Terminale Scientifique
Histoire,2ème partie : Les relations internationales de 1947 à nos jours
Chapitre 1
La guerre froide 1947-1991
En donner d’abord une définition : une confrontation qui va se jouer sur tous les fronts, idéologique,
géopolitique, économique, scientifique et culturel mais aussi sportif et spatial entre deux blocs réunis autour
des deux Supergrands ou superspuissances, les Etats-Unis et l’URSS ? Cet affrontement fut indirect, donc
« froid ». Quelques nuances cependant : le conflit ne fut pas froid partout (pas de tropisme européen), il fit
des millions de morts en Asie. La guerre froide fut un phénomène mondial (une étape de la mondialisation).
Noter que l’histoire de la guerre froide est-en train de s’écrire : des controverses sur son interprétation et sur
sa périodisation.
Problématique
Sur quelles visions du monde les deux Grands s’opposent-ils ? Pourquoi l’affrontement entre les Etats-Unis et l’URSS n’a-t-il
pas dégénéré en une nouvelle guerre mondiale ?
I. Deux modèles concurrents (cf cours sur les modèles)
Introduction :
(sur les modèles)
Un modèle idéologique : une construction théorique du meilleur des régimes économico-politiques
qui s’offre à l’imitation. Ecart souvent considérable entre l’abstraction du modèle et la réalité
concrète dudit régime.
Revenir sur l’année 17, qui marque la naissance ou l’affirmation de ces modèles (intermède
mondialiste des Etats-Unis ; révolution d’Octobre)
Après 1945, une hétérogénéité du système planétaire due à la rivalité entre des idéologies étatiques
viscéralement opposées, puisque le marxisme-léninisme suppose la destruction du capitalisme
comme condition d’avènement du socialisme.
Les deux modèles se réclament de la démocratie, mais se disent démocratiques selon deux
conceptions opposées, celle de l’Ouest implique la concurrence (pluralisme politique, concurrence
économique), celle de l’Est (on parle de « démocratie populaire ») se Prévaut de l’égalité sociale (par
l’abolition de la propriété et l’étatisation des moyens de production)
A. Le modèle américain
(a) un modèle politique : commentaire d’un organigramme
Constitution de 1787. Vie politique US marquée par une incroyable faiblesse de la participation aux
élections, en dépit d’un très vivant patriotisme constitutionnel. Deuxième élément, le fédéralisme : 50
Etats fédérés souverains en ce qui concerne l’environnement, la politique scolaire, la législation
pénale (38/50 Etats ont conservé la peine de mort). C’est l’Etat fédéral qui accorde des subventions :
moyen de pression sur les Etats. Le pouvoir fédéral est concentré à Washington, bureau ovale de la
Maison Blanche et salle du Congrès au Capitole. D’autres institutions : le FBI, la Fed, la Cour
Suprême, le Pentagone
Périodiquement, la Constitution américaine est modifiée par des amendements : 27 (le 26e sous
Nixon abaisse la majorité électorale, le XIIIe en 1865 abolit l’esclavage, évoquer le Bill of Rights de
1790-1791 qui rassemble les dix premiers amendements.
La vie politique est rythmée par le bipartisme : ce système est encouragé par le scrutin majoritaire.
Autrefois implanté dans le Sud esclavagiste, aujourd’hui le Parti démocrate est soutenu par les
minorités ethniques et tous les bénéficiaires du système de protection sociale (rappeler résultats des
dernières élections présidentielles), tandis que le Parti républicain a ses bastions dans le Middle West
et dans la bourgeoisie conservatrice du Nord-Est ; sa base, ce serait plutôt les clases moyennes
« blanches ». Partis qui sont avant tout des machines électorales ; programmes le plus souvent peu
marqués idéologiquement. Rôle des lobbies dans le financement des campagnes (spots télévisés etc.)
Régime présidentiel fondé sur une séparation stricte des pouvoirs. Président élu pour quatre ans,
mandat renouvelable une fois, nomme les secrétaires (les ministres), les hauts fonctionnaires. N’est
pas responsable devant le Congrès. Président est chef des armées et chef de la diplomatie. Des
rapports avec le Congrès strictement réglementés, peut user d’un droit de veto suspensif (suspendu
par un nouveau vote positif à la majorité des deux tiers). Congrès est formé de deux chambres,
chambre des représentants (nombre d’élus proportionnel à la population d’un Etat), et le Sénat (deux
élus par Etat). Le Congrès vote les lois et le budget. Peut mettre en place des commissions
spécialisées sur certains sujets ou de diligenter des enquêtes. Des blocages fréquents quand la
majorité du Congrès n’est pas favorable au président. Mais globalement la guerre froide a renforcé
les prérogatives du président (National Security Council, la NASA)
Contestations de l’exécutif dans les années 1960/1970 : assassinat de Kennedy, scandales à répétition
sous Kennedy, Johnson et Nixon, scandale du Watergate et procédure d’impeachment. Leurs
successeurs considérés comme des personnalités faibles : Ford, Carter. Il revient à Reagan d’avoir
restaurer l’autorité présidentielle.
(b) Un modèle économique et social : chanson America de West Side Story (1957). Commentaire d’un
document
* Une société basée sur le libéralisme, l’esprit d’initiative, de la libre-entreprise. Des lois antitrusts pour
garantir la libre concurrence : Sherman Act, évoquer cas de Rockfeller, de Bell, de Microsoft
* Emprise de l’Etat modeste : des prélèvements obligatoires relativement faibles, poids des financements
publics surtout décisifs pour le complexe militaro-industriel. Globalement le privé l’emporte sur le public,
exemple de l’éducation. Etat-providence voulu par Roosevelt dans le cadre du New Deal, devait être
consolidé par Truman (Fair Deal) mais refus du Congrès de voter les crédits en 1946. C’est sous les
présidences démocrates de Kennedy et de Johnson que se mettent en place les projets Medicare et Medicaid
(1965, 1967). Etat-Providence démantelé sous la présidence Reagan (1981-1989). Près de 40 millions de
personnes n’ont absolument aucune couverture sociale. le désengagement de l’Etat n’a rien de linéaire. S’est
accéléré à partir de Reagan (« le gouvernement n’est pas la solution de nos problèmes, il est le problème »,
discours inaugural du 20 janvier 1981).
* La séduction qu’a pu exercer le modèle américain est celui de l’American Way of Life dont a pu rêver
l’ensemble des classes moyennes des pays industrialisés jusqu’à la mondialisation
Texte : 4 questions posées
1. L’extrait de cette comédie musicale présente deux points de vue contradictoires sur le
modèle américain. A la version idéalisée des jeunes filles qui voient en l’Amérique une
« terre promise » répond celle plus désenchantée des garçons. Dans le propos des jeunes
portoricaines, on peut reconnaître deux traits essentiels du modèle, intimement liés l’un et
l’autre.
D’une part, le modèle américain repose sur l’égalité des chances, c’est-à-dire sur le liberté
d’initiative et la compétition entre les individus : « Tout est libre en Amérique », « Libre d’être ce
que tu veux être ». Le modèle politique repose depuis 1787 sur la même Constitution complétée au
fil de temps par 27 amendements qui concourent à assurer le respect des droits et des libertés
individuelles dans cette démocratie libérale. Ensuite, le dynamisme économique américain est
intimement lié au modèle du capitalisme libéral. La propriété privée est un droit sacré. La primauté
de l’initiative individuelle, l’esprit de concurrence et la recherche du profit commandement le
fonctionnement de la vie économique. Personne ne croit à la lutte des classes. Chaque Américain est
en effet persuadé que s’il travaille d’arrache pied et si la chance lui sourit, il gagnera plus d’argent et
deviendra, qui sait, un nouveau Rockfeller.
L’idée liberté est donc intimement liée à celle de la réussite sociale, comme l’exprime la phrase :
« Ici tu es libre et fier », sous-entendu : fier d’avoir réussi. Et dans la société américaine, les riches
offrent le modèle de la réussite sociale : cette réussite est donc synonyme de prospérité matérielle. La
foi dans les vertus du système est confortée par la puissance économique du pays qui entre dans la
société d’abondance après la Seconde Guerre mondiale. La vigoureuse croissance de l’économie
américaine trouve une répercussion dans les paroles de la chanson : « Partout des gratte-ciels en
Amérique ! » « Un boom des industries en Amérique ! ». Le baby boom de l’après guerre se
prolonge ; l’urbanisation s’intensifie, les villes s’étalent : le dynamisme de la civilisation suburbaine
symbolisent la domination des classes moyennes : « On construit de grands appartements ! » ou
« J’aurai un appart’ avec terrasse ! ». L’abondance, le confort marquent la vie quotidienne. La
publicité stimule les achats à crédit, donc les affaires (« Acheter à crédit est si chouette »). Confiants
dans l’avenir, les Américains, impatients de profiter des biens matériels, n’hésitent pas à s’endetter :
« Des Cadillac pour tous en Amérique ! », « J’aurai ma machine à laver ! »
Au total, le modèle américain a de quoi séduire : « La vie est sympa en Amérique ! », elle est même
« formidable » : l’hédonisme est aussi un trait distinctif de la société américaine après 1945.
2. Si ce rêve a de quoi séduire il comporte aussi une face cachée. Les garçons mettent
l’accent sur la pauvreté : acheter mais « à condition de payer ». Plus qu’en Europe, où les
Etats providence développent précocement une politique d’assistance maladie et
chômage, la société américaine compte nombre de laissés pour compte. La société
d’abondance ne concerne donc pas tous les Américains (« Que crois-tu avoir à laver ? »).
L’urbanisation accélérée provoque aussi une grave crise urbaine : les classes moyennes se
réfugiant dans les banlieues, havres de paix au terme de la journée de travail, les vieux
centre-villes se dégradent et les familles pauvres, surreprésentées dans les minorités
raciales, s’y entassent (« à douze dans une pièce en Amérique ! ») : c’est la
« ghettoïsation » qui débouchera sur des affrontements violents dans nombre de grandes
villes américaines dans les années 1960. Enfin, les garçons dénoncent le mythe du
« Melting Pot » : les Etats-Unis ne sont décidément pas une Terre promise puisque la vie
n’est « sympa » que « si tu es Blanc en Amérique » et l’égalité des chances dénoncée
comme une illusion : il vaut mieux « perdre [son] accent » si l’on veut être sûr de
trouver du travail.
3. Les critiques des garçons sont évidemment justifiées, à condition de préciser que malgré
ses revers le modèle américain ne perd cependant pas sa puissance attractive. Cependant,
en dépit de l’abondance, la pauvreté frappe de 30 à 40 millions d’Américains sur une
population de 183 millions en 1960. La surreprésentation des pauvres dans les minorités
raciales est indéniable. Dans le Sud des Etats-Unis, la ségrégation raciale exerce ses
ravages à l’encontre de la minorité noire. Jusqu’au milieu des années 1960, elle y est
légale et elle se maintiendra après, inégalement, dans les coutumes. Bien que l’esclavage
eût été aboli en 1865, Noirs et Blanc vivent séparés, jamais égaux (doctrine déclaré légale
par la Cour Suprême en 1896) ; dans les hôpitaux, les écoles, les bâtiments publics, les
transports. Les mariages mixtes sont interdits dans la plupart des Etats du Sud. Et
pourtant la Cour Suprême a déclaré anticonstitutionnel le principe « égal mais séparé » en
1954 : séparer les « races » à l’école, c’est instituer l’inégalité entre les enfants et donc
empêcher l’égalité des chances. Dans les années 1950, le pasteur Martin Luther King
avec des libéraux blancs, mène campagne pour que les Noirs soient des citoyens à part
entière et appelle les Américains à la réconciliation (discours de Washington, août 1963,
I have a dream). Touchés les premiers par la crise urbaine, les jeunes Noirs se satisfont de
moins en moins de la stratégie de non violence de leurs aînés, surtout après l’assassinat de
King en 1968. Les premières émeutes raciales éclatent en 1965 à Los Angeles et les
années suivantes, la guérilla urbaine, prônée par les Black Panthers, s’étend à d’autres
grandes villes.
4. Les années 1960 sont celles d’une prise de conscience de la pauvreté et de la
discrimination. Le retour au pouvoir des démocrates dans les années 60 est marqué par la
volonté de faire reculer les « nouvelles frontières » de la pauvreté et de la discrimination :
sous les présidences J.F. Kennedy et L.B. Johnson, des systèmes de soins et de protection
sociales (Medicare et Medicaid) sont créés. Le combat des noirs pour la conquête de leurs
droits civiques débouche sur l’instauration de la discrimination positive (Affirmative
Action), le vote du Civil Rights Act (1964) et du Voting Act (1965).
C Des évolutions dans la structure et la capacité de séduction de ce modèle : l’exemple de Kennedy et
de la New Frontier
Discours de J.F.Kennedy, « La Nouvelle Frontière », 15 juillet 1960 (commentaire d’un document
d’Histoire)
1. John Fitzgerald Kennedy, issue d’une famille catholique irlandaise très aisée, est député
démocrate puis sénateur du Massachusetts. Aux élections présidentielles de 1960, il l’emporte de
justesse sur son adversaire, le républicain Nixon. Premier président catholique des Etats-Unis, il
est à 43 ans le symbole de l’Amérique démocrate. Il est assassiné à Dallas le 22 novembre 1963
dans des circonstances toujours mal élucidées.
Ce texte est un extrait du discours que prononça Kennedy devant la Convention du parti démocrate
au moment où il reçut l’investiture pour les élections présidentielles de novembre 1960. Le
système politique américain repose sur le bipartisme : deux partis, démocrate et républicain,
dominent presque sans partage la vie politique. Les militants des deux grands partis, avant la
campagne présidentielle, désignent dans chaque Etat leurs délégués à la convention nationale. Lors
de la convention, une plate-forme électorale est adoptée. Les délégués élisent le candidat à la
présidence et le candidat à la vice-présidence qui forment le « ticket » (ici, Kennedy-Johnson). Ce
texte s’adresse donc aux militants du parti démocrate : comme tout discours de campagne, Kennedy
dresse dans un premier temps un bilan très critique de la présidence républicaine d’Eisenhower pour
proposer dans une deuxième temps, sa vision personnelle, « la nouvelle frontière », afin de reformer
après une campagne interne acharnée l’unité de son camp autour de sa candidature.
2. « La frontière joue un rôle considérable dans l’imaginaire collectif américain. L’idéal du
pionnier s’avançant toujours plus loin vers l’Ouest souligne l’élan et l’optimisme américain.
Face à un milieu difficile, hostile, les plus aptes à réussir sont ceux qui sont les plus travailleurs
et qui savent prendre des risques. L’achèvement de la transformation de tout le territoire en
Etats (Arizona en 1912) marque la fin de la frontière » (dir. J.M. Lambin, Hachette, 2004, p.81).
Kennedy, dans ce discours, réactualise un mythe toujours vivant pour les électeurs américains.
3. D’emblée Kennedy se situe dans la lignée de ses deux grands prédécesseurs démocrates,
Roosevelt (président de 1933 à 1945) et Truman (président de 1945 à 1953). Il critique
implicitement l’absence d’audace de la présidence d’Eisenhower, dont son concurrent direct,
Richard Nixon (futur président de 1969 à 1974), fut le vice-président. Selon Kennedy, le pouvoir
fédéral a manqué de réactivité et de réponse face à des problèmes aussi différents que le
chômage agricole et ouvrier face à la hausse de la productivité, la crise urbaine et la ghettoïsation
des espaces centraux dans les grandes villes, le problème de la ségrégation dans les Etats du Sud
(malgré l’arrêt de la Cour Suprême de 1954 condamnant le principe « égal mais séparé »,
décision courageuse qui n’a pas été relayée par le pouvoir exécutif jugé « timoré »), ou encore le
problème des retraites et de l’assurance maladie en un temps où l’amélioration de la vie
quotidienne prolonge l’espérance de vie.
Dans son discours de campagne, Kennedy dénonce les dysfonctionnements d’une société en pleine
transformation qui a perdu ses repères et est en passe d’oublier ses valeurs. Kennedy constate que le
modèle américain, pourtant engagé dans une rude concurrence face à l’Union Soviétique, est en voie
d’essoufflement et a perdu de son dynamisme originel qui lui a chaque fois permis de surmonter les
crises qu’il a traversées.
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