes populaires ou argotiques anciens
7
Parmi ces autres types de formants, nous avons des resuffixations parasitaires et des éléments entrant dans des compositions tautologiques.
8
Sainéan 1912:221, 1er vol.
9
Concernant l'histoire de ce verbe, le TLFI indique, dans l'article morfaler, dont dérive morfale :
Probablement variante de morfalier "manger gloutonnement" (1834, Hécart, Dict. rouchi-fr.), variante de morfailler
"id." (1636, Monet), issu de morfer "id." (1623, Sorel, Francion), variante de morfier "id." (1566 d'après Esnault), du
moyen haut allemand murfen "ronger".
4
2.1 Valeur de ces suffixes
D'autres affixes déjà bien connus sont présents dans le lexique de Chereau ; ce sont essentiellement les
suffixes suivants :10
– -anche(r) (dans pictancher "boire", suffixation parasitaire de picter "id.") ;
– -ouze (dans verdouze "une pomme ou une poire" selon la glose de Chereau, probablement bâti sur vert) ;
– -eux : ce suffixe, qui appartient au registre standard – aujourd'hui aussi bien qu'au début du XVIIe siècle
– est utilisé par les argotiers décrits dans le Jargon pour former des unités typiques de leur lexique ; citons l'exemple de sorgueux "voleur de nuit", dérivé de sorgue "nuit", terme d'argot ancien qui, d'après
Sainéan (1912:450, 2e vol.), dérive d'un ancien provençal sorn "sombre". La formation de cet adjectif
substantivé est tout à fait conforme à celle des adjectifs du registre standard puisque le rapport sémantique entre la base nominale et le dérivé correspond à l'idée "qui a un rapport avec un élément géographique" que l'on rencontre dans brumeux, venteux. La différence ici consiste en ce que sorgueux, substantivé, nomme un animé humain ; en cela, le lexique argotique détourne l'usage du suffixe -eux dans le
cas de termes formés sur une base ayant un rapport sémantique avec la nature pour produire un substantif, et non un adjectif (s'ajoutent également des connotations stylistiques sur le rapport sous-entendu
entre le moment de la nuit et l'activité délictuelle consistant à s'approprier illégalement le bien d'autrui) ;
– -ailler (dans mouchailler "regarder", dérivé de moucher "espionner", synonyme de moucharder) ;11
– -in, présent dans frusquin, marquin "chapeau", rupin "gentilhomme", rouin "prévôt des maréchaux", rusquin "écu", tabarin "manteau". Ce formant pose problème. On ne peut le qualifier de formant authentiquement populaire ou argotique ; mais sa grande productivité dans un glossaire aussi peu fourni que celui de Chereau impose de s'interroger sur ses fonctions morpho-sémantiques. On remarque qu'il produit
un dérivé dont le sémantisme est le parfait équivalent du terme de base, par exemple tabarin "manteau"
est bâti sur tabar "id.", mais qu'il peut avoir également une fonction grammaticale comme dans rupin
"gentilhomme", dérivé de rupe "dame" (attesté en 1596 dans un autre recueil argotique, La Vie généreuse des Mercelots). En ce qui concerne les autres termes, il est difficile d'affirmer que -in y a une fonction suffixale car l'origine de ces mots reste inconnue ou incertaine. Le problème de l'identification de la
base se pose ici également ;
– -ichon (voir rastichon "prêtre", michon "argent", ornychon "poulet") ;
– -iller (voir maquiller et roupiller, qui font l'objet d'une étude détaillée à la section 2.3) ;
– -astre (chenastre "bon", dérivé de chenu "id.") ;
– -ard (présent dans plusieurs termes, babillard, guellard, pellard, roüillarde, tollard, millard) ;
– -uche (présent notamment dans angluche "oie", resuffixation d'anglais).
Par ailleurs, la suffixation, phénomène morphologique bien identifié dans l'argot, sert déjà, dès le début du
XVIIe siècle, à créer des dérivés métaphoriques, comme par exemple babillard "ministre, serviteur de l'Ếtat",
formé sur le radical de babiller.
Certains de ces suffixes ont une visée expressive : péjorative pour -ard et -aille(r), diminutive pour -ichon
(présent dans ornychon "poulet", bâti sur ornye "poule"), augmentative ou itérative pour -iller, ou simplement
déformatrice, notamment pour -ouze et pour -anche (exemples : felouze "poche", présent dans la partie narrative de l'ouvrage, déformation de feuillouse "bourse", proprement "feuillue", d'où "doublée" ; molanche
"laine", construit sur molle (ces deux étymologies sont fournies par Sainéan). Cette fonction déformatrice
participait de la fonction cryptologique de l'argot ; ainsi, boutanche, resuffixation de boutique, ne laisse plus
prédire le sens du terme de base. En emploi absolu, boutanche pouvait aussi bien représenter boutique que
bouteille, comme c'est le cas actuellement.
2.2
Problème de l'identification d'un (pseudo-) suffixe particulier
10
Parmi ces suffixes, les plus productifs sont -ailler, anche(r), -ard, -eux, -in. Pour plus de détails, voir nos relevés en
annexe.
11
Pour Guiraud, moucharder est un dérivé de mouschier (1455, texte du procès des Coquillards), lui-même dérivé d'un
verbe wallon mucier "cacher". Pour le TLFI, en revanche, moucharder provient de mouchard "espion de police, 1567, luimême dérivé de mouche "espion").
5
Exemples de nouzaille "nous", de vouzaille "vous" et de sezaille "il", "lui"
Les suffixes que nous venons de citer ne posent pas de problème particulier car ils sont bien identifiés, morphologiquement et sémantiquement. Ce n'est pas le cas pour tous les formants que l'on rencontre dans le
glossaire de Chereau, notamment pour l'élément -aille / -zaille. En effet, parmi les termes présentant une
suffixation parasitaire12, nous remarquons les pronoms personnels nouzaille "nous" et vouzaille "vous",
augmentés d'un curieux élément que ne présentent pas les autres pronoms personnels transformés par l'argot. Leur formation pourrait s'expliquer par la présence du suffixe collectif à valeur péjorative -aille, présent
en français commun, mais ceci ne peut être la raison ayant présidé à l'adoption de ce formant puisqu'on relève sezaille "lui" dans la partie narrative13, pronom personnel singulier dont toute notion de collectivité est
absente. La question est donc de savoir s'il convient de considérer ce formant comme un suffixe ou comme
un élément purement argotique, à visée probablement ludique ou expressive, dans la mesure où; agissant
comme une suffixation parasitaire et supplémentaire, il ne déforme pas la base lexicale qu'il affecte, celle-ci
restant ainsi compréhensible. De plus, vu que ce formant -aille suffixe un pronom personnel, est-il un homonyme du suffixe que l'on connaît ? En un mot, existe-t-il plusieurs -aille ? 14
Il est également remarquable d'examiner la distribution de ces pronoms :
"Si tu veux trimer de compagnie avec meziere, nouzaille aquigerons grand chere"15
('"Si tu veux marcher de compagnie avec moi, nous ferons bonne chère") (notre traduction)
"(...) nos bien amez Sylvain Torpet, Thibault Garaut, qui bient o nozailles (...)"16
("nos bien-aimés Sylvain Torpet, Thibault Garaut, qui vont avec nous") (notre traduction)
En effet, contrairement à l'usage contemporain, les pronoms personnels argotiques d'alors sont aussi bien
toniques que clitiques.
2.3 Un problème de vraie ou fausse suffixation
Exemples de maquiller "faire" et de roupiller "dormir"
Il est cependant encore plus malaisé d'identifier une suffixation. En effet, les évolutions historiques, qu'elles
soient morphologiques et/ou phonétiques, peuvent brouiller l'analyse. Prenons l'exemple de marquiller, vraisemblablement corruption de maquiller. Le sens du verbe indiqué par Chereau est "travailler" (métaphore
pour "voler, dérober"). L'étymologie qu'en donne le TLFI (article maquiller) est la suivante :
Terme d'argot picard, dérivé, à l'aide du suffixe -iller, de l'ancien verbe picard maquier "faire"
(deux attestations en Artois au milieu du XIIIe s. dans Tobler-Lommatsch), emprunté au moyen
néerlandais maken "faire" (idem en néerlandais).
12
Nous entendons par suffixation parasitaire une formation différente de la resuffixation qui supprime l'affixe originel
pour le remplacer par un autre formant suffixal ; la suffixation parasitaire ne fait que charger un terme d'un élément superfétatoire. Et, en effet, nouzaille et vouzaille nous apparaissent ici relever de ce type de formation : nous ou vous + zaille, si l'on considère que la coupure a lieu après nou- et vou-.
13
Sainéan (1912:244, 1er vol.).
14
La question peut être posée pour le formant -zigue qui apparaît dans d'autres pronoms personnels, mézigue, tézigue,
cézigue, dans la mesure où zigue est également un terme autonome (zig ou zigue "individu quelconque"). La question ici
est d'établir une chronologie correcte afin d'éviter tout anachronisme. Selon le TLFI, zig (ou zigue) et mézigue sont attestés pour la première fois en 1835. On relève cependant, dans le Jargon, des formes teziere et teringand "tu", "toi", ultérieurement tezingand dans l'édition de 1660. Il serait facile de considérer zigue comme un dérivé de l'élément final de
tezingand. Le sémantisme de tous ces termes autorise cette interprétation (puisqu'on trouvera aussi, ultérieurement,
mezingand "je", "moi"). Nous avançons donc l'hypothèse que l'on peut, dans ce cas précis, se départir de la prudence
qui doit nécessairement entourer toute étude morphologique portant sur des textes argotiques anciens, et accepter le
substantif contemporain zigue "individu" comme un dérivé de l'élément présent dans les pronoms personnels argotiques
anciens. Nous aurions donc ici un cas de lexicalisation d'un formant grammatical d'origine argotique.
15
Sainéan 1912:239, 1er vol.
16
Sainéan 1912:244, 1er vol.
6
On voit bien ici que la finale -iller est différente de celle que l'on peut trouver dans nasiller, construit, selon le
TLFI, sur nez, puisque maquiller est une dérivation d'emprunt. Mais cette étymologie pose la question de la
base, puisque, ici, c'est nas- et non nez qui est directement à l'origine de la formation du terme.
Peut-on donc dire à bon escient que maquiller est construit avec un suffixe, dans la mesure où -iller apparaît
comme une extension phonétique de -ier ? Cette question pose donc celle du statut de maquiller : mot
simple ou mot complexe, construit ou non, selon que l'on prenne ou non en considération les données historiques ? Supposer qu'il y a dérivation implique que l'on devrait rencontrer par ailleurs des termes formés sur
une base *maqu- avec d'autres formants, ce qui pourrait éventuellement permettre d'identifier un suffixe
dans le formant -iller de maquiller17. L'analyse est encore plus difficile à conduire pour roupiller "dormir" (présent dans le glossaire de Chereau, cf. Sainéan 1912:198, 1er vol.), pour lequel une étymologie sûre n'est toujours pas établie. Dans ces conditions, il nous paraît encore plus difficile d'émettre une opinion définitive sur
le statut de l'élément -iller.
3.
Termes présentant peut-être des suffixes populaires/argotiques anciens
Exemples de avergos "œufs" et de castros "chapon"
De nombreux auteurs ont mis en avant le fait que la suffixation parasitaire ou la resuffixation argotique est
un phénomène récent; apparu durant le XIXe siècle. Cette opinion devrait être reconsidérée si l'on prend en
compte les données suivantes. Nous citerons seulement deux exemples, mais ils nous semblent tout à fait
représentatifs.
Le suffixe populaire -o est, vraisemblablement, présent dans le terme castros qui figure dans la partie narrative du recueil18. Il est en effet question, dans une chanson intitulée Chanson de l'Argot, de "quelque chenastre castros". Notons que le mot rime avec argot, ce qui nous donne une indication fiable sur sa prononciation.
"Quelque chenastre castros" signifie "quelque bon chapon". La métonymie est évidente, et logique : le terme
castré a évolué vers le sens "chapon" (ceci n'est pas surprenant car d'autres métonymies sont présentes
dans l'ouvrage). Selon toute vraisemblance, castros ne peut qu'être une resuffixation de castré19. Nous
sommes donc ici en présence d'une métonymie resuffixée.
Il est néanmoins remarquable que le nom, au singulier, prenne un s final qui n'intervient pas dans la prononciation. Et il est encore plus intriguant de constater ce phénomène de resuffixation au début du XVII e siècle,
sachant que la resuffixation en -o fera son apparition officielle, si l'on peut dire, et en tout cas massive, deux
siècles et demi plus tard dans les documents argotiques, vers le milieu du XIXe siècle.
Un autre terme, le mot avergo "œuf", pose problème. Nous avons dit en introduction que l'on ne pouvait
guère faire abstraction des données étymologiques en ce qui concerne le lexique populaire avant de se livrer à toute étude morphologique. Avergo est en effet un mot dont l'étymologie n'est pas totalement résolue.
Dans son dictionnaire de l'argot, J.-P. Colin lui attribue une origine germanique, un étymon *albaire, dont
nous ne trouvons trace nulle part. Kluge, pour sa part, donne *ajjaz comme étymon germanique commun du
mot allemand contemporain. Peut-être avergo(t) est-il une création argotique française sur le mot latin de
l'oiseau, avis, avec, déjà au XVIIe siècle, l'élément -got, extension du suffixe -ot. Les raisons qui suggèrent
cette hypothèse sont les suivantes :
– un étymon latin – avis en l'occurrence – n'est pas impossible puisque des termes empruntés à des
langues anciennes sont présents dans le lexique de Chereau : crie "viande" (du grec kreas, κρέας), artie
"pain", autre forme pour arton, présent dans le lexique dit des Coquillards (1455) (du grec arton, αρτον),
ornie "poule" (de l'accusatif grec ornitha όρνιθα, de ornis όρνις). De nombreux auteurs (Guiraud, Dauzat,
Sainéan, chez qui sont données ces étymologies) les rapprochent en effet de leurs équivalents en grec.
Dans ces conditions, une création argotique sur un étymon latin est concevable ;
– des raisons sémantiques ont pu mener à la création de avergot : avec le suffixe diminutif -ot, le mot se
comprend comme "petit oiseau" ;
17
On peut penser à maquereau, mais l'étymologie de ce terme restant incertaine, nous ne nous aventurerons pas à le
considérer comme un dérivé d'une racine *maqu- à l'origine de maquiller.
18
19
Sainéan 1912:234, 1er vol.
Notons au passage que castrer, en ancien et moyen français, était la forme picarde, normande et méridionale de châtrer, forme française standard.
7
– comme le fait remarquer le TLFI dans l'article qu'il lui consacre, le suffixe -ot(te) est productif dès l'ancien
français ; les exemples les plus anciens fournis par le Trésor datent du XIIIe siècle ; ce sont : au XIIIe s. :
chariot, culot, linotte ; au XIVe s. : billot ; au XVe s. : ballot, chènevotte, marotte, menottes ; au XVIe s. :
caillot, culotte, gélinotte, etc. Notons que le TLFI ajoute : "Il [le suffixe -ot] a souvent remplacé le suffixe et/-ette et continue d'être productif de nos jours, mais on le rencontre plus souvent, au masculin, sous la
variante -o.", ce qui nous ramène aux interrogations que soulève castro présenté auparavant ;
– de plus, on constate que les trois emprunts au grec nomment des produits alimentaires. Une création
d'après le latin pour nommer les œufs paraît donc cohérente. Il resterait à tenter d'élucider les raisons
socio-linguistiques pour lesquelles ces mots désignant des denrées alimentaires de base viennent de
langues classiques qui n'étaient à cette époque-là comprises que dans un cercle extrêmement restreint
de lettrés.20
On peut néanmoins s'interroger sur les raisons qui font que l'extension en -got ne réapparaît ensuite que
bien plus tard : 1875 pour mendigot "mendiant", 1886 pour parigot "parisien". Pour cette raison, nous donnons notre hypothèse sous toutes réserves, tout en notant que l'élément -got n'est pas un cas unique en la
matière : de nombreux éléments apparaissent à date ancienne, puis, après quelques siècles d'absence dans
les écrits, resurgissent, dans l'écrit à tout le moins, à partir de la fin du XVIIIe siècle21 (c'est le cas de ouille(r)22, de -caille(r)23, de -oche ou -boche24, de -on25, de -oque26, -uche)27. 28
20
On peut également s'interroger sur le lectorat en général du Jargon en 1628 et conjecturer qu'il était peu nombreux.
21
Précisons de nouveau que, sauf mention contraire, toutes les données chronologiques qui suivent sont extraites du
TLFI.
22
En ce qui concerne cet affixe, on note, pour le lexique populaire, bredouille avec une première attestation en 1534,
puis, plus de deux siècles et demi plus tard, arsouille, en 1792 (les dates sont prises dans le TLFI, aux articles des
termes en question) (remarquons que l'étymologie d'arsouille pose problème et qu'il convient d'être prudent sur les formants de ce terme). L'écart chronologique entre les deux mots pose de multiples questions, non seulement sur leur origine, mais également sur les possibles causes d'une disparition de tel ou tel formant populaire pendant près de trois
cents ans.
23
Nous verrons ce formant en détail dans la section suivante. Mais il nous est d'ores et déjà possible de faire ici des remarques similaires à celles que nous venons de faire pour -ouille ; en effet, -caille apparaît certes comme un formant ancien (première occurrence en 1475 dans mouscaille, puis présence de icicaille "ici", lanscailler, rouscailler, au XVIIe
siècle, avant une extinction complète puis une sorte de renaissance, en 1935, dans poiscaille "poiscaille", il est vrai seul
terme formé avec cet élément. Il nous semble difficile d'avancer avec certitude des hypothèses sur les raisons de ces
disparitions puis de ces retours en faveur dans le lexique populaire.
24
La distribution chronologique de -oche ou -boche apparaît moins erratique que celle des autres suffixes ou pseudosuffixes dont nous traitons dans cette partie ; en effet, selon le corpus général que nous avons pu constituer, il apparaît
que le plus ancien terme, caboche "tête", naît dans la littérature vers 1165, sous la plume de Benoît de Sainte-Maur
dans le Roman de Troie (sous la forme caboce), le plus récent, fastoche "facile", étant attesté vers 1956 (Guiraud 1956).
Hormis les XIVe et XVe siècles qui ne présentent aucun terme populaire ou familier suffixé en -oche, chaque siècle fournit un exemple de cette resuffixation (baloches au XIIIe siècle, mioche vers 1567 (au sens propre il est vrai, celui de "petit
morceau de mie"), taloche en 1606, mioche de nouveau, au sens familier que nous lui connaissons, "enfant", et bamboche, au XVIIIe s., puis bidoche et pétoche au XIXe s., et enfin, au siècle dernier, bavocher, cinoche, fastoche et valoche. Mais il convient de garder ici en mémoire – comme il est de rigueur de le faire pour tout formant d'origine populaire – la question de l'identification de ces mêmes formants ; par exemple, fastoche est-il une resuffixation populaire en oche de facile, ou bien doit-on ici isoler un allomorphe -toche de -oche ? On peut néanmoins constater une certaine productivité de l'élément final -oche dans le temps (ce qui n'exclut évidemment pas des analyses plus approfondies sur ses
possibles allomorphes).
25
-on apparaît également avec une distribution chronologique erratique. Si le premier terme avec une acception familière apparaît en 1560 (couillon), suivi de rastichon "prêtre" en 1628 (donc dans le Jargon de Chereau), il faut attendre le
XIXe siècle pour voir apparaître, dans la littérature, de nombreux termes composés avec ce formant : biffeton, bourrichon, canasson, mecton, mouvement qui se poursuit durant le siècle suivant, avec brandillon, cureton, gorgeon, maton,
paveton, pochtron. Dans ce cas également, le hiatus chronologique est important, plus de deux siècles.
26
Des remarques similaires peuvent être faites pour -oque : après une première attestation en 1694 pour breloque, il
faut attendre le XIXe siècle pour lire loufoque, mastoc, vioque (suivis au XXe s. par amerloque, chinetoque, cradoque,
pédoque, sinoque).
27
Mêmes constatations pour -uche : attesté tout d'abord dans le Jargon de Chereau avec angluche et dasbuche, le formant réapparaît en 1849 avec Pantruche "Paris", puis dans quelques termes nés au cours du XXe siècle : greluche, ma-
8
Avec ces deux exemples, on peut certes voir que le suffixe -o(t) (et son extension -got29) est présent à date
ancienne dans le lexique argotique. Mais on constate surtout que le suffixe semble avoir des fonctions différentes :
–
dans le cas d'avergo, on a une suffixation parasitaire affectant un possible étymon latin, *aver-, construit sur avis, + -go ;
dans le cas de castros, -o(s) agit comme une resuffixation, un simple changement de la finale du
terme d'origine.
–
Les questions que l'on peut se poser alors sont les suivantes :
– la resuffixation doit-elle être considérée comme un phénomène différent de la suffixation parasitaire,
même si l'élément considéré est présent dans les deux types de formation ? par exemple, -o(t) agit
comme suffixation dans cher > chérot et comme resuffixation dans propriétaire > proprio. Dans avergo,
nous avons une suffixation parasitaire, dans parigot, une resuffixation ;
– -o, -ot, -os, -got sont-ils des éléments différents nécessitant une analyse et un traitement particuliers, ou
bien les allomorphes d'un seul suffixe ? Les différences graphiques sont-elles pertinentes pour l'analyse ?
– hormis -ot pour lequel un sémantisme diminutif et/ou hypocoristique est à peu près bien établi, peut-on
également attribuer un contenu sémantique cohérent aux trois autres formes ? Si cela est impossible,
peut-on encore les considérer comme des suffixes, ou bien recourir à la notion plus ouverte de formant ?
4.
Des éléments à statut problématique
Exemples de lanscailler "uriner", de mouscaille "selle" et mouscailler "déféquer", et de rouscailler "parler"
Nous avons évoqué, en introduction, la difficulté à faire la part entre affixes, éléments de composition tautologique et autres formants. Répétons-le, une claire détermination des différents types de formants entrant en
jeu dans la formation du lexique populaire ne peut faire l'impasse sur la recherche étymologique ; en effet,
seule celle-ci est à même de déterminer une bonne affectation des composants.
Un terme intéressant à examiner ici est rouscailler. Selon le TLFI, rouscailler, dont la première attestation
date de 1628, donc du Jargon, est composé de rousser "grogner, gronder" (attesté pour la première fois
dans le dictionnaire de Cotgrave de 1611, A dictionarie of the French and English tongues), verbe d'origine
onomatopéique, et d'un verbe non attesté, *cailler "bavarder", que l'on peut conjecturer d'après le verbe cailleter "bavarder", présent pour la première fois dans la littérature en 1766 chez Jean-Jacques Rousseau30 (ce
verbe cailleter est dérivé de caillette "femme bavarde et frivole", lui-même probablement dérivé de caille "oiseau"). Nous aurions donc ici une composition tautologique31.
Ce type de formation semble assuré dans le cas qui nous occupe, mais on peut s'interroger sur les raisons
qui ont fait évoluer le sémantisme de rouscailler de "parler" vers "protester". Aussi convient-il ici d'examiner
le cas de mousse32, ancêtre de mouscaille, qui mérite un développement particulier car il est exemplaire des
problèmes que rencontre l'étymologie confrontée au lexique populaire, dans la mesure où plusieurs interprétations sont possibles. Ce terme attire plusieurs commentaires car plusieurs hypothèses étymologiques sont
envisageables : mousse peut être une apocope de mouscaille, attesté en 1475 comme nom propre de personnage fictif ; le TLFI considère plutôt que mouscaille est dérivé de mousse ; le même dictionnaire donne,
tuche, paluche. Notre étude sera ultérieurement prolongée en tenant compte de l'article de Marc Plénat, "Morphologie
des dérivés en Vche", Recherches linguistiques de Vincennes, n°26, 1997, pp.113-150.
28
Toutes les remarques qui suivent sur les différents (pseudo-)suffixes posent la question de la fiabilité des sources littéraires, plus exactement, de l'image fidèle qu'elles donnaient du langage populaire en usage au moment où de grands
auteurs (dont Balzac et Hugo pour le XIXe siècle) ont introduit ces termes dans leurs écrits. Concomitamment, on peut
s'interroger sur l'absence de ces termes dans les textes antérieurs (voir nos remarques sur la fiabilité des sources écrites
dans notre conclusion de cette étude, p.9).
29
La terminologie extension est utilisée par le TLFI dans ses fiches descriptives des suffixes.
30
Cité par Ferdinand Brunot, Histoire de la langue française, tome 6, p. 1311.
31
Ceci est l'hypothèse de nombreux chercheurs, dont Wartburg, Guinet, etc., ainsi que du TLFI.
32
Glosé "de la merde" par Chereau lui-même.
9
pour mousse, une possible origine bretonne, le breton mous, attesté vers 1350 ; mousse fait par ailleurs partie d'une série synonymique assimilant une matière molle quelconque aux ennuis : merde, panade, purée,
mouise, etc. ; mousse pourrait être formellement apparenté à mouise "id.", emprunté à un dialecte de l'allemand méridional mues "bouillie" ; la première attestation de mouise ne date cependant que de 1821 ; enfin,
mouscaille présente un suffixe -caille présent dans d'autres termes populaires : poiscaille "poisson", lanscailler (cf. ci-dessus), rouscailler "parler" puis "protester". Il est possible également que nous soyons en présence d'un élément -caille à valeur expressive ; dans ce cas, rouscailler serait un augmentatif de rousser.
L'élément -caille est également présent dans lanscailler "uriner", mot formé sur lance "eau".33 Il est certes
intéressant de constater que le phénomène de la dérivation suffixale est un phénomène ancien, mais il est,
dans ce cas précis, encore plus intéressant de se demander si -caille est un suffixe au sens strict créé par
l'argot, ou un terme indépendant, ce qui implique alors la formation d'un mot complexe construit (ou la composition tautologique, selon les termes affectés). Le mot caille existe pour désigner l'estomac, mais il existe
également, dans la langue populaire, un substantif caille, au sujet duquel le TLFI indique, dans l'article
caille2 : "On rencontre ds la docum. la forme homon. caille, mot arg. au sens de «excrément, merde» déverbal de cailler, forme dial. de cacare". Il s'agit alors d'examiner les termes présentant -caille : lanscailler,
mouscaille (mouscailler "déféquer", présent dans Chereau), poiscaille "poisson", rouscailler. Mouscaille est
attesté depuis 1475 en tant que nom propre de personnage fictif, et mouscailler "aller à la selle" se trouve
dans Chereau. Selon le TLFI, l'argot mousse est attesté au sens de "excrément" depuis environ 1570 dans
une expression provençale "Mousse pour le guet, bran pour les sergens" (TLFI, article mouscaille). Selon
nous, l'élément -caille présent dans ces mots n'est pas un suffixe ludique comme l'argot en a produit beaucoup, mais un terme indépendant.34 Ainsi, lanscaille, mouscaille seraient des composés, et ce dernier serait
de plus un composé tautologique puisque les deux éléments ont chacun le sens d'excrément. L'existence de
poiscaille ne remet pas cette théorie en cause, puisque nous changeons de champ lexical ; en effet, avant
de désigner le poisson de manière neutre dans la langue populaire, poiscaille s'appliquait au poisson avarié.
De plus, cet exemple n'est pas unique ; d'autres termes indépendants sont devenus des suffixes, notamment
-ard, d'origine germanique, dérivé de l'adjectif hart "dur, fort", dont la vitalité, pour former des augmentatifs
ou des dépréciatifs, ne se dément pas. Dans ces conditions, on ne peut s'étonner de la grammaticalisation
d'un ancien terme indépendant. On peut en revanche s'interroger sur le statut à attribuer aujourd'hui au formant -caille, au vu de ces données historiques.
De l'examen de ces termes, il ressort que la composition tautologique, phénomène ancien (la date de 1475
pour mouscaille l'atteste), peut s'appliquer à des termes d'origine étrangère, comme pour lanscailler, construit sur lance "eau", emprunté à l'italien (à condition que la forme phonétique de l'emprunt soit proche du
phonétisme français). Cet exemple est également probant dans la mesure où il met en évidence une formation ancienne, et, de plus, une formation mettant en jeu deux termes dialectaux, mousse présent en provençal35 et caille attesté comme forme dialectale issue d'un verbe également dialectal, cailler.
Parfois, ce sont à la fois la forme phonique et le sémantisme qui sont semblables dans les deux langues
(nous ne traiterons pas ici des influences réciproques ou unilatérales qui peuvent survenir entre deux
langues). Ainsi, l'allemand dialectal Mües "bouillie" avait toutes les chances d'être incorporé dans le lexique
populaire français, en devenant mouise, en ce sens qu'il était proche de mousse, mouscaille, ce qui a d'ailleurs précipité son évolution sémantique, passant de "bouillie", "soupe de basse qualité" à "misère", un des
sens de mouscaille. Pour utiliser la terminologie de Guiraud, nous dirions que l'étymon mousse, mouscaille a
favorisé et précipité l'emprunt de Mües en actualisant un de ses sèmes. C'est donc la morphologie, principalement la finale de ces termes étrangers, qui non seulement précipite leur intégration dans notre lexique populaire, mais, concomitamment, fait perdre aux locuteurs français la conscience de leur origine étrangère.
L'élément -caille(r) n'a été que très peu productif. Outre les trois mots notés ici, on le trouve en suffixation
parasitaire dans icicaille "ici" (première attestation en 1660, dans une réédition du Jargon, référence citée
33
Lance et lanscailler sont présents dans Chereau (cf. Sainéan 1912:196, 1 er vol.).
34
Nous sommes ici en désaccord avec Guiraud, qui écrivait, en 1956 : "Dans lanscailler, mouchailler, rouscailler, le fréquentatif –aille (qu'on trouve dans criailler, piailler) est une forme expressive régulière plutôt qu'un suffixe parasite." (Guiraud 1956:20).
35
Le TLFI note que "mousse est probablement emprunté au breton mous [...], attesté dès le milieu du XIVe s., apparenté
au gallois mws "puanteur"". Ce mot nous semble devoir être mis en relation avec d'autres termes, notamment avec
l'alémanique mues "bouillie", à l'origine du français mouise, qui présente les mêmes sémantismes que mousse(caille) :
"misère", "excrément". Il nous est difficile de trancher sur les origines linguistiques et géographiques de l'étymon de cette
famille.
10
par J.P. Colin) et dans poiscaille "poisson" (1935, selon Colin). Deux questions se présentent alors, qui peuvent également être posées pour un grand nombre d'autres formants du lexique populaire :
– cette faible rentabilité de -caille(r) autorise-t-elle à considérer cet élément comme un suffixe ?
– existe-t-il deux éléments -caille, l'un étant un terme ancien entré dans la composition d'autres unités lexicales, le second servant à une suffixation parasitaire, probablement en raison de l'expressivité de l'élément, mais après que tout souvenir de la signification première de -caille a été oublié ?
Nous pensons que ces questions doivent également être appliquées à la recherche morphologique du
lexique standard.
Conclusion et prolongements
Les conclusions que nous tirons de cette étude sont nombreuses ; voici les points les plus importants qui
nous semblent mériter des recherches ultérieures :
– Ce corpus pose plusieurs questions, entre autres celle de la fiabilité que l'on peut accorder à certains recueils argotiques, qu'il s'agisse de recueils anciens ou de recueils contemporains. On relève en effet plusieurs erreurs dans le Jargon de Chereau36. Mais on peut également se demander si certaines formes,
qui ont été qualifiées de fautives par les commentateurs ultérieurs, ne seraient pas en réalité les formes
exactes utilisées par les locuteurs argotiques du début du XVIIe siècle. La question est posée simplement, et elle est double : aurait-on par erreur étudié certaines entrées fautives ? Aurait-on donc utilisé
des formes abusivement corrigées ? De plus, on peut se demander si une étude structurale du lexique
doit ignorer le lexique populaire à cause de ces incertitudes sur la fiabilité des sources.
– Un autre fait remarquable consécutif à l'examen du Jargon et qui mérite des recherches approfondies est
celui de l'ancienneté de certains types de formation, comme nous l'avons vu avec avergo et castros.
– Une autre interrogation est la suivante : qu'est-ce qu'un élément de formation, ou, plus exactement, à
partir de quel moment peut-on qualifier tel formant d'affixe ? Quels sont les paramètres à prendre systématiquement en considération pour ce faire : sémantisme de l'élément, capacité à commuter avec
d'autres affixes, productivité, fonction de création de nouveaux signes lexicaux ? Quel est le statut des
pseudo-suffixes argotiques qui n'apparaissent que dans très peu de termes, sans créer de nouvelles unités signifiantes mais en connotant des termes existants ?
– De plus, il nous semble important de remarquer que l'étude des divers recueils sur lesquels nous nous
appuyons semble mettre en avant le fait suivant : il nous paraît difficile de cautionner la démarche qui
consiste à affecter une règle de construction des mots morpho-sémantique unique pour un seul affixe.
Sans entrer ici dans le détail, nos différentes recherches nous ont déjà fait remarquer que les RCM semblent agir différemment pour le lexique standard et pour le lexique populaire. Nous pensons en effet qu'il
n'est guère aisé d'unir dans une RCM unique tous les sémantismes que peut recouvrir un seul affixe, ne
serait-ce qu'en ce qui concerne le seul lexique standard. Si l'on prend l'exemple du suffixe -et(te), comment unir morpho-sémantiquement des termes tels que chevrette, tablette, crevette, maquette ? Une
chevrette est en effet une petite chèvre, une tablette n'est pas forcément une table de petite dimension,
et ni une crevette, ni une maquette ne sont respectivement une petite *crève ni une petite *maque, si l'on
s'en tient, pour crevette, à l'examen seul de la base en synchronie (on sait en effet que crevette est
l'équivalent dialectal de chevrette)37. De la même manière, si détricoter signifie bien "aller au rebours de
l'opération qui consiste à tricoter", (se) désister ne qualifie pas l'action de *"aller au rebours de l'opération
qui consiste à *se sister". Si l'on prend un autre affixe en considération, une terrasse n'est pas une terre
connotée péjorativement ou augmentativement. Ce phénomène se retrouve d'ailleurs aussi dans le
lexique populaire, où, par exemple, déglinguer n'est pas le contraire de *glinguer.
36
Par exemple, marquiller (Sainéan 1912:196, 1er vol.), vraisemblablement corruption de maquiller, déjà évoqué cidessus, p.5, mais aussi endrogue (op. cit., p.194), pour endroguer, trimand (op. cit., p.199), pour trimard).
37
Parmi les travaux actuels de référence sur la suffixation en -et(te), voir Dal (1991) et Fradin (2003b).
11
– Au stade de nos recherches, nous nous demandons donc s'il ne convient pas de dissocier, pour tel affixe
donné, une RCM 1 qui caractériserait les termes standard affectés par cet affixe et une RCM 2 qui caractériserait les termes populaires affectés par ce même affixe, voire, à l'intérieur d'une même catégorie,
celle des mots standard en l'occurrence, sous-catégoriser les RCM (comme nous l'avons vu pour détricoter et pour se désister). Ceci nous ramène à l'exemple de demorfier ; par delà la description du corpus
argotique, on peut voir que celui-ci sert de révélateur à des problèmes morphologiques généraux.
– Un autre aspect de la question à prendre en considération, et non des moindres, est celui de la perspective choisie : si l'on veut caractériser les affixes dans leur utilisation actuelle, peut-on ou doit-on passer
outre les questions diachroniques ? La description morphologique du lexique contemporain doit-elle faire
l'économie des questions relatives à la diachronie ? Dans le cas contraire, comment inclure les données
historiques dans une description morpho-sémantique du lexique contemporain sans multiplier les cas
d'idiosyncrasie ?
Annexe 1 – Données extraites du Jargon de l'Argot reformé
Mots affixés, composés ou complexes présents dans la partie "glossaire" du recueil38
Entrées
Gloses d'Ollivier Chereau
avergos
"des œufs"
angluche
"une oye"
abloquer, abloquir
"achepter"
antroller
"emporter"
ambier
"fuir"
attrimer
"prendre"
affurer
"tromper"
barbaudier de castu
"le gardien d'un hospital"
babillard
"un ministre"
broquante
"une bague"
basourdir
"tuer"
barbillons (de Varenne)
"des naveaux"
boutanche
"une boutique"
battouze
"de la toile"
ballader (?)
"aller demander l'aumosne"
crie ou criole
"de la chair"
cambrouse (?)
"une chambriere"
chenastre
"bon"
dasbuche
"un Roy"
duresme
"du fromage"
doubleux
"un larron"
epoufer la fricaudrie
"c'est quand les coupeurs de bourses jettent ce qu'ils ont desrobé de peur
d'estre surpris"
38
Nous avons fait suivre certaines entrées d'un point d'interrogation. En effet, l'étymologie de ces termes n'étant pas totalement éclaircie de manière sûre, il est difficile de se prononcer sur la nature de leurs composants morphologiques.
12
endrogue (sic)
"chercher à faire fortune"
fremion
"le marché"
floutiere
"rien"
fretille (?)
"de la paille"
frolleux
"un traistre"
frusquin (?)
"un habit"
georget
"un pourpoint"
grenafle
"une grange"
guellard
"un bissac"
girolle
"soit"
lourdaut
"un portier"
lanscailler
"pisser"
meziere
"moy"
morfiente
"une assiette"
marpaut
"un homme"
mouchailler
"regarder"
marquiller (sic) (?)
"travailler"
mouscailler
"chier"
molanche
"de la laine"
marmouzet
"le pot au potage"
marquin
"un couvre chef"
nouzaille
"nous"
ornyons
"des chappons"
ornychons
"des poulets"
picter ou pictancher
"boire"
pivois
"du vin"
piolle39
"une taverne"
piollier
"un tavernier"
pharos40
"le gouverneur d'une ville"
pallots
"les paysans"
paturons
"les pieds"
39
Pour Sainéan (1912:421-422, 2e vol.), piolle est un diminutif de pie "boisson". Par métonymie, le terme en serait venu
à désigner l'endroit où l'on boit. Pour le TLFI, piolle (et le contemporain piaule) se rattachent au verbe d'ancien français
pier "boire".
40
Il est difficile de se prononcer ici sur une suffixation en -os, laquelle suffixation supposerait une base nominale *farque l'on ne trouve pas. Sainéan (op. cit., p.344) rapproche pharos du provençal faraud, farot "petit maître". Dans son article faraud, le TLFI indique :
"Emprunté à l'espagnol faraute, d'abord "messager de guerre, interprète" (depuis 1492 [...]), puis "celui qui récitait le
prologue d'une comédie" (depuis 1611 [...]) d'où "faraud" (depuis 1620 [...]), l'espagnol étant emprunté au français
héraut. Pharos "gouverneur " (1628, O. Chéreau, Le Jargon ou Langage de l'argot réformé), donné comme 1re attestation du mot français par Esnault., est à rattacher au latin pharao (pharaon [...])."
L'exemple de pharos illustre toutes les difficultés que l'on rencontre lorsque l'on tente d'identifier les formants du lexique
populaire.
13
piausser
"se coucher"
pontifle
"une putain"
pinos41
"des deniers"
pelladier
"un pré"
pellard
"du foin"
rastichon
"un prestre"
rupin
"un gentilhomme"
roüin
"le prevost des mareschaux"
roüaux
"les archers"
roupiller
"dormir"
rusquin
"un escu"
roüastre
"du lard"
rabatteux ou doubleux de sorgue
"c'est un larron de nuict"
rouscailler bigorne
"parler jargon"
rivancher
"travailler du membre duquel on arrouse la terre"
rifle42
"du feu"
rifoder
"cuire ou brusler"
roüillarde
"une bouteille"
sabrieux
"un volleur"
sabrenaut
"un cordonnier ou savetier"
seziere ou seringand
"luy"
tabar ou tabarin
"un manteau"
trimand (sic)
"un chemin"
tolle ou tollard
"un bourreau"
teziere ou teringand
"toy"
toutime
"tout"
vouzaille
"vous"
verdouzier
"un jardin ou jardinier"
verdouze
"une pomme ou une poire"
Mots affixés présents dans le reste de l'ouvrage
castros
"chapon" (FN)
felouze
"poche", peut-être même mot que feuillouse "bourse", proprement "feuillue",
c'est-à-dire "doublée"
francillon
resuffixation de français (FN)
froutiere
"rien", équivalent de floutière "id.", amplification de flou "id."
41
Il est également malaisé de se prononcer sur la formation de pinos. Sainéan (op. cit., p.421) l'orthographie également
pinot et le rapproche d'un moyen français pinard, "très petite pièce de monnaie, proprement pomme de pin, répondant
au lyonnais pignolles, argent."
42
Selon Sainéan (op. cit., p.437), rifle est "une réduction ultérieure de rufle", lui-même autre forme pour ruffe "feu", présent dans le texte du procès des Coquillards (1455), emprunté à l'argot italien rufo "feu", selon Sainéan (op. cit., p.442).
14
malingreux
"sorte de mendiant", dérivé de malingre "malade", terme de jargon
michon
"argent", dérivé de miche "pain"
millard
"sorte de mendiant" – cf. le terme dialectal du Maine et de l'Anjou millaud
"gueux", dérivé de miller "crier d'une manière perçante"
sur le minsu
"sans artifice" – minsu est dérivé de mince
mirquin
"bonnet", autre forme de marquin "chapeau d'homme", dérivé de marque "fille"
passifle
équivalent de passife, dérivé de passans "chaussures"
picoure
"haie épineuse", proprement piqûre
ragot
"quart d'écu", proprement pourceau
ruffez ou riffaudez
"sortes d'escroc", dérivé du fourbesque rufo "feu"
sezaille
"lui"
sorgueux
"voleur de nuit", dérivé de sorgue "nuit" – cf. l'ancien provençal sorn "sombre"
Les gloses, explications d'ordre étymologique, etc., sont de Lazare Sainéan (référence ci-dessous). Nos propres commentaires sont
indiqués par nos initiales.
Annexe 2 – Bibliographie
– Chereau O. (1741), Le Jargon ou langage de l'argot reformé, édition Jean Oudot, Troyes (1e éd. 1628)
– Colin J.-P., Mével J.-P., Leclère (Ch. (2002), Dictionnaire de l'argot français et de ses origines, Paris, Larousse, 2e édition (1e éd. 1990)
– Corbin D. (1992), "Hypothèses sur les frontières de la composition nominale", Cahiers de grammaire,
n°17, Université Toulouse-Le Mirail, CNRS-UA 1033, pp.25-55
– Corbin D. (1991), "La formation des mots : structures et interprétations", Lexique, n°10, pp.7-30
– Dal G. (1991), "Hyponymie et prototypie : les noms en -asse et -et(te) du français", Lexique, n°10,
Presses Universitaires de Lille, pp.211-239
– Darmesteter A. (1927), La vie des mots étudiée dans leurs significations, Paris, Delagrave, 16e éd. (1e éd.
1886)
– Darmesteter A. (xxxx), Traité de la formation des mots composés dans la langue française comparée aux
autres langues romanes et au latin, 2e édition, impression de 1967, Honoré-Champion, Paris
– Dauzat A. (1946), Les argots. Caractères, évolution, influence, Paris, Delagrave (1e éd. 1929)
– Fradin B. (2003a), Nouvelles approches en morphologie, Paris, PUF, collection Linguistique nouvelle
– Fradin B. (2003b), "Le traitement de la suffixation en -ET", Langages, Larousse, Paris, n°152, pp.51-77
– Greimas A.J. (1966), Sémantique structurale, Paris, Larousse, collection "Langue et langage"
– Guiraud P. (1994) Dictionnaire des étymologies obscures, Paris, Payot (1e éd. 1982)
– Guiraud P. (1986), Structures étymologiques du lexique français, Paris, Payot (1e éd. 1967)
– Guiraud P. (1956), L'argot, PUF, Que Sais-Je
– Kerleroux F. (2004), "Sur quels objets portent les opérations morphologiques de construction ?", Lexique,
n°16, Presses Universitaires du Septentrion, pp.85-123
– Kluge (2002), Etymologisches Wörterbuch der deutschen Sprache, Berlin, Walter de Gruyter (24e éd.
revue et augmentée, 1e éd. 1883)
– Sainéan L. (1912), Les sources de l'argot ancien, Paris, Honoré-Champion, 2 tomes
– Trésor de la Langue Française Informatisée, atilf.inalf.fr
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