Attac aux paradis
Des organismes existent, tels le GAFI (Groupe d'Action Financière Internationale) qui tente de lutter contre le
blanchiment d'argent, mais leur champ d'action est trop limité. Il est avant tout nécessaire d'informer les citoyens,
seule voie possible pour que le crime économique et financier relève enfin du droit pénal international.
Quelques mesures d'urgence sont envisageables, mais rien n'est possible sans une prise de conscience préalable de
la portée des paradis fiscaux et des véritables enjeux qu'ils constituent.
La criminalité financière en quelques chiffres
La grande délinquance financière a ses sanctuaires :
« l’archipel planétaire des paradis fiscaux »
Ceux-ci tiennent un rôle central dans l’univers de la finance noire puisqu’ils en représentent les usines de
retraitement.
D’après le Fonds Monétaire International (F.M.I) ;
le phénomène du blanchiment représente entre 2 et 5 % du produit intérieur brut (P.I.B) mondial ;
la moitié des flux de capitaux internationaux transitent ou résident dans ces territoires ;
entre 600 et 1500 milliards de dollars d’argent sale y circulent chaque année ;
leur activité est une industrie qui gère autour de 20% de la richesse privée mondiale.
A titre de comparaison, les dettes publiques cumulées sur l’ensemble des marchés internationaux s’élèvent à 5000
milliards de dollars alors que parvenir à la satisfaction universelle des besoins sanitaires et nutritionnels essentiels
(nourriture, eau potable, santé) ne coûterait que 13 milliards de dollars par an (soit 1% des sommes qui circulent dans
les paradis fiscaux…)
Plus que tout, banques et grandes entreprises sont avides de capter, après les avoir blanchis, les profits des affaires
du crime organisé (trafics de drogues, d’armes, de déchets toxiques, de produits nucléaires d’organes humains, de
femmes, d’enfants, de main d’œuvres, d’objets d’art, de voitures, contrebandes d’alcool, de tabac, de médicaments,
vols, fraudes fiscales, fausse monnaie, fausses factures, piratage informatique, etc).
Ainsi par exemple, les profits tirés annuellement du trafic de drogues (cocaïne, héroïne, cannabis) représenteraient
de 300 à 500 milliards de dollars, soit 8% à 10% du commerce mondial (5250 milliards de dollars en 1998). Le chiffre
d’affaire du piratage informatique dépasse les 200 milliards de dollars, celui de la contrefaçon les 100 milliards de
dollars, 10 à 15 milliards de dollars pour la fraude au budget communautaire européen, etc.
Au total, en ne tenant compte que des activités ayant une dimension transnationale, dont la «traite des
blanches », le produit criminel mondial brut dépasse selon certaines estimations les 1000 milliards de
dollars par an, soit près de 20% du commerce mondial.
En admettant que les charges (production, gestion, pertes sur saisie, corruption, etc)
représentent environ 50% du chiffre d’affaire, il reste 500 milliards de profits annuels, une
somme 40 fois plus importante que celle nécessaire à l’éradication des problèmes de santé et de
malnutrition qui affectent environ 1 milliard d’individus dans le monde. Ainsi, sur dix ans, les
profits cumulés atteignent 5000 milliards de dollars, autant que l’ensemble mondial des dettes
publiques cumulées, et, 3 fois plus que le montant des réserves en devises de toutes les banques
centrales (1638 milliards de dollars selon la B.R.I en 1998).
Une question fondamentale se pose alors : comment écouler ce gigantesque pactole qui empilé en billet de 100
dollars s’élèverait à 500 kilomètres de hauteur ! ?
Blanchir cet argent et le réintroduire dans l’économie licite en toute discrétion nécessite l’utilisation des
paradis fiscaux et autres places
offshore
, via les sociétés commerciales ou financières qu’ils abritent.
C’est à ce stade que les criminels en col blanc interviennent. Le coût de l’opération de recyclage ; environ un tiers,
soit 150 milliards de dollars partagés entre réseaux bancaires et intermédiaires ; avocats, courtiers, gérants de trusts et
fiducies…
Au bout du compte sont blanchis et réinvestis annuellement plus de 350 milliards de dollars, soit un peu
moins d’un milliard de dollars par jours…
Les organisations criminelles multinationales n’encombrent pas les caisses d’épargnes avec leurs bénéfices
(qu’aucun autre secteur d’activité légale n’atteint), et chassent au contraire les taux de profits les plus élevés ;
placements à risques, spéculation financière (ce qui participe à la formation de bulles financières), marchés
émergents, immobiliers, nouvelles technologies. Lubrifiant de la prodigieuse expansion du capitalisme moderne, il
leur reste suffisamment d’argent pour soutenir leur train de vie et participer au financement de la corruption des
partis et dirigeants politiques contre de solides promesses de maintenir un système qui leur est si favorable en l’état.